Catégorie : Politique et société

  • Une inscrip­tion obli­ga­toire en biblio­thèque

    « Une inscrip­tion obli­ga­toire en biblio­thèque est une démarche qui s’ins­crit dans la logique de droits cultu­rels. »

    Ques­tion de vision de la culture. Moi j’at­tends le contraire, qu’il n’y ait pas besoin d’ins­crip­tion préa­lable, que quiconque puisse emprun­ter dans une biblio­thèque de passage avec une simple carte d’iden­tité.

    Qu’on ne me parle pas de vol et de contrôle. Ce n’est pas comme si les preuves de domi­cile deman­dées lors des inscrip­tions étaient fiables. Ce n’est pas comme si les biblio­thèques enclen­chaient des procé­dures judi­ciaires pour récu­pé­rer les livres. Si besoin était – ce qui n’est pas aussi évident qu’il n’y parait – il suffi­rait d’un proces­sus natio­nal pour que les biblio­thèques puissent se retour­ner contre les usagers à partir de cette carte d’iden­tité.

  • Évidem­ment, ce n’est pas la voiture qui s’est vengée

    Lot : après une dispute, une femme meurt écra­sée par la voiture de son mari
    Le Pari­sien

    Forcé­ment ça ironise. On se moque du titre avec la voiture possé­dée qui écrase seule la femme, par pure coïn­ci­dence après une dispute de couple.

    En réalité je trouve cette ironie assez moche.

    Évidem­ment, intui­ti­ve­ment on y lit qu’il y a eu une dispute et que la femme a ensuite été volon­tai­re­ment écra­sée par son mari.

    C’est intui­tif, probable, mais on n’en sait rien, pas à la simple lecture de l’ar­ticle.

    La police enquête et véri­fie. C’est son boulot de juste­ment ne pas se conten­ter de dire « c’est évident » sans savoir. Pas de fausse naïveté non plus puisqu’il est clai­re­ment dit que le mari est en garde à vue depuis hier. On peut se douter que la police a les mêmes présomp­tions intui­tives que chacun de nous.

    Entre temps, nous on ne sait rien, mais alors rien du tout. On n’a aucun témoi­gnage, aucun récit de l’évé­ne­ment. On ne sait pas comment la femme a été écra­sée. On ne sait même pas si le mari était au volant. En fait on ne sait même pas si quelqu’un était au volant ou si la voiture a été lâchée en roue libre sur une côte. C’est quand même peu pour prétendre l’évi­dence.

    Sauter aux conclu­sions c’est faire justice sur des stéréo­types ou les proba­bi­li­tés, et ça n’est à l’hon­neur de personne.

    * * *

    Pour une fois l’ar­ticle est au contraire très bien fait. On ne sait pas grand chose mais le jour­na­liste expose les faits sans détour. C’est à peu près tout ce qu’il peut faire en l’état.

    Aurait-il fallu qu’il titre « Il tue sa femme en l’écra­sant à cause d’une dispute » alors qu’il n’a aucun élément pour ça à part l’évi­dente suspi­cion que tout le monde verra de toutes façons ?

    Personne ne prétend que la voiture, possé­dée par je ne sais quel esprit, a sauté seule sur la victime. Le jour­na­liste pousse l’idée d’une culpa­bi­lité de l’homme dès la première phrase de l’ar­ticle, en hauteur double :

    Un homme d’une soixan­taine d’an­nées est en garde à vue depuis jeudi et la mort de sa femme à Prays­sac (Lot).

     

    Diffi­cile d’être plus expli­cite sur les faits sans confondre les proba­bi­li­tés avec la réalité. Pour une fois qu’un jour­na­liste présente un article comme il faut sans biais ni sur-inter­pré­ta­tion, n’al­lons pas lui repro­cher.

    * * *

    Il y a un vrai problème où la presse écarte trop souvent la respon­sa­bi­lité des atteintes aux femmes ou aux mino­ri­tés. Je fais toute­fois la diffé­rence entre celui qui excuse et celui qui ne sait pas.

    Je n’ai – malheu­reu­se­ment – pas la solu­tion au problème géné­ral mais je ne crois pas qu’ajou­ter des injus­tices en compense d’autres. Ce n’est que mon opinion, mais j’ai plutôt tendance à croire que les maux s’ajoutent entre eux.

  • Pour une sécu­rité sociale

    Je ne comprends pas comment on peut accep­ter d’in­di­vi­dua­li­ser les couver­tures santé.

    Par nature ça veut dire que certaines couver­tures ne rembour­se­ront que partiel­le­ment, ou pas tous les types de soins. Bien évidem­ment ce sont prin­ci­pa­le­ment les plus pauvres qui prennent ces couver­tures au rabais, voire qui s’en passent. Dans le meilleur des cas on augmente l’ex­po­si­tion aux risques de ceux qui pour­ront le moins en suppor­ter l’im­pact.

    Tout ce qu’on obtient c’est qu’ils renoncent aux soins :

    Ce système, à bout de souffle, conduit entre 21 et 36 % des Français à renon­cer aux soins pour des raisons finan­cières (pdf). Derrière ces statis­tiques, il y a des enfants sans lunettes alors qu’ils en auraient besoin (ce qui entraîne parfois un retard scolaire) ; des dents qu’on arrache au lieu de les soigner ; des bron­chites négli­gées qui dégé­nèrent, des personnes âgées qui s’isolent de plus en plus faute d’ap­pa­reil audi­tif …

    Le pire c’est que ça finit par coûter plus cher à la collec­ti­vité en plus d’être un désastre pour les concer­nés.

    On cherche juste à réduire les coûts, par idéo­lo­gie, ou en compa­rant les prélè­ve­ments avec des pays dont le système est payé direc­te­ment par les citoyens.

    Cela n’em­pêche ni M. Fillon ni M. Emma­nuel Macron (En marche !) de prévoir une baisse des dépenses de l’as­su­rance-mala­die : 20 milliards d’eu­ros d’éco­no­mies en cinq ans pour le premier ; 15 milliards pour le second. «  On ne peut avoir des dépenses de santé qui augmentent trois fois plus vite que la créa­tion de richesses  », professe M. Macron, pour­tant guère gêné de voir les distri­bu­tions de divi­dendes augmen­ter, elles, dix fois plus que les richesses produites.

    On a déjà réduit les crédits plus qu’il n’est possible, lais­sant les hôpi­taux dans un épui­se­ment humain et admi­nis­tra­tif, et sans aucune marge de manœuvre. La grippe annuelle arrive à épui­ser les lits dispo­nibles. Le moindre imprévu ne peut plus être géré parce que tout est fait pour suppri­mer tout ce qui semble super­flu par rapport au fonc­tion­ne­ment quoti­dien, et qu’on en a supprimé encore un peu plus pour forcer à faire des écono­mies.

    Il ne reste plus qu’à dimi­nuer les rembour­se­ments. On couvre moins de choses, ou en en rembour­sant une part plus faible. Ce faisant on en laisse plus aux mutuelles, dans un cercle vicieux qui laisse de côté les plus pauvres.

    Ce n’est même pas rentable écono­mique­ment :

    Sur 100 euros de coti­sa­tions reçues par les complé­men­taires, 15 à 19 % partent en frais de gestion (et de publi­cité) (pdf), contre 4 à 5 % pour la Sécu­rité sociale. Aucune «  ratio­na­lité écono­mique  » ne justi­fie donc que l’on préfère l’une à l’autre. Au contraire : un guichet public unique qui rembour­se­rait tout «  permet­trait de gagner 7 milliards d’eu­ros  », précise M. Noam Ambrou­rousi, spécia­liste de la santé et conseiller de M. Mélen­chon. Pour en mesu­rer l’im­por­tance, il faut se rappe­ler que le fameux «  trou  » de la Sécu­rité sociale s’élève à 4,7 milliards d’eu­ros.

    Et bien entendu, il s’agit surtout de segmen­ter. Les jeunes cadre ont beau jeu de mili­ter pour leur liberté de choix. Il s’agit surtout de segmen­ter. On segmente ceux qui peuvent payer et ceux qui ne peuvent pas, mais on segmente aussi les jeunes et les vieux, les handi­ca­pés lourds et les autres, ceux dont on sait qu’ils ont un ennui de santé sérieux et les autres.

    Forcé­ment, le jeune cadre en bonne santé paye moins cher à ce jeu… mais c’est au prix de la soli­da­rité avec les autres. C’est la logique écono­mique d’un assu­reur qui calcule le risque indi­vi­duel mais est-ce souhai­table socia­le­ment ?

    La logique de la sécu­rité sociale unique c’est juste­ment la frater­nité, et s’as­su­rer que personne ne doive renon­cer.

    Dans une tribune reten­tis­sante, ils ont réclamé une prise en charge des soins à 100 %, ainsi qu’une fusion de la Sécu­rité sociale et des complé­men­taires santé (Le Monde, 14 janvier 2017).

    C’est un des points où j’ai un problème avec Benoit Hamon et globa­le­ment le PS. On renonce à un point qui me semble essen­tiel socia­le­ment et qui a du sens même écono­mique­ment… juste parce que c’est diffi­cile poli­tique­ment.

    Oui, je veux une sécu­rité sociale univer­selle, qui rembourse tout le monde – pas que les sala­riés – à 100% pour tous les soins utiles. Ça comprend évidem­ment les trai­te­ments dentaires, ortho­don­tiques ou optiques, mais pas que. Ça comprend l’in­té­gra­lité du parcours hospi­ta­lier, repas compris.

    Oui ça coûte cher, mais pas plus que le système privé, proba­ble­ment même moins. La seule diffé­rence est de soigner aussi les pauvres. Du coup oui ça coûte plus cher que la situa­tion actuelle. Ques­tion de choix poli­tique.


    Les cita­tions viennent d’un article du Monde Diplo­ma­tique, dont je vous recom­mande très forte­ment la lecture.

  • La poli­tique ce n’est pas choi­sir le meilleur projet

    La poli­tique ce n’est pas choi­sir le meilleur projet de façon objec­tive. Un tel clas­se­ment n’a aucun sens. On n’élit pas des inten­dants, de simples gestion­naires.

    La poli­tique c’est faire des choix. Il n’y a pas de baguette magique. Il y a toujours un coût, un effort un four­nir, un pan de la popu­la­tion qui sera moins favo­risé, un risque que ça ne fonc­tionne pas…

    La poli­tique c’est faire un arbi­trage suivant ce qui nous parait le plus impor­tant en notre âme et conscience, suivant ce qu’on veut comme société. Il n’y a rien de plus subjec­tif que ça.

    Fuyez ceux qui pensent qu’il suffit d’ex­pliquer ou de se rensei­gner.

    De ceux là il y a ceux qui manquent de recul et qui ne perçoivent même pas qu’il puissent y avoir une autre vision de la société. De ceux là il y a aussi ceux dont l’idéo­lo­gie voilent toute réflexion et qui pensent avoir forcé­ment la vérité.

    Enfin de ceux là il y a aussi ceux qui n’en­vi­sagent que la vision tech­no­cra­tique du système. Ces derniers sont les plus dange­reux parce qu’ils nient le concept même de démo­cra­tie. Ils refusent la capa­cité de choi­sir en toute conscience une option moins effi­cace sur le papier mais qui parfois respecte des valeurs ou un modèle de société auquel on aspire.

    * * *

    Ne me dites pas « ceux qui sont contre n’ont pas lu le texte ou ne savent pas de quoi ils parlent ». C’est majo­ri­tai­re­ment vrai, mais ça l’est aussi de ceux qui sont pour. C’est par contre insul­tant pour ceux qui ont fait un choix conscient et informé, mais juste un choix diffé­rent du votre.

    Tout ce que ça montre c’est une absence d’ou­ver­ture ou une bien mauvaise consi­dé­ra­tion de la démo­cra­tie.

    Ça n’em­pêche bien évidem­ment pas d’in­ci­ter les gens à lire, à se rensei­gner, et d’es­sayer de convaincre, mais au moins on se posi­tionne sur le fond.

  • La retraite à 60 ans

    Par une série de clics sur les sites publics, on vient de m’in­for­mer que j’au­rai les 172 trimestres néces­saires à ma retraite à taux plein quand j’au­rai 67 ans.

    Acces­soi­re­ment ça sera aussi le cas du BAC+5 moyen qui finit ses études à 23 ans et qui cotise quatre trimestres par an sans discon­ti­nuer.

    Elle est loin la retraite à 60 ans…

    Deux choses inté­res­santes :

    67 ans est l’âge pivot à partir duquel tout le monde a sa retraite à taux plein quel que soit le nombre de trimestre cotisé.  Ne crai­gnez pas trop la période d’inac­ti­vité : Si vous êtes dans mon cas ça ne chan­gera pas grand chose (et s’ils augmentent l’âge pivot d’ici là, il y a de bonnes chances qu’ils augmentent aussi le nombre de trimestres à coti­ser de toutes façons).

    Statis­tique­ment je serai mort ou en situa­tion de dépen­dance depuis plusieurs années. Dit autre­ment : Seule une mino­rité de BAC+5 profi­tera de sa retraite à taux plein.

    Plus que les calculs sur la pyra­mide géné­ra­tion­nelle ou la remise en cause du régime par répar­ti­tion, cette dernière statis­tique rend à elle seule drama­tique­ment crédible le « vous n’au­rez pas votre retraite ».

    La vérité c’est que pour la majo­rité d’entre-nous, nous ne serons plus capables de travailler avant d’at­teindre l’âge de la retraite. Recu­ler l’âge de départ ne sauve pas la retraite, on en est à un point où ça la supprime.

  • PIB, crois­sance, bonheur, mais surtout écolo­gie

    J’avais déjà abordé la ques­tion des gestion­naires. Aujourd’­hui je m’in­té­resse à deux critères au niveau poli­tique : Le bonheur des gens et l’éco­lo­gie. En fili­grane derrière je parle d’iné­ga­lité, de soli­da­rité, d’édu­ca­tion, de services publics, d’in­fra­struc­tures, de mutua­li­sa­tion, de règle­men­ta­tion dras­tiques sur la pollu­tion et de réduc­tion de la consom­ma­tion d’éner­gie.

    C’est certai­ne­ment ridi­cule et tota­le­ment naïf pour ceux qui promeuvent une vision écono­mique, mais je ne vois pas une seconde comment deman­der plus de travail à du person­nel soignant en hôpi­tal qui se dit épuisé et qui a déjà une duré de vie ampu­tée de 7 ans à cause de ça.

    J’ai deux vidéos à vous montrer. La première n’est qu’une intro­duc­tion mais est impor­tante. Dites-moi en sortant de la seconde comme vous pouvez ne pas tout centrer sur le bonheur et l’éco­lo­gie ?

    * * *

    Bref, en ce moment des candi­dats qui parlent bonheur et écolo­gie, il n’y en a pas 150 malheu­reu­se­ment. S’il n’y en a aucun de parfait, il y en a par contre plusieurs qui ne s’en préoc­cupent qu’à la marge, ou dont ce n’est pas la prio­rité assu­mée.

  • L’abs­ten­sion n’est pas le plus gros parti de France

    L’abs­ten­sion plus gros parti de France ? oui mais non… Parce qu’il y a une centaine d’opi­nions incon­ci­liables dans les gens qui s’abs­tiennent. Ce n’est pas assi­mi­lable à un gros parti mais à plusieurs dizaines, peut-être plusieurs centaines.

    Et quand on se dit qu’en fait ce gros chiffre de l’abs­ten­tion c’est en fait une centaine de petits partis qui indi­vi­duel­le­ment n’ar­rivent pas à la cheville de ceux qui se font élire… ça change un peu la vision de ce qu’on peut en faire.


    Et pour éviter les trolls : Il n’en reste pas moins que oui, le parti qui a la majo­rité sur une assem­blée est au mieux quali­fiable de plus grande mino­rité. Oui ça pose un sacré problème démo­cra­tique (et encore plus quand les votes des élus du parti sont déci­dés par la majo­rité d’un petit bureau poli­tique).

  • Je ne discu­te­rai pas poli­tique avec vous

    Je ne discu­te­rai pas avec vous si vous trou­vez géniales toutes les propo­si­tions de votre favori ou que vous trou­vez une excuse à tout ce qu’il peut dire d’er­roné.

    Je ne discu­te­rai pas avec vous si vous trou­vez idiot tout ce que ses oppo­sants peuvent dire ou que vous imagi­nez un calcul perni­cieux derrière chaque propo­si­tion.

    Avoir des opinions et se retrou­ver dans un courant précis n’em­pêche pas d’avoir une pensée complexe et son propre esprit critique.

    Si vous n’êtes pas capables d’avoir cette pensée non binaire et de l’ex­pri­mer, ne venez pas discu­ter poli­tique avec moi. Ça n’a aucun inté­rêt ni pour vous ni pour moi… et ça m’épuise.

    Merci.


    Les équipes d’au moins deux candi­dats semblent surveiller les réseaux et inter­ve­nir systé­ma­tique­ment pour placer une réponse mili­tante non argu­men­tée. C’est fati­guant, pénible, et moi ça ne m’in­cite pas à les consi­dé­rer posi­ti­ve­ment. Au contraire.

    Depuis, surtout pour ces deux candi­dats, j’ai désor­mais tendance à faci­le­ment suppri­mer ou bloquer à vue les réac­tions des incon­nus qui surgissent de nulle part, dans mes commen­taires ici ou dans mes mentions. Bien entendu ça ne sera jamais le cas si vous abor­dez le fond, des chiffres, des argu­men­ta­tions qui ne se résument pas à votre opinion… et si vous accep­tez qu’on puisse simple­ment avoir une opinion diffé­rente.

  • [Santé] La réalité est complexe

    Pour éviter de payer trop de coti­sa­tions sociales il suffit d’ar­rê­ter de rembour­ser la bobo­lo­gie et les gaspillages, ou au moins de mettre une fran­chise de 1 ou 2 € pour respon­sa­bi­li­ser le patient et éviter qu’il ne consulte pour rien. Non ?

    La réalité est plus complexe que ça.

    En n’al­lant pas consul­ter avant que ce ne soit grave, parfois on évite de consul­ter pour rien… et parfois on empêche de détec­ter un vrai problème à temps, ou d’em­pê­cher que juste­ment ça ne devienne grave.

    L’ef­fet est malheu­reu­se­ment connu, étudié et publié(*). Vouloir limi­ter les rembour­se­ments soins aux cas graves finit par coûter plus cher à la collec­ti­vité que de rembour­ser tota­le­ment les soins léger à tous. Bien entendu, au passage, on a dégradé la santé des plus pauvres. L’équi­libre n’est pas qu’é­co­no­mique, il est aussi au niveau humain.

    * * *

    Au moins pour­rait-on éviter de rembour­ser les médi­ca­ments qui n’ont que peu d’ef­fet, au moins les place­bos type homéo­pa­thie, Non ?

    Même ce qui semble évident ne l’est pas tant que ça.

    Parfois ne pas avoir ce médi­ca­ment peu effi­cace ou ce placebo, c’est se finir par en donner un autre, peut-être plus cher, peut-être avec des risques d’ef­fets secon­daires à préve­nir ou à trai­ter. Ce peut aussi être voir le patient faire une seconde consul­ta­tion ailleurs pour obte­nir une ordon­nance. C’est aussi oublier que le placebo a aussi un effet réel sur le patient, même s’il est d’ori­gine psycho­lo­gique. Les méde­cins sont humains, et ils gèrent des enjeux humains qui ne se traduisent pas si faci­le­ment par de simples calculs.

    Bref, ne pas payer pour ce qui ne sert à rien peut au final coûter plus cher, aussi bien finan­ciè­re­ment qu’en terme de santé.

    * * *

    Mais on peut au moins réduire les gaspillages admi­nis­tra­tifs dans la CPAM et dans les hôpi­taux, non ?

    Devi­nez : C’est plus complexe que ça.

    Là aussi il y a un équi­libre. Faut-il plus de souplesse et donc avoir quelques gaspillages et une utili­sa­tion moins stricte des finances ? ou faut-il contrô­ler, mettre des proces­sus de ratio­na­li­sa­tion au risque de payer les contrôle, ajou­ter de l’ad­mi­nis­tra­tif, ne pas gérer les cas qui sortent des cases pré-établies ?

    L’équi­libre n’est pas évident, et a aussi un impact sur la qualité et le niveau des soins eux même. Tout tend à démon­trer qu’on est allé trop loin dans la ratio­na­li­sa­tion des hôpi­taux, dans les contrôles des méde­cins et dans la mise en cases admi­nis­tra­tives au niveau de la CPAM. Pour­tant ceux qui veulent écono­mi­ser en ajou­tant souplesse et simpli­cité sont les mêmes que ceux qui veulent éviter les gaspillages en bobo­lo­gie. Il va falloir choi­sir.

    * * *

    J’in­siste aussi : Pour ajou­ter à la complexité, il ne suffit pas de trou­ver l’op­ti­mum écono­mique. Les choix écono­miques ont aussi un impact sur le niveau de santé, sur le niveau de soli­da­rité.

    Trou­vez l’op­ti­mum écono­mique au risque d’une baisse raison­nable du niveau de soins dans l’hô­pi­tal public rural. Peut-être que les plus aisés se paie­ront le trajet vers une clinique privée plus loin au lieu d’al­ler à l’hô­pi­tal public local. L’hô­pi­tal public local ayant moins de volume, on y ferme la mater­nité locale dont les coûts fixes seraient trop impor­tants.

    Tout le monde, plus riches inclus, verra le niveau de soin bais­ser moins raison­na­ble­ment que prévu : un peu à cause des temps de trajet en urgence, un peu à cause de l’in­ca­pa­cité d’al­ler voir ses proches aussi faci­le­ment qu’à l’hô­pi­tal local, et beau­coup à cause des risques de compli­ca­tion en cas de problème urgent faute de mater­nité locale.

    Au passage, même si ça ne se verra pas sur les comptes de l’hô­pi­tal, tout le monde paiera aussi plus cher qu’i­ni­tia­le­ment : à cause des distances nette­ment allon­gées, autant pour les patients que leur famille ou que les pompiers et ambu­lances, à cause des jour­nées de congé pour faire le trajet, à cause des frais d’au­to­route, à cause de l’ab­sence de trans­port en commun pour aller si loin, etc.

    L’exemple donné n’est pas si théo­rique que ça.

    * * *

    Bref, Non notre système n’est pas parfait. Oui on peut amélio­rer les choses. Oui on doit conti­nuer à le faire, et à tester d’autres solu­tions.

    Main­te­nant la réalité est complexe et les solu­tions qui semblent évidentes ou de bon sens peuvent parfois bien dété­rio­rer les choses.

    Le fait est que notre couver­ture de santé est plutôt dans le tout haut du panier par rapport à qui se fait ailleurs, pour un coût total plutôt infé­rieur à la plupart des pays occi­den­taux (atten­tion à bien addi­tion­ner ce qui est payé par les orga­nismes publics mais aussi ce qui est payé à titre privé), et pour ce prix on a une soli­da­rité certes impar­faite mais qui là aussi est loin d’être dégueu­lasse par rapport à ce qui existe ailleurs.

     

    (*) Je n’ai pas les liens sous la main. Je me rappelle au moins une publi­ca­tion offi­cielle du Canada et une du Royaume Uni, ainsi que d’autres études. Si quelqu’un retrouve certains de ces liens, je suis preneur.

  • La rengaine du service mili­taire

    Emma­nuel Macron a annoncé samedi qu’il comp­tait instau­rer, s’il est élu président, un « service natio­nal » obli­ga­toire d’une durée d’un mois pour tous les jeunes.

    L’Ex­press

    Sérieu­se­ment ? Un mois. Déjà qu’un service natio­nal d’un an n’est pas forcé­ment perti­nent, un mois ça n’a juste plus aucun sens…

    Et ça parle d’y faire une remise à niveau scolaire, notam­ment pour l’illet­trisme. Et ça parle d’ai­der à la mixité sociale. Et ça parle de renfor­cer l’adhé­sion à la nation et à la collec­ti­vité. On peut arrê­ter le tir s’il vous plait ?

    L’école étant obli­ga­toire de 6 à 16 ans. 60 000 établis­se­ments, 850 000 ensei­gnants. Que vont donc bien pouvoir ensei­gner les mili­taires qui permette la remise à niveau en un mois après 10 ans d’en­sei­gne­ments par des profes­sion­nels expé­ri­men­tés ?

    L’an­cien service natio­nal avait au mieux su bras­ser diffé­rents milieux sociaux, bien qu’a­vec pas mal de repro­duc­tion. Avec un an de service, l’im­pact sur la mixité sociale de la nation hors des murs mili­taire a été quasi nul. A-t-on vrai­ment là aussi trouvé une formule magique pour prétendre avoir un meilleur effet en un mois alors qu’on prévoit déjà de sépa­rer les 10% les moins lettrés pour une remise à niveau scolaire ?

    J’ai aussi mal à voir en quoi impo­ser la présence et l’obéis­sance par la force pendant un mois va vrai­ment géné­rer une adhé­sion à l’État et à la nation. Mon expé­rience me fait croire qu’on va surtout radi­ca­li­ser les posi­tions. Ceux qui étaient un peu lâchés vont prin­ci­pa­le­ment géné­rer du rejet et un senti­ment d’op­pres­sion. Les autres peuvent se sentir mieux inté­grés, mais avec d’une vision très néga­tive sur ceux qui ne sont pas entrés dans le rang. Un an permet d’at­té­nuer cet effet néga­tif mais c’est impos­sible en un seul mois…

    Cette mesure ne figu­rait pas jusqu’à présent dans son programme.

    On peut croire que l’enjeu est là : Flat­ter les conser­va­teurs et les auto­ri­taires en consi­dé­rant qu’il y a des voix à récu­pé­rer à droite vue la situa­tion de leur candi­dat. Ce ne serait pas très glorieux pour celui qui prétend ne pas faire de promesses de campagne et appor­ter un renou­veau dans la parole poli­tique.

    Le risque c’est que l’in­ten­tion tienne en partie dans le troi­sième point de l’image : « dispo­ser d’une réserve mobi­li­sable en plus de la garde natio­nale. »

    L’Eu­rope s’arme. Le monde se radi­ca­lise et le natio­na­lisme monte rapi­de­ment partout, l’Eu­rope la première. Certains tech­no­crates croient peut-être que l’es­ca­lade à l’ar­me­ment est une bonne idée, voire qu’il faudrait une bonne guerre.

    On l’a déjà vu, et il y a tant de choses qui font repen­ser à l’avant guerre mondiale qu’il ne serait pas éton­nant que ces poli­tiques nous rejouent le même scéna­rio en pensant agir pour le bien de la nation, seuls dans leur micro­cosme.


    Cette idée du service mili­taire est une conne­rie vis-a-vis des objec­tifs présen­tés, mais que peut-on faire ?

    Vous voulez travailler contre l’illet­trisme ?

    Arrê­tez de réduire le nombre d’édu­ca­teurs spécia­li­sés. Embau­chez des ensei­gnants. Permet­tez aux familles non privi­lé­giées d’être là le soir et le week-end autour des enfants pour les accom­pa­gner dans les devoirs. Rédui­sez les effec­tifs par classe ou mieux, ajou­tez un second ensei­gnant par classe.

    On peut aussi favo­ri­ser la diffu­sion gratuite des livres du domaine public ou mettre un ensei­gne­ment continu gratuit. On peut créer des classes spéci­fiques pour ceux qui en ont besoin plutôt que de les porter avec leur tranche d’âge ou de les stig­ma­ti­ser avec des années de retard dans une classe plus jeune.

    Vous voulez favo­ri­ser la mixité ?

    Commen­cez par impo­ser le respect des quotas de loge­ments sociaux, et prin­ci­pa­le­ment dans les villes riches. Impo­sez que les quotas se fassent quar­tiers par quar­tiers plutôt que de relé­guer les plus pauvres dans des ghet­tos en bordure de péri­phé­rique ou d’au­to­route. On peut même imagi­ner que chaque construc­tion neuve de plus de 4 loge­ments inclue une propor­tion de loge­ment sociaux sur place.

    Redo­rez l’école publique pour que les plus aisés ne cherchent plus à la fuir. Non ce n’est pas un hasard s’il y a corré­la­tion avec mes propos plus haut.

    Arrê­tez l’ex­plo­sion des frais sur l’uni­ver­sité. Évitez que les moins aisés aient à travailler en paral­lèle de leurs études. Redo­rez aussi l’uni­ver­sité et ses programmes de recherche pour que les aisés ne fuient pas tous en grandes écoles.

    Vous voulez une cohé­sion natio­nale ?

    Pour rappro­cher le citoyen de l’État, on pour­rait déjà arrê­ter de culpa­bi­li­ser ceux qui sont dans le besoin, finan­ciè­re­ment, humai­ne­ment ou pour leur santé. Arrê­tez de les trai­ter de frau­deurs, d’as­sis­tés, de fainéants, ou de reje­ter leurs cris. Permet­tez aux struc­tures qui ont pour pour but d’ai­der ceux en diffi­culté d’être plus là pour épau­ler et accom­pa­gner que pour culpa­bi­li­ser et contrô­ler.

    Lutte contre la discri­mi­na­tion, arrê­tez de dési­gner l’en­nemi, de monter les uns contre les autres, de segmen­ter et divi­ser en groupes. Redon­nez une vision de progrès social. Quit­tez tous les privi­lèges de fait, redon­nez ses lettres de noblesses à la démo­cra­tie, faites de la poli­tique plutôt du marke­ting.