Catégorie : Emploi et travail

  • Ensei­gnants gratuits, promo­tion excep­tion­nelle

    Ensei­gnants gratuits, promo­tion excep­tion­nelle

    J’en­tends encore autour de moi les gens râler sur ces ensei­gnants trop payés, qui font toujours grève et qui sont toujours en vacances. Je rage parce que pas un n’ac­cep­te­rait les condi­tions de travail des profes­seurs des écoles.

    Sans salaire depuis la rentrée, des ensei­gnants reçoivent des bons alimen­taires

    Ce n’est que le titre de l’ar­ticle de presse, mais le contenu ne vient nulle­ment modé­rer le sens initial. Après deux mois sans salaire, on leur fait même l’in­sulte de leur donner des bons alimen­taires. Et encore, c’est au profes­seur de s’hu­mi­lier à quéman­der pour les obte­nir.

    Ils ont réussi le concours, sortent d’un diplôme BAC+5 – oui, il faut avoir un master pour ensei­gner désor­mais – souvent jeunes diplô­més donc sans le sou. Vous en connais­sez beau­coup qui dans ces condi­tions conti­nue­raient à travailler après plus de deux mois sans salaire sur un nouveau job ? Vous le feriez ?

    Même quand tout fonc­tionne, le salaire n’est jamais versé à plein le ou les premiers mois. C’est dans le proces­sus « normal » de l’édu­ca­tion natio­nal : Le profes­seur reçoit un simple acompte, et le solde au mieux fin octobre.

    Quant aux congés ou aux horaires soit-disant tranquilles, je vous laisse lire la petite histoire de septembre dernier – lisez-la, vrai­ment. Oh, et le sala­rié trop payé n’est en réalité payé que 2000 € bruts par mois (envi­ron 1550 € net), pour un BAC +5 une fois le concours en poche. Quant à la sécu­rité de l’em­ploi, 13 ans d’exer­cice avec une bonne nota­tion ne garan­tit pas une place de titu­laire.

    Pensez-y avant de vous moquer de la prochaine grève qui parle de mauvaises condi­tions de travail.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Jeyheich

  • Renfor­cer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi

    Renfor­cer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi

    Je demande à @pole_emploi de renfor­cer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi
    François Rebsa­men

    Nouveau gouver­ne­ment. Chômage impor­tant. Première action et commu­ni­ca­tion.

    Parce qu’é­vi­dem­ment la cause majeure du chômage ce sont bien les chômeurs qui ne cherchent pas du travail (ou pas). Sinon tout serait résolu (ou pas). Il est urgent d’y répondre, il n’y avait rien de plus impor­tant à faire comme action pour le ministre du chômage.

    Le pire c’est que non seule­ment le Pôle Emploi ne fait déjà plus que ça (pape­ras­se­rie admi­nis­tra­tive, enre­gis­tre­ment et contrôles ; se rappe­ler du temps qu’ils ont pour chaque chômeur) mais en plus on renforce ici l’idée que ceux qui sont chômeurs ne sont que de vils profi­teurs.

    La stig­ma­ti­sa­tion c’est aussi ce qui rend plus diffi­cile de retrou­ver un emploi. L’idée (fausse) que la France est un pays d’as­sis­tés c’est ce qui dimi­nue la proba­bi­lité d’in­ves­tis­se­ment.

    Bref, c’était clai­re­ment le plus impor­tant à faire pour la relance du gouver­ne­ment et la confiance de la base socia­liste en ceux qu’elle a élu.

    Elle se voit suffi­sam­ment l’iro­nie là ?

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Kevin Sr.

  • Des congés d’ins­tit

    Des congés d’ins­tit

    Je m’étais promis de faire ce billet un jour mais avec la rentrée je vois à chaque fois ma femme se faire bouillir quand elle entend « oh, les instits ils font la rentrée mais ils ne travaillent pas beau­coup quand même » (ou autres variantes simi­laires).

    Alors je sais que chacun est diffé­rent mais je vais prendre un exemple que je connais bien :

    L’an­née dernière elle était la plupart des jours à l’école avant 7h. Là, même si elle n’em­bauche qu’à 8h45, elle prépare ses cours du jour, fait des correc­tions, gère l’em­mer­de­ment quoti­dien admi­nis­tra­tif ou tech­nique, arrange les plan­nings, etc.

    Le soir elle partait un peu avant 18h. Entre la fin des cours et le départ ce n’est pas de la garde­rie mais des correc­tions, le range­ment de la salle, et… la discus­sion avec les parents ou sa collègue (elle fait deux mi-temps, donc il y a une collègue avec qui se synchro­ni­ser pour les deux classes).

    Le midi… vous avez compris : En gros ça bosse aussi une majeure partie du temps, au moins pour faire la police et gérer les bobos des élèves (parce que même si on n’est pas de garde, on ne laisse pas les enfants pleu­rer dans un coin en disant « je suis perché »).

    Le week-end ou le soir à la maison, devi­nez quoi : Le travail est loin d’être rare, pour prépa­rer les acti­vi­tés ou adap­ter un cours. Il faut dire que l’ex­cep­tion­nel est régu­lier. Ça tourne entre les réunions parent-instit trimes­trielles (non seule­ment ça prend du temps, mais en plus ça se prépare en amont), les livrets en fin de trimestre, et les diverses fêtes d’école, sorties et anima­tion. Parfois elle avait moins de temps libre que moi qui suis cadre de direc­tion sans horaires.

    Vous allez me dire qu’il reste les vacances ? et bien non. Parce qu’un cours ça se prépare, ça se créé. On ne se contente pas de prendre le livre et de le suivre. Quand il s’agit de nouveaux niveaux et qu’on fait les choses biens, on peut passer faci­le­ment 1h de concep­tion pour pour 2h de cours. Là elle avait deux mi-temps, dont un avec un double niveau. Bref, trois niveaux à prépa­rer. Cet été elle n’a pas eu plus de congés « ne rien faire » que moi.

    Bien entendu tout ça n’est pas décompté en heures supplé­men­taires, c’est « inclus dans le forfait ».

    Oui, tout dépend de chacun, et un vieil instit qui a ses cours faits depuis des années épargne proba­ble­ment du temps, un instit qui salope son travail et se moque des élèves aussi (heureu­se­ment ils sont proba­ble­ment plus rares qu’on ne veut bien le dire), mais la plupart des gens qui crachent sur les vacances des instit font proba­ble­ment bien moins d’heures de travail à l’an­née. Pensez-y la prochaine fois.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Jeyheich

  • Travail et auto­ma­ti­sa­tion : la fin du travail ne touche pas que les emplois les moins quali­fiés

    Pour les cher­cheurs, l’in­for­ma­ti­sa­tion devrait surtout porter sur des emplois peu quali­fiés. Ils n’ont réalisé aucune esti­ma­tion pour évaluer le nombre d’em­plois touchés par l’au­to­ma­ti­sa­tion dans les années à venir, mais ils concluent leur prédic­tion en expliquant que les employés peu quali­fiés et les profes­sions à bas salaires qui devraient être les plus touchées devront être réaf­fec­tés à des tâches qui ne sont pas sensibles à l’in­for­ma­ti­sa­tion, comme celles néces­si­tant de l’in­tel­li­gence créa­tive et sociale

    L’au­to­ma­ti­sa­tion des tâches et l’avan­ce­ment des tech­no­lo­gies fait dispa­raitre les travaux les moins quali­fiés au profits de travaux plus quali­fiés mais plus rares ?

    Fumis­te­rie.

    Si dans les 20 dernières années du XXe siècle nous avons connu un exode des emplois les moins quali­fiés vers des emplois quali­fiés et très quali­fiés, la perte d’em­ploi se fait désor­mais dans tous les domaines de compé­tences.

    Et même quand ce n’est pas le cas, ce n’est pas forcé­ment une bonne nouvelle

    Si l’au­to­ma­ti­sa­tion peut amélio­rer le travail, le rendre plus stimu­lant et inté­res­sant, une machine trop sophis­tiquée peut aussi géné­rer de la déqua­li­fi­ca­tion, trans­for­mant un arti­san compé­tent en opéra­teur de machine modé­ré­ment quali­fié.

    Mais surtout on a de moins en moins besoin de réflé­chir. D’une part grâce à l’aide de l’in­for­ma­ti­sa­tion, d’autre part parce que la réflexion se concentre aux mains de quelques uns.

    Les travailleurs de la connais­sance sont eux-mêmes en train de se déqua­li­fier, ressem­blant de plus en plus à des opéra­teurs infor­ma­tiques, estime Carr.

    11edsall-chart1-articleLarge

    On peut faci­le­ment mettre ça en rela­tion avec la concen­tra­tion des richesses et du capi­ta­lisme forcené. Moins de très riches, qui contrôlent et exploitent le travail des autres. Ceux qui restent deviennent opéra­teurs de systèmes auto­ma­ti­sés ou sur des tâches manuelles trop complexes à auto­ma­ti­sées (par des ouvriers loca­li­sées dans des pays à très bas coûts).

    Le graphique est éclai­rant. On a de moins en moins d’em­plois qui néces­sitent de réflé­chir, et on chute à un niveau excep­tion­nel­le­ment bas.

    Le pire c’est que nos poli­tiques conti­nuent à faire perdu­rer le mythe des avan­cées tech­no­lo­giques qui poussent vers des postes plus quali­fiés, alors qu’en réalité on réduit surtout le nombre d’em­ploi, en les écra­sant tous plus ou moins vers de l’exé­cu­tion intel­lec­tuelle, du contrôle de proces­sus.

    En fait, depuis les années 2000, la concur­rence dans les emplois manuels peu quali­fiés s’est accrue et les travailleurs plus quali­fiés ont pris la place des moins quali­fiés pour des emplois eux-mêmes moins quali­fiés.

    La poli­tique du « avec un meilleur diplôme vous aurez un emploi » ne fait que repor­ter le problème. L’im­por­tant est juste d’avoir un meilleur diplôme que les autres, même si la haute compé­tence est inutile. On en est à deman­der le bac ou des études supé­rieures pour tout, du person­nel de ménage jusqu’au jardi­nier en passant par l’ou­vrier à la chaîne. Le pire c’est qu’en plus on spécia­lise forte­ment les diplôme, rendant les gens très diffi­cile à redé­ployer sur d’autres missions.

    Je n’ai pas de solu­tion au problème de déqua­li­fi­ca­tion des emplois. Si ce n’est arrê­ter de s’y soumettre, profi­ter du besoin moindre pour réali­ser tu travail libre, sur des tâches qui sont et plus valo­ri­sante et plus utiles à la société. Pour ça le revenu de base est une piste.

    La pour­suite du tout emploi n’amène de toutes façons à rien, sauf le bonheur des 0,1% qui concentrent capi­tal comme capa­cité de déci­sion.

  • Avec un revenu de base, qui ferait les métiers pénibles ?

    Je n’aime pas forcé­ment les réponses qui y sont données là bas mais la ques­tion est diable­ment inté­res­sante.

    L’exis­tence même de cette ques­tion amène à dire que, bien à l’abri dans notre confort, nous sommes heureux d’avoir une société de classes où certains, pour vivre, n’ont pas le choix d’ac­cep­ter les métiers pénibles que nous ne voulons pas exer­cer.

    La notion de confort et de péni­bi­lité varie suivant notre envi­ron­ne­ment social, mais seuls ceux tout en bout de chaîne ne peuvent pas en dire autant.

    Renon­cer à chan­ger la société parce que nous n’au­rions plus une popu­la­tion infé­rieure corvéable, c’est déjà répondre que ce chan­ge­ment est juste­ment essen­tiel, et urgent.

    Bref, nous aurons réussi, revenu de base ou pas, quand juste­ment nous ne nous pose­rons plus cette ques­tion.

    Et pour la réponse ?

    Il y a une chose de certaine : Si le métier est vrai­ment utile à la société, on finira par trou­ver quelqu’un pour le faire, parce qu’on sera prêt à y mettre le prix.

    Le marché de l’em­ploi est actuel­le­ment tota­le­ment faussé par une demande dispro­por­tion­née par rapport à l’offre, et par une repro­duc­tion sociale très impor­tante. La conjonc­tion des deux permet de donner de très mauvaises condi­tions à des travaux pour­tant pénibles tout en offrant extrê­me­ment bonnes condi­tions à des travaux dits « haute­ment quali­fiés » réser­vés à une élite sociale, majo­ri­tai­re­ment repro­duite par nais­sance ou rela­tion­nel.

    En réalité il y a plus de personnes capables d’as­su­rer ces travaux « haute­ment quali­fiés » pour peu qu’ils aient tous les mêmes faci­li­tés au départ, que de personnes prêtes à accep­ter les travaux pénibles.

    À long terme avec un revenu d’exis­tence qui n’est pas au rabais, on risque effec­ti­ve­ment d’in­ver­ser les condi­tions de travail et les échelles de revenu de nombreux métiers. Les travaux pénibles vrai­ment utiles conti­nue­ront à être remplis, mais simple­ment pas aux mêmes condi­tions.

  • The most impor­tant econo­mic chart of our era

    Pour rejoindre le graphique précé­dent, voici celui de Busi­ness Insi­der.

    house-of-debt-chart

     

    Même s’il concerne les États Unis, le problème est celui de tout le système occi­den­tal (pas que j’ex­clue les autres régions, mais je n’en connais pas les chiffres pour juger, ce pour­rait bien être simi­laire).

    Deux raisons pour Busi­ness Insi­der, qu’on retrouve effec­ti­ve­ment en France :

    1. Les déten­teurs du capi­tal prennent une part de plus en plus grande des profits.
    2. Les quelques plus hauts salaires prennent une part de plus en plus impor­tantes de la masse sala­riale globale.

    Ça s’agran­dit depuis la « crise » – n’al­lez plus croire que les déten­teurs du capi­tal assument les risques, ce sont les travailleurs qui le font – mais c’est un décro­chage qu’on a depuis les années 1980.

    Conti­nuez à taper sur les charges sociales et les charges patro­nales et oubliez vite qu’il y en a qui, eux, augmentent leur niveau de vie avec la crise, malgré le fait que ce sont eux qui sont sensés payer toutes ces charges patro­nales.

  • Emploi, ou pas

    Quel sera l’im­pact sur l’em­ploi, et donc de réduc­tion des défi­cits dont on sait qu’ils sont très large­ment créés par le chômage de masse. On sait que face à une réduc­tion du coût du travail, les entre­prises ont le choix entre en profi­ter pour augmen­ter leurs marges ou pour embau­cher. Mais ce choix s’ef­fec­tue sous de très fortes contraintes dans les petites entre­prises et avec un très fort biais en faveur des effets d’au­baine dans les grandes entre­prises. La réduc­tion sur 5 sala­riés payés au SMIC repré­sente 35% du coût d’une nouvelle embauche. Soit la demande reste atone et l’ef­fet posi­tif sur l’em­ploi sera nul même s’il peut y avoir un effet posi­tif sur la consom­ma­tion, soit la demande est en crois­sance et l’ef­fet d’au­baine sera très impor­tant.

    Au total, le pacte de respon­sa­bi­lité va d’abord se traduire par un trans­fert signi­fi­ca­tif des charges vers un système fiscal qui reste très injuste

    [source: Pacte d’ir­res­pon­sa­bi­lité]

    Il est temps de penser l’em­ploi et le chômage autre­ment. Le plein emploi c’est fini, et ça ne date pas d’aujourd’­hui. La ques­tion est struc­tu­relle et n’a plus rien à voir avec le coût du travail. Le coût du travail entraîne unique­ment des oscil­la­tions sur une courbe qui ne fait que descendre depuis pas loin d’un siècle. Quand il y a remon­tée, c’est juste un arte­fact qui trompe la vision.

    On peut – et on doit – penser répar­ti­tion du travail, mais même ça est du court terme. Ce qu’il faut c’est sortir de cette idée de « sauve­gar­der des emplois ». Il faut sauve­gar­der la protec­tion sociale, la vie commune, mais si cela se fait avec moins d’em­plois, ou avec un système de travail très diffé­rent : tant mieux.

    Quelle est cette logique imbé­cile qui voudrait que travailler plus soit un objec­tif commun de notre société alors qu’on arrive à auto­ma­ti­ser jour après jour ? Pourquoi conti­nuer à penser en deux caté­go­ries : Ceux qui ont un emploi et ceux qui n’en ont pas ? Le revenu d’exis­tence est une piste. Ce n’est pas la seule mais il est temps de s’y mettre car on ne chan­gera pas de société en un an. Si on tarde trop on sera au pied du mur et ça passera par une révo­lu­tion, le sang, et le pire.

  • Indi­ca­teurs de coût du travail

    Cout-du-travail-en-Europe-Indicateurs-trimestriels[source: Indi­ca­teurs de coûts du travail]

    Conti­nuez à bramer que la baisse du coût du travail va résoudre le chômage après ça…

  • Baisse du chômage, mais baisse de l’em­ploi

    La baisse (très légère) des chiffres du chômage est un dange­reux trompe l’oeil. Tout le monde commence à connaitre le premier biais : Le chiffre surveillé baisse, mais le nombre d’ins­crits totaux au Pôle Emploi conti­nue d’aug­men­ter.

    En fait c’est encore pire : Le taux d’em­ploi – popu­la­tion avec un emploi par rapport à la popu­la­tion en âge de travailler – est stable. Le taux d’ac­ti­vité – popu­la­tion active, avec emploi ou au chômage, sur la popu­la­tion en âge de travailler – est lui en baisse.

    Ce que ça veut dire c’est que non seule­ment l’em­ploi n’aug­mente pas, mais les gens aban­donnent, et quittent la caté­go­rie des actifs, ou des étudiants qui rallongent leurs études faute de confiance et de débou­chés.

    Au final le résul­tat est le même, malgré la jolie courbe qui semble s’amé­lio­rer, la propor­tion de citoyens avec un emploi s’ame­nuise avec le temps alors que la popu­la­tion géné­rale augmente. À un moment ça va craquer, et d’ailleurs ça craque déjà.

    Deux solu­tions : Mieux répar­tir le travail, et descendre à 32 heures, et pourquoi pas au-delà un jour. Ou oser se déta­cher de l’em­ploi comme valeur sociale et instau­rer un revenu d’exis­tence. Dans les deux cas il va falloir imagi­ner les solu­tions et arrê­ter de croire qu’on résout tout en amélio­rant la forma­tion ou en inci­tant les gens à travailler plus.

    Deux liens :

  • Petit calcul sur 50 milliards

    Le salaire moyen en France est de 2410 euros mensuels bruts d’après l’INSEE, soit 28920 euros annuels (ne lancez pas un scud à votre dépar­te­ment RH tout de suite pas : on parle du salaire moyen, le salaire médian est lui bien en dessous, dans les 1700 € par mois).

    On peut y ajou­ter les charges patro­nales (je prends 40%, en sachant que ça fait moins, surtout si on parle de les dimi­nuer), de l’es­pace au sol, un bureau, des four­ni­tures, et du temps de gestion (faire la paie, le mana­ge­ment, etc.). À vue de nez on peut tabler sur un coût vrai­ment-tout-compris de 50 000 euros par personne et par an.

    Avec 50 milliards sur trois ans, disons 15 milliards par an, on finance donc à vue de nez 300 000 emplois au salaire moyen (qui vous l’ad­met­trez n’est quand même pas super bas).  C’est à peu près l’es­ti­ma­tion du MEDEF, sur laquelle ils ne s’en­gagent pas.

    Sauf que… cette équa­tion consi­dère que les emplois sont unique­ment source de coûts, qu’ils ne produise rien, ne rapportent rien, ce qui est juste inima­gi­nable.

    Avec ce pacte de respon­sa­bi­lité, on supprime des pres­ta­tions sociales (les charges reti­rées, se sont des coti­sa­tions pour la famille, la santé, …) pour offrir des emplois gratuits aux entre­prises, qui bien sûr empo­che­ront le résul­tat produit au niveau des action­naires, accé­lé­rant le déséqui­libre crois­sant entre capi­tal et travail.

    Bien entendu ceci est le scéna­rio posi­tif. Comme le MEDEF ne souhaite pas s’en­ga­ger formel­le­ment, il est probable qu’une partie des charges écono­mi­sées aille direc­te­ment gros­sir la marge et les reve­nus des action­naires. Ce serait juste plus simple ainsi, surtout dans une période sans demande, donc où on n’a pas vrai­ment besoin de nouveaux sala­riés.

    Et si…

    Le salaire moyen d’un fonc­tion­naire est de 2950 € mensuels bruts. Toujours avec le même type de calcul, on arrive à quelque chose comme 62 000 euros annuels vrai­ment-tout-compris.

    15 milliards permet­trait de créer 242 000 fonc­tion­naires, ou du moins d’ar­rê­ter de bais­ser leur nombre. C’est un peu moins mais ils profi­te­ront à l’en­semble de la société.

    Imagi­nez qu’on créé des crèches, qu’on assure une éduca­tion à un niveau bien meilleur, surtout là où c’est diffi­cile, qu’on résorbe un peu le gigan­tesque délai d’at­tente judi­ciaire, qu’on ait des poli­cier en patrouille dans les rues pour éviter les problèmes au lieu de camé­ras pour les obser­ver, qu’on ait des hôpi­taux avec un person­nel qui travaille mieux…

    Nous n’au­rons fait bais­ser le chômage que de 7% (que…) mais il ne s’agit plus d’une parole en l’air non enga­geante d’un repré­sen­tant du MEDEF, il s’agit d’un fait concret qui ne demande qu’une déci­sion.

    On a donc un effet court terme plus fort. On perd proba­ble­ment l’ef­fet moyen terme sur les emplois induits par la relance d’ac­ti­vité (impos­sible à chif­frer) qu’au­rait de mettre 300 000 emplois de plus dans les entre­prises. Mais d’un autre côté un gagne des effets long terme et très long terme indé­niables en terme d’édu­ca­tion, d’at­trac­ti­vité du terri­toire (qui est loin d’être unique­ment une ques­tion de charges et de coût sala­rial).

    Bien entendu, si on regarde le salaire médian (donc qu’on ne prend pas de hauts fonc­tion­naires très bien payés), on fait bais­ser le coût et c’est 315 000 emplois possibles.

    Et sinon…

    Et sinon, si le côté « fonc­tion­naire » fait peur : quid de finan­cer plutôt des créa­tions d’en­tre­prises, des grands projets publics d’in­fra­struc­ture, des produc­tions utiles ?