Les indemnités chômage pèsent trop sur la France, il faut réduire cet assistanat. Peut-être pas autant qu’on le croit finalement… Parfois, rien de mieux que les chiffres.
Catégorie : Emploi et travail
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Entendu sur les 35h
Les 35h ont été globalement profitables et aux salariés et aux entreprises. Ceux qui y ont perdu ce sont tous les autres.
Le problème étant que le passage à marche forcé aux 35h s’est fait majoritairement via des gains de productivité et l’arrêt des activités peu rentables. Ce gain a été partagé entre les entreprises et les salariés, mais n’a que très peu entraîné d’embauches. L’écart se creuse donc entre ceux qui bénéficient d’un emploi et ceux qui n’en n’ont pas. Socialement ça reste un problème.
Attention toutefois à ne pas en tirer que la réduction du temps de travail était une idiotie. Le problème résulte de la réalisation, pas de l’objectif.
Étude comparée
L’occasion a été de fouiller un peu les chiffres de l’OCDE pour voir un peu si nos 35h sont totalement anachroniques et qu’il faut viser à travailler plus comme le disent certains.
Premier tour statistique, entre 2000 et 2012, sur les 37 pays de l’OCDE, le temps de travail annuel par travailleur a baissé dans tous les pays sauf la Belgique (qui note une augmentation de 2%). Tous. Allemagne, Royaume Uni et États Unis compris.
Non seulement nous ne sommes pas isolés mais notre baisse est nettement inférieure à celle de l’Allemagne ou de la moyenne de l’OCDE, similaire à celle du Royaume Uni et des États Unis.
Second tour entre 1997 et 2012 pour prendre une référence avant les lois sur les 35h et le résultat est similaire (cette fois ci c’est la Russie qui fait exception avec 2% d’augmentation).
En lançant une analyse sur l’ensemble des données qui remontent jusqu’à 1950 pour certains pays, on voit que la baisse moyenne sur les pays de l’OCDE est constante et ininterrompue.
Pour ceux qui aiment bien comparer avec l’Allemagne, nous avons toujours eu un temps de travail annuel plus important qu’eux, et cette différence se creuse. Proportionnellement, l’écart n’a jamais été aussi important que ces quatre dernières années.
Seuls quelques pays ont eu ponctuellement un temps de travail annuel inférieur à 2012, et avec un écart rarement supérieur à 2% (seules exceptions : La Suède dans les années 80, La La Russie dans les années 90 et la Slovaquie en 2003).
Choix du modèle de société
Bref : Nous travaillons de moins en moins. Les 35h ne sont qu’une organisation sociale de cette baisse, certainement pas la cause. Ce qui est inquiétant c’est plutôt que nous ne réfléchissions pas à la suite, parce que ça va encore baisser.
L’étude OCDE indique le temps de travail annuel moyen par travailleur (salarié ou non, plein temps ou non). Il ne prend pas en compte les gens qui ne travaillent pas. Une différence majeure tient donc dans la répartition de ce travail sur l’ensemble de la population :
Le travail est-il réservé à quelques happy few qui trustent tout le temps de travail et donc aussi toute la richesse, ou le travail et la richesse sont-ils mieux réparti sur l’ensemble de la population quitte à ce que chacun travail et gagne un peu moins ? On se posait peu la question il y a cinquante ans mais avec les taux de non-emploi actuels, il s’agit bien du cœur du sujet.
Inciter les gens à travailler plus individuellement, ou freiner la baisse du temps de travail individuel (que ce soit en temps de travail hebdomadaire, ou en absences pour formation et congés), c’est indirectement choisir le premier modèle des deux. Ce n’est pas forcément ma vision d’une société (et finira forcément par éclater si nous avançons durablement sur ce chemin).
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Embauche : les patrons de PME ne cherchent pas des Bac+5
Les hauts diplômés à BAC+5 sont plus souvent en situation précaire qu’on ne le pense. C’est navrant quand on regarde le manque de personnes pour certains postes niveau CAP.
Et voilà qu’on déclare
L’offre de travail doit mieux s’adapter aux entreprises ; une réforme est urgente pour favoriser des formations courtes et adaptées à la demande sur le marché du travail
Sérieusement, il faut vraiment qu’on soit malade en France pour imaginer un truc pareil. On doit être le seul pays dans l’histoire à penser qu’il faut réduire le niveau d’éducation. Pire, le seul à penser que ça améliorera l’emploi.
Que les gens soient instruits n’a jamais été un problème, ou ne devrait pas l’être, sauf à vouloir créer une société de classes avec une élite instruite et un peuple qui ne doit pas penser trop loin pour éviter de faire des vagues.
Pourquoi un diplômé d’école de commerce serait-il fondamentalement moins bon qu’un BEP pour vendre en magasin ? Pourquoi un master en psychologie ne pourrait pas garder des enfants à domicile ? Je ne dis pas que c’est nécessaire, mais ce n’est en rien disqualifiant.
Des études poussées c’est une chance, pour mieux travailler, mais aussi mieux comprendre le monde qui nous entoure, améliorer les pratiques… Même une formation longue en sciences humaines peut être bénéfique à la communauté pour un poste de tourneur/fraiseur.
Le gros défaut c’est au contraire qu’on entraine tout le monde à penser via ce système de classe avec ceux qui « pensent » d’un côté, généralement à partir BAC+4, et ceux qui « font » de l’autre. Si tu appartiens à la première catégorie, tu ne dois jamais t’abaisser à accepter un emploi dans la seconde, et si tu t’y astreins alors on pensera que tu y seras inefficace (et peut être à raison tellement on t’a entrainer à délaisser tout ce qui peut ressembler au « faire »).
Et si au lieu d’espérer diminuer le niveau d’éducation — je n’en reviens toujours pas — on tablait plutôt sur un changement de valeurs et d’état d’esprit pour que les gens aient envie de « faire », et arrêter de se sentir « trop bien » pour ça ?
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Petite échelle de rémunération
J’ai écouté – avec retard – le magazine Envoyé Spécial sur le chômage et la pénurie de main d’œuvre. Vous pouvez passer votre chemin, rien n’y est dit, ou presque.
Par contre on y conte encore une pénurie de main d’œuvre pour une série de boulots payés au SMIC, souvent en temps partiel non choisi, et avec des horaires atypiques (genre quelques heures, puis une énorme pause mais pas suffisante pour te permettre de rentrer chez toi pour une autre activité, puis encore quelques heures, dont une partie le soir ou très tôt le matin) et très mal considérés socialement.
Un boulot dont personne ne veut, dont l’offre est structurellement insatisfaite, dans le modèle libéral, logiquement les conditions ou la compensation devraient être améliorées pour tenter d’inverser un peu la tendance, ou au moins pour que les quelques personnes aillent chez vous plutôt que chez le voisin. Mais non, ces jobs restent au niveau du minimum légal et on préfère se plaindre du manque de personnel.
Un peu de réalisme : Le niveau d’éducation a sensiblement augmenté depuis 50 ans. La majorité des gens peuvent prétendre à des emplois qualifiés (et trop souvent refusent le reste), potentiellement intéressants. Il n’y a cependant pas tant que ça de boulots intéressants sur le marché par rapport à la demande. Inversement il y a plein de boulots pourris, souvent sans qualification particulière nécessaire. Quelqu’un m’explique pourquoi les boulots pourris sont encore moins bien payés que les boulots intéressants ? N’est-ce pas là une échelle de valeur purement idéologique ?
Dans un monde vraiment libéral, en occident (niveau d’éducation assez élevé) le personnel de ménage nettoyant un bureau serait souvent mieux payé que la personne qui travaille dans ce bureau. Que cela fasse un peu cogiter les chantres du libéralisme bien assis dans leur bureau avec leur salaire confortable.
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Les pauvres en Allemagne meurent de plus en plus jeunes
Nous comparer avec le modèle allemand semble un peu passé de mode, même si c’est toujours par là qu’on commence quand on parle de réduire un peu la protection sociale.
On oublie bien trop souvent qu’une partie du système se fait au détriment des pauvres, forcés par la loi à accepter des emplois à un euro de l’heure. Pensez, à 48 heures par semaine (ce qui est le maximum légal en Europe) on arrive à moins de 200 euros par mois. Comptez en plus un taux de travail temporaire non souhaité qui dépasse largement ce qu’on voit chez nous, et on voit rapidement que ce n’est pas l’Eldorado là bas non plus.
Le résultat ne devrait pas étonner mais c’est toujours mieux quand la statistique nous le confirme : Les pauvres en Allemagne meurent de plus en plus jeunes. C’est une régression dramatique et un symptôme d’échec on ne peut plus grave.
L’espérance de vie des petits revenus outre-Rhin est passée de 77,5 ans en 2001 à 75,5 ans en 2010. Et c’est bien pire dans les anciens länder d’Allemagne de l’Est, où elle a chuté de 77,9 ans à 74,1 ans.
Ironiquement, en parallèle on y passe l’âge légal de la retraite de 65 à 67 ans. Rappelez-vous comme en France on justifiait les changements d’âge de retraite par l’augmentation de l’espérance de vie.
Salaire indécent, dégradation très sensible des conditions de vie au point de faire baisser significativement l’espérance de vie, il y a certainement de bonnes idées à prendre en Allemagne, mais ne copions pas tout, par pitié.
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Chômage : Pôle Emploi « au bord de l’implosion »
Sans rire, à quoi sert le coûteux pôle emploi à part surveiller les chômeur pour radier tous ceux qui ne rentrent pas dans les cases ? Pour l’anecdote je me rappelle une amie qui a été radiée car sa carte d’identité a expirée entre deux rendez-vous.
Qu’on ne me parle pas d’accompagnement, clairement nous ne nous en donnons pas les moyens. Chômage : Pôle Emploi « au bord de l’implosion ».
A Garges-les-Gonesses (Val-d’Oise), un conseiller est même censé suivre 516 personnes par mois et un autre à Yerres (Essonne) le chiffre record de 655 chômeurs.
Théoriquement on donne un entretien mensuel par personne. En comptant 18 jours de 7 heures de travail par mois, cela nous donne 11 minutes et demie par personne et par mois… en considérant que notre conseiller est productif à 100%. Si on compte même 1/3 du temps pour l’administratif et 2 minutes entre chaque rendez-vous, il reste un peu moins de 6 minutes d’accompagnement par personne. Il faut être sacrément productif.
Il est temps, soit d’arrêter les délires et gérer le pôle emploi comme un système d’indemnité sans accompagnement obligatoire (en se concentrant sur un nombre réduit de personnes), soit d’y mettre vraiment les moyens. Là nous avons une superbe machine à perdre qui coûte cher mais ne peut avoir aucune efficacité.