Catégorie : Emploi et travail

  • Travail illé­gal: Bouygues voit sa défense taillée en pièces

    Les ouvriers roumains sont embau­chés par Elco et les polo­nais sont recru­tés par Atlanco, boîte d’in­té­rim au siège irlan­dais qui passe par des bureaux fictifs à Chypre. Cette nouvelle forme de commerce trian­gu­laire vise à profi­ter des meilleurs taux d’im­po­si­tion euro­péens. Comme le notent les enquê­teurs, les paie­ments des pres­ta­tions d’At­lanco par Bouygues passent par Chypre mais sont encais­sés dans une banque irlan­daise à Northamp­ton. Rappe­lons égale­ment que l’un des respon­sables d’At­lanco en France n’est autre qu’un ancien cadre Bouy­gues…

    […] Pour l’Urs­saf et les impôts : plus de 22 millions d’eu­ros de pertes entre 2009 et 2012. Pour les ouvriers déta­chés : pas de couver­ture sociale, pas de congés payés, un dumping social devenu une règle euro­péenne pour ces métiers. Mais, pour Bouygues, une main-d’œuvre flexible à bas coûts.

    […]

    L’amende requise pour Bouygues est de 150 000 euros, en deçà du maxi­mum légal de 225 000 euros, qui reste de toute de façon une amende de paco­tille pour le géant du BTP. […] le procu­reur a tenu à préci­ser du bout des lèvres et sans aucune expli­ca­tion qu’il ne deman­dait pas une exclu­sion du groupe, même tempo­raire, des marchés publics. Au vu de l’am­pleur de la fraude et de la mise en cause de la respon­sa­bi­lité du groupe, cette exclu­sion serait la seule peine de nature à rappe­ler à l’ordre Bouygues et l’en­semble des multi­na­tio­nales du BTP.

    — Media­part

    Allez comprendre pourquoi ces grandes entre­prises n’hé­sitent pas… Moi j’ai ma petite idée. Tout ça n’est pas prêt de chan­ger.

     

  • Quand le pdg d’Air France divague sur les acquis sociaux

    [Il] enchaîne sur un sujet que l’on pensait désor­mais impos­sible à remettre en cause : l’in­ter­dic­tion du travail des enfants. Mais mani­fes­te­ment, pour le patro­nat décom­plexé, aucun sujet n’est tabou. « Je me suis penché sur l’évo­lu­tion du travail des enfants. On a d’abord inter­dit aux enfants de moins de huit ans de travailler, puis l’in­ter­dic­tion a été portée à douze ans, puis à seize. (…) Qu’est-ce que c’est qu’un enfant ? Est ce qu’il faut les faire travailler, pas travailler ? Pas sûr »,[…]

    Reve­nant sur son expé­rience de patron d’Air France, Alexandre de Juniac se met à expliquer les effroyables contraintes auxquelles il est soumis. Sans possi­bi­lité d’agir sur le prix du kéro­sène, ou sur les tarifs des rede­vances aéro­por­tuaires, sa seule marge de manœuvre, explique-t-il, « c’est le coût du travail ». Tout cela impose, selon lui, de « mettre des limites aux acquis sociaux », d’au­tant qu’il faut faire face à une concur­rence redou­table, avec d’un côté les compa­gnies low cost et de l’autre les compa­gnies du Golfe. Ni les unes ni les autres ne sont bridées par le droit social, à l’en­tendre.

    Se sentant porté par son sujet, le pdg d’Air France ne peut s’em­pê­cher alors de racon­ter une anec­dote, qui mani­fes­te­ment lui tient à cœur : « Comme le disait mon homo­logue de Qatar Airways hier à propos de la grève, “M. de Juniac, chez nous, ce ne serait pas possible, on les aurait tous envoyés en prison” », raconte-t-il d’une mine gour­mande, sous les applau­dis­se­ments de la salle. C’est dire combien la France est défa­vo­ri­sée ! Et le Qatar est un si bel exemple ! Les sala­riés émigrés, trai­tés comme des esclaves, y meurent par tombe­reaux sur les chan­tiers.

    — Media­part, à partir d’en­re­gis­tre­ments vidéos publiés

    Si vous ne croyez pas à la lutte des classes (peut être pas celle de la grande époque des syndi­cats, mais au moins sa décli­nai­son moderne avec le 1‰ qui domine les entre­prises), vous devriez y regar­der à deux fois cas si nous sommes ici dans un excès, la posi­tion de fond est en fait assez repré­sen­ta­tive de ce que j’ai vu de mes propres yeux plus d’une fois.

    La compé­ti­ti­vité et la renta­bi­lité sont l’al­pha et l’omega qui justi­fient l’as­ser­vis­se­ment des 99,9%. Ils ne se rendent même pas compte du déca­lage qu’ils ont avec le reste de la popu­la­tion et certains croient même méri­ter leur distinc­tion.

  • La réduc­tion des coûts, une obses­sion françai­se….

    les DRH français qui estiment que [la] néces­saire opti­mi­sa­tion [des coûts] devance le main­tien d’un bon climat social, la GPEC ou l’amé­lio­ra­tion de la perfor­mance.

    En seconde place [des prio­ri­tés des entre­prises […] le déve­lop­pe­ment de la produc­ti­vité des sala­riés, autre recette d’op­ti­mi­sa­tion ; loin devant la gestion des compé­tences rares et l’in­no­va­tion qui néces­sitent des enve­loppes budgé­tai­res…

    A contra­rio, hors de France, c’est bien le climat social, l’in­no­va­tion et la gestion des compé­tences rares qui figurent au rang de prio­rité des diri­geants alors que logique­ment pour les DRH monde la gestion prévi­sion­nelle des emplois et des compé­tences et le mana­ge­ment de la perfor­mance consti­tuent l’es­sen­tiel de leur feuille de route.

    Sur les échos, grand jour­nal commu­niste.

    Je ne sais pas si ça mérite un commen­taire, mais je trouve que ça reflète bien et l’état d’es­prit ici, et le fossé qu’on a vis à vis des anglo-saxons.

  • Quelques notes sur la décla­ra­tion en auteur indé­pen­dant

    J’ai regardé deux ou trois fois comment décla­rer des reve­nus tirés de la vente de livres auto-édités. Quelques notes pour ceux que ça peut aider, sans aucune garan­tie juri­dique (mais vous êtes invi­tés à commen­ter et corri­ger) :

    Vous ne perce­vez pas de droits d’au­teur

    Vous déte­nez bien des droits d’au­teur sur vos livres, mais votre acti­vité n’est pas liée à la vente de ces droits d’au­teur.

    C’est assez diffi­cile à avaler mais en fait la logique est assez simple : L’au­teur édité vend des droits d’au­teurs sur une oeuvre origi­nale. Vous, vous vendez des copies de livres, ce qui est très diffé­rent. Il se trouve que le contenu du livre est le votre, mais ce qui est vendu est bien une simple copie de livre.

    Coti­sa­tions sociales

    Oubliez donc le fait qu’il y a « droits d’au­teurs » dans la case « trai­te­ments et salaires » de votre fiche d’im­pôts sur le revenu, car ce n’est pas de là que viennent vos reve­nus.

    Mais surtout ce qui doit atti­rer votre atten­tion c’est le paie­ment des coti­sa­tions sociales. Dans le cas d’un auteur édité, c’est l’édi­teur qui s’en occupe et cotise pour vous à l’Agessa. En auto-édité c’est à vous de vous en occu­per et les rappels URSSAF peuvent faire très mal pour ceux qui ont « oublié ».

    Pas d’Agessa ou de MDA

    En fait, qui découle de ce qui précède, vous êtes bien auteur de vos livres, mais pour ce qui est du fisc vous êtes un vendeur, ce qui est diffé­rent.

    Vous pouvez proba­ble­ment vous consi­dé­rer comme éditeur, comme libraire ou comme simple commerçant de livres, mais vous n’êtes pas artiste-auteur. Vous serez refusé à l’Agessa et dans les statuts réser­vés aux auteurs ou artistes si vous tentez d’y coti­ser direc­te­ment.

    Tout au plus, vous pour­riez prétendre à une acti­vité d’au­teur si vous ne vendez volon­tai­re­ment qu’une poignée d’exem­plaires numé­ro­tés de vos œuvres origi­nales, un peu comme un photo­graphe qui vend ses tirages. Je doute que ce modèle soit adapté à grand monde, et ça vous impo­sera en plus de sortir des plate­formes clas­siques de vente de livres.

    Fran­che­ment, c’est le plus dommage est le plus diffi­cile à avaler, mais tous les statuts protec­teurs liés aux auteurs de livres vous sont irré­mé­dia­ble­ment fermés si vous n’êtes pas avali­sés par un éditeur.

    Alors auto-entre­pre­neur ?

    Alors il faut vous décla­rer en travailleur indé­pen­dant ou monter une entre­prise plus clas­sique.

    En travailleur indé­pen­dant vous rele­vez à priori du RSI (et vous avez toute ma compas­sion pour cela, car vous allez souf­frir), et les coti­sa­tions qui vont avec. Il semble que certains arrivent à se faire enre­gis­trer auprès de l’URSSAF avec le code APE 9003B « autres acti­vi­tés artis­tiques » et être exoné­rés de la CFE, ce qui est loin d’être négli­geable pour une petite acti­vité.

    Il vous faudra envi­sa­ger une struc­ture plus clas­sique et moins avan­ta­geuse si vous dépas­sez le plafond de 32 900 €, mais ça laisse déjà de quoi voir venir pour beau­coup d’auto-édités.

    Quid d’une double acti­vité auteur – éditeur sépa­rée ?

    Pour les joueurs il doit y avoir moyen de décla­rer une acti­vité d’auto-entre­pre­neur « éditeur » et de vous ache­ter vous-même vos droits d’au­teurs, ouvrant droit à l’AGESSA pour cette seconde acti­vité d’au­teur édité. Dans certaines condi­tions, via la vente de livres papier, cette acti­vité pour­rait même être consi­dé­rée comme une acti­vité commer­ciale de vente et non une acti­vité de service, amenant une taxa­tion plus légère et un plafond de chiffre d’af­faire plus que doublé.

    Je n’ai pas connais­sance de gens qui aient essayé (mais en cher­chant ça doit se trou­ver), donc il est possible que j’ai manqué une bonne raison pour ne pas le faire. Si rien ne vient l’em­pê­cher et pour peu que vous vendiez assez, il est possible que ce soit un des montages les plus inté­res­sants. Il faut par contre être prêt à passer pas mal de temps entre la gestion de l’ad­mi­nis­tra­tif et le montage (mais j’es­père qu’on vous avait prévenu : être indé­pen­dant c’est aussi subir la pape­rasse).

    Reste à voir si en étant en même temps auteur et éditeur et si votre maison d’édi­tion n’édite que vous, certains ne consi­dè­re­ront pas que vous êtes à compte d’au­teur plutôt qu’à compte d’édi­teur (et là : finie la fisca­lité d’au­teur).

    Pas dans les BNC

    Certains tentent visi­ble­ment de décla­rer les ventes en BNC (béné­fices non commer­ciaux) mais ça me semble haute­ment discu­table. Le fisc avait exclu la chose quand j’avais posé la ques­tion de l’auto-édition il y a quelques années, vous êtes préve­nus (et un rappel de coti­sa­tions sociales ça peut faire très mal).

    Ça ne serait valable que si l’ac­ti­vité n’est pas conçue comme une acti­vité profes­sion­nelle.

    Quelle est votre inten­tion d’au­teur ? Si vous vivez ça comme une acti­vité profes­sion­nelle en cher­chant à vendre et en écri­vant pour vendre, vous avez à priori une acti­vité profes­sion­nelle. Le fait d’échouer à avoir un volume de vente signi­fi­ca­tif n’est à priori pas un critère pour entrer dans les BNC.

    Est-ce que vous faites de la promo­tion, de la publi­cité ? Cher­chez-vous à en tirer votre revenu prin­ci­pal (ou un revenu signi­fi­ca­tif par rapport à votre revenu prin­ci­pal) ? Vous présen­tez-vous comme « auteur » quand on vous demande votre acti­vité profes­sion­nelle ? Y passez-vous vos heures ouvrées en semaine ? Ça peut être autant d’in­dices que vous le vivez à priori comme une acti­vité profes­sion­nelle.

    Si effec­ti­ve­ment vous écri­vez comme une acti­vité de loisir et avez choisi de fina­le­ment propo­ser le résul­tat à la vente pour voir, de façon acces­soire sans que ce ne soit l’objec­tif initial, et qu’en plus les gains sont peu signi­fi­ca­tifs, alors pourquoi pas. Mais dans ce cas vous ne vous consi­dé­re­rez à priori pas comme auteur indé­pen­dant (ce qui est l’objet du billet), pas plus que celui qui a fait de la gouache le week-end dernier ne se consi­dère artiste-peintre.

    Et sans se décla­rer ?

    À ma connais­sance, il faut oublier (et c’est aussi ce que m’avait répondu le fisc il y a quelques années). Toute acti­vité profes­sion­nelle doit être décla­rée en entre­prise (l’auto-entre­pre­neur n’est qu’un sous-cas d’en­tre­prise indi­vi­duelle), sans excep­tion, quel que soit le montant des gains. Le reste ça s’ap­pelle du travail au noir.

    Surtout pas d’as­so­cia­tion loi 1901

    Tourne en ce moment le retour de quelqu’un qui a monté une asso­cia­tion « loi 1901 » pour son acti­vité d’auto-édition, en se rému­né­rant en sala­rié de cette asso­cia­tion.

    Le problème est dans l’objec­tif de l’as­so­cia­tion, qui doit être abso­lu­ment non-lucra­tif. Or monter une asso­cia­tion dans l’objec­tif de vendre ses propres livres et d’en tirer une rému­né­ra­tion c’est typique­ment une volonté commer­ciale et lucra­tive.

    Tenter de formu­ler astu­cieu­se­ment l’objet de l’as­so­cia­tion ne trom­pera personne et fera tomber tout argu­ment de bonne foi dans le cas d’un contrôle ou de la plainte d’un auteur ou éditeur inami­cal.

    On peut tout à fait monter une maison d’édi­tion via une asso­cia­tion. Être sala­rié de sa propre asso­cia­tion me semble plus que border­line. Si tant est que ça puisse être légal, ça deman­de­rait de sépa­rer très forte­ment l’ac­ti­vité sala­riée de la gestion de l’as­so­cia­tion.

    Si par contre se sala­rier est dès le départ l’objec­tif et non le moyen, là on tombe non seule­ment dans le lucra­tif, mais dans l’ex­ploi­ta­tion de l’as­so­cia­tion au béné­fice de ses gérants, et ça peut faire très mal (on parle de prison).

    Pour moi c’est peut-être le pire des montages à faire. La décla­ra­tion de BNC ou le simple report dans « trai­te­ments et salaires » sur la décla­ra­tion de reve­nus me semblent presque moins risqués car on peut au moins arguer de sa bonne foi si les montants sont faibles. Contrai­re­ment au détour­ne­ment du statut asso­cia­tif, ça se résol­vera au pire sous forme d’un doulou­reux rappel de coti­sa­tions sociales avec péna­li­tés.

  • Le drame social des droits rechar­geables

    Non seule­ment son dossier met 57 jours à être traité, mais l’ex-ANPE lui déniche un reliquat de droits rechar­geables issus d’un petit boulot étudiant de 2013. ­Pen­dant sa licence, la Rennaise gardait les collec­tions du musée des Beaux-Arts deux à six jours par mois afin de mettre du beurre dans les épinards. À cause de cet emploi, elle perçoit 310 euros mensuels pendant 610 jours. Alors qu’a­vec son dernier emploi de vendeuse, elle aurait pu prétendre à 700 euros… Un coup de massue. « Je m’en sors moins bien que quand j’étais étudiante précaire ! C’est une puni­tion pour tous les gens obli­gés de travailler pendant leurs études parce qu’ils n’ont pas papa et maman derrière et ça, ça passe très mal ! »

    …Joli monde de droits rechar­geables de la dernière réforme du Pôle Emploi.

    En fait c’est très simple. On calcule le montant de l’in­dem­nité la première fois que vous vous inscri­vez au Pôle Emploi, avec les rému­né­ra­tions que vous avez eu à l’époque. Si vous n’épui­sez pas vos droits à indem­ni­sa­tions, ils sont repris à votre prochaine période de chômage.

    Si vous avez pris un petit boulot alimen­taire à temps partiel pendant vos études et pointé un mois une fois le diplôme en poche… ne retom­bez surtout jamais au chômage ! Même plusieurs années après, on vous indem­ni­se­rait d’abord pendant 23 mois en fonc­tion de votre petit boulot alimen­taire à temps partiel, donc quelques euros par jours.

    Peu importe combien de temps vous avez travaillé depuis, peu importe à quel niveau de rému­né­ra­tion vous avez cotisé entre temps. Une vraie machine à perdre pour tous les jeunes qui commencent par des petits boulots ou CDD précaires.

    Pire, si vous repre­nez quelques CDD, ça recharge vos droits, toujours au montant précé­dent. La situa­tion peut même deve­nir perma­nente pour ceux qui ont une suite d’em­plois précaires.

    Seules solu­tion pour refaire calcu­ler ses droits à un plus haut niveau : 5 ans de CDI sans période de chômage (6 pour les plus de 50 ans), ou épui­ser les dits-droits en cumu­lant 2 ans de chômage (3 pour les plus de 50 ans). Avec un tel système, certains vont même avoir inté­rêt à ne pas poin­ter au chômage suite à une perte d’em­ploi. Géniale solu­tion aux chiffres du chômage, à défaut d’être une solu­tion au chômage lui-même.

    Le plus drama­tique c’est que ce délire a été décou­vert il y a des mois, avant que la situa­tion ne devienne insou­te­nable pour tant de monde.

  • Mensonges sur le dimanche

    [Nous allons] accor­der des déro­ga­tions au repos domi­ni­cal […] pour éviter un préju­dice « au public » ou « au fonc­tion­ne­ment de l’en­tre­prise ». Avant le critère juri­dique c’était : « si cela ne portait pas préju­dice »… aux sala­riés ».

    Le glis­se­ment est très symp­to­ma­tique, et est plutôt la norme ces dernières années. La société doit passer par l’éco­no­mie et le déve­lop­pe­ment des entre­prises, avec le postu­lat que ça rejaillira forcé­ment en posi­tif sur les citoyens eux-même.

    Au final c’est l’in­té­rêt des proprié­taires d’en­tre­prises qui prévaut sur celui de l’en­semble des citoyens. Gênant, pour ne pas dire plus.

    Dans ces « zones touris­tiques inter­na­tio­nales », la loi décide que, dans ces zones, la nuit commence après 24 h, il sera possible de bosser jusqu’à 23 h 59 en « soirée ». Seule « contrainte » : l’em­ployeur « veille » à ce que le sala­rié « dispose d’un moyen de trans­port pour rega­gner son domi­cile ». Qui y croit une seconde ?

    On ne libère rien. Il aurait été possible d’au­to­ri­ser le travail de nuit jusqu’à 23h59 dans ces zones. On a préféré recu­ler la nuit. Astuce admi­nis­tra­tive qui n’a qu’un seul avan­tage : reti­rer des protec­tions aux sala­riés.

    Quant à s’as­su­rer qu’il existe un moyen de trans­port, n’y voyez aucune action posi­tive. Ça veut juste dire que l’em­ployeur refu­sera d’em­ployer un candi­dat qui n’a pas le permis voiture, et ça même si se garer dans ces zones sans payer une fortune est juste inac­ces­sible pour le vendeur payé au lance-pierre.

    La loi [ne] fixe AUCUNE [majo­ra­tion de salaire pour travail le dimanche]. Le projet Macron renvoie au « dialogue social » aléa­toire

    … c’est à dire au rapport de force patro­nat / syndi­cat, pas très équi­li­bré en ce moment dans le domaine du commerce de détail. À la loi du plus fort quoi…

    Cita­tions de Gérard Filoche, avec les même préci­sions qu’hier.

  • Ques­tion de redis­tri­bu­tion… et de modèle social

    Ques­tion de redis­tri­bu­tion… et de modèle social

    En pratique, si certaines miettes tombent en bas, les finances qu’on donne aux plus riches profitent d’abord aux plus riches. Formulé ainsi personne ne s’en étonne, mais la fable qui voudrait qu’en soute­nant les plus riches on relève toute la société a la vie dure. Elle ne s’ap­puie malheu­reu­se­ment sur rien de concret.

    Wealth doesn't trickle down. It trickles outwards - to tax havens.
    Wealth doesn’t trickle down. It trickles outwards – to tax havens.

    Le problème c’est qu’on semble inca­pable d’oser dire « stop » à la classe supé­rieure, qui demande de plus en plus.

    Aux États Unis, on se rend compte que des grands groupes payent plus en indem­ni­tés à leur PDG qu’à la commu­nauté via le fisc. Au niveau mondial ce sont 211 000 personnes qui détiennent 13% du capi­tal plané­taire, y compris les éner­gies fossiles, les loge­ments, les terres, les moyens de produc­tion… C’est 0,004% de la popu­la­tion et ce déséqui­libre va gran­dis­sant.

    Évolution du salaire moyen horaire hors inflation des salariés du secteur privé aux Etats-Unis. Baisse depuis 2011.
    Évolu­tion du salaire moyen horaire hors infla­tion des sala­riés du secteur privé aux Etats-Unis. Baisse depuis 2011.

    En France, les grands patrons ont obtenu des allè­ge­ments histo­riques de fisca­lité pour aider à leur compé­ti­ti­vité et compen­ser des bas salaires vrai­sem­bla­ble­ment trop chers. En paral­lèle pour­tant, la part des salaires dans le PIB ne fait que dimi­nuer depuis 40 ans, les salaires commencent à dimi­nuer aussi (à monnaie constante). Autant dire que non, ça ne permet pas d’amé­lio­rer l’em­ploi, ça permet surtout de conso­li­der des divi­dendes et la course à la capi­ta­li­sa­tion.

    Depuis 40 ans, la part du PIB reversée des salaires vers les dividendes représente 1,5x le PIB.
    Depuis 40 ans, la part du PIB rever­sée des salaires vers les divi­dendes repré­sente 1,5x le PIB.

    Les aides, baisses de fisca­lité et déré­gle­men­ta­tions ne font qu’a­li­men­ter le haut de la pyra­mide. Les divi­dendes explosent pendant que les PDG font la mine du chat de Shreck en mettant tout sur le dos de la crise. Ça ne s’ar­rête pas. Ils osent tout, jusqu’à vouloir dénon­cer l’obli­ga­tion de moti­ver les licen­cie­ments.

    Entre temps, rien ne s’ar­range. Les gens lais­sés sur le carreau sont de plus en plus nombreux : +44% de SDF en 10 ans. Le pire est peut être de se rendre compte que 25% d’entre eux ont pour­tant un emploi.

    Quant à la baisse des « charges » pour la compé­ti­ti­vité des entre­prises, c’est tout simple­ment une baisse des coti­sa­tions sociales, dont les caisses sont pour­tant déjà dans le rouge depuis des années. Il serait illu­soire de croire que cela ne va pas faire bais­ser le niveau de vie et se santé de ceux qui sont le plus dans le besoin.

    Les pauvres sont trop pauvres, mais ne les aidons pas avec nos impôts
    61% pour dire qu’il faut augmen­ter les minima sociaux, mais 58% pour refu­ser d’aug­men­ter les impôts à cette fin. Blocage idéo­lo­gique.

    Tout le monde est bien d’ac­cord sur le problème, mais dès qu’il s’agit de faire de la redis­tri­bu­tion autre­ment qu’en donnant plus de sous aux plus riches, il y a un blocage idéo­lo­gique. L’im­pôt c’est pour­tant la base d’un système que même les plus riches étran­gers nous envient (l’his­toire en lien me tire une larme à chaque lecture). Je crains que ça ne dure pas, parce que pour ça il faut le finan­cer et le consen­te­ment à l’im­pôt est au plus bas.

    Le travail de commu­ni­ca­tion des plus riches fonc­tionne, il obtient désor­mais le soutien même des plus pauvres : Au lieu de main­te­nir le niveau des recettes, on sabre dans les pres­ta­tions et dans la redis­tri­bu­tion. Pauvre monde, pauvre France. Nous décons­trui­sons en quelques années une dyna­mique qui a pris des dizaines d’an­nées à se former.

    La quan­tité de biens étant limi­tée, quand on allège les taxes, coti­sa­tions et impôts des plus riches, voire qu’on subven­tionne leurs acti­vi­tés, on ne fait que prendre aux plus pauvres pour cela. C’est tout bête mais bon à rappe­ler.

    Et si pour vous commen­ciez à voir d’un bon oeil tout ce qu’on vous demande de payer pour la collec­ti­vité ? La seule ques­tion est de savoir quel modèle social vous soute­nez, et si les trans­for­ma­tions en cours ont votre soutien.

    La lutte des classes existe, nous l’avons gagnée.
    — Warren Buffet

    Les « riches », eux, savent très bien où ils en sont. Je ne compte plus le nombre de fois où j’en entendu « tu devrais être pour, c’est posi­tif pour nous ». La phrase célèbre attri­buée à Warren Buffet n’a jamais été aussi vraie.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-SA Doctor Ho

  • Le prin­cipe de non-loca­tion du corps humain

    Le prin­cipe de non-loca­tion du corps humain

    Le prin­cipe de non-loca­tion du corps humain. Je ne sais pas d’où sort cette idée que l’on n’au­rait pas le droit de gagner de l’argent en mettant son corps à dispo­si­tion d’au­trui, mais il faudra en parler à l’en­semble des travailleurs manuels de ce pays, ça les inté­res­sera beau­coup. Surtout nos mili­taires qui sautent sur des mines en Afgha­nis­tan et nos 56000 ouvriers victimes de mala­dies profes­sion­nelles chaque année. En fait, l’ex­ploi­ta­tion de l’Homme par l’Homme, et notam­ment de son corps, c’est un peu la base du capi­ta­lisme et jusqu’à l’ar­ri­vée de […], ça ne semblait choquer personne, à l’ex­cep­tion peut-être des syndi­cats. Mais si pour inter­dire […] vous voulez pour rester cohé­rent inter­dire aussi le travail, ça me va, je signe.
    extrait de ad virgi­lium

    J’ai toujours eu du mal avec l’ar­gu­ment « c’est de l’ex­ploi­ta­tion de gens qui n’ont pas le choix » voire « de la loca­tion du corps humain ».

    Une partie impor­tante des travailleurs manuels ne font *que* se soumettre à une exploi­ta­tion physique parce qu’ils n’ont pas le choix pour vivre. Croyons-nous que travailler à la chaîne, dans des fours à plus de 40° ou avec des produits dange­reux se fait par envie ou par amour ?

    Nous louons souvent notre corps, parfois pour la partie physique, parfois pour la partie mentale, souvent au détri­ment de notre santé – si le travail c’est la santé, n’ou­blions pas qu’on nous achète notre travail, et donc notre santé

    Je ne suis pas cynique au point de dire que tout se vaut, donc qu’on doit accep­ter toute exploi­ta­tion humaine simple­ment parce que le prin­cipe est partout autour de nous. Le simple argu­ment ne me suffit par contre pas.

    La ques­tion est de savoir où on trace la limite. C’est bien plus diffi­cile qu’on ne le croit car on utilise au jour le jour plus d’un outil ou d’un service qui exploite autrui dans des condi­tions tota­le­ment inac­cep­tables.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-SA James Vaughan

  • Ensei­gnants gratuits, promo­tion excep­tion­nelle

    Ensei­gnants gratuits, promo­tion excep­tion­nelle

    J’en­tends encore autour de moi les gens râler sur ces ensei­gnants trop payés, qui font toujours grève et qui sont toujours en vacances. Je rage parce que pas un n’ac­cep­te­rait les condi­tions de travail des profes­seurs des écoles.

    Sans salaire depuis la rentrée, des ensei­gnants reçoivent des bons alimen­taires

    Ce n’est que le titre de l’ar­ticle de presse, mais le contenu ne vient nulle­ment modé­rer le sens initial. Après deux mois sans salaire, on leur fait même l’in­sulte de leur donner des bons alimen­taires. Et encore, c’est au profes­seur de s’hu­mi­lier à quéman­der pour les obte­nir.

    Ils ont réussi le concours, sortent d’un diplôme BAC+5 – oui, il faut avoir un master pour ensei­gner désor­mais – souvent jeunes diplô­més donc sans le sou. Vous en connais­sez beau­coup qui dans ces condi­tions conti­nue­raient à travailler après plus de deux mois sans salaire sur un nouveau job ? Vous le feriez ?

    Même quand tout fonc­tionne, le salaire n’est jamais versé à plein le ou les premiers mois. C’est dans le proces­sus « normal » de l’édu­ca­tion natio­nal : Le profes­seur reçoit un simple acompte, et le solde au mieux fin octobre.

    Quant aux congés ou aux horaires soit-disant tranquilles, je vous laisse lire la petite histoire de septembre dernier – lisez-la, vrai­ment. Oh, et le sala­rié trop payé n’est en réalité payé que 2000 € bruts par mois (envi­ron 1550 € net), pour un BAC +5 une fois le concours en poche. Quant à la sécu­rité de l’em­ploi, 13 ans d’exer­cice avec une bonne nota­tion ne garan­tit pas une place de titu­laire.

    Pensez-y avant de vous moquer de la prochaine grève qui parle de mauvaises condi­tions de travail.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Jeyheich

  • Renfor­cer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi

    Renfor­cer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi

    Je demande à @pole_emploi de renfor­cer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi
    François Rebsa­men

    Nouveau gouver­ne­ment. Chômage impor­tant. Première action et commu­ni­ca­tion.

    Parce qu’é­vi­dem­ment la cause majeure du chômage ce sont bien les chômeurs qui ne cherchent pas du travail (ou pas). Sinon tout serait résolu (ou pas). Il est urgent d’y répondre, il n’y avait rien de plus impor­tant à faire comme action pour le ministre du chômage.

    Le pire c’est que non seule­ment le Pôle Emploi ne fait déjà plus que ça (pape­ras­se­rie admi­nis­tra­tive, enre­gis­tre­ment et contrôles ; se rappe­ler du temps qu’ils ont pour chaque chômeur) mais en plus on renforce ici l’idée que ceux qui sont chômeurs ne sont que de vils profi­teurs.

    La stig­ma­ti­sa­tion c’est aussi ce qui rend plus diffi­cile de retrou­ver un emploi. L’idée (fausse) que la France est un pays d’as­sis­tés c’est ce qui dimi­nue la proba­bi­lité d’in­ves­tis­se­ment.

    Bref, c’était clai­re­ment le plus impor­tant à faire pour la relance du gouver­ne­ment et la confiance de la base socia­liste en ceux qu’elle a élu.

    Elle se voit suffi­sam­ment l’iro­nie là ?

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Kevin Sr.