Auteur/autrice : Éric

  • La para­ly­sie du tout parfait

    Je lis Tris­tan, et par là un billet essen­tiel d’An­thony, que malheu­reu­se­ment j’avais manqué en janvier.

    Savoir, tout savoir, puis déci­der

    Il me faut un savoir quasi-ency­clo­pé­dique sur le domaine pour me sentir à l’aise au moment de faire un choix.

    Oh combien je m’y retrouve. Au risque de renfor­cer le petit côté autiste, je dirai que ce fut encore pire pour moi. Pour un achat je construis des tableaux de dix kilo­mètres en compa­rant tous les produits du marché sur toutes les boutiques, et même un peu plus, et finis – parfois – par me déci­der au bout de longs mois. Je ne sais pas lequel de nous deux avec Anthony est le moins impul­sif, mais je ne dois pas me lais­ser tant distan­cer que ça.

    Les bases du choix

    Mais là c’est encore simple fina­le­ment, parce qu’on peut trou­ver des critères objec­tifs, des recom­man­da­tions, des expé­riences. Et quand le sujet est pure­ment subjec­tif alors ? Fut un temps mes connais­sances rigo­laient (peut être un peu jaune) sur mon inca­pa­cité à faire des choix simples comme « quel parfum souhaites-tu ? ». Parce qu’entre la glace à la fraise et la glace à la vanille il n’y a pas vrai­ment de *rai­son* de prendre l’un ou l’autre, du coup j’étais inca­pable de dire quoi que ce soit, ou même de prendre une alter­na­tive au hasard. Ce n’est pas tant que j’hé­site sur le choix, c’est que le choix n’a souvent pour moi aucun sens si je n’ai pas de critère objec­tif et de « pourquoi » ; je ne le conçois même pas dans mon esprit.

    Heureu­se­ment j’évo­lue. Ça a été un grand travail sur moi-même, et ça l’est encore un peu parfois, avec quelques stra­té­gies d’évi­te­ment (« vanille » la glace, il y en a toujours et ça m’évite de faire un choix arbi­traire qui n’a aucun sens pour moi). Heureu­se­ment en contexte profes­sion­nel ce travail sur moi-même je l’ai fait avec encore plus de force, au point qu’il a été au moins en partie trans­formé en qualité : atten­tion au détail et volonté d’étu­dier les problé­ma­tiques profon­dé­ment.

    Avan­cer, sauter dans l’in­connu

    Mais tout n’est fina­le­ment pas vrai­ment une ques­tion de savoir faire un choix. C’est un besoin de tout savoir, tout comprendre. Un baptême de plon­gée, je soupçonne ma femme d’avoir été surprise de me voir être capable d’uti­li­ser le déten­deur sans faire trop de sima­grées sans pour autant savoir en détail comment ça fonc­tionne. Côté tech­nique infor­ma­tique c’est une malé­dic­tion qui prend un temps mons­trueux.

    Bien entendu ça se travaille, mais en gran­dis­sant on réalise jour après jour l’éten­due de tout ce qu’on ne connait pas, qui gran­dit bien plus vite que l’éten­due de nos propres connais­sances.

    Apprendre c’est se rendre compte de l’im­por­tance de notre igno­rance. Parfois il y a de quoi se sentir un peu perdu.

    Tout ça pour dire

    Si j’ai appris une chose, c’est qu’a­van­cer est le plus diffi­cile. Même quand je suis (très) critique sur des initia­tives, je ne perds pas de vue que la grande force c’est d’avoir essayé, d’avoir avancé dans l’in­connu, et que ça c’est plus impor­tant que tout. C’est une qualité rare, c’est celle que nous tentons chaque jour de mettre en exergue en star­tup.

    Avan­cez, sans mettre la char­rue avant les boeufs, sans oublier qui vous êtes et ce en quoi vous croyez, mais avan­cez, c’est ça l’im­por­tant.

    Et cette gêne qui nous impose de tout savoir et tout contrô­ler, qui nous incite à refu­ser l’im­per­fec­tion, faisons-en une force. C’est la même force qui nous pousse à toujours vouloir mieux, et à nous dépas­ser nous-même. C’est une capa­cité d’in­ves­tir pour comprendre et savoir avan­cer dans la bonne direc­tion au lieu d’avan­cer bête­ment n’im­porte comment. Ne reniez pas ce trait de votre person­na­lité, culti­vez-le, guidez-le : Le tout est d’avan­cer.

    L’étape suivante c’est savoir décon­nec­ter, profi­ter de la vie sans toujours avoir dans un coin l’en­semble de tout ce qu’on estime impar­fait ou incom­plet. C’est là dessus que se situe mon prochain combat.

  • Quand le peuple veut hacker sa consti­tu­tion…

    C’est vrai qu’on n’en­ten­dait plus beau­coup parler de l’Is­lande et de sa nouvelle consti­tu­tion. L’oc­ca­sion de recom­men­cer de zéro est rare. Il y a eu là bas un élec­tro­choc qui aurait pu permettre de casser les résis­tances et de réfor­mer le système. De loin on y a un peu cru.

    […] en réunis­sant une Assem­blée consti­tuante, formée de 25 citoyens « ordi­naires » char­gés de réécrire la Cons­ti­tu­tion islan­daise. Mieux encore, chacun était invité à parti­ci­per à cette réécri­ture colla­bo­ra­tive sur le site web dédié. Cela ressemble fort à un conte de fées démo­cra­tique […]

    C’était sous-esti­mer la résis­tance du corps poli­tique pour éviter sa propre remise en cause. Si nous imagi­nons très bien qu’il puisse y avoir résis­tance, l’his­toire nous donne un ensei­gne­ment majeur :

    Au contraire, le Parle­ment a décidé de bafouer ses propres décla­ra­tions publiques ainsi que la volonté du peuple expri­mée par le réfé­ren­dum natio­nal, en gelant le projet de loi. De plus, pour couron­ner le tout, le Parle­ment a imposé à la hâte la néces­sité pour tout chan­ge­ment consti­tu­tion­nel sous la prochaine légis­la­ture d’être approuvé par les deux tiers du parle­ment et 40% du vote popu­laire. Un taux de parti­ci­pa­tion mini­mal de 80% sera néces­saire pour qu’une réforme consti­tu­tion­nelle soit accep­tée à la prochaine session du parle­ment.

    Le problème n’est pas tant que le projet ait pu être rejeté, c’est qu’il a été simple­ment mis de côté, et que le corps poli­tique au pouvoir a vite mis en place des gardes fous immenses pour empê­cher toute remise en cause si jamais ils devaient être obli­gés d’en venir au vote.

    Il faut dire que la pres­sion popu­laire était forte, et que le besoin de créer autre chose était clai­re­ment incon­tes­table vu le résul­tat du premier réfé­ren­dum :

    le réfé­ren­dum natio­nal du 20 octobre 2012 sur cette loi, au cours duquel 67% de l’élec­to­rat a exprimé son soutien à ce projet de loi ainsi qu’à ses prin­ci­pales dispo­si­tions spéci­fiques, y compris la natio­na­li­sa­tion des ressources natu­relles (83% de Oui), la démo­cra­tie directe (73% de Oui), et « Une personne, un vote » (67% de Oui).

    À ce niveau là il y a un tel mouve­ment que voter des lois pour frei­ner le chan­ge­ment ça ressemble ni plus ni moins à de l’obs­truc­tion.

    Quand nous ne sommes plus capables de remettre en cause notre propre système poli­tique, alors nous ne sommes plus en démo­cra­tie. Il semble que malgré une quasi révo­lu­tion dans les esprits du peuple Islan­dais, ils n’en soient pas capables.

    Parti de cette expé­rience, j’ai bien du mal à imagi­ner que notre système est plus démo­cra­tique que le leur. Il nous faudrait bien plus que leur propre élan pour renver­ser notre propre struc­ture.

    Alors, que fait-on ?

  • Décla­rons notre patri­moine, et voyons l’inu­ti­lité

    La décla­ra­tion de patri­moine de Jean-Noël Guérini est magni­fique. Elle nous offre un très bon exemple de l’ab­sur­dité de tout le système :

    Notre élu gagne 94 250 € par an. Il faut y rajou­ter des probables très fortes indem­ni­tés de repré­sen­ta­tions et autres aides diverses liées à sa fonc­tion.

    En sortie il n’y a pas de mutuelle (le Sénat y pour­voit), peu de frais de trans­port (train gratuit, avion peu cher), pas de frais de loge­ment (le premier a été hérité, le second est déjà remboursé – proba­ble­ment depuis facile une quin­zaine d’an­nées vu la date d’achat. Bref, il y a la vie courante et tout ce qu’on a envie de se payer pour son plai­sir, et éven­tuel­le­ment des écono­mies.

    Donc avec quasi­ment aucune sortie impor­tante, et des entrées de l’ordre de 100 000 euros au moins… On compte moins de 30 000 € de posses­sions, 20 000 € de parti­ci­pa­tion à une société qu’il a proba­ble­ment créée (vu que non cotée) et … moins 4 000 € de liqui­di­tés. C’est tout, pas d’as­su­rance vue, d’épargne, d’ac­tions en bourse, rien.

    Quel inté­rêt d’avoir de telles décla­ra­tions de reve­nus ? Vous imagi­nez qu’a­vec de tels reve­nus on enre­gistre si peu de posses­sions et des liqui­di­tés + épargne qui ne repré­sentent qu’un demi revenu mensuel hors indem­ni­tés ?

    Autant dire qu’au mieux tout fuit immé­dia­te­ment dans les posses­sions fami­liales grâce à des accords, et que tout ceci n’a aucun sens. Au mieux.

    Donc au mieux on vient de prou­ver par l’exemple la complète absur­dité de ces décla­ra­tions si elles ne sont pas éten­dues au moins à la famille. Sauf que la famille n’a rien demandé et on voit mal au nom de quoi on leur impo­se­rait des contraintes. 

    Quand bien même nous étudie­rions ce scéna­rio le moins repro­chable, il serait on ne peut plus inté­res­sant de se poser la ques­tion du « pourquoi, actuel­le­ment, orga­ni­ser la fuite de la tota­lité des capi­taux vers d’autres personnes ? ». Donc plus que savoir si untel est riche ou pas, ce dont je me moque tota­le­ment, on voit bien qu’il y a de quoi réflé­chir et de quoi inquié­ter nos poli­tiques.

  • Joie des cabi­nets de recru­te­ment

    Copie quasi verba­tim de ce que je viens d’en­voyer aujourd’­hui :

    Bonjour,

    J’avais eu des contacts perti­nents par le passé avec [chargé de recru­te­ment 1] et [chargé de recru­te­ment 2] entre 2008 et 2010.

    Depuis debut 2011 que vous êtes en charge, vous ne me trans­met­tez que des offres qui ne cadrent aucu­ne­ment avec mon type de poste et qui sont géné­ra­le­ment au moins 30% en dessous du salaire que j’avais en 2008 quand je discu­tais avec [cabi­net de recru­te­ment] (étant entendu que depuis 2008 mes expé­riences et mes préten­tions ont bien évidem­ment évolué).

    Le consta­tant, je vous en ai fait la remarque dès mai 2011. N’ayant vu aucune amélio­ra­tion, je vous ai demandé expli­ci­te­ment de me reti­rer de vos listes en novembre 2011. Toujours sans effet, je vous l’ai encore signalé en février de cette année.

    Ne voyant aucune amélio­ra­tion dans la quali­fi­ca­tion ni prise d’ef­fet de mes demandes, je suis au regret de devoir faire deux requêtes plus formelles :

    1. Merci de me commu­niquer le numéro d’en­re­gis­tre­ment CNIL de la base de profil dans laquelle je suis enre­gis­tré. Ceci est une requête légale au titre de la loi loi n°78–17 rela­tive à l’in­for­ma­tique, aux fichiers et aux liber­tés du 6 janvier 1978.
    2. Ensuite, au choix :
    • Soit faire en sorte en interne que mon dossier ne soit plus géré par [chargé de recru­te­ment 3], ni qu’au­cune solli­ci­ta­tion ne me soit envoyée de sa part.
    • Soit de reti­rer toute donnée nomi­na­tive me concer­nant de vos registres (et pas unique­ment de me désins­crire de vos solli­ci­ta­tions), puis de me confir­mer cette suppres­sion.

    Je suis désolé d’en arri­ver là mais je ne vois de toutes façons pas comment établir la rela­tion de confiance néces­saire à un recru­te­ment dans le contexte qui m’est présenté actuel­le­ment, ni pour moi ni – et encore moins – pour vous recom­man­der à mes rela­tions en recherche d’em­ploi.

    En vous remer­ciant d’avance pour la prise en compte,

    Le pire étant que je ne suis plus en recherche depuis 2007 mais ça…

    Sérieu­se­ment, c’est à me dissua­der de faire appel à des recru­teurs pour mes recherches en tant qu’em­ployeur, et encore plus à faire suivre leurs offres à des gens biens.

    C’est quoi vos expé­riences avec des cabi­nets de recru­te­ment ? Vous en avez à conseiller des biens, pas trop chers, qui comprennent le web, qui savent quali­fier des profils de bon niveau et pas taper au hasard ?

  • Paie­ment avec Mozilla

    Je ne sais quoi penser. Mozilla a sorti sa solu­tion de paie­ment. C’est une étape essen­tielle dans l’objec­tif de propo­ser une plate­forme appli­ca­tive complète concur­rente à l’App store d’Apple et au Google Play d’An­droid.

    Main­te­nant, on va me dire que je suis trop critique sur un projet nais­sant mais..

    Prix par palier

    Le prix par palier est une fausse bonne idée. C’est une galère à gérer si on veut vendre sur plusieurs plate­formes ou si on vend aussi hors ligne. Comment est-ce que je synchro­nise les prix ou justi­fie les diffé­rences ?

    Google et Apple le font, parce qu’ils veulent que tout passe par eux et se plie à leur struc­ture. Est-ce vrai­ment le modèle de Mozilla ?

    Comment fais-je pour revoir mon busi­ness plan tous les six mois ? Tous les six mois Mozilla va chan­ger les prix en euros pour tenir compte des conver­sions face au dollar (alors que mes coûts sont en euros et ne changent pas). Au final c’est ma marge qui va faire yoyo hors de mon contrôle, et ça c’est sacré­ment risqué.

    Pire, pour moi qui vend du livre numé­rique avec des prix fixés, je ne peux simple­ment pas léga­le­ment me confor­mer à cette grille. J’ai pour­tant dans les cartons une appli­ca­tion mobile full web qui cadre pour­tant parfai­te­ment avec la philo­so­phie du Market Place Mozilla : dommage.

    Plus éton­nant, pourquoi n’ai-je pas de palier au delà de 10€ ? Il y a bien des logi­ciels qui valent plus de ce montant. Ce n’est même pas rare dans l’App Store ou dans Google Play. Côté Chrome Web Store on a un palier 17 à 37€ et un maxi­mum de tran­sac­tion à 1000€. Il serait dommage que le Market Place Mozilla se limite aux petits jeux à 2$.

    Commis­sion de 30%

    Je ne peux pas non plus donner 30% en commis­sion. Désolé, même avec toute la bonne volonté du monde. Comme beau­coup de commerçants, 30% c’est parfois plus que la marge brute de mes ventes. Si je donne ça, je suis défi­ci­taire avant même d’im­pu­ter mes coûts.

    Oui, Google et Apple le font. Ils profitent de l’en­fer­me­ment de leurs utili­sa­teurs : Si vous voulez vendre il faut accep­ter de passer par là et de lais­ser 30%. Est-ce que vrai­ment Mozilla cherche aussi à moné­ti­ser l’en­fer­me­ment ?

    Mais quitte à compa­rer il faut parler du Chrome Web Store, qui est bien plus proche de l’ap­proche du Market Place Mozilla. Donc le Chrome Web Store prend 5%. Pas 30%, 5%. Forcé­ment, l’uti­li­sa­teur n’est ici pas dans un jardin fermé donc il est plus diffi­cile de justi­fier de telles commis­sions.

    D’ailleurs, quitte à en parler, Google Wallet est capé à 5% mais peut même prendre moins que ça si on dépasse les 9 € sur une tran­sac­tion. Il y a une API pour du in-app, et au final les mêmes possi­bi­li­tés de paie­ment puisque pour l’ins­tant Mozilla n’est bran­ché qu’à Google Wallet. Diffi­cile de justi­fier les 25 points supplé­men­taires de commis­sion.

    Alors ?

    Alors une API passe-plat qui fait la liai­son avec diffé­rents four­nis­seurs de solu­tions de paie­ment ça a de la valeur. Se simpli­fier la vie aussi.

    Disons qu’il faudrait au mini­mum faire sauter la contrainte du palier maxi­mum. Là je peux être prêt à payer un ou deux points de pour­cen­tage sur le prix de vente. Le pres­ta­taire pourra certai­ne­ment en gagner au moins deux autres avec ses pres­ta­taires de paie­ment vu le volume de tran­sac­tions en jeu et l’ab­sence d’in­te­rac­tion avec les vendeurs.

    Par contre pour 25 points de plus que Google Wallet, ça me parait diffi­cile à justi­fier. C’est encore plus plus diffi­cile à imagi­ner aujourd’­hui où ça ne fait que Google Wallet avec des contraintes en plus et moins de fonc­tion­na­li­tés.

  • Rendu de l’avis de la Hadopi concer­nant VLC

    J’avais rédigé un billet il y a quelques temps pour envoyer une contri­bu­tion à propos d’une consul­ta­tion de la Hadopi concer­nant VLC. Le billet n’a pas forcé­ment été mis à jour avec la toute dernière version qui a effec­ti­ve­ment été envoyée, mais le contenu est assez proche.

    La Hadopi a désor­mais rendu son avis. J’y vois mon argu­men­ta­tion presque copiée.

    Dans les faits ça ne change pas grand chose pour VLC, sauf si VideoLan réus­sit à trou­ver le finan­ce­ment néces­saire pour une licence auprès du consor­tium Blu-Ray.

    Par contre ça ouvre beau­coup de portes pour plus tard forcer les DRM et autres jardins fermés, par exemple ceux d’Apple ou d’Ama­zon. D’une manière ou d’une autre, c’est une porte ouverte qui peut avoir de grandes consé­quences à l’ave­nir : Il était temps que cette loi serve à quelque chose.

    On y voit aussi que offi­ciel­le­ment les clefs de déchif­fre­ments ne font pas partie du « logi­ciel ». Ça confirme que ces éléments ne sont pas couverts par le droit d’au­teur. Je ne suis pas certain que ça ouvre vrai­ment des portes, mais on ne pourra plus en empê­cher l’uti­li­sa­tion sous ce motif.

    Pas de quoi sortir le carton à Cham­pagne, mais ça reste une étape inté­res­sante de fran­chie.

  • Lisez en numé­rique qu’ils disaient…

    Mis à jour, expli­ca­tion en bas du billet

    Vous lisez une série sur papier, vous venez de finir le tome 4 et vous cher­cher le tome 5. Tout le monde vous parle de numé­rique et vous déci­dez de tester tout ça.

    Vous avez aussi bien véri­fié que le livre était « sans DRM » comme on vous a dit de le faire. Toutes les boutiques ne le précisent pas, vous avez du cher­cher un peu mais c’est bien tombé : celui là est sans DRM.

    Vous ache­tez votre ebook à 15 €. Bon, 14,99 en réalité mais on ne va pas chipo­ter. Vous avez pris l’EPUB et pas le PDF. Tout ça c’est du chinois mais comme c’est ce qu’on vous conseille partout, vous suivi ce qu’on vous disait. Vous ne compre­nez toute­fois pas bien pourquoi on tente de vous vendre l’autre s’il ne faut pas l’ache­ter mais vous faites comme si de rien n’était.

    Là les ennuis commencent. Le livre vous donne une méchante impres­sion de déjà vu. Véri­fi­ca­tion faite, c’est marqué « tome 5 » mais c’est en fait la première moitié du tome 3 que vous avez déjà lu. Vous fouillez et confir­mez votre méchante impres­sion : L’édi­teur publie chaque livre papier édition poche en deux livres numé­riques, en renu­mé­ro­tant toute la série. Malheu­reu­se­ment bien que les titres indiquent en gros « tome X », la numé­ro­ta­tion des poches et des numé­riques est diffé­rente. Il faut deux livres numé­riques pour faire un poche. Les tomes 1 et 2 numé­riques corres­pondent au tome 1 édition poche et les tomes 3 et 4 numé­riques au tome 2 édition poche. Le tome 5 numé­rique est donc la première partie du tome 3 édition poche. Rien ne le signa­lait expli­ci­te­ment, il fallait faire très atten­tion aux sous-titres pour s’en rendre compte. Ce n’est clai­re­ment pas votre faute : Les bonnes librai­ries avaient même chaîné le tome 5 édition poche avec le tome 5 numé­rique comme s’ils étaient équi­va­lents.

    Vous avez un peu l’im­pres­sion de vous être fait avoir, surtout à 2×15 € le couple d’ebook alors que le papier n’est pas à 30 €. Un doute vous prend d’ailleurs : Vous n’aviez pas payé si cher que ça les tomes précé­dents, 10 € tout au plus. Seconde méchante impres­sion. Vous véri­fiez et avec la réduc­tion de 5% appliquée presque partout, le tome 5 papier édition poche vaut seule­ment 8 € pour l’équi­valent de deux tomes numé­riques. Bon, 7,98 € mais on ne va pas chipo­ter.

    Oui, vous venez d’ache­ter un ebook qui vaut entre 3 et 4 fois plus cher que sa version papier, et qui de plus est tota­le­ment renu­mé­roté par rapport à votre lecture précé­dente.

    Sérieu­se­ment, comment le lecteur peut-il s’en sortir ?

    Oui c’est un cas réel, même si romancé. Non, pas de nom (et je ne parlais pas de Game of Throne même s’il semble d’après les réac­tions que le problème soit simi­laire), parce que ça n’ap­porte rien, que mon objec­tif n’est pas de poin­ter du doigt X ou Y, et que je veux bien croire que les concer­nés soient de bonne foi avec juste d’une mauvaise orga­ni­sa­tion. Heureu­se­ment ces cas relèvent de l’ex­cep­tion, mais la pilule doit parfois être diffi­cile à avaler.


    Mis à jour et expli­ca­tion : Le billet a été légè­re­ment modi­fié après publi­ca­tion pour tenir compte des raisons du problème. Nous avons ici trois facteurs qui se cumulent :

    Premier facteur : Tout d’abord, il arrive qu’un livre broché grand format soit publié en plusieurs tomes lorsqu’il passe en édition poche. Plus rare à ma connais­sance, il peut aussi arri­ver l’in­verse : Plusieurs tomes grand format sont réédi­tés en un seul livre poche. C’est ce qu’il s’est passé ici.

    En papier cela ne pose pas de problème majeur vu que l’édi­tion poche est éditée long­temps après l’édi­tion brochée grand format. Souvent cette dernière n’existe plus et les deux ne circulent pas en paral­lèle. Dans notre cas le premier tome de l’édi­tion poche est paru trois ans après la fin de commer­cia­li­sa­tion de l’édi­tion brochée grand format du même tome. Pris isolé­ment c’est maladroit mais tout va bien.

    Deuxième facteur : Au lieu d’in­diquer « tome 1 et 2 » sur le poche, la série a été entiè­re­ment renu­mé­ro­tée. La numé­ro­ta­tion des uns et des est indiquée assez visi­ble­ment sur la couver­ture, ce qui peut induire faci­le­ment le lecteur en erreur s’il cherche à suivre la série d’une édition à l’autre.

    Malheu­reu­se­ment ici, c’est l’édi­tion grand format qui sert de support à l’édi­tion numé­rique. Elle hérite donc de la même numé­ro­ta­tion, concur­rente à celle de l’édi­tion poche. Là aussi, pris isolé­ment c’est compré­hen­sible, mais au final les deux se retrouvent bien en vente au même moment, avec le risque que le lecteur glisse du papier au numé­rique avec une très mauvaise surprise après achat.

    Troi­sième facteur : L’édi­tion numé­rique est basée sur l’édi­tion brochée grand format. Si elle est bien déco­tée par rapport au prix origi­nal, c’est par rapport au prix de cette édition grand format que le calcul a été fait : 15 € au lieu de 19 €.

    Entre temps les poches sont sortis, avec un prix entre 8 et 10 € suivant les tomes, et le prix du numé­rique n’a pas été impacté. Chaque poche regroupe deux tomes de l’édi­tion grand format, ce qui veut dire qu’un tome édition poche à 8 € contient le même texte que deux livres numé­riques à 15 €. C’est tout de même un facteur de 3,75 entre les deux prix, en faveur du papier. Incom­pré­hen­sible pour le lecteur.

    Les prix numé­riques plus chers que l’édi­tion poche corres­pon­dante c’était assez fréquent par le passé. Désor­mais on en trouve de moins en moins. On est juste tombé sur un éditeur qui n’a pas encore fait sa tran­si­tion sur ce point là.

    Comme je le suppo­sais, plus qu’une mauvaise volonté c’est proba­ble­ment simple­ment le cumul d’une maladresse et d’un manque de coor­di­na­tion ou/et d’or­ga­ni­sa­tion commer­ciale entre la divi­sion numé­rique et la divi­sion papier.

    Le problème c’est que non seule­ment tout ça reste incom­pré­hen­sible pour le lecteur mais surtout que ce n’est pas son problème. Lui se retrouve à payer 15 € la moitié d’un titre qu’il a déjà lu alors que la version papier de ce qu’il cher­chait coute moins de 10 €. S’il revient au numé­rique plus tard c’est qu’il est sacré­ment motivé, et ce sera avec un autre libraire/distri­bu­teur. On est en train de se tirer une balle dans le pied avec ce type d’his­toires.

  • Strea­ming dans la musique

    J’aillais réagir sur un billet concer­nant le strea­ming dans le livre, mais fina­le­ment c’est toute la mise en contexte que je rejette. Je me méfie beau­coup des chiffres sur la musique. Regar­dons un peu plus près :

    Un achat pour 400 écoutes

    0,04 centimes par achat numé­rique et 0,0001 par écoute, ça veut dire qu’un achat rapporte autant que 400 écoutes.

    Il serait inté­res­sant de savoir combien de fois on écoute habi­tuel­le­ment nos titres ache­tés. Si c’est du même ordre de gran­deur, alors on peu igno­rer super­be­ment tous ceux qui critiquent la rému­né­ra­tion du strea­ming.

    Il faut aussi prendre en compte que le strea­ming ne remplace pas forcé­ment un achat, parti­cu­liè­re­ment les écoutes gratuites. Il se fait aussi pour des titres qu’on n’au­rait pas acheté, ou dans des situa­tions où on n’au­rait pas sorti le bala­deur.

    Dans ces cas la compa­rai­son est faus­sée car la rému­né­ra­tion du strea­ming s’ajoute à celle de l’achat, et là même une petite rému­né­ra­tion doit être vue comme un succès.

    Comp­ter en rému­né­ra­tion par écoute au lieu de comp­ter en rému­né­ra­tion globale c’est tenter de faire coller un modèle de rareté, très adapté à la vente physique, au monde numé­rique qui lui est adapté à un modèle d’abon­dance : 0,0001 euro sur un million d’écoutes ou 0,01 euro sur 10 000 écoutes ça revient bien au même. L’im­por­tant n’est pas le prix par écoute ou le nombre d’écoutes, mais combien ça rapporte au final.

    Un modèle qui rapporte

    Et si on s’at­tache au cumulé, sur les 9 premiers mois 2012 le strea­ming c’est un montant équi­valent à 75% de l’achat numé­rique.

    Les deux sont en progres­sion donc l’un ne remplace pas l’autre. Le strea­ming c’est 30% de progres­sion. Autant dire que c’est très bon.

    Un marché porteur, nouveau, qui en partie s’ajoute aux précé­dents, avec une progres­sion de 30%, dans un marché global en baisse, si on fris­sonne je peux imagi­ner que c’est de plai­sir.

    On lit d’ailleurs un peu plus bas que le strea­ming pèse 57% des reve­nus musi­caux. Pour un modèle déclaré comme ne rappor­tant rien… ça fait peur.

    Parlons de Johny et de répar­ti­tion

    Mais il y a un point très inté­res­sant dans l’his­toire, c’est le chiffre annoncé de 0,01 centime par écoute pour Johny Halli­day.

    Il faut dire que pour le même inter­prète on parle de 4 centimes pour un achat. Ses titres iTunes sont entre 99 c. et 1,29 euros. Ça veut dire qu’il a un droit d’au­teur entre 4 et 5% du hors taxes. Fran­che­ment c’est très peu, et je n’y crois guère. Pas pour Johny. C’est parti­cu­liè­re­ment vrai pour lui qui dure depuis long­temps et qui a des ventes assu­rées. Il est même un cas parti­cu­lier en ce qu’il est connu pour vendre très très bien son vieux cata­logue. Il est donc probable qu’il arrive à négo­cier mieux.

    Si les chiffres sont vrais, il y a problème et ce n’est pas lié au strea­ming ou au numé­rique mais aux contrats faits par les majors. Le problème est là.

    C’est parti­cu­liè­re­ment vrai quand on regarde le 0,01 centime par écoute. Le même billet montre qu’il y a proba­ble­ment un chiffre d’af­faire de 4277 $ pour 800 000 écoutes, soit 0,41 centimes d’eu­ros. L’his­toire ne dit pas si c’est du hors taxes ou pas, mais même dans le meilleur des cas ça veut dire que que Johny touche 3% du hors taxe sur les écoutes en strea­ming, donc encore moins que pour un achat.

    Je ne sais pas vous, mais là aussi, moi je n’irai pas taper sur le strea­ming. Il y a des inter­mé­diaires qui doivent bien en profi­ter.

    On le confirme encore dans le même billet quand le respon­sable Spedi­dam se plaint que les musi­ciens et choristes ne touchent rien du tout. Si le strea­ming rapporte peu en global c’est une vraie ques­tion (mais on a vu que ce n’était pas le cas). Si par contre quelqu’un ne gagne *rien*, alors le problème est plus au niveau de la répar­ti­tion des droits que sur les reve­nus géné­rés.

    Tout ça est encore illus­tré par le fait que les socié­tés de strea­ming ne seraient toujours pas rentables. Pour des socié­tés qui génèrent 36% des reve­nus de l’in­dus­trie et sachant que les artistes gagnent très peu en droits, il y a des gens qui se gavent au milieu. Je vous laisse devi­ner qui.

    Plus que le strea­ming, ce sont les inter­mé­diaires qui sont en ques­tion dans tous ces chiffres (et ce n’est pas neuf)

    Musique, livres

    Je me suis concen­tré ici sur l’exemple de la musique, pour montrer que non, le strea­ming en soi n’a pas à être peint en noir.

    Main­te­nant pour moi les usages de musique et de litté­ra­ture sont trop diffé­rents pour les asso­cier. Les modèles écono­miques du strea­ming des deux acti­vi­tés n’ont pour moi rien de commun. On en parlera dans un autre billet.

  • 42 pour une seule école ? ça fait 41 de trop

    Bon, une nouvelle école. Quelques réac­tions :

    J’ap­pré­cie l’ou­ver­ture sans trop faire atten­tion à l’âge. Les forma­tions privées sont trop souvent atta­chées au cursus avec l’obli­ga­tion d’en­chaî­ner sans s’ar­rê­ter sous peine de devoir passer dans les forma­tions conti­nues spéci­fiques pour.

    J’ap­pré­cie aussi l’hon­nê­teté de faire une vraie sélec­tion, sur l’été pour lais­ser les élèves avoir une porte de sortie avec la fac. Le fait de croire dans une forma­tion de déve­lop­peur et pas que dans des chefs de projets / ingé­nieurs, ça me fait aussi plai­sir : Il faut recré­di­bi­li­ser ces postes si on veut avoir des gens compé­tents.

    Tech­ni­cien expert, C++

    On y forme des tech­ni­ciens, dans la pure lignée Epita / Epitech. Que ce soit un ancien Epitech qui reprenne la chose n’est pas anodin. Ce n’est ni un plus ni un moins, juste diffé­rent de beau­coup de forma­tions actuelles. Je conti­nue à voir une vraie diffé­rence entre ceux qui sont formés avec une orien­ta­tion « ingé­nieur » et ceux qui sont formés avec une orien­ta­tion « tech­ni­cien expert ».

    Une école de plus avec de réels tech­ni­ciens infor­ma­tiques très poin­tus, ok, pourquoi pas, voyons plus loin.

    On ne cède pas à la mode. Tout s’ap­prend par C++ dès la première année. C’est la langue obli­gée qui sert de base pour le reste si je lis bien le programme. Je dirais que ça ne fait pas de mal, que les déve­lop­peurs bas niveau sont trop peu nombreux, mais je ques­tionne la perti­nence de voir le modèle objet par le prisme de C++.

    Peu de web

    Par la suite il y a de nombreuses sections pour C# et les tech­no­lo­gies Micro­soft, quelques sections Java, mais pour le reste on repas­sera : 3 crédits pour apprendre toutes les tech­no­lo­gies web (Javas­cript, PHP, HTML, XML, etc.) et 3 autres pour apprendre en même temps les frame­works web et le e-commerce (Rails, Zend, Ruby, le e-commerce, les cms, les IHM web, et même l’er­go­no­mie web), ça fait fran­che­ment chiche, même pour un simple survol Si j’étais méchant je dirai qu’on comprend mieux le pourquoi des inter­faces de Free.

    Peut être est-ce parce que c’est mon domaine et que j’y attache de l’im­por­tance, mais le web me semble l’objet tech­no­lo­gique majeur de ces dernières années. Bref, pour moi c’est étrange d’y consa­crer si peu. Je ne vois pas les gens apprendre Javas­cript, PHP, HTML5, Zend Frame­work, Ruby et Rails comme ça d’un coup.

    Quelques points datés

    Je conti­nue à tiquer sur GANTT, UML, Merise, ITIL. Je peux le comprendre dans certaines forma­tions. J’ai plus de mal dans une nouvelle forma­tion de zéro, et surtout dans celle là qui est très orien­tée pratique / tech­nique / déve­lop­pe­ment.

    À l’in­verse, pour une forma­tion axée sur le projet et la mise en pratique, parler de méthodes agiles en dernière année ça me semble un peu du gâchis.

    Point global sur le programme

    Bon, mais fina­le­ment tout ce qui précède reste assez cohé­rent. On forme des tech­ni­ciens experts, plutôt bas niveau, dont le haut du panier saura proba­ble­ment inter­ve­nir partout avec aisance et compé­tence.

    Tout juste le programme laisse-t-il appa­raître beau­coup de noms de tech­no­lo­gies et j’au­rais aimé y voir plus d’al­go­rith­mie ou de théo­rie, mais il est tout à fait possible que ce soit abordé à l’oc­ca­sion des projets.

    Je ne vais pas dire que c’est ce que j’au­rais choisi en créant une forma­tion, mais ça ne me semble pas méri­ter toutes les critiques que j’ai vues.

    Enro­bage marke­ting

    Non, moi ce qui me fait prendre de la distance c’est l’en­ro­bage. Ça pue le mauvais marke­ting au point que ça en est néga­tif. J’ai l’im­pres­sion de retrou­ver l’EPITA en 97 : tutoie­ment, on met en avant la créa­tion de virus, une épreuve de sélec­tion « ultime et redou­table » (qui élimine 2/3 à 3/4 des candi­dats, donc bien moins que la plupart des concours ou proces­sus de sélec­tion, dans l’édu­ca­tif ou non), le but est plus d’en mettre plein les yeux que d’ap­pa­raître sérieux.

    On retrouve aussi cet enro­bage dans le super marke­ting « pas de diplôme, l’im­por­tant ce sont les compé­tences ». Sauf que le diplôme en France c’est essen­tiel­le­ment un certi­fi­cat indiquant que tu as suivi une certaine forma­tion. Au lieu d’in­diquer « diplôme de master à xxxx » les élèves indique­ront « suivi forma­tion complète à xxx ». S’ils ne le font pas c’est mauvais signe pour la répu­ta­tion de la forma­tion en ques­tion.

    Pas de diplôme

    Au final ça ne chan­gera donc rien. Ou plutôt si, ça rendra impos­sible certains emplois publics ou diffi­cile certaines embauches à l’étran­ger, ça sera irréa­liste d’en­chaî­ner sur d’autres études supé­rieures comme la recherche ou un MBA en gestion/commerce pour la double compé­tence, et ça empê­chera les échanges par équi­va­lence de diplôme/compé­tence en Europe.

    Je note d’ailleurs que le parcours du DG[*] avec un MBA à HEC ne peut proba­ble­ment pas être fait dans cette nouvelle école (sauf à reprendre de zéro la prépa HEC) juste­ment à cause du manque de diplôme. Faites ce que je dis, pas ce que je fais. Tout ça pour quoi, un effet de manche marke­ting ?

    En fait là aussi ça me fait beau­coup penser à l’EPITA qui à l’époque se défen­dait de trou­ver un inté­rêt à avoir un diplôme reconnu par la CTI mais qui tentait régu­liè­re­ment de la demande (et se fera reje­ter jusqu’en 2007).

    Je me dis que l’ab­sence de diplôme en sortie est proba­ble­ment dû à l’ab­sence de pré-requis du bac en entrée (ça empêche proba­ble­ment de faire recon­naître le niveau ensuite par l’État) mais ça aurait été plus honnête de l’ex­pri­mer ainsi.

    [*] D’ailleurs, c’est moi ou il y a un couac ? Dans son profil Linke­din le DG en ques­tion est ingé­nieur EPITA depuis 92 alors que cette dernière ne délivre de diplôme reconnu que depuis 2007. Même chose pour la préci­sion du master EPITECH 2005 alors que l’école n’est habi­li­tée que depuis 2007. Pire, parce que là il indique une forma­tion entre 1999 et 2005 alors qu’il a fondé l’école et en était le DG à ce moment là (ça me parait un peu incom­pa­tible avec l’idée d’en sortir diplômé pour moi). On voit qu’ef­fec­ti­ve­ment tout n’est pas clair côté diplômes, et ça n’ins­pire pas confiance (Je me souviens un peu trop de l’am­bi­guité entre­te­nue concer­nant le titre ingé­nieur à l’EPITA avant qu’ils n’ob­tiennent l’ha­bi­li­ta­tion).

    Forma­tion

    Je retrouve encore EPITA dans l’idée qu’ils forment des archi­tectes tech­niques, des chefs de projets et des experts. J’ai bien parlé de tech­ni­cien expert plus haut, mais c’est plus pour faire la diffé­rence avec nombre de forma­tions de tech­ni­ciens basiques. Il reste que faire miroi­ter qu’être archi­tecte ou expert en sortie d’école c’est trom­per les élèves. À mon époque certains EPITA croyaient valoir deux fois le salaire d’em­bauche moyen telle­ment on leur montait la tête à ce niveau (je parle d’EPITA mais ce n’étaient pas les seuls).

    Et là où je bip c’est quand je vois parler d’école peer-to-peer. Outre le mot clef marke­ting pour les élèves en manque, ça me rappelle ce que j’ai vu dans d’autres orga­nismes de forma­tion où ce sont les élèves qui donnent les cours aux autres élèves. Ça peut fonc­tion­ner, mais ça a aussi de graves manques. C’est aussi juste infai­sable au départ.

    Si on ajoute que monter une promo de 1000 élèves en une seule année est quasi­ment infai­sable en arri­vant à une bonne qualité de forma­tion, j’ai tendance à croire que les cinq premières promo passe­ront à la trappe et qu’on s’en moque.

    Epita / Epitech / 42

    Au final voilà juste une EPITA / EPITECH de plus, fondée par la même personne, avec la même orien­ta­tion de tech­ni­cien expert, la même philo­so­phie vis à vis des diplôme (affir­mer que c’est inutile jusqu’à enfin réus­sir à avoir l’ha­bi­li­ta­tion), le même danger sur la forma­tion en partie assu­rée par les élèves. Faire des écoles en série ne m’ins­pire pas tant confiance que ça. La forma­tion n’est cepen­dant pas aussi critiquable que ne le laissent entendre quelques geeks.

    Côté résul­tat, comme les EPITA / EPITECH, il peut en sortir du mauvais comme du bon. Et comme dans les deux autres, il en sortira proba­ble­ment quelques-uns de très bons, comme une masse qui n’est pas excep­tion­nelle pour autant. Bref, comme partout : La valeur des gens dépend plus des gens que de la forma­tion.

    Vus le système, la promo immense et le côté marke­ting un peu forcé, je conseille tout de même au moins de ne pas faire partie des premières promos qui risquent de payer les pots cassés.

  • ReLire à relire

    On ne peut pas à la fois critiquer la loi sur le droit d’au­teur dans le fait qu’elle est inadap­tée au monde numé­rique, et en même temps tirer à boulets rouges sur la première initia­tive visant à essayer de trou­ver des solu­tions […] Le dispo­si­tif proposé présente au moins l’avan­tage d’of­frir une seconde vie à des ouvrages qui n’en auraient jamais eu.

    Manue, Figo­blog

    Le cas des indis­po­nibles du XXème siècle est un vrai problème. Sans rien toucher à l’équi­libre du droit d’au­teur et en se basant unique­ment sur de l’opt-in, il est peu probable qu’on puisse arri­ver à un résul­tat signi­fi­ca­tif. L’al­ter­na­tive idéale aurait été une réforme profonde du droit d’au­teur mais, consi­dé­rant la proba­bi­lité quasi-nulle d’y arri­ver, je ne peux pas tota­le­ment nier la perti­nence d’un compro­mis excep­tion­nel et forcé­ment bancal.

    D’un autre côté, peut-on accep­ter une initia­tive par le seul fait qu’elle cherche à faire un compro­mis ? Le projet ReLIRE est à mon avis person­nel trop déséqui­li­bré en faveur des éditeurs. L’au­teur y est à peine consi­déré.

    Il aurait pour­tant été aisé de modé­rer un peu toute cette histoire. Quelques propo­si­tions très simples :

    1. Préve­nir acti­ve­ment l’au­teur

    Il est juste incom­pré­hen­sible que l’édi­teur soit prévenu par recom­mandé mais que rien n’oblige ou même n’in­cite à tenter de préve­nir l’au­teur ou ses ayants droits. Pour­tant il s’agit norma­le­ment de lui rever­ser des droits lors de l’ex­ploi­ta­tion, c’est bien qu’on pense arri­ver à le joindre. C’est à se deman­der si le tenir à l’écart n’est pas volon­taire pour éviter qu’il n’ex­prime un choix conscient.

    Il appa­raît indis­pen­sable de faire porter sur l’édi­teur d’ori­gine une obli­ga­tion de mettre en œuvre les démarches raison­nables pour contac­ter l’au­teur ou ses ayants droits : par recom­mandé, lui signa­ler l’ins­crip­tion à la base ReLIRE, les impli­ca­tions, ainsi que la possi­bi­lité et les moyens de s’op­po­ser à l’ex­ploi­ta­tion numé­rique.

    • L’au­teur est injoi­gnable : L’œuvre est une œuvre orphe­line, avec les spéci­fi­ci­tés prévues en ce cas (ça méri­te­rait un billet complet, consi­dé­rons entre temps que nous ne chan­geons rien à ce que le projet prévoir ici)
    • L’au­teur ne répond pas : L’œuvre peut suivre le parcours des indis­po­nibles envi­sagé jusque là.
    • L’au­teur réfuse la gestion collec­tive : L’œuvre sort du système prévu pour les indis­po­nibles. Elle pourra, si l’au­teur le souhaite, être exploi­tée suivant des condi­tions contrac­tuelles stan­dard accep­tées par lui.

    Certains éditeurs n’existent plus, nombre d’au­teurs n’ont plus de coor­don­nées à jour ou ne répon­dront pas, mais le coût de gestion est assez faible pour que cette étape soit jugée indis­pen­sable. Cette étape sera de toutes façons néces­saire le jour où on cher­chera à leur verser leurs droits d’au­teur, donc il s’agit juste de l’an­ti­ci­per.

    2. Faci­li­ter l’op­po­si­tion de l’au­teur

    La réelle porte pour expri­mer son choix se fait ensuite. Passer d’un opt-in à un opt-out est déjà un compro­mis gigan­tesque avec le droit d’au­teur tel qu’on le conçoit actuel­le­ment. Puisque les échecs à la première étape prévue plus haut seront nombreux, il faut donner des possi­bi­li­tés réelles d’ac­cé­der à cet opt-out.

    Actuel­le­ment il existe une fenêtre de 6 mois. Si l’au­teur n’est pas informé au début de cette période, on voit mal comment quelques mois seraient suffi­sant pour prendre conscience de son inscrip­tion et y réagir.

    Le mini­mum m’ap­pa­rait que l’au­teur puisse se posi­tion­ner par avance, et sans attendre qu’un tiers déclenche sans l’aver­tir l’ins­crip­tion dans la base ReLIRE. Une simple noti­fi­ca­tion suffit et doit avoir pour effet d’em­pê­cher l’ins­crip­tion par la suite dans la base, ou d’y asso­cier auto­ma­tique­ment un refus.

    Le second point est de pouvoir expri­mer un refus à tout moment, même après le début d’ex­ploi­ta­tion. Ce refus peut inté­grer un préavis pour permettre à l’édi­teur de ne pas avoir inves­tit à perte : On peut imagi­ner un ou deux ans, mais pas les durées actuelles qui peuvent aller jusqu’à dix ans.

    Dans tous les cas, l’au­teur ou ses ayants droits doivent pouvoir s’op­po­ser à tout moment à des trans­po­si­tions numé­riques de mauvaise qualité, non inté­grales, non fidèles, ou plus large­ment non homo­thé­tiques. Si tout se fait sans l’au­to­ri­sa­tion de l’au­teur, il serait diffi­cile d’ac­cep­ter des travaux d’en­ri­chis­se­ment ou d’ex­ten­sion de l’œuvre.

    3. Pas de renver­se­ment de la charge de preuve

    Telle quelle, la loi demande à l’au­teur qui s’op­pose de prou­ver qu’il n’a pas cédé les droits numé­riques à l’édi­teur ou à des tiers. Comme toute preuve néga­tive, c’est malheu­reu­se­ment quasi­ment impos­sible à faire.

    C’est de plus tota­le­ment aber­rant vis à vis de la réalité du droit d’au­teur et de ces œuvres. On parle en effet d’œuvres non exploi­tés, donc quasi­ment toutes épui­sées dont l’au­teur peut récu­pé­rer ses droits sur simple demande, et publiées à des dates où il est extrê­me­ment peu probable une cession de droits numé­riques.

    Sur toutes ces noti­fi­ca­tions, l’au­teur ne doit avoir à faire qu’une simple noti­fi­ca­tion sur l’hon­neur. Charge à celui qui réclame avoir obtenu des droits de prou­ver l’op­posé, et dans ce sens ce sera bien plus facile à faire.

    4. Reti­rer la prio­rité de l’édi­teur papier

    Une prio­rité et un droit d’ex­clu­si­vité ont été donné à l’édi­teur papier d’ori­gine, proba­ble­ment pour récom­pen­ser le travail de décou­verte ou promo­tion fait sur la version physique. C’est toute­fois non seule­ment illé­gi­time mais dange­reux.

    C’est illé­gi­time parce que les inves­tis­se­ments et péréqua­tions ont été faites à l’époque sur une renta­bi­lité avec la version papier seule­ment. Les gains futurs liés au numé­rique ne sont qu’un bonus qui n’ap­porte aucune valeur ajou­tée ni à l’œuvre ni à l’au­teur. C’est aussi illé­gi­time car si l’édi­teur croit en l’œuvre, alors elle serait toujours exploi­tée et donc non concer­née par la base ReLIRE.

    C’est surtout dange­reux : L’édi­teur papier a inté­rêt à inscrire l’œuvre sur la base ReLIRE dans le dos de l’au­teur plutôt que le contac­ter et travailler avec lui. Pire, c’est à se deman­der s’il n’est pas possible pour l’édi­teur d’in­ter­rompre tempo­rai­re­ment l’ex­ploi­ta­tion papier le temps de faire l’ins­crip­tion dans la base et gagner l’ex­clu­si­vité numé­rique.

    Si le compro­mis de l’opt-out est un pas énorme dans le droit d’au­teur, ici c’est une réelle trans­for­ma­tion du droit d’au­teur en droit de l’édi­teur.

    Il n’y a pas lieu de donner une exclu­si­vité ou une surprime à l’édi­teur qui a choi­sit d’ar­rê­ter l’ex­ploi­ta­tion et qui a échoué dans la négo­cia­tion avec l’au­teur, ou proba­ble­ment qui l’a évitée. C’est encore plus vrai si la numé­ri­sa­tion est faite sur fonds publics, comme ça se dessine aujourd’­hui.

    On pour­rait même penser que l’édi­teur papier d’ori­gine devrait être spéci­fique­ment écarté juste­ment à cause de ce qui précède. Je n’irai pas jusque là, mais au moins on peut ne lui donner aucun droit parti­cu­lier par rapport aux autres.