Je suis toujours surpris par les entreprises qui adaptent les salaires à la zone géographique pour des postes où la zone géographique n’a pas d’importance.
Dans la plupart des entreprises on paye suivant une de ces deux formules :
La valeur de remplacement, c’est à dire le niveau à partir duquel l’employeur a intérêt à recruter (et éventuellement former quelqu’un d’autre), et est en mesure de le faire ;
La valeur ajoutée, c’est à dire un pro-rata de ce que son travail génère comme valeur ou comme revenu.
Et là, si on n’a pas particulièrement besoin que le salarié soit dans la ville la plus chère, pourquoi donnerait-on une majoration ?
Si on utilise la valeur de remplacement, par définition l’employeur aurait intérêt à recruter et former un nouveau salarié plutôt que de payer le coût de la vie de la ville la plus chère.
Si on utilise la valeur ajoutée, l’employeur se créerait une dette s’il payait plus que la valeur ajoutée du salarié.
J’ai l’impression que ces différences de salaire en fonction du coût de la vie sont principalement des restes des anciennes politiques où on t’attache à un établissement précis, parce que tu entres sur un poste d’une équipe et que cette équipe est là. Dans cette logique changer de ville c’est changer d’équipe, de rôle, de missions.
Cette façon de voir n’a plus de sens pour moi avec des équipes distribuées, et encore moins maintenant que le télétravail prend plus de place. Savoir où vit chacun, dans quel bureau il travaille ou même s’il travaille réellement dans un établissement de l’entreprise ou pas, n’a plus vraiment d’importance. C’est un choix privé, et pas de raison qu’on paye plus ou moins un collègue en fonction de ses choix privés.
Pour être franc je vois bien le sens de payer un salaire dépendant du coût de la vie, avec une vision très socialiste du chacun en fonction de ses besoins mais c’est du militantisme. Ça prend en compte bien plus que la simple zone géographique et ça veut surtout dire lâcher la détermination du salaire par les deux points vus plus haut.
This framework allows software engineering managers to have meaningful conversations with their direct reports around the expectations of each position and how to plan for the next level in their career ladder.
http://www.engineeringladders.com/
Je regrette de ne pas avoir trouvé ça il y a quelques mois. J’ai défini mes grilles de carrière sous forme de tableaux fixes et je trouve ce système bien plus adapté pour différencier les progressions.
CTO’z ce sont des entretiens de CTO. L’interviewé a du temps pour s’exprimer, sans être coupé, avec un fil qui dure entre 1h et 1h30. J’avais participé cet été.
Il y a un sentiment de sérénité indescriptible à chaque fois que je refuse des contrats sur mon activité de freelance.
Je suis peu sollicité et je dis encore plus rarement oui. J’aimerais bien développer plus cette activité mais dire « je ne suis pas la bonne personne », que ce soit au niveau tarifs, compatibilité de caractère ou valeur ajoutée, me donne l’impression de faire les choses bien.
Ça me donne finalement bien plus de boost à l’égo que quand on me contacte pour quelque chose qui correspond parce que ça confirme mes valeurs et mon positionnement.
Passer un projet qu’on a en tête. Voir que la personne le transforme un peu et le conçoit autrement. Partir pour lui expliquer ce que je veux vraiment, lui dicter ce qu’il y a à faire. Se retenir, lâcher prise.
Déléguer c’est lâcher prise, accepter que les gens abordent le même objectif différemment, voire adaptent les objectifs à leur vision.
Ne pas décider soi c’est la différence entre « déléguer » et « faire exécuter ». Ça tombe sous le sens mais c’est aussi facile de l’oublier quand on a la tête dans le guidon.
J’ai écrit plusieurs fois ce billet avant de finir sur cette unique formule :
La question n’est pas de savoir si vous êtes manager, lead, expert ou mouton à cinq pattes, la question c’est quel impact vous avez.
Il n’y a pas besoin d’être manager ou lead pour progresser dans sa carrière. Il est tout à fait imaginable d’avoir un déroulé de carrière aussi rapide et aussi poussé via de l’expertise technique.
Vos connaissances et compétences expertes n’ont toutefois de valeur que si elles ont un impact pour l’entreprise. L’enjeu c’est d’avoir cet impact et le simple fait d’être expert technique n’en dit pas grand chose.
⁂
Viser l’impact c’est d’abord comprendre l’effet de levier : Passé un certain cap le collectif prime très largement sur l’individu. Il est juste plus facile de faire progresser de 1 % une équipe de 30 personnes que de progresser soi-même de 30 %.
Si vos connaissances et compétences n’améliorent que votre travail individuel, votre progression de carrière sera certainement moins rapide que le lead ou le manager qui eux bénéficient d’une démultiplication.
Je pense que l’incompréhension vient de là : Un expert seul n’a pas grand impact. Il arrive même que son impact soit négatif si sa présence a tendance à diminuer l’autonomie ou l’initiative des autres (pire encore si elle génère des guerres internes).
Sauf à avoir une connaissance pointue qui se trouve difficilement ailleurs et qui est essentielle au développement de l’entreprise, la progression de carrière de l’expert technique passe aussi par l’encadrement des plus jeunes, la communication non-violente, la collaboration, la prise d’initiatives, la prise de responsabilités, et beaucoup de savoir-être qui permettent de faire rayonner cette expertise.
Ce n’est pas tant qu’on ne peut pas progresser en tant qu’expert, c’est que ça demande autre chose que simplement être le sachant dans sa grotte.
L’importance de ces à-côtés va de plus grossir avec le temps. La plupart des entreprises n’ont besoin d’expertise que jusqu’à un certain point. Au-delà, les connaissances ou compétences ultra-pointues n’apporteront qu’une valeur ajoutée réduite.
Si vous tenez absolument à une progression de carrière continue, il faudra soit développer d’autres atouts, probablement du leadership et des prises de responsabilités (pas forcément du management), soit viser les quelques boites qui ont absolument besoin d’une R&D à la pointe (sachant que vous ne serez pas le seul à postuler et que les autres auront peut-être développé ces compétences de rayonnement, donc seront donc plus intéressants que vous).
Le meilleur conseil qu’on m’ait donné pour la facturation d’une activité de service :
Facture 2x plus cher, quitte à échouer à signer la moitié de tes prospects
Je crois que c’était à OCTO mais ça s’est toujours révélé juste. Le corollaire que j’applique : Si la très grande majorité des prospects signent, c’est que tu n’es pas assez cher.
Être deux fois plus cher avec deux fois moins de clients c’est avoir le même chiffre d’affaire mais deux fois plus de temps pour du perso, pour de la r&d, pour faire le petit plus sur les clients que tu as, pour amortir une période difficile, et pour aller chercher d’autres clients qui eux aussi paieront ce nouveau tarif.
Mais Éric, personne n’achète cette gamme de matériel en réalité !
En fait si. J’ai fait un petit sondage pour confirmer et suivant les items il y a quand même 10 à 20% de gens qui répondent être financés sur le haut de gamme. C’est absolument non représentatif mais ça suffit à dire que ça arrive.
Maintenant, même pour ceux qui ont ce haut de gamme, ce n’est pas forcément sur toute la liste pour autant.
L’enjeu n’est pas tant de dire « c’est ça qu’il vous faut », même si ça pourrait être légitime, mais de pousser le curseur à fond pour montrer que même à ce niveau de gamme et en cumulant toute la liste, on arrive à une somme tout à fait raisonnable et acceptable (voire peu significative).
Ok, c’est dit, maintenant on fait quoi si on veut être plus modéré ?
C’est là que je suis embêté parce que savoir sur quoi vous voulez appuyer est très personnel.
Les deux vrais coûts de ma grille personnelle sont le fauteuil de bureau et l’écran. Le reste est accessoire. Le problème c’est que c’est aussi ceux sur lesquels j’ai envie de faire le moins de concessions.
Votre dos est le seul matériel qui ne se remplace pas
Un vrai fauteuil ergonomique coûte cher mais on parle de votre santé. Même financièrement, si sur les 10 ans de la durée de vie garantie du siège vous avez cinq jours d’arrêt cumulés pour mauvaise position (mal de dos, migraines ou douleurs cervicales, tensions au poignet), vous venez de repayer votre siège. Oups.
Les quatre références que j’ai en tête sont toutes au-delà de 1000 €. On peut trouver moins cher en descendant en gamme mais je n’ai pas de référence à vous proposer. La solution réellement recommandée est souvent de partir sur de l’occasion. On divise la facture par 2 ou 3 sans forcément changer la qualité.
À défaut, cherchez un fauteuil de bureau réglable mais évitez les baquets gaming qui semblent confortables, ils vous tuent souvent le dos à petit feu sans que vous vous en rendiez compte parce qu’ils confondent confort et bonne position ergonomique.
Investir dans l’écran est vite rentable, même financièrement
J’ai pris un écran très cher. Juste en dessous il y a le Samsung 49G9 à 1150 € HT, qui correspond à 2x 27″ côte à côté. Pour faire baisser la facture vous pouvez aussi prendre effectivement 2x 27″ qhd séparés, ou même un seul 32″ 4k. Bref, on peut descendre entre 300 et 500 € HT sans être trop mauvais.
Pour autant, si vous avez un enfant en primaire, observez-le faire ses devoirs. Le gros du temps il le passe à alterner le regard entre son cahier et le livre, et reprendre la position dans la page à chaque fois.
Vous c’est pareil chaque fois que vous basculez entre des fenêtres qui ne sont pas visibles en même temps, ou que vous défilez verticalement sur une même fenêtre parce que tout ne s’affiche pas. On parle de millisecondes mais en permanence. Cumulé, en ajoutant les quelques cas où vous manipulerez effectivement des tableurs ou des schemas extralongs, ça finit assez facilement par justifier les 10 à 30 € de surcoût mensuel, c’est à dire un dixième de journée par mois.
Au final tu es en train de justifier le haut de gamme et dire que c’est quand même ça qu’il faut acheter ?
Un peu. Bon, pas sur tout.
Le bureau j’ai pris un assis-debout électrique. On peut se passer de ce luxe. Je tiens juste à la hauteur réglable, toujours pour des questions ergonomiques et de dos. Un bureau réglable à manivelle on peut descendre à 250 €
Le micro j’ai pris du très haut de gamme. On me dit que Tonor a une version sur bras articulé qui donnera quasiment aussi bien pour un quart du prix.
On peut en dire autant sur la webcam liée à l’écran externe. N’économisez pas trop, il est important qu’elle sache bien gérer la faible luminosité, mais on n’a pas besoin de 1080p pour la visio. On doit pouvoir trouver moitié moins cher.
Je tiens cependant sur le reste. Peut-être n’avez-vous pas besoin d’un casque audio à réduction de bruit active, mais si c’est le cas alors il y a une telle différence d’efficacité que le prix que j’ai donné se justifie. Peut-être recevez-vous déjà très bien le WiFi de votre box dans votre bureau, mais sinon il est indispensable d’améliorer ça.
Ok, ça mène à combien tout ça ?
Et bien ça dépend, justement. Ça dépend de là où vous me faites confiance sur le « c’est justifié » et de là où vous avez déjà ce qu’il vous faut.
Mettons qu’on ne touche pas à la chaise, qu’on passe à la gamme en dessous en écran, en bureau, micro, webcam, qu’on garde casque et réseau CPL et qu’on prend un éclairage moins cher, on vient de retirer 30 % à mon prix précédent et on tombe à environ 60 € HT mensuels sur 5 ans pour quelqu’un qui a besoin de toute la liste.
Mettons qu’on prenne un bon fauteuil Ikea simple, un écran unique, un casque correct mais sans anti-bruit, on peut tomber à ⅓ du prix et on tombe à environ 30 € HT mensuels sur 5 ans pour quelqu’un qui a besoin de toute la liste.
Si on se concentre sur le fait qu’une partie non négligeable des dev seront déjà très équipés et n’auront pas envie d’avoir tout en double, on va tomber sur des prix moyens quasiment insignifiants.
C’est même le message principal : J’ai fait une somme sur toute la liste pour l’exercice mais c’est peu représentatif. En réalité il est probable que le coût moyen soit inférieur de moitié, et donc qu’il permette de continuer à envisager des choses de qualité sans avoir à affecter un budget monstrueux.
Bonus : Ce sera probablement rentable pour l’entreprise. Le vrai message est celui qui suit.
Quelques milliers d’euros amortis sur 5 ans ça n’est rien au regard d’une petite amélioration d’efficacité ou de moral d’ingénieurs qui coûtent plus de 5 000 € par mois à l’entreprise.
On avance dans beaucoup de boîtes sur le télétravail mais peu vont jusqu’au bout de la logique. On donne un ordinateur portable, parfois un écran, et vogue la galère. En réalité j’ai besoin de bien plus et non je n’ai pas forcément déjà le matériel de qualité disponible pour ça.
J’ai besoin d’un bureau à ma taille, d’un fauteuil de qualité pour rester huit heures par jour, d’être bien vu et bien entendu pour les visio, d’un wifi qui aille jusqu’à mon bureau, d’un clavier et d’une souris externes de qualité, ainsi que d’un casque pour bien entendre – à réduction de bruit active si possible parce que je ne suis pas toujours seul dans l’appartement, et que je ne maitrise ni les travaux des voisins ni ceux dans la rue.
Parfois j’ai des choses de la liste, parfois non, parfois pas d’une qualité suffisante, parfois j’ai simplement envie d’en avoir la pleine jouissance sans me dire que je suis contraint par l’usage professionnel, et je n’ai en tout cas aucune envie de prendre à mon compte le remplacement ou la réparation de matériels qui servent en réalité principalement pour mon activité salariée.
Bref, il est du rôle de l’entreprise de fournir un poste de travail de qualité pour le télétravail, de la même façon qu’elle le fait déjà pour ses propres locaux. Ça ne devrait pas être optionnel. Ça l’est d’autant moins quand l’extension du télétravail permet à l’entreprise de payer moins de postes de travail dans ses locaux.
Alors quoi ? J’ai fait l’exercice en cherchant du très haut de gamme (voir ce second billet à ce sujet). Ça parait exagéré mais vous risquez d’être surpris dans la suite.
€ TTC
€ HT
Bureau assis-debout électrique Flexispot EC5 ou E6 (suivant la hauteur) + Plateau Ikea Linnmon 150×75
450
375
Fauteuil ergonomique – Herman Miller Embody – RH New Logic 220 – Kinnarps 9000 – BMA Axia
1 500
1 250
Webcam haute qualité Logitech StreamCam
160
135
Micro HD + Bras articulé Blue Yeticaster
230
190
Casque anti-bruit bluetooth et filaire Bose 700
320
270
Écran secondaire très large haute déf. avec hub pour réduction du câblage Dell U4021QW (40″ 21/9e)
1 800
1 500
Clavier et trackpad ou souris bluetooth
275
230
Lampe de bureau
150
125
Couple de boitiers CPL avec WIFI Devolo Magic 2 WiFi
200
170
TOTAL
5 100 € TTC
4 240 € HT
On peut faire tomber 25 % avec un environnement moins haut de gamme, ou retirer 60 % pour un environnement plus basique.
La réalité c’est que si tout le monde n’aura pas besoin de toute la liste (ou même envie que toute la liste), on ne parle pas de quelques centaines d’euros donnés pour accompagner le petit matériel.
Et pourtant, pour ce super haut de gamme qui va impacter confort et productivité, même en affectant l’intégralité du matériel même à ceux qui n’en ont pas besoin, en le renouvelant à la fréquence ridiculement courte de 3 ans, on arrive à… 120 € hors taxes par mois.
Sur un amortissement plus réaliste de 5 ans on tombe à 90 € hors taxes mensuels. À ce tarif c’est jouable même pour un indépendant.
Managers, entreprises, directions des ressources humaines, il est temps de vous réveiller et faire un pas raisonnable. Économiser 100 € mensuels en ne fournissant pas le matériel pertinent à des salariés payés plus de 5 000 € cotisations sociales incluses. Les 100 à 300 € annuels pour du petit matériel qui sont souvent alloués à ce titre ne sont pas au niveau. C’est ridicule et méprisant.
Même en ajoutant une quote-part du chauffage, des charges et de la valeur locative de l’espace utilisé (oui c’est légitime), on arrive à moins de 250 € par mois.
Un poste de travail dans les locaux de l’entreprise, espace et services inclus, c’est beaucoup plus proche de 500 à 1 000 €. Autant vous dire qu’en réalité on ne parle pas de frais, on parle d’économies.
Même pour le télétravail partiel, pour peu que les présences moins importantes permettent de retirer quelques postes ou qu’on vous demande de rembourser moins d’abonnement de transport, on s’y retrouve.
Note : J’adorerais monter un service clef en main pour les entreprises qui gère l’équipement des postes de télétravail. On n’est alors pas forcément sur ces tarifs mais c’est dans tous les cas largement raisonnable pour une entreprise qui investit vraiment sur l’environnement de travail de ses salariés.
Si ça vous intéresse d’en parler (soit pour entreprendre soit pour y souscrire), faites moi signe. Si jamais il y a assez d’intéressés pour amorcer l’idée d’un service de qualité, ça mérite attention.