Un des conseils si vous voulez tenter l’aventure du télétravail : Investissez !
Entreprises
Oui, il faut un ordinateur portable efficace. Oui ça veut dire investir plus que pour un PC fixe au bureau. Ça veut même dire investir encore plus parce que lancer Zoom ça prend en soi des ressources non négligeables.
Je ne dis pas tout. L’ordinateur portable c’est non seulement l’outil de travail du salarié mais aussi la seule représentation de l’entreprise qu’il aura en face de lui. Exit les locaux et les autres employés, il aura cet ordinateur portable et tout passera à travers.
L’ordinateur rame ? C’est comme si vous laissiez des souris ou des fuites au plafond dans vos locaux. Chaque frustration liée à cet outil ce sera un coup de canif dans l’image de l’entreprise, sa volonté de s’y impliquer ou d’y rester, et son envie de faire des efforts en restant positif.
Trois paragraphes et ce n’est pas assez : Investissez dans ce foutu ordinateur portable. Mettez-y deux fois le prix que vous y auriez mis, renouvelez-le aussi plus souvent.
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Et pourtant, ce n’est pas tout. Achetez un écran secondaire, grande taille et de qualité, même s’il n’y en avait pas au bureau.
Achetez aussi une vraie chaise ergonomique réglable. Pas celle à 100 €, une vraie. Là aussi, plus chère que dans vos locaux parce que le salarié aura potentiellement moins de raison de bouger de sa chaise pendant les heures de travail.
Ajoutez-y un bon casque et/ou un vrai micro qui permettent de communiquer sans bruit parasite. S’il y a un peu de bruit dans la rue ou chez les voisins, investissez carrément dans un casque à réduction de bruit active, les modèles efficaces à 300 euros et plus.
Si vous avez des salariés qui doivent réfléchir ensemble, proposez-leur aussi un tableau blanc et une caméra grand angle pour partager ce tableau blanc.
Si on veut aller jusqu’au bout on peut même proposer un bureau assis-debout électrique.
Oh ! et si une part importante de l’activité se passe au téléphone ou si des tiers ont besoin de les appeler, payez-leur un téléphone et un numéro différent de leur personnel. Oui c’est important.
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Oh, et je n’ai pas dit ? Financez la moitié de l’accès Internet, ainsi que la taxe foncière, du loyer, de la taxe d’habitation et des factures électricité et chauffage au pro-rata de la place rapport à la place utilisée dans le logement.
Déjà parce que c’est légitime, mais aussi parce que ça peut inciter certains à dédier au bureau un espace dans le logement, voire emménager là où ils auront un tel espace.
Croyez-moi, l’investissement vaut le coup (et ce type de financement n’est pas soumis aux cotisations sociales).
Salariés
Je ne devrais pas le dire parce que ça peut inciter des entreprises à ne pas investir mais… Si l’entreprise ne vous paye pas tout ce qui est plus haut et que vous avez le salaire qui vous le permet : Faites-le !
Faites-le sur vos deniers ou changez d’entreprise pour une qui porte attention aux conditions de travail des salariés ;-)
J’insiste particulièrement sur la connexion internet : Oubliez le wifi pourri. Si votre wifi est trop mauvais, utilisez une connexion câble, éventuellement un boitier CPL si vous avez besoin.
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Au delà, réservez-vous un espace pour le bureau. Un lieu avec de la lumière naturelle, une lumière électrique blanche et non jaune, un minimum d’espace, et si possible une porte qui ferme s’il y a d’autres personnes dans la maison.
Ça peut être la cuisine, peu importe, mais évitez la chambre ou le salon. Différenciez là où c’est possible la pièce de repos et la pièce de travail.
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Oh ! et n’espérez pas gardez vos enfants pendant le télétravail. Niet, jamais, ou pas autrement qu’en mode urgence pour la journée le temps de trouver une solution. En fait un bon critère pourrait être « ne gardez pas vos enfants pendant le télétravail si vous ne les auriez pas emmené au travail ».
Mais, Éric, ça coûte un pognon de dingue !
Vous n’accueilleriez pas vos salariés dans un coin non aménagé avec une juste table de cantine quelques tabourets et aucune séparation phonique avec vos salles de réunion. Pourquoi le faire avec des salariés en télétravail ?
Côté entreprise en comptant 3 ans de renouvellement pour l’ordinateur et le petit électronique, 6 ans pour le reste, en prenant tout en très haut de gamme et premium, j’arrive à un amortissement… entre 800 et 1600 € hors taxe par an.
Oui, on en est là. Moins de 1 500 € par an. Autant dire rien.
Sur un salarié en présence, rien que le remboursement de la moitié de ses abonnements transport et le versement transport additionnel auprès de la collectivité doivent arriver à peu près à ce niveau. Ne parlons même pas du coût de l’espace de vos bureau, des consommables, du mobilier, de l’entretien, des services généraux, de l’électricité, de la sécurité, des assurances. Vous pourriez payer 2x ça et faire encore des économies.
À ces niveaux là vous pourriez même dire à vos salariés de prendre ce qu’ils veulent sans vraie limite et leur laisser comme un avantage en nature dans le solde de tout compte à leur départ.
Je n’aime pas la polarisation autour du télétravail.
C’est facile de se moquer et de traiter d’idiots tous ceux qui ne lâchent pas toutes les vannes. La réalité est, comme toujours, bien plus complexe.
Il y a des sociétés qui ne veulent pas de télétravail autrement que ponctuel, et c’est tout à fait respectable.
Parfois c’est juste un choix. Certains préfèrent sortir le soir avec les collègues, faire des jeux de société, ou être sur place ensemble. Ça ne dit pas que le télétravail est mal, juste tout le monde ne souhaite pas vivre ainsi.
Vouloir compléter une équipe hors du télétravail n’est pas plus illégitime que compléter une équipe en télétravail.
Parfois les entreprises ne savent simplement pas encore tout, et en ont conscience. Passer du présentiel au télétravail c’est quand même une sacré révolution.
Elles peuvent préférer y aller par étapes, se confronter aux problèmes au fur et à mesure avec un impact limité.
Il y a la stratégie de commencer par du télétravail partiel et celle de limiter le télétravail total à certains salariés plus autonomes, voire qui ont déjà une première expérience dans une entreprise précédente.
J’ai parfois dit à des candidats « ici le télétravail on connait déjà, ce n’est pas improvisé », parce qu’ils prennent bien moins de risques ainsi. Ça ne m’étonne pas que des entreprises aient la même politique dans l’autre sens, et préfèrent commencer avec des salariés qui savent déjà.
Vous pouvez penser que c’est de la défiance, j’y vois de la sagesse. Celles qui me font peur sont plutôt celles qui se lancent sans savoir, sans réfléchir, sans comprendre. Ce sont ces dernières qu’il faut éviter de rejoindre.
Il ne suffit pas de dire « ok, à partir de demain on fait du télétravail ». Ce serait aussi simpliste que dangereux.
Du point de vue de l’entreprise on parle de risques psychosociaux. Comment évite-t-on que quelqu’un ressente de l’isolement ? Comment évite-t-on qu’il se mette de lui-même la pression ? Comment l’aide-t-on à gérer la séparation pro-perso quand il travaille de chez lui ? Comment détecter les prémisses d’un burn-out ?
Comment communiquer dans cette nouvelle organisation ? Avec quel outil ? quelles pratiques ? Quelle gestion des notifications ? Comment sait-on à quel moment on peut interagir avec une personne et à quel moment on risque d’empiéter sur sa vie perso quand on ne peut plus se baser sur la présence au bureau ?
Comment former les managers à une nouvelle approche et de nouveaux réflexes ? Comment gère-t-on la relation avec son manager en visio et par écrit ? Comment faciliter l’intégration des nouveaux ? L’organisation est-elle identique pour les salariés autonomes et ceux qui font de l’exécution ? La culture informatique est-elle suffisante dans tous les départements ? Comment les départements basés sur l’émulation locale vont-il changer de culture ? Comment évite-t-on de tout faire exploser si certains groupes n’avancent pas vers le télétravail à la même vitesse et génèrent des jalousies ou des frustrations ?
Comment assurer une installation correcte au salarié ? Faut-il financer écran, fauteuil et bureau ? si oui comment ? avec quelle politique d’utilisation personnelle vu que le salarié ne voudra pas forcément tout dupliquer chez lui ? quelle politique si c’est une utilisation personnelle qui casse quelque chose ? Faut-il imposer un débit de connexion minimum ? une pièce séparée des enfants le mercredi après-midi ? Faut-il financer des espaces de coworking ?
Comment gère-t-on les rencontres une fois de temps en temps dans l’année ? Avec quel budget pour les déplacements ? Faut-il pour cela imposer un temps de trajet maximum pour faciliter ces déplacements ?
Administrativement, se limite-t-on à la France ? Sinon quelles sont les règles et les impacts ? Un français peut-il télétravailler ponctuellement depuis ailleurs que chez lui ? depuis l’étranger ? qu’en dit l’assurance ?
Que fait-on si un salarié vit finalement mal le télétravail ? Faut-il un bureau local pour ceux-là ? Que faire avec ceux qui ne s’adaptent pas au télétravail des autres ? Comment évite-t-on de faire des groupes étanches entre ceux en télétravail et ceux en local ? Comment est-ce qu’on qualifie l’adaptation au télétravail d’un nouveau collaborateur lors de sa période d’essai ?
Et du point de vue du salarié, comment gérer les livraisons de colis qui interrompent une réunion importante ? Comment gérer l’enfant qui pleure ou qui sollicite sur les horaires de travail ? Faut-il d’ailleurs imposer quelques heures de présence communes ou être plus souple ? Que fait-on si la connexion saute ? Sait-il régler son débit pour éviter que l’adolescent à côté ne prenne toute la bande passante ?
Honnêtement il y a des réponses à tout ça. Il ne s’agit pas de dire que ce sont des problèmes bloquants ou que le télétravail est fondamentalement plus problématique que la présence.
Ce sont par contre des enjeux qui ne s’ignorent pas, ou qui ne devraient pas s’ignorer dans la transition.
Malheureusement ça ne s’invente pas forcément. Une partie des réponses dépend de choix très subjectifs et on ne peut ni ne doit se contenter de suivre un livre ou un consultant.
Bref, critiquer les entreprises qui ne font pas leur révolution en un claquement de doigts c’est espérer que ces entreprises jouent aux apprentis sorciers.
S’il y a des entreprises à éviter ce ne sont pas celles qui y vont avec prudence mais réelle ouverture, ce sont celles qui y vont sans réfléchir, avec un big bang naïf.
Ça peut très bien se passer et tomber en marche sans trop y penser, surtout dans une petite structure, mais ça peut aussi merder gravement avec des conséquences irréparables autant pour l’entreprise que pour les salariés. Les entreprises recommandables chercheront à anticiper un peu.
Je ne comprends pas pourquoi on continue à économiser des bouts de chandelles dans les équipes techniques.
« La version gratuite suffit bien », « As-tu vraiment besoin de l’option 16 Go de RAM ? », « On ne peut pas se permettre de payer ça pour tout le monde, ça ferait une grosse somme »
Ok, mais quel est le coût réel ? À chaque fois j’ai privilégié les versions haut de gamme, les offres « entreprise » avec SSO, et j’ai choisi des périodes de renouvellement au plus court. Bref, je suis très au-dessus de la réalité.
Type
Annuel HT
Gestion projet
300 €
Asana, Atlassian, etc.
Code source
250 €
Github, Gitlab, etc.
Email et agenda
125 €
Google suite, Office 365, etc.
IDE
130 €
Jetbrains, etc.
Autres logiciels
100 €
divers softs (coût annuel)
Visio
230 €
Zoom, …
Laptop
750 €
2700 € TTC amorti sur 3 ans
Garantie étendue
80 €
300 € TTC amorti sur 3 ans
Accessoires
80 €
400 € TTC amorti sur 4 ans
Ecran(s)
200 €
1000 € TTC amorti sur 4 ans
Casque anti-bruit
90 €
450 € TTC amorti sur 4 ans
Chaise ergonomique
170 €
1000 € TTC amorti sur 5 ans
Bref, j’ai de l’ordre de 2 500 € HT annuels en étant très au-dessus de la réalité.
Un ingénieur en développement à 45 000 € brut coûte entre environ 65 et 70 000 euros annuels tout compris à l’entreprise. Ces frais très haut de gamme représentent quelque chose comme 3,7 % du coût total.
Ok, ce n’est pas rien, pas négligeable, mais pas mortel non plus si on met en rapport le temps épargné, le confort et le bien être associé.
Oui, on peut faire sans (heureusement), mais pas certain que ce soit plus rentable. Rien qu’en temps, ça représente 1/4 h par jour travaillé. Ce n’est pas rien, mais la fatigue, la frustration et les différents contournements nécessaire à se passer de ces frais, ça peut vite représenter ça annuellement aussi : 5 minutes de perdues à relancer zoom, 10 fois 30 secondes de perdues à attendre des build ou des suites de tests qui tournent un peu plus lentement, 100 fois 5 secondes de perdues à basculer entre les tâches et les applications fautes d’avoir un écran supplémentaire, 2 fois 5 minutes de pause parce qu’on n’est pas si bien assis, 10 minutes de perte de concentration parce qu’une conversation à côté nous a perturbé, etc.
Toutes ces petites économies coûtent un pognon de dingue.
Et si on devenait un peu plus rationnels ? Payer chaque mois des milliers d’euros des ingénieurs pour ensuite refuser de leur donner les 200 € mensuels qui leur permettent de travailler efficacement, c’est un peu crétin, non ?
Pendant que vous y êtes : Investissez aussi dans des espaces cloisonnés plutôt que de grands open space, et ajoutez-y des petites salles de réunion en assez grand nombre pour passer un coup de fil ou discuter à deux de façon impromptue. Ça coûte très cher, mais l’investissement se rembourse facilement plusieurs fois.
J’entends trop souvent des développeurs se plaindre d’être forcés de passer dans le management pour progresser en salaire.
Déjà ça ne reflète pas la réalité. On est dans un métier où le salaire peut doubler avec l’ancienneté. Je doute que ce soit vrai pour tant de métiers que ça dans le privé, pas sans changer totalement de rôle voire de métier.
L’enjeu est cependant que, effectivement, la productivité individuelle n’est pas proportionnelle avec l’ancienneté. On progresse souvent bien plus les premières années que les suivantes.
À périmètre identique, on voit plus facilement la différence entre deux développeurs avec 2 et 5 ans d’expérience qu’entre deux développeurs avec 10 et 13 ans d’expérience.
Rien d’anormal, donc, que la progression salariale le reflète.
Ce n’est pas « la France qui est en retard sur ces questions », c’est juste l’application du système de marché. Le salaire dépend de ce que vous apportez, pas de votre ancienneté.
L’avantage c’est qu’avec l’expérience, normalement, vous pouvez apporter plus que votre code. Le périmètre n’a aucune raison d’être identique avec les années.
Vous pouvez former les plus jeunes et les faire progresser. Vous pouvez communiquer avec le business, avec la communication, avec le légal, faire l’interface, comprendre les enjeux de chacun et proposer des solutions. Vous pouvez parler coût, maintenance et stratégie. Vous pouvez identifier les problèmes et les solutions, améliorer l’organisation de l’équipe. Etc.
L’idée c’est de lever la tête de son code et commencer à embrasser un périmètre plus large. Vous avez de la chance : Contrairement à beaucoup d’autres domaines, vous pouvez faire ça sans changer de métier (et sans forcément devenir manager).
Pour ma part j’utilise ces termes :
Senior : Il va guider, organiser, former, servir de mentor ou de sage. Ce n’est pas forcément le plus expert, ni même celui qui a le plus d’ancienneté, mais c’est lui qui va faire progresser tout le monde ou s’assurer qu’on ne parte pas n’importe où. Il est souvent manager mais pas forcément, par contre il y a toujours un aspect de mentor et donc donc pas très loin de l’encadrement.
Expert : C’est lui le plus pointu mais pas forcément le plus expérimenté. Parfois il est même relativement jeune par rapport aux autres. Il n’y a pas forcément besoin d’expert dans toutes les équipes donc ce n’est pas forcément un débouché facile.
Lead : Souvent avec du bagage technique significatif mais pas forcément un expert. Souvent assez expérimenté mais pas forcément le senior non plus. Souvent avec une dose d’encadrement mais pas forcément non plus. J’attends de lui qu’il dirige l’équipe, l’organise, donne l’impulsion, comprenne et appréhende les enjeux, y compris les équilibres business, planning, maintenance, etc. C’est souvent lui qui s’engage et prend les responsabilités, et qui sait parler avec tout le monde et a tendance a être suivi par tout le monde.
Les étiquettes sont forcément limitatives. Ce ne sont pas les seules façons de voir les choses mais ça permet de mettre des nom sur des rôles et des attentes.
Un développeur avec beaucoup d’ancienneté est juste un développeur avec beaucoup d’ancienneté. S’il n’agit pas comme tel, son ancienneté ne le transforme pas de fait en senior, en expert ou en lead.
Se contenter de ne se préoccuper que de son code personnel tout en ayant 5 ou 10 ans d’expérience est tout à fait respectable, mais si on ne progresse que peu le salaire en fera autant.
Ce qui précède est démultiplié par un effet de levier.
Si vous impactez plusieurs personnes, vous pouvez générer une valeur supérieure à ce que vous pourriez obtenir isolément. Améliorez les conditions de travail d’une équipe, les dix personnes concernées n’augmenteront peut-être leur productivité que 5 % chacun, mais cumulé c’est aussi pertinent qu’augmenter votre efficacité personnelle de 50 %… et bien plus facile.
Quand l’amélioration de productivité individuelle baisse, agir sur le collectif a un meilleur retour sur investissement. Dans mes rôles plus haut, c’est ce que font le senior et le lead.
L’expert, non seulement plus rare, est aussi un rôle plus difficile parce que son effet de levier est beaucoup plus complexe à obtenir (et à quantifier). Or, quand les développeurs parlent d’une progression de carrière « sans management », ils ont tendance à imaginer un expert.
Je pense que le mythe du « il faut faire manager » vient en partie de là. Un développeur avec beaucoup d’expérience qui ne perçoit pas son rôle collectif a besoin de faire une sacré différence de production individuelle par rapport aux plus jeunes pour justifier son salaire. Au bout d’un moment ça n’est plus viable et le salaire stagne. Le problème n’est pas de faire du management ou pas, mais de lever un peu la tête pour voir ce qu’on peut apporter, où et comment.
Post-scriptum : On vous intronisera parfois explicitement comme lead alors que vous ne l’étiez pas auparavant, plus rarement comme expert. Ça n’arrivera quasiment jamais comme senior. De mon expérience dire à quelqu’un « désormais tu es senior » n’a jamais fonctionné. C’est quand on l’est et qu’on agit comme tel qu’on peut ensuite s’y faire reconnaître.
J’en avais fait un après trois mois. En voici un autre au bout de deux ans et quelques.
Le fond n’a pas beaucoup changé alors je vous incite à d’abord lire le billet précédent. On y gagne en temps de trajet, en place. On change les interactions sociales et les temps de respiration. Ça joue autant sur le professionnel que sur le personnel.
Le résumé décideur après deux ans : Oui ça fonctionne. Non ce n’est pas pour autant toujours aussi idéal que certaines lectures le laissent penser. Rien d’étonnant cependant, le monde idéal n’existe pas. Après, savoir si c’est une bonne chose pour vous, ça va dépendre de vous.
Le confort local
Essentiellement j’ai changé mon bureau l’année dernière. J’ai un bureau assis-debout, essentiel pour les trop longues visio-conférences ou pour réfléchir sans clavier. J’ai eu une vraie chaise de bureau pour remplacer ma chaise de cuisine droite en bois. J’ai aussi une enceinte de bonne qualité avec de la musique derrière moi quand j’en ai besoin pour me concentrer. J’ai aussi pu brancher une configuration à trois écrans, et on y prend goût.
Enfin, le télétravail c’est la capacité à faire une sieste de 20 minutes quand c’est nécessaire, ou de prendre 1h30 sur la pause de midi quand je ne tiens pas. À une période l’année dernière, je pense que j’aurais dû me mettre en arrêt maladie longue durée si je ne l’avais pas pu. À la place je l’ai relativement bien vécu et ça a été relativement transparent pour mon employeur. Gagnant pour les deux.
Bref, je suis encore et toujours convaincu que le télétravail doit s’accompagner de confort. C’est d’ailleurs une des motivations que j’entends fréquemment sur le télétravail : Avoir un vrai bureau et pas une place de poulailler dans l’open-space. À vous d’y donner corps, et ça peut faire toute la différence.
Les entreprises qui veulent fonctionner en télétravail feraient bien de financer du matériel de façon massive (poste informatique et écran, mais aussi bureau, chaise de travail, lampe, webcam additionnelle, tableau blanc, etc.) plutôt que chercher à économiser sur ces postes budgétaires.
Peut-être que si les entreprises présentielles travaillaient sur le confort local dans leurs bureaux, les questions de télétravail se poseraient différemment.
L’isolement
L’isolement joue très fort pour moi. Si j’avais un premier ressenti au bout de trois mois, ça prend toute son ampleur avec le temps.
Je suis très introverti dans ma vie personnelle. Je sors peu pour autre chose que de l’utilitaire, et encore moins depuis que j’ai un enfant à la maison. J’apprécie quand ça arrive mais je ne sais pas maintenir correctement les liens pour le montrer, ou m’organiser pour prendre ces initiatives. Avec le télétravail, désormais mes interactions sociales de la semaine se limitent trop souvent à quelques bonjour quand j’amène mon fils à l’école.
Ne voir que ma chambre, mon bureau, les tâches ménagères et éducatives, ma femme et mon fils, ça pèse. Beaucoup. Les trajets professionnels à Paris une fois tous les deux mois sont presque une respiration. Ils me permettent de voir les collègues mais sont aussi le prétexte à revoir les amis de là bas.
Vous pouvez dire que c’est lié à mon organisation et à ma façon de vivre (*). C’est certainement vrai mais il n’en reste pas moins que, dans ce contexte, l’isolement généré est difficile à vivre. Le fait d’avoir un bureau avec des collègues en face à face, des pauses voire des jeux ou des discussions locales au détour du bureau, ça m’apportait quelque chose que je n’ai plus.
Est-ce que le confort contrebalance l’isolement ? La réponse est loin d’être tranchée pour moi — et ne concerne que moi et ma situation particulière, vous aurez votre propre réponse en fonction de votre propre contexte.
Mon idéal serait probablement un système de télétravail partiel une semaine sur deux ou plusieurs jours par semaine, avec quelques moments de rendez-vous fixes pour tout un ensemble de collègues.
Le management
Je vois beaucoup de retours faire porter la responsabilité de la réussite ou de l’échec du télétravail sur le management. J’adhère à beaucoup de ce qui s’y dit sur la confiance, l’autonomie et la responsabilisation mais je trouve la conclusion un peu facile, et ne reflétant que rarement une expérience de manager.
Le télétravail me demande de repenser mon rôle, la façon dont je le mène. Factuellement, mon boulot en tant que manager change beaucoup, mais s’il change ce n’est pas sur les questions d’autonomie et de responsabilisation (qui sont dans mes organisations cibles qu’il y ait télétravail ou pas).
Si ça change c’est qu’il est bien plus difficile de sentir des signaux quand quelqu’un commence à ne plus être à l’aise. Il est de même difficile de se rendre compte que telle ou telle remarque (de moi ou d’un autre) a été mal reçue et qu’il me faut intervenir. Il est tout autant difficile de voir si tel ou tel changement est positif ou négatif tant qu’il n’y a pas de forte douleur.
Non seulement on ne voit que le formel, l’écrit et le résultat, mais en plus on agit par ces mêmes canaux. La petite discussion à la machine à café ne prend pas forme aussi facilement : C’est soit de l’écrit soit de la visio. Les rendez-vous 1–1 sont d’autant plus essentiels avec le télétravail.
Je parle de ma position de manager mais ça fonctionne dans les deux sens : Vu que je conçois mon rôle de manager comme au service des autres, si c’est plus difficile pour moi alors ça a aussi des impacts négatifs sur l’aide que je peux apporter, et donc sur les tiers non-managers. J’imagine plus facile de perdre quelqu’un et de s’en rendre compte trop tard, et plus difficile de résoudre un désalignement (*).
Quand tout va bien c’est parfait et le télétravail ne génère aucune problématique significative. Quand quelque chose n’est pas idéal, le télétravail à temps plein complexifie l’humain, des deux côtés, et peut démultiplier les problèmes ou les difficultés (*).
Organisation d’entreprise
Je ne l’ai pas abordé mais je n’ai d’expérience que pour des équipes techniques de bon niveau et impliquées. Tel que je le vois, le télétravail n’est adapté que pour des gens dirigés à la tâche d’exécution sans aucune latitude ni aucun aléas (on peut donc simplement mesurer l’avancement) soit des gens en totale responsabilité et autonomie (individuellement ou collectivement).
Quand je parle de responsabilité et d’autonomie je le prends avec un sens très étendu. Côté organisation, l’essentiel des problèmes ressentis viennent de situations où les opérationnels n’étaient (ou ne se sentaient) pas libres de prendre les décisions qu’ils pensaient pertinentes, ou qu’ils devaient justifier leur travail après-coup (le temps passé, les décisions prises, les aléas, la qualité obtenue).
La position intermédiaire, à la fois donner des responsabilités et de la liberté mais pas toute l’autonomie pour faire les choix ou les comprendre, est une source de frustration permanente. C’est déjà vrai sur une organisation locale (ne faites pas ça) mais ça s’y rattrape en partie par la proximité. En télétravail les problèmes induits m’y semblent démultipliés (*).
Le quotidien
Ce n’est pas un vrai problème mais c’est quand même une surprise pour moi alors je le signale : Même dans une entreprise totalement en télétravail depuis sa naissance il y a une demie-douzaine d’année, on perd encore du temps significatif avec les problèmes de son et de vidéo, on oublie parfois de faire de l’écrit, etc.
De même, si on est plus au calme, il est plus fréquent que au moins un des intervenants ait des travaux chez lui, ses voisins ou dans la rue, une connexion qui tombe, un wifi taquin, un matériel en panne sans pièce de rechange, un démarcheur qui sonne à la porte, un espace de coworking trop bruyant et aucune cabine d’isolement de disponible, etc.
Bref, les petits soucis du quotidien sont tout autant là en télétravail.
Enfin, certains aiment bien l’asynchrone et l’écrit (moi le premier), mais je n’ai pas trouvé de solution efficace pour remplacer les discussions autour d’un tableau blanc. Il existe des logiciels pour ça, mais sauf à payer à chacun une tablette avec stylet, ça ne sera jamais la même chose. Les réunions d’architecture sont clairement un point où on perd très nettement en efficacité.
Encore une fois : Ça fonctionne mais rien n’est magique. Certains vous diront que c’est toujours mieux qu’une entreprise qui n’a pas assez de salle de réunion. Savoir si c’est mieux qu’une entreprise qui a des espaces adéquats, ça va être un choix plus personnel.
(*) Oui, moi aussi j’aimerais une situation idéale, où tout est parfait, où tout le monde est aligné, où la culture est parfaitement partagée, où les désaccords sont déminés, où il y a bienveillance et collaboration à chaque instant de la vie, où moi-même j’ai une hygiène de vie parfaite, pas de problème de santé ni de freins sociaux.
Les retours qui disent que le télétravail ne pose aucun problème tant que le contexte est idéal et que sinon c’est la faute des problèmes autour, j’ai l’impression d’y lire un « quand ça ne fonctionne pas c’est la faute des autres ».
En pratique tout n’est pas toujours parfait. Parfois c’est la faute de l’organisation, parfois de la culture, parfois d’un contexte non maitrisé ou d’une personne particulière. Parfois on y peut quelque chose, parfois nos leviers d’action sont plus restreints ou plus long terme. Peu importe. Ça arrive et ça doit être pris en compte. Une organisation qui ne fonctionnerait que dans un contexte idéal est une mauvaise organisation.
Du coup oui, je me permets de signaler ce qui est plus difficile même si le problème n’existerait pas dans une situation totalement idéale par ailleurs. J’ai tendance à dire qu’en tant que manager c’est même mon boulot de penser à ça et d’y travailler.
Je suis plutôt agréablement surpris des résultats du sondage mais j’ai plein de choses à dire sur les réponses qui m’ont été faites.
Je fais des réponses ici parce que ça me permet d’être plus posé et d’avoir plus d’espace que sur Twitter mais aussi parce que ces réponses vont évoluer en fonction des commentaires que vous me ferez.
Tout ceci n’est qu’un immense brouillon : J’espère bien que les discussions ici ou là bas seront assez riches pour me faire changer d’avis sur plusieurs points. Si c’est le cas, les contenus évolueront donc en conséquence.
Continuer la discussion, chercher le consensus
Je commence par mettre de côté tous les appels à discussion et à consensus. Bien évidemment que ma question ne vaut qu’après discussion éclairée et recherche d’un consensus. Parfois il y a quand même des avis divergents.
J’irais même plus loin : Il doit y avoir régulièrement des avis divergents. Quand la recherche du consensus va trop loin, on a juste des gens qui s’auto-censurent et abandonnent. C’est sain et sage de leur part parce que ça permet d’avancer mais ça reste un échec collectif.
Au final c’est celui qui a le pouvoir qui gagne. Ce peut-être le pouvoir hiérarchique, le pouvoir d’influence par le charisme, le pouvoir de nuisance de celui qui ne lâche pas son avis ou qui sera pénible si on ne lui donne pas raison, ou même le pouvoir de celui qui rendra mal à l’aise l’équipe par une position victimaire.
Le pouvoir est un très mauvais indicateur de stratégie. Pourquoi lui donner ce poids ?
Il faut espérer le consensus et le favoriser par des discussions ouvertes où chacun est à l’écoute. Il faut cependant savoir prendre une décision avant que ce consensus ne soit forcé.
L’absence de consensus n’est pas un problème, il est le signe d’une richesse. Le problème est dans l’impossibilité de dégager un choix en l’absence de consensus. Mon scénario présuppose d’ailleurs un consensus de l’équipe. C’est déjà une situation plus que confortable.
Vous avez choisi le consensus à mon petit jeu ? Considérez que vous ne l’avez pas et rejouez.
Déléguer au consultant
J’ai proposé l’option parce que je l’ai vécue dans les grands groupes. J’étais le consultant.
Pour moi c’est la pire des réponses.
On fait intervenir le consultant dans la phase d’étude. Le consultant permet d’apporter des connaissances, des compétences ou des expériences qu’on n’a pas. Il établit une grille d’analyse, pousse de l’information et propose des recommandations. Il devrait s’arrêter là.
Le consultant est le pire acteur pour prendre la décision elle-même une fois l’étude bouclée. Il n’a qu’une vue partielle du contexte, généralement peu de l’historique de la boite, une compréhension biaisé des enjeux, et des motivations propres potentiellement différentes des intérêts internes.
Au final il n’a aucune raison de prendre une meilleure décision que vous (manager et équipe) qui pourrez vous baser aussi sur son expérience et ses recommandations (et les suivre le cas échéant si c’est l’élément le plus important).
Le point majeur est surtout que le consultant n’est engagé en rien par sa recommandation. Ce n’est pas lui qui en assumera les conséquences. Pire, il peut être incité à travailler dans son intérêt (valoriser son travail, ou déclencher de nouvelles prestations) au lieu de travailler à l’intérêt du projet.
Faites intervenir des consultants, prenez en compte leurs recommandations (vraiment, surtout si vous avez embauché quelqu’un de compétent qui a le recul nécessaire, n’écartez pas trop facilement ce qu’il vous dira) mais ne leur déléguez pas la décision.
Les conséquences de l’erreur
Ça dépend, quelles sont les conséquences de l’erreur ?
Je n’avais pas anticipé cette réponse. Elle me gêne énormément et c’est peut-être la plus révélatrice de mon approche des choses.
Parler de conséquences de l’erreur part du préjugé que l’avis d’en face est une erreur, que nous on a raison (peu importe si celui qui parle est dans la position du manager ou de son équipe). Pourquoi ce préjugé ? Il y a deux avis différents. J’ai autant de chances de faire une erreur que d’avoir raison. En fait si ça se trouve aucune des deux solutions n’est une erreur, ou les deux le sont.
J’ai bien évidemment en mémoire tous les cas où je regrette de ne pas avoir imposé ma solution mais il y a un gros biais du survivant. Combien d’autres décisions se seraient révélées aussi catastrophiques si je m’imposais ? Je suis bien incapable de le savoir. En fait même là où j’ai des regrets, si ça se trouve ma solution aurait été encore pire.
Donc oui, parfois j’ai le sentiment que les autres sont dans l’erreur et qu’on va en payer les conséquences de façon très grave. Quand c’est le cas je le dis, j’explique les conséquences que j’entrevois. Ces risques sont pris en compte, parfois les autres demandent des explications. Ça fait partie des éléments sur lesquels chacun va baser sa décision mais ça n’emporte pas décision en soi.
Principe de la prise de décision : Avancer tout ce qu’on pense, donner la mesure de notre conviction. Pour autant, une fois exposée, partagée et prise en compte par tous, cette intime conviction ne doit pas inciter à imposer quoi que ce soit.
N’oublions pas que les personnes en face ont potentiellement aussi ce même sentiment de grosse erreur, mais à l’encontre de ce qu’on pense nous.
Celui qui a l’expérience
On est ici dans un dérivé du cas précédent. Invoquer l’expérience n’est ni plus ni moins un prétexte pour dire que mon intime conviction devrait l’emporter.
Si j’ai plus d’expérience je l’ai mis sur la table, j’ai expliqué et explicité ce que je pouvais, affirmé que mon intuition n’est pas forcément explicable mais se base sur plusieurs années derrière moi. Cela a déjà été pris en compte par les personne en face de moi dans leur analyse. Ce n’est pas suffisant pour m’imposer.
L’historique de l’équipe et du manager
Le manager a-t-il habitude de prendre des bonnes décisions ? L’équipe ?
Peu importe en fait, à partir du moment où cet historique est partagé, connu au moment où la décision est prise. Si l’équipe a l’habitude de se planter et le manager l’habitude d’avoir raison, alors l’équipe prendra probablement d’elle-même l’avis du manager le temps qu’elle progresse. Si ce n’est pas le cas c’est que le fondement du refus est plus fort que ce critère historique.
Comme l’expérience, l’historique n’a de poids sur « qui prend la décision » que s’il n’est pas partagé en amont au moment de chercher le consensus, ou que l’un des deux est fondamentalement incompétent au point de ne pas savoir prendre en compte cet élément dans sa prise de décision (et on parle alors d’un niveau d’incompétence assez grave).
Une fois l’historique partagé, il a fait partie des éléments source de la décision de chacun, et ne doit pas emporter la décision collective pour lui-même
Ceux qui assument les conséquences
J’ai vu cet argument employé pour étayer de choix opposés. On laisse la décision à ceux qui en assument les conséquences. Certains pensent que c’est l’équipe, d’autres que c’est le manager.
Les deux me gênent parce qu’ils présupposent que tout le monde n’est pas de la même bonne volonté et dans le même bateau. Si mes équipes souffrent c’est un problème pour moi. Si je souffre ou si je ne suis plus en capacité de les protéger ou de les aider, c’est un problème pour eux. Si la décision prise ne va pas dans l’intérêt de l’entreprise, c’est un problème pour tous.
Vouloir distinguer une personne qui serait plus responsable ou qui subirait le plus les conséquences, c’est présupposer qu’il y a intérêts divergents et ça me pose problème. C’est vrai si on parle de fondateurs, actionnaires et dirigeants — et c’est pour ça que je les ai explicitement exclu de mon petit jeu — mais c’est plus gênant si on parle de management intermédiaire.
Je ne suis pas bisounours. Je sais bien que dans beaucoup de structures il y a ces intérêts divergents, mais c’est bien un problème d’organisation ou de culture à résoudre. Que des organisations dysfonctionnelles engagent des réponses différentes pour éviter ou compenser des problèmes par ailleurs, c’est certain mais ça m’intéresse moins.
Si le manager emporte les décisions parce qu’il craint de subir les conséquences d’une erreur auprès de son N+1, il y a un problème organisationnel à résoudre bien plus important que de savoir comment sont réalisés les choix.
Dans l’idéal ou dans la réalité ?
C’est la réponse qui m’a fait le plus réfléchir. Parle-je d’un idéal ou de vécu ?
Je n’ai pas la réponse. Le fait qu’il y ait un décalage entre les deux est forcément inconfortable, mais la réalité a aussi ses contraintes.
Je me suis imposé plus que je ne l’aurais aimé par le passé. Peut-être pour compenser d’autres erreurs, peut-être parfois aussi par lâcheté parce que je savais que c’est la conception du management que la direction attendait de moi. Parfois j’ai regretté de ne pas l’avoir fait, mais penser que les conséquences aurait forcément été meilleures ne relève que de la croyance.
Le passé permet d’apprendre, mais je sais aussi que le futur me réservera d’autres cas de conscience et que je ne respecterai pas toujours mes conclusions — parfois a raison à cause d’autres dysfonctions à prendre en compte, peut-être parfois pour de mauvaises raisons. Je n’ai pas dit que c’était facile.
Oui mais alors ?
Je ne donne que ma réponse de principe. J’espère qu’elle transparait suffisamment dans ma position précédente et dans les réponses ci-dessus.
Je me base sur le supposés suivants :
1. Je travaille avec une équipe responsable, compétente, impliquée, qui cherche à bien faire, qui prendra en compte les éléments de business d’organisation et de stratégie que je poserai sur la table de la même façon que je prendrai en compte les éléments pratiques qu’ils remonteront.
J’ai plus souvent rencontré ce cas que le contraire, quoi que les légendes urbaines en disent.
Je conçois que ce ne soit pas toujours le cas, mais vous avez alors d’abord ce problème à régler. Le reste en découle.
2. Une fois que chacun a explicité ses motivations, ses expériences, ses connaissances, que les compétences respectives sont connues de tous, je n’ai pas de raison de considérer que ma synthèse est moins juste que celle des autres, mais pas meilleur non plus, sauf à me considérer fondamentalement plus intelligent que mon équipe.
Avec un tel supposé, si tout le monde a la même implication et que les éléments sources comme les raisonnements de chacun ont été explicitement partagés, autant jouer à pile ou face.
Je suis là pour faire que l’équipe tourne, autonome, responsable. Mieux : Je suis là pour qu’elle s’améliore, par l’expérience et la prise en responsabilité.
Retirer à l’équipe la capacité de prendre elle-même sa décision irait à l’encontre de cet objectif.
Certes, ça ne dit rien sur le choix pris, s’il est bon ou pas, mais ne pas leur laisser ce choix aura des conséquences sur l’autonomie, l’implication et la prise de responsabilité.
Oui. La décision doit être celle de l’équipe, pas la mienne, quelles que soient mon expérience et ma position hiérarchique.
Il y a plein de bonnes raison pour s’imposer. Parfois il faut le faire, mais en général c’est à cause de dysfonctions à compenser : Des éléments stratégiques qu’on ne peut pas partager, une organisation qui fonctionne mal et à compenser, une culture pas encore en place, des membres de l’équipe qui ne sont pas à leur place. Ça doit rester l’exception et ça doit interroger.
Manager, directeur, responsable, Pourquoi prends-tu la décision à la place de ton équipe ? Pourquoi penses-tu que ton avis doit primer ?
Non, ce n’est pas ton rôle.
Ton rôle c’est de permettre à cette équipe de travailler au mieux. C’est de les mettre en capacité, de leur donner les moyens, d’instaurer la bonne culture, d’organiser, de trancher les différents et cas problématiques quand il y en a, de pousser à l’amélioration, de t’assurer que rien n’est oublié ou mal compris, d’informer de ce qu’ils ne savent pas, de définir puis déployer un cap et une stratégie, de gérer le budget, l’administratif, d’apporter soutien personnel.
Pfiou, c’est déjà énorme et j’en oublie.
Ton rôle est immense mais non, il n’est pas de prendre des décisions à la place de ceux qui savent et qui sont au jour le jour sur le sujet. Ton rôle n’est pas tant de diriger que de donner la direction.
S’il y a besoin d’imposer c’est qu’on est dans l’échec.
Ce peut-être un échec de recrutement (les personnes ne veulent pas s’impliquer), un échec de culture (les personnes ne veulent plus s’impliquer ou le font mal), un échec d’organisation ou d’autonomie (les personnes ne peuvent pas s’impliquer), un échec de formation ou d’information (les personnes n’ont pas les connaissances ou compétences pour s’impliquer), un échec de moyens (les personnes n’ont pas le temps ou les ressources nécessaires à s’impliquer), ou encore plein d’autres choses, mais un échec.
Et ces échecs, tous ceux que j’ai listé, sont liés à votre rôle de manager, votre responsabilité.
Votre rôle est majeur, et c’est tout ça.
Il n’est pas de prendre la décision mais de permettre qu’elle soit prise, puis de l’appuyer. Si vous la prenez, c’est que vous avez échoué à votre vrai rôle.
J’en ai déjà parlé il y a deux semaines, je recrute pour des gens que je connais.
J’ai désormais deux nouvelles offres, toutes deux très tech, pour des seniors.
La première est pour une petite équipe sur Lyon, plutôt orientée back-end mais il faut avoir envie de toucher de l’infra jusqu’à la webapp en React.
La seconde est à Paris, rôle dédié front-end dans une équipe d’une dizaine et pour une boite qui ne devrait pas laisser indifférent.
L’offre de recrutement d’une équipe complète est toujours ouverte et il n’est jamais trop tard pour faire un signe mais, si ça vous intéresse, ne tardez pas.
Comme ce sera toujours le cas, je publie tous les détails, sur l’organisation interne, les locaux, le nom de la société, la fourchette de salaire. L’idée c’est de trouver la bonne personne pour le bon poste, pas de jouer à colin-maillard.
Vous recrutez et on se connait, au moins de loin ? Je peux vous proposer quelque chose de complémentaire aux offres habituelles.
La précédente grille datait de 2013. Elle tourne encore mais elle me gêne. Certains chiffres étaient estimés à la hache. Rien que la fiscalité était approchée avec un 46% non justifié.
Depuis j’ai refait mes grilles quand je me suis lancé, puis les ai améliorées suite à mon bilan l’année dernière. Je ne peux pas les partager vu la quantité d’informations personnelles mais j’ai tenté d’en extraire une version plus neutre.
Il y a trop de paramètres pour pouvoir tout résumer mais voici quelques points notables :
Le freelance ne compte pas toujours son logement mais c’est un point significatif dans le calcul. Un espace de co-working peut vite monter à 250 ou 300 € par mois. Ceux qui travaillent de chez eux occupent une pièce. Au début on pense que ça ne coûte rien mais quand on déménage on compte bien une pièce dédiée en plus pour ça, à laquelle il faut ajouter la quote-part de charges, d’électricité et de chauffage.
Le statut d’auto-entrepreneur est vite super intéressant même quand on se paye du matériel et du mobilier. Sur les autres statuts il faut facturer bien plus cher pour avoir la même chose à la fin du mois.
Rogner sur le matériel et les frais ne change pas la donne. Même 1 000 € , quand c’est amorti sur plusieurs années et donc dans les 500 jours facturés, ça n’est pas significatif. Ne mégotez pas sur votre confort.
Le pire est le « on rembourse la moitié de votre abonnement de transport ». Presque éliminatoire. Si respecter le minimum légal est vu comme un avantage propre à être mentionné, je ne suis pas certain d’avoir envie d’entendre le reste. […]
Ce billet a deux ans et je n’ai pas grand chose à y changer. C’est lui qui guide mes offres aujourd’hui, le fait de décrire le travail et le contexte plutôt qu’une liste de technos.
Le milieu a lui un peu changé. On trouve toujours ses mêmes recruteurs qui cherchent « un développeur pour un éditeur logiciel » mais qui refusent de te dire qui avant de te faire dérouler ton CV, et qui à la place se vantent d’avoir un babyfoot une mutuelle ou une sortie annuelle.
Les espaces communautaires commencent par contre à mettre des règles un peu plus strictes. Précision obligatoire du salaire, de l’entreprise, de la présence ou non de télétravail, etc.
On a aussi quelques recruteurs qui fonctionnent différemment. J’ai au moins Shirley Almosni Chiche en tête. On y voit des annonces claires avec des noms et des chiffres, sans détours, du détail sur le fonctionnement interne des équipes et sur les conditions de travail. J’aimerais bien que d’autres prennent exemple.
C’est probablement elle qui m’a décidé à mettre moi aussi en avant le nom de l’entreprise d’accueil. Je suis agacé quand les autres ne le font pas, il est normal que j’en tire moi-même les conséquences. Bref, merci.
J’ai justement une proposition en cours un peu hors des habitudes, avec un « bring your own team ». Profitez-en !