Catégorie : Santé

  • Inci­ta­tion à perfor­mance par des primes dans les admi­nis­tra­tions de santé

    Il se nomme d’après une légende de l’Inde colo­nia­liste. Esti­mant qu’il y avait trop de cobras dans la ville de Delhi, les auto­ri­tés déci­dèrent de mettre en place une récom­pense pour chaque tête de cobra rappor­tée. La mesure eu un franc succès, jusqu’à ce que l’ad­mi­nis­tra­tion découvre des fermes de cobras, elle arrêta alors le programme de récom­penses et les éleveurs relâ­chèrent leur animaux, augmen­tant le nombre de cobras initia­le­ment présents dans la ville.

    Visi­ble­ment tout le monde ne connait pas encore l’ef­fet cobra.

    Ce matin j’en­tends une poli­tique de la majo­rité parler d’in­ci­ta­tion à perfor­mance par des primes dans les admi­nis­tra­tions de santé, et plus parti­cu­liè­re­ment en EHPAD. En quelques minutes elle dit que l’im­por­tant n’est pas de faire des actes mais d’ai­der les gens, et envi­sage trois exemples d’in­di­ca­teurs :

    • La baisse du nombre d’actes
    • Permettre aux gens de rentrer chez eux plus tôt (baisse de durée des séjours)
    • Limi­ter le nombre de fois où on fait reve­nir les gens (baisse des réad­mis­sions)

    Sérieu­se­ment, même avec des agents dont l’objec­tif prin­ci­pal sera la qualité des soins, n’y a-t-il personne pour iden­ti­fier d’aussi mauvais indi­ca­teurs ? pour voir que ça va déra­per, voire être dange­reux ?

    Nous allons mettre des gens, souvent mal payés vis à vis de leur impli­ca­tion, en posi­tion de se dire « ça me semble utile mais si je fais cet acte de soin je risque de faire une croix sur ma prime ». Vu qu’on parle de primes d’équipes, on peut même avoir la pres­sion malsaine des collègues « tu aurais du refu­ser la réad­mis­sion de cette personne, tu ne peux pas mettre en diffi­culté finan­cières tes collègues comme ça en cette période », qu’elle soit expli­cite, impli­cite ou même auto-suggé­rée.

    Le pire étant la prise de risque du  « norma­le­ment ça devrait bien se passer, si je la renvoie chez elle dès main­te­nant, on évite d’am­pu­ter le salaire de ce mois ».

    Vous n’y croyez pas ?

    Nos soignants sont dédiés à la cause. J’ai bon espoir que le person­nel résiste au mieux à cette pres­sion, quitte à devoir faire une croix sur leur rétri­bu­tion finan­cière et à se prendre encore des critiques sur leur gestion. Dans le meilleur des cas nous aurons un superbe exemple du méca­nisme de double contrainte contra­dic­toire, géné­rant un mal-être supplé­men­taire gigan­tesque, de l’épui­se­ment ou des burn out.

    Notre poli­tique se plai­gnait qu’on parle de prime à la perfor­mance dans le service public depuis long­temps sans pour autant l’avoir fait. Oui, ceci peut expliquer cela : C’est diffi­cile de trou­ver de bons indi­ca­teurs sans effet pervers. Très diffi­cile, surtout quand la rela­tion de confiance est déjà rompue avec l’au­to­rité de contrôle.

    * * *

    Oui, la gestion finan­cière est impor­tante. Inci­ter à éviter les gâchis est une bonne chose. Mais si on commence à donner des primes sur ce critère, il risque de primer sur l’objet même du service donné. C’est du mana­ge­ment de base ça. Comment ceux qui veulent faire fonc­tion­ner le service public comme une entre­prise peuvent-ils l’ou­blier ?

    Quand on base le service public – non rentable par nature – sur des indi­ca­teurs de perfor­mance finan­ciers, c’est évident que ça va mal se passer quelque part. Quand on veut gérer des services publics avec des recettes idéo­lo­giques éculées, ça ne se passe pas mieux.

    Au-delà, le prin­cipe même des primes sur objec­tif est contre-produc­tif à la base, mais là aussi il faut avoir un peu lu pour éviter les préju­gés basés sur l’in­tui­tion. Je vous recom­mande au mini­mum la courte vidéo de cet ancien billet.

  • Le burn-out en mala­die profes­sion­nelle, la FAQ

    J’en ai marre du FUD sur l’ins­crip­tion du burn out au tableau des mala­dies profes­sion­nelles alors je vais faire une petite FAQ.

    Je parle dans la suite de burn out mais si vous voulez être pédant vous pouvez parler du syndrome d’épui­se­ment profes­sion­nel. Ça fait plus scien­ti­fique mais ça revient au même.

    Ce n’est pas (offi­ciel­le­ment reconnu comme) une mala­die

    Si. Ça ne prête en fait pas vrai­ment à débat.

    La France est un pays qui aime bien les listes admi­nis­tra­tives mais on n’en est heureu­se­ment pas à défi­nir exhaus­ti­ve­ment ce qui est ou pas une mala­die en fonc­tion d’une liste offi­cielle. Cette liste offi­cielle exhaus­tive n’existe pas.

    Pour être complet, il existe bien une clas­si­fi­ca­tion inter­na­tio­nale mais qui a pour objec­tif de caté­go­ri­ser puis réali­ser des statis­tiques, pas de régle­men­ter ou défi­nir ce qui doit être reconnu ou non comme une mala­die. Elle fait de plus l’objet de critiques et contro­verses juste­ment concer­nant la section sur les mala­dies mentales.

    Nous n’avons même pas de défi­ni­tion légale de ce qu’est une mala­die au regard de la loi. Il nous reste donc le diction­naire :

    Alté­ra­tion de l’état de santé se mani­fes­tant par un ensemble de signes et de symp­tômes percep­tibles direc­te­ment ou non, corres­pon­dant à des troubles géné­raux ou loca­li­sés, fonc­tion­nels ou lésion­nels, dus à des causes internes ou externes et compor­tant une évolu­tion.

    Il me parait super­flu de démon­trer que le burn out entre bien dans cette défi­ni­tion. Pour les plus récal­ci­trants, le même diction­naire parle de mala­die (noire) pour un « état patho­lo­gique carac­té­risé par un état de profonde tris­tesse » et de mala­die (mentale, nerveuse ou psychique) pour du « trouble du compor­te­ment ».

    J’ai pris la défi­ni­tion du TLFi parce que ce diction­naire fait clai­re­ment réfé­rence mais si vous préfé­rez la plus offi­cielle neuvième édition du diction­naire de l’Aca­dé­mie française, on y trouve « Alté­ra­tion plus ou moins profonde et durable de la santé ; état d’une personne malade ». Sauf à nier la notion de santé mentale et de mala­die psychique, on peut faci­le­ment dire que le burn out quali­fie là aussi.

    À ceux qui ne se suffisent pas de l’ar­gu­men­ta­tion linguis­tique, le burn-out est suivi par des méde­cins et/ou psycho­logues, parfois de façon médi­ca­men­teuse (même si ce n’est clai­re­ment pas un bon critère pour iden­ti­fier une mala­die). Il est souvent la cause racine d’in­ter­rup­tions de temps de travail données par des méde­cins et vali­dées par la sécu­rité sociale. On a des docu­ments issus d’or­ga­ni­sa­tions et d’ad­mi­nis­tra­tions de santé à propos du burn out. Il est même excep­tion­nel­le­ment reconnu pour certaines personnes comme acci­dent du travail (sisi) ou comme mala­die profes­sion­nelle (preuve s’il en est que même l’ad­mi­nis­tra­tion consi­dère que ça peut en être une, le problème n’est pas là).

    L’ins­crip­tion au tableau n’est pas néces­saire

    Elle ne l’est pas. On peut tout à fait faire recon­naitre son burn out comme mala­die profes­sion­nelle sans que cette mala­die ne soit inscrite au tableau. Il y a une procé­dure pour ça, qui juge le cas indi­vi­duel. Certains cas sont accep­tés tous les ans.

    Le para­graphe précé­dent est d’ailleurs vrai pour *tou­tes* les mala­dies inscrites au tableau. *Tou­tes* pour­raient théo­rique­ment être recon­nues comme mala­dies profes­sion­nelles même si elles n’y étaient pas inscrites. L’enjeu n’est pas là.

    Le problème c’est que la procé­dure indi­vi­duelle est complexe. Il faut prou­ver la mala­die (ça c’est l’étape simple), que la mala­die peut être provoquée par les condi­tions de travail (ça reste faisable) mais aussi que ce sont ces condi­tions de travail et *exclu­si­ve­ment* ces condi­tions de travail qui ont déclen­ché la mala­die. Et là…

    Démon­trer l’ab­sence d’autres causes possibles, même partielles, c’est carré­ment mission impos­sible. Démon­trer l’ab­sence de quelque chose, c’est déjà géné­ra­le­ment un tour de force mais alors quand on parle de déter­mi­ner objec­ti­ve­ment et exhaus­ti­ve­ment les causes d’une affec­tion menta­le… ça devient du Houdini.

    Bref, il y a évidem­ment des excep­tions, des cas qui permettent d’ap­por­ter des preuves, ou même proba­ble­ment des dossiers excep­tion­nel­le­ment étudiés avec empa­thie et bien­veillance malgré des règles théo­rique­ment très strictes, mais autant dire que la procé­dure indi­vi­duelle n’est pas la solu­tion. N’es­pé­rez pas réus­sir.

    Le problème est d’ailleurs le même pour l’es­sen­tiel des mala­dies profes­sion­nelles. Tu es soumis à un agent patho­gène pendant des années. Tu tombes malade avec la mala­die corres­pon­dante. Théo­rique­ment rien ne prouve que tu n’au­rais pas pu l’at­tra­per ailleurs, que tu ne l’au­rais pas eu quand même.

    C’est *exac­te­ment* pour ça qu’on a créé le tableau des mala­dies profes­sion­nelles. Ça dit que si les condi­tions d’ex­po­si­tion sont réunies au travail (au deman­deur de le prou­ver) et qu’il a attrapé la mala­die décrite (à prou­ver aussi) alors dans ces cas là, et unique­ment dans ces cas là, on présume que la cause est proba­ble­ment profes­sion­nelle.

    L’em­ployeur peut toujours prou­ver que les condi­tions d’ex­po­si­tion n’étaient pas si réunies que ça, notam­ment par des mesures de préven­tion et des règles internes pour éviter l’ex­po­si­tion. Il peut toujours prou­ver qu’il y a d’autres causes pour un cas précis. Bref, ce n’est qu’une présomp­tion, mais elle permet d’évi­ter une preuve impos­sible à appor­ter, ou en tout cas d’évi­ter de reje­ter un nombre exces­sif de dossiers légi­times.

    On ne parle que de ça. Prou­ver qu’il y a un envi­ron­ne­ment propre à une pres­sion exces­sive, du harcè­le­ment moral, une déres­pon­sa­bi­li­sa­tion puis­sante et une situa­tion psychique propre à créer le burn out effec­ti­ve­ment subi, ça reste diffi­cile. C’est diffi­cile, subjec­tif, fran­che­ment pas une porte ouverte à toutes les demandes farfe­lues, mais entre ça et prou­ver l’ab­sence d’autres sources possibles, c’est le jour et la nuit.

    Pensez qu’il faut de plus faire tout ça alors qu’on est juste­ment dans un état de faiblesse et d’épui­se­ment mental extrême, parti­cu­liè­re­ment vis à vis de tout ce qui vient du milieu du travail. C’est un peu comme deman­der à un amputé des deux bras de rédi­ger lui-même par écrit les circons­tances de son acci­dent.

    On peut le faire recon­naitre comme acci­dent du travail

    Pour moi c’est le plus magni­fique contre-argu­ment. L’idée c’est qu’au lieu d’at­tri­buer le burn out à une expo­si­tion globale à une situa­tion profes­sion­nelle propice, on tente d’iden­ti­fier un fait déclen­cheur unique. Ça permet de quali­fier un acci­dent et de le faire recon­naitre ainsi.

    Ça fonc­tionne parfois, pour ceux qui arrivent à iden­ti­fier un événe­ment déclen­cheur spéci­fique, mais ça n’est en rien une solu­tion géné­ra­li­sable.

    C’est surtout un contour­ne­ment. Pour quali­fier un acci­dent du travail, il faut toujours prou­ver qu’il y a mala­die (les consé­quences de l’ac­ci­dent). Il faut toujours prou­ver que la cause est profes­sion­nelle. Il faut cepen­dant en plus prou­ver que cette cause a un fait déclen­cheur soudain et unique.

    En théo­rie ce devrait être plus limité, plus diffi­cile. En pratique la procé­dure est plus simple, plus ouverte.

    L’idée c’est donc de trou­ver un fait signi­fi­ca­tif sur lequel on pour­rait tenter de raccro­cher le burn out, quitte à esca­mo­ter tout le reste. Sauf dans quelques cas excep­tion­nels, on est à la limite de la fausse décla­ra­tion.

    Que certains en soient réduits à passer par là et que ça fonc­tionne démontre plutôt juste­ment à quel point le parcours de recon­nais­sance indi­vi­duelle de burn out en mala­die profes­sion­nelle est tota­le­ment inadapté. Il y a besoin d’un allè­ge­ment des preuves, exac­te­ment dans ce que permet l’ins­crip­tion au tableau prévu à cet effet.

    Et puis merde ! présup­po­ser que le syndrome d’épui­se­ment *pro­fes­sion­nel* a a-priori une cause liée à l’en­vi­ron­ne­ment profes­sion­nel est-ce vrai­ment si déli­rant que ça ?

    On préfère agir via une poli­tique de santé publique

    Faites donc. Il y a une telle absence d’ac­tion face au problème que ça ne peut pas faire de mal. J’ima­gine qu’une simple circu­laire inci­tant les admi­nis­tra­tions concer­nées à trai­ter les dossiers avec bien­veillance et empa­thie pour­rait déjà large­ment contri­buer à une amélio­ra­tion des choses. Même ça n’a pas été fait (ce qui pour moi est la preuve qu’il y a surtout une volonté de ne *pas* ouvrir la porte à des prises en compte de mala­dies mentales, du moins pas autre­ment qu’au compte goutte).

    On pour­rait aussi impo­ser aux employeurs de grandes entre­prises d’avoir des dispo­si­tifs de préven­tion et de prise en compte du problème. L’ins­pec­tion du travail pour­rait enquê­ter dans les domaines et entre­prises qui génèrent des taux anor­maux de burn out. Elle pour­rait aussi passer à la répres­sion quand les condi­tions humaines sont destruc­trices pour l’in­di­vidu. Pour ça on pour­rait recru­ter un peu dans l’ins­pec­tion du travail qui n’ar­rive déjà pas à gérer le strict mini­mum et où imagi­ner analy­ser l’en­vi­ron­ne­ment psychique doit rele­ver de la science-fiction.

    Bref, faites donc, mais je ne vois pas en quoi ce serait exclu­sif d’une inscrip­tion au tableau des mala­dies profes­sion­nelles. Au contraire, faire les deux serait d’une superbe cohé­rence dans l’ac­tion publique.

    Ça va amener plein d’abus

    FUD (fear, uncer­tainty and doubt).

    On ne parle déjà que de gens effec­ti­ve­ment atteints par le syndrome d’épui­se­ment profes­sion­nel, qui peuvent être recon­nus comme tels et le prou­ver. Ce n’est pas un truc marrant qu’on prend par plai­sir. On ne parle pas de simple­ment réper­to­rier tous ceux qui sont fati­gués ou n’ont pas envie d’al­ler travailler le lundi matin.

    Ensuite on parle de prou­ver des condi­tions. Chaque inscrip­tion au tableau des mala­dies profes­sion­nelles est liée à des condi­tions d’ex­po­si­tion profes­sion­nelles. Il faudra donc prou­ver que l’en­vi­ron­ne­ment corres­pond à celui de nature à créer des burn out. On parlera proba­ble­ment de pres­sion, de mana­ge­ment humi­liant, de harcè­le­ment, et globa­le­ment de situa­tion psycho­lo­gique destruc­trice. Il faudra le prou­ver, et imagi­nez bien que l’em­ployeur fera tout ce qu’il peut pour ne surtout pas lais­ser acter offi­ciel­le­ment qu’il a un tel envi­ron­ne­ment.

    Bref, on va permettre de faire effec­ti­ve­ment recon­naitre des cas de burn out sans deman­der l’im­pos­sible. On ne dit pas que ça va d’un coup être facile pour autant.

    Mais surtout, aujourd’­hui on sait que cette mala­die touche du monde, et que ça augmente de plus en plus. Les dossiers accep­tés sont peu nombreux. L’abus il existe déjà, aujourd’­hui, et il est au détri­ment des gens qui souffrent.

    En déter­mi­nant de quelle côté est la présomp­tion (le seul effet de l’ins­crip­tion au tableau des mala­dies profes­sion­nelles), on peut choi­sir la situa­tion qui génè­rera le moins d’injus­tices.

    Ce serait anor­mal de consi­dé­rer que l’em­ployeur est forcé­ment en faute

    Ça tombe bien, il n’en est pas ques­tion ici. Il s’agit d’at­tri­buer une cause qui permet à la sécu­rité sociale de couvrir plus ou moins bien les consé­quences de la mala­die, pas de dire si cette cause relève ou non d’une faute de l’em­ployeur.

    Il peut y avoir une mala­die profes­sion­nelle sans faute ni indem­ni­sa­tion spéci­fique de l’em­ployeur, comme il peut y avoir recon­nais­sance d’une faute et indem­ni­sa­tion du préju­dice sans recon­nais­sance pour autant d’une mala­die profes­sion­nelle.

    Main­te­nant à titre person­nel je ne verrai pas forcé­ment d’un mauvais œil qu’on commence à inquié­ter les employeurs quand le burn out vient de condi­tions humaines inac­cep­tables ou d’un défaut de préven­tion flagrant.

  • Sécu­rité sociale et coti­sa­tions sala­riales

    Je suis gêné aux entour­nures à chaque fois que j’en­tends parler de la suppres­sion d’une partie des coti­sa­tions sala­riales (les fameuses « charges ») au profit de la CSG.

    Fonda­men­ta­le­ment c’est une bonne chose. C’est la prise en compte que notre société n’est plus celle de 1945. Non seule­ment on consi­dère désor­mais la santé et la protec­tion sociale comme des droits qui ne sont pas condi­tion­nés par un emploi, mais la propor­tion d’ac­tifs en emploi dans la popu­la­tion baisse de façon conti­nue et défi­ni­tive.

    Le couplage emploi ↔ couver­ture sociale dispa­rais­sant – encore une fois, c’est une bonne chose – il est logique que son finan­ce­ment change en consé­quence. Ne pas le faire serait risquer que l’uni­ver­sa­li­sa­tion de la couver­ture sociale finisse par explo­ser un jour.

    * * *

    L’équi­libre n’est cepen­dant pas forcé­ment simple à trou­ver. Avec les coti­sa­tions sociales on finance autant les frais de santé que les indem­ni­tés de perte de salaire. Il en va de même avec les retraites où on finance les mini­mum vieillesse comme les parties au delà qui sont en fonc­tion des coti­sa­tions person­nelles.

    Si on voulait être acadé­mique, il faudrait lais­ser sépa­rer ce qui dépend de la situa­tion person­nelle et ce qui relève d’un régime géné­ral. Une partie devrait rester sous contrôle des sala­riés, l’autre devrait être globa­li­sée.

    C’est faisable mais je n’ai pas lu de travaux en ce sens et ça me gêne beau­coup. Là on passe d’une situa­tion illé­gi­time à une autre.

    * * *

    Quand les fonde­ments sont bancals, il y a de quoi se méfier. Le chan­ge­ment n’est pas neutre et il faut le relier à l’idéo­lo­gie libé­rale de l’exé­cu­tif de ces dix dernières années : Dimi­nuer la dépense publique et délé­guer au privé une part crois­sante des couver­tures sociales.

    L’idée de rendre obli­ga­toire les mutuelles pour les sala­riés tient du génie à ce niveau. Ça passe pour une mesure sociale alors qu’il s’agit de fixer qu’une partie de la couver­ture indis­pen­sable est à gérer par le privé. C’est d’au­tant plus perni­cieux que ça ne se voit pas immé­dia­te­ment, et que c’est la mutuelle qui passera pour le méchant de service quand elle augmen­tera ses tarifs.

    Pourquoi je vous raconte ça ? Parce que le trans­fert des coti­sa­tions sala­riales vers la CSG n’est dès aujourd’­hui pas prévu à budget constant. La diffé­rence se chiffre en milliards d’eu­ros. Rien que ça. L’hô­pi­tal étant déjà en sous-finan­ce­ment gigan­tesque, il faudra bien compen­ser ça par des augmen­ta­tion de couver­ture par le privé.

    Le gouver­ne­ment vient d’ailleurs d’an­non­cer une augmen­ta­tion de plus de 10% du forfait hospi­ta­lier, augmen­ta­tion qui sera assu­mée par les mutuelles privées et pas par la sécu­rité sociale publique. Facile main­te­nant que les mutuelles sont géné­ra­li­sées. Coïn­ci­dence ? diffi­cile d’y croire. Les mutuelles ont bien entendu annoncé qu’elles auront à augmen­ter leurs coti­sa­tions à l’ave­nir.

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    Malheu­reu­se­ment le trans­fert du finan­ce­ment des coti­sa­tions sala­riales vers la CSG nous retire aussi un levier pour éviter ça. Les coti­sa­tions sont gérées de manière pari­taire entre les orga­ni­sa­tions sala­riales et employeurs. La CSG est au mains de l’État. Le trans­fert est une bonne chose, le chan­ge­ment de contrôle est légi­time pour la même raison, mais il ne se fait pas à un moment de l’his­toire très favo­rable pour un service public univer­sel.

    Si la poli­tique de l’État conti­nue dans la direc­tion de ces dernières années – et ça semble plutôt s’ac­cé­lé­rer avec l’exé­cu­tif actuel – il y a des chances que le finan­ce­ment par la CSG baisse, au moins par rapport aux recettes et aux besoins, et que la part du privé augmente en consé­quence.

    De plus, la CSG étant impôt fixe et non-progres­sif et les mutuelles étant au contraire un système assu­ran­tiel basé sur les risques indi­vi­duels, nous allons de plus tout droit vers une augmen­ta­tion des inéga­li­tés et une indi­vi­dua­li­sa­tion de la santé. Ce n’est pas mon aspi­ra­tion et ça va coûter bien plus cher : La sécu­rité sociale ayant des frais de fonc­tion­ne­ment pas loin de quatre fois plus faibles que ceux des mutuelles.

    * * *

    On peut essayer de lutter contre tout cela mais j’ai peur que les syndi­cats sala­riés jettent aussi le bébé avec l’eau du bain, qu’ils cherchent à garder le contrôle sur la sécu­rité sociale, oubliant que ça ne concerne plus que les sala­riés.

  • Pour une sécu­rité sociale

    Je ne comprends pas comment on peut accep­ter d’in­di­vi­dua­li­ser les couver­tures santé.

    Par nature ça veut dire que certaines couver­tures ne rembour­se­ront que partiel­le­ment, ou pas tous les types de soins. Bien évidem­ment ce sont prin­ci­pa­le­ment les plus pauvres qui prennent ces couver­tures au rabais, voire qui s’en passent. Dans le meilleur des cas on augmente l’ex­po­si­tion aux risques de ceux qui pour­ront le moins en suppor­ter l’im­pact.

    Tout ce qu’on obtient c’est qu’ils renoncent aux soins :

    Ce système, à bout de souffle, conduit entre 21 et 36 % des Français à renon­cer aux soins pour des raisons finan­cières (pdf). Derrière ces statis­tiques, il y a des enfants sans lunettes alors qu’ils en auraient besoin (ce qui entraîne parfois un retard scolaire) ; des dents qu’on arrache au lieu de les soigner ; des bron­chites négli­gées qui dégé­nèrent, des personnes âgées qui s’isolent de plus en plus faute d’ap­pa­reil audi­tif …

    Le pire c’est que ça finit par coûter plus cher à la collec­ti­vité en plus d’être un désastre pour les concer­nés.

    On cherche juste à réduire les coûts, par idéo­lo­gie, ou en compa­rant les prélè­ve­ments avec des pays dont le système est payé direc­te­ment par les citoyens.

    Cela n’em­pêche ni M. Fillon ni M. Emma­nuel Macron (En marche !) de prévoir une baisse des dépenses de l’as­su­rance-mala­die : 20 milliards d’eu­ros d’éco­no­mies en cinq ans pour le premier ; 15 milliards pour le second. «  On ne peut avoir des dépenses de santé qui augmentent trois fois plus vite que la créa­tion de richesses  », professe M. Macron, pour­tant guère gêné de voir les distri­bu­tions de divi­dendes augmen­ter, elles, dix fois plus que les richesses produites.

    On a déjà réduit les crédits plus qu’il n’est possible, lais­sant les hôpi­taux dans un épui­se­ment humain et admi­nis­tra­tif, et sans aucune marge de manœuvre. La grippe annuelle arrive à épui­ser les lits dispo­nibles. Le moindre imprévu ne peut plus être géré parce que tout est fait pour suppri­mer tout ce qui semble super­flu par rapport au fonc­tion­ne­ment quoti­dien, et qu’on en a supprimé encore un peu plus pour forcer à faire des écono­mies.

    Il ne reste plus qu’à dimi­nuer les rembour­se­ments. On couvre moins de choses, ou en en rembour­sant une part plus faible. Ce faisant on en laisse plus aux mutuelles, dans un cercle vicieux qui laisse de côté les plus pauvres.

    Ce n’est même pas rentable écono­mique­ment :

    Sur 100 euros de coti­sa­tions reçues par les complé­men­taires, 15 à 19 % partent en frais de gestion (et de publi­cité) (pdf), contre 4 à 5 % pour la Sécu­rité sociale. Aucune «  ratio­na­lité écono­mique  » ne justi­fie donc que l’on préfère l’une à l’autre. Au contraire : un guichet public unique qui rembour­se­rait tout «  permet­trait de gagner 7 milliards d’eu­ros  », précise M. Noam Ambrou­rousi, spécia­liste de la santé et conseiller de M. Mélen­chon. Pour en mesu­rer l’im­por­tance, il faut se rappe­ler que le fameux «  trou  » de la Sécu­rité sociale s’élève à 4,7 milliards d’eu­ros.

    Et bien entendu, il s’agit surtout de segmen­ter. Les jeunes cadre ont beau jeu de mili­ter pour leur liberté de choix. Il s’agit surtout de segmen­ter. On segmente ceux qui peuvent payer et ceux qui ne peuvent pas, mais on segmente aussi les jeunes et les vieux, les handi­ca­pés lourds et les autres, ceux dont on sait qu’ils ont un ennui de santé sérieux et les autres.

    Forcé­ment, le jeune cadre en bonne santé paye moins cher à ce jeu… mais c’est au prix de la soli­da­rité avec les autres. C’est la logique écono­mique d’un assu­reur qui calcule le risque indi­vi­duel mais est-ce souhai­table socia­le­ment ?

    La logique de la sécu­rité sociale unique c’est juste­ment la frater­nité, et s’as­su­rer que personne ne doive renon­cer.

    Dans une tribune reten­tis­sante, ils ont réclamé une prise en charge des soins à 100 %, ainsi qu’une fusion de la Sécu­rité sociale et des complé­men­taires santé (Le Monde, 14 janvier 2017).

    C’est un des points où j’ai un problème avec Benoit Hamon et globa­le­ment le PS. On renonce à un point qui me semble essen­tiel socia­le­ment et qui a du sens même écono­mique­ment… juste parce que c’est diffi­cile poli­tique­ment.

    Oui, je veux une sécu­rité sociale univer­selle, qui rembourse tout le monde – pas que les sala­riés – à 100% pour tous les soins utiles. Ça comprend évidem­ment les trai­te­ments dentaires, ortho­don­tiques ou optiques, mais pas que. Ça comprend l’in­té­gra­lité du parcours hospi­ta­lier, repas compris.

    Oui ça coûte cher, mais pas plus que le système privé, proba­ble­ment même moins. La seule diffé­rence est de soigner aussi les pauvres. Du coup oui ça coûte plus cher que la situa­tion actuelle. Ques­tion de choix poli­tique.


    Les cita­tions viennent d’un article du Monde Diplo­ma­tique, dont je vous recom­mande très forte­ment la lecture.

  • [Santé] La réalité est complexe

    Pour éviter de payer trop de coti­sa­tions sociales il suffit d’ar­rê­ter de rembour­ser la bobo­lo­gie et les gaspillages, ou au moins de mettre une fran­chise de 1 ou 2 € pour respon­sa­bi­li­ser le patient et éviter qu’il ne consulte pour rien. Non ?

    La réalité est plus complexe que ça.

    En n’al­lant pas consul­ter avant que ce ne soit grave, parfois on évite de consul­ter pour rien… et parfois on empêche de détec­ter un vrai problème à temps, ou d’em­pê­cher que juste­ment ça ne devienne grave.

    L’ef­fet est malheu­reu­se­ment connu, étudié et publié(*). Vouloir limi­ter les rembour­se­ments soins aux cas graves finit par coûter plus cher à la collec­ti­vité que de rembour­ser tota­le­ment les soins léger à tous. Bien entendu, au passage, on a dégradé la santé des plus pauvres. L’équi­libre n’est pas qu’é­co­no­mique, il est aussi au niveau humain.

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    Au moins pour­rait-on éviter de rembour­ser les médi­ca­ments qui n’ont que peu d’ef­fet, au moins les place­bos type homéo­pa­thie, Non ?

    Même ce qui semble évident ne l’est pas tant que ça.

    Parfois ne pas avoir ce médi­ca­ment peu effi­cace ou ce placebo, c’est se finir par en donner un autre, peut-être plus cher, peut-être avec des risques d’ef­fets secon­daires à préve­nir ou à trai­ter. Ce peut aussi être voir le patient faire une seconde consul­ta­tion ailleurs pour obte­nir une ordon­nance. C’est aussi oublier que le placebo a aussi un effet réel sur le patient, même s’il est d’ori­gine psycho­lo­gique. Les méde­cins sont humains, et ils gèrent des enjeux humains qui ne se traduisent pas si faci­le­ment par de simples calculs.

    Bref, ne pas payer pour ce qui ne sert à rien peut au final coûter plus cher, aussi bien finan­ciè­re­ment qu’en terme de santé.

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    Mais on peut au moins réduire les gaspillages admi­nis­tra­tifs dans la CPAM et dans les hôpi­taux, non ?

    Devi­nez : C’est plus complexe que ça.

    Là aussi il y a un équi­libre. Faut-il plus de souplesse et donc avoir quelques gaspillages et une utili­sa­tion moins stricte des finances ? ou faut-il contrô­ler, mettre des proces­sus de ratio­na­li­sa­tion au risque de payer les contrôle, ajou­ter de l’ad­mi­nis­tra­tif, ne pas gérer les cas qui sortent des cases pré-établies ?

    L’équi­libre n’est pas évident, et a aussi un impact sur la qualité et le niveau des soins eux même. Tout tend à démon­trer qu’on est allé trop loin dans la ratio­na­li­sa­tion des hôpi­taux, dans les contrôles des méde­cins et dans la mise en cases admi­nis­tra­tives au niveau de la CPAM. Pour­tant ceux qui veulent écono­mi­ser en ajou­tant souplesse et simpli­cité sont les mêmes que ceux qui veulent éviter les gaspillages en bobo­lo­gie. Il va falloir choi­sir.

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    J’in­siste aussi : Pour ajou­ter à la complexité, il ne suffit pas de trou­ver l’op­ti­mum écono­mique. Les choix écono­miques ont aussi un impact sur le niveau de santé, sur le niveau de soli­da­rité.

    Trou­vez l’op­ti­mum écono­mique au risque d’une baisse raison­nable du niveau de soins dans l’hô­pi­tal public rural. Peut-être que les plus aisés se paie­ront le trajet vers une clinique privée plus loin au lieu d’al­ler à l’hô­pi­tal public local. L’hô­pi­tal public local ayant moins de volume, on y ferme la mater­nité locale dont les coûts fixes seraient trop impor­tants.

    Tout le monde, plus riches inclus, verra le niveau de soin bais­ser moins raison­na­ble­ment que prévu : un peu à cause des temps de trajet en urgence, un peu à cause de l’in­ca­pa­cité d’al­ler voir ses proches aussi faci­le­ment qu’à l’hô­pi­tal local, et beau­coup à cause des risques de compli­ca­tion en cas de problème urgent faute de mater­nité locale.

    Au passage, même si ça ne se verra pas sur les comptes de l’hô­pi­tal, tout le monde paiera aussi plus cher qu’i­ni­tia­le­ment : à cause des distances nette­ment allon­gées, autant pour les patients que leur famille ou que les pompiers et ambu­lances, à cause des jour­nées de congé pour faire le trajet, à cause des frais d’au­to­route, à cause de l’ab­sence de trans­port en commun pour aller si loin, etc.

    L’exemple donné n’est pas si théo­rique que ça.

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    Bref, Non notre système n’est pas parfait. Oui on peut amélio­rer les choses. Oui on doit conti­nuer à le faire, et à tester d’autres solu­tions.

    Main­te­nant la réalité est complexe et les solu­tions qui semblent évidentes ou de bon sens peuvent parfois bien dété­rio­rer les choses.

    Le fait est que notre couver­ture de santé est plutôt dans le tout haut du panier par rapport à qui se fait ailleurs, pour un coût total plutôt infé­rieur à la plupart des pays occi­den­taux (atten­tion à bien addi­tion­ner ce qui est payé par les orga­nismes publics mais aussi ce qui est payé à titre privé), et pour ce prix on a une soli­da­rité certes impar­faite mais qui là aussi est loin d’être dégueu­lasse par rapport à ce qui existe ailleurs.

     

    (*) Je n’ai pas les liens sous la main. Je me rappelle au moins une publi­ca­tion offi­cielle du Canada et une du Royaume Uni, ainsi que d’autres études. Si quelqu’un retrouve certains de ces liens, je suis preneur.

  • La vie ne se discute pas

    C’était il y a plus d’un an. Ça me réchauffe le cœur à chaque fois que quelqu’un le repar­tage. Merci.

    Autour de moi j’avais un ami qui luttait contre un cancer et qui a perdu la bataille, lais­sant femme et enfants. J’ai appris que d’autres connais­sances en France étaient passées par là dans leur vie, avec heureu­se­ment plus de succès.

    Sur la même période deux de mes connais­sances en Amérique du nord ont lancé un crowd­fun­ding pour gérer le même type d’évé­ne­ment. De ce que j’ai compris, au moins une n’es­père plus payer les trai­te­ments mais juste vivre le temps qui lui reste.

    Alors oui, savoir que les gens autour de moi n’ont pas besoin de lancer de crowd­fun­ding pour leur trai­te­ment, ça vaut toutes mes coti­sa­tions sociales.

    Oui il y a d’autres modèles possibles. Non les pays qui ont un autre modèle ne sont pas tous au niveau du moyen-âge. Ce n’est juste pas le sujet.

    J’ai parlé d’un vécu, personne, réel, concret. Je ne parle que de moi et même si les partages me font beau­coup de bien, ce n’est pas un débat.

    Peut-être est-ce ma faute d’avoir placé ce message dans un flux qui parle beau­coup poli­tique – le pire est que parfois je me laisse moi-même entraî­ner à argu­men­ter suite aux réponses, j’ai mes propres contra­dic­tions – mais quand vous me répon­dez impôts trop élevés ou libé­ra­li­sa­tion des assu­rances, non seule­ment vous êtes hors sujet, mais en plus vous me portez un coup au cœur. En niant ou refu­sant mon vécu, ces gens qui ont combattu la mala­die, l’aide qu’ils ont ou non reçu, vous êtes pour moi d’une indé­cence folle.

    Si vous voulez parler du modèle de la sécu­rité sociale, des impôts, du niveau de soin, de la compa­rai­son avec d’autres pays, de tel ou tel parti poli­tique : Bien­ve­nue mais pas ici, merci.

  • [Lecture] La crèche a, une fois de plus, donné de l’ho­méo­pa­thie à notre enfant de 18mois, sans nous préve­nir

     

  • Faire passer un recul de l’éga­lité pour un progrès

    J’avoue parta­ger cette fasci­na­tion.

    Nous avons créé la sécu­rité sociale pour ça. Puis nous dimi­nuons pas à pas l’idée, au point que la mutuelle s’im­pose comme néces­saire.

    Aujourd’­hui nous parlons de charges à allé­ger dans les entre­prises, de prélè­ve­ments obli­ga­toires trop impor­tants, de pacte de respon­sa­bi­lité à 40 milliards. Derrière ce sont nos coti­sa­tions sociales, qui dimi­nuent, tout simple­ment.

    Nous créons les condi­tions pour ne plus pouvoir assu­rer la sécu­rité sociale.

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    Plus simple­ment, nous migrons d’un système public vers un système privé (et forte­ment lucra­tif).

    Les petits salaires n’ont pas de quoi payer une mutuelle privée ? rendons là obli­ga­toire. L’en­tre­prise en paiera une part. Le sala­rié finira par payer aussi si on lui présente bien que c’est pour obte­nir une meilleure couver­ture, genre payer l’or­tho­don­tie ou les lunettes de vue, qui ne sont pour­tant pas super­flues dans la vie.

    Pour parfaire, histoire que ce ne soit pas trop visible avec le chômage actuel, on prévoit aussi la conti­nuité de la mutuelle pendant un an entre deux boulots.

    Au final on paye autant, voire plus, mais ça n’est plus vu dans le registre charges et les mauvaises pres­ta­tions ne sont plus la respon­sa­bi­lité de l’État.

    Pendant ce temps on peut réduire les pres­ta­tions du système public et faire bascu­ler peu à peu vers un privé de plus en plus indis­pen­sable. On pourra ensuite culpa­bi­li­ser les assis­tés qui restent à charge du public via la CMU.

    La créa­tion de la CMU est peut-être le plus éclai­rant. Il s’agit d’ac­ter très clai­re­ment que la sécu­rité sociale ne couvre même pas le mini­mum indis­pen­sable et qu’il est abso­lu­ment néces­saire d’y adjoindre une complé­men­taire. Au point que nous la four­nis­sons à ceux qui ne peuvent pas la payer.

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    Entre temps, nos gouver­ne­ments arrivent à faire passer l’aban­don progres­sif de la sécu­rité sociale comme un progrès : désor­mais vous aurez une couver­ture santé complé­men­taire.

    Pourquoi diable n’au­rait-on pas une couver­ture de base suffi­sante via la sécu­rité sociale ? Mystère et boule de gomme.

  • Mayenne: ses collègues lui offrent 213 jours de RTT pour rester auprès de son fils malade

    Une mère de famille employée d’une fonde­rie a reçu l’équi­valent de dix mois de RTT, donnés par ses collègues, pour lui permettre de s’oc­cu­per de son fils atteint d’une tumeur au cerveau.

    BFM TV

    Ça ressemble à un conte de Noël, mais en regar­dant entre les lignes c’est surtout un bel échec social compensé par le sacri­fice de quelques indi­vi­dus.

    La ques­tion prin­ci­pale : Doit-on permettre à un parent d’ac­com­pa­gner son enfant en plein cancer, entre hospi­ta­li­sa­tion et impos­si­bi­lité d’al­ler à l’école ?

    Si vous pensez que la collec­ti­vité ne peut pas tout faire, que c’est pas de chance pour cette famille mais tant pis pour elle, y compris si ça veut dire devoir quit­ter son emploi, perdre la mutuelle d’en­tre­prise et poten­tiel­le­ment tomber au RSA, avec l’im­pact que ça a juste au moment où on doit payer des soins, alors tout va bien.

    Sinon vous pouvez penser que ça fait partie des acci­dents de la vie qui frappent au hasard, que ça pour­rait être pris en charge comme le sont les handi­cap divers ou la prise en charge du garçon lui-même.

    Sauf que si on prend cette dernière option – et c’est visi­ble­ment l’opi­nion des autres employés de la fonde­rie, qui on sacri­fié leurs propres congés pour permettre à cette famille de passer l’épreuve – et c’est mon opinion aussi – faire peser la soli­da­rité sur les indi­vi­dus les plus proches plutôt que la collec­ti­vité dans son ensemble, c’est un bel échec de notre modèle social.

    Le simple fait de permettre ce don de RTT, imaginé à l’ori­gine dans un contexte très simi­laire, c’est insti­tu­tion­na­li­ser et promou­voir ce nouveau méca­nisme social du chacun pour sa gueule, j’es­père que tu t’en­tends bien avec tes collègues parce qu’il va falloir les convaincre de se sacri­fier pour toi. Ce n’est défi­ni­ti­ve­ment pas un conte de Noël, c’est la consé­quence d’un échec social qu’on tente de contour­ner.

  • Élec­tro­sen­sible, je vis isolée en montagne : mon handi­cap est enfin reconnu

    C’est une première victoire pour toutes les personnes souf­frant d’hy­per­sen­si­bi­lité aux champs élec­tro­ma­gné­tiques. Marine R., qui avait déposé un recours pour faire recon­naître son handi­cap dû aux ondes, vient d’ob­te­nir gain de cause devant la justice.

    […] Le Docteur Belpomme a mis au point un diagnos­tic fiable par image­rie céré­brale […]

    Le Plus

    La faci­lité aurait été de reje­ter la demande en jugeant infondé le concept d’élec­tro­sen­si­bi­lité. C’est même semble-t-il ce qui a eu lieu initia­le­ment.

    Au risque d’en choquer plus d’un, c’est une très bonne chose que l’is­sue finale soit plus posi­tive : Il s’agit de juger de l’état de handi­cap d’une personne, fut-il lié à une cause psycho­so­ma­tique, et unique­ment de ça.

    Oui, en l’état de nos connais­sances, cette ques­tion d’élec­tro­sen­si­bi­lité est très certai­ne­ment psycho­so­ma­tique, à ranger dans les peurs irra­tion­nelles. Quand la peur est telle qu’elle handi­cape réel­le­ment et tota­le­ment sa victime, on le recon­nait et voilà tout.

    Contrai­re­ment à ce que laisse entendre le témoi­gnage de l’ar­ticle, ce n’est en rien une avan­cée de recon­nais­sance de l’élec­tro­sen­si­bi­lité elle-même.

    Main­te­nant, pour ceux qui en rigolent, je me permets de placer un second lien trouvé le même jour :

    Si aujourd’­hui on envi­sage que certaines schi­zo­phré­nies puissent avoir pour cause des micro-orga­nismes dans la gorge, ça laisse à réflé­chir.

    Certaines longueurs d’ondes à certaines puis­sances pour­rait-elles avoir une influence sur un élément tiers qui lui même influence les victimes ?

    Nous n’en savons rien, proba­ble­ment est-ce unique­ment psycho­so­ma­tique, mais au moins restons humbles et évitons de nous moquer, d’au­tant que la souf­france de ces gens est elle bien réelle. Merci