Catégorie : Politique et société

  • Google s’at­taque à l’uni­ver­sa­lité des droits ! (et ils ont raison)

    Pour l’ap­pli­ca­tion de cette déci­sion, la Commis­sion natio­nale de l’in­for­ma­tique et des liber­tés (Cnil) a demandé à Google de faire les déré­fé­ren­ce­ments pour l’en­semble des recherches possibles pour les inter­nautes. En effet, toute personne peut faire une recherche partout dans le monde en utili­sant n’im­porte quel nom de domaine (google.fr aussi bien que google.de ou google.com…). Or Google ne veut déré­fé­ren­cer que pour les requêtes venant des moteurs dits « euro­péens » (.fr, .de, .it, .nl…).

    […]

    Personne, pas même Google, ne peut reven­diquer d’être hors la loi tant que celle-ci ne contre­vient pas aux prin­cipes fonda­men­taux des droits de l’Homme.

    La Cnil a raison d’exi­ger que le défé­ren­ce­ment soit global lorsqu’il est en confor­mité avec la déci­sion de la CJUE. Il convient de ne pas céder à Google.

    Et pour une fois, je suis en fort désac­cord avec la posi­tion de la LdH.

    Il n’y a que trois possi­bi­li­tés :

    1. Bloquer ces résul­tats et conte­nus partout, pour tout le monde
    2. Bloquer ces résul­tats et conte­nus pour les accès depuis l’Eu­rope
    3. Bloquer ces résul­tats et conte­nus pour les sites euro­péens et/ou desti­nés aux euro­péens

    La première solu­tion, souhai­tée par la LdH, me semble extrê­me­ment dange­reuse. Elle implique que des déci­sions légales ou règle­men­taires en France et en Europe doivent s’ap­pliquer inter­na­tio­na­le­ment. Le pendant évident c’est que les déci­sions états-uniennes, tuni­siennes, chinoises et péru­viennes s’ap­plique­ront aussi en France.

    Le souhai­tons-nous vrai­ment ? moi non. Il y a plein de choses auto­ri­sées chez nous qui seraient inter­dites ailleurs. Des liber­tés auxquelles je tiens.

    C’est d’ailleurs tota­le­ment irréa­liste. Comment conci­lier ce qui est expli­ci­te­ment un droit chez certains et une inter­dic­tion chez d’autres ?

    Se conten­ter de parler des Droits de l’Homme n’éclaire pas mieux. Outre le fait que chaque conti­nent a sa propre décli­nai­son, avec plusieurs versions, ces textes ne sont que des décla­ra­tions géné­rales à partir desquelles il faut créer un équi­libre.

    Le droit à l’ou­bli doit-il primer sur le droit d’ex­pres­sion et le droit à l’in­for­ma­tion ? Comment ? Ne devrait-on pas juste bloquer les résul­tats sur une recherche à partir du nom mais pas à partir d’une recherche sur les faits eux-mêmes ?

    Je suis certains que diffé­rentes cultures et diffé­rents pays répon­dront diffé­rem­ment, et pour­tant tous en pleine confor­mité avec les droits de l’Homme.

    Peut-on diffu­ser de la culture qui est tombé dans le domaine public chez l’un et encore sous droit d’au­teur chez l’autre ? Peut-on parler cryp­to­gra­phie avan­cée ? Quelle est la limite entre la liberté d’ex­pres­sion, la paro­die et le respect de la dignité humaine ? Quelle est la limite entre le droit à l’in­for­ma­tion, la liberté de la presse, et le respect de la présomp­tion d’in­no­cence ou la diffa­ma­tion ? Quelle est la limite au niveau de la porno­gra­phie ? Peut-on bloquer des sites sur déci­sion admi­nis­tra­tive ou non judi­ciaire quand il s’agit de poten­tiel terro­risme ou pédo­phi­lie ? A-t-on le droit de publier des infor­ma­tions qui seraient sous secret d’État dans un pays tiers pour des raisons de sécu­rité ou d’ordre public ?

    Sérieu­se­ment, toutes ces posi­tions sont plei­ne­ment respec­tueuses des droits de l’Homme, et aucune n’ap­pelle à un arbi­trage univer­sel. La réponse de l’un casse­rait tota­le­ment l’équi­libre social de l’autre, et aucune réponse n’est objec­ti­ve­ment meilleure ou même moins dange­reuse. Pire : Faire primer la réponse de l’un pour­rait être attaquable chez l’autre juste­ment au titre des droits de l’Homme, et inver­se­ment.

    Il reste la possi­bi­lité d’être prag­ma­tique, de respec­ter la souve­rai­neté de chacun. La troi­sième est la solu­tion chinoise. Elle est complexe à mettre en œuvre et serait tota­le­ment inap­pli­cable de toutes façons. Google peut encore avoir une présence un peu partout (et encore, pas partout, comment feront les autres pays ?) mais comment contraindre le New York Times ? Les chinois ont isolé leur réseau et érigé une barrière filtrante à l’en­trée. Ce serait diffi­cile en France, et je ne le souhaite pas du tout.

    Bref, reste la solu­tion inter­mé­diaire. Elle est utili­sée par Google depuis long­temps, et n’est en rien spéci­fique au droit à l’ou­bli. Yahoo! avait aussi tran­ché ainsi dans les années 2000 quand des objets nazis s’étaient retrou­vés sur leur site d’en­chères. Il faut dire que c’est le seul choix vrai­ment raison­nable pour des sites qui traversent autant de pays et qui ne veulent pas retreindre les acti­vi­tés auto­ri­sées à une peau de chagrin.

    C’est impar­fait, contour­nable, mais fina­le­ment le plus prag­ma­tique, et peut-être même souhai­table : Les étran­gers conti­nue­ront à voir ce que vous souhai­tez oublier, mais en même temps si c’est légal chez eux, au nom de quoi les contrain­drions-nous ? Il sera encore possible pour vos compa­triotes d’ac­cé­der à l’in­for­ma­tion en la recher­chant volon­tai­re­ment sur un site étran­ger. Fina­le­ment ça permet de gérer l’ac­cès à l’his­toire et la liberté d’être informé, tout en gardant une certaine opacité et une capa­cité à oublier pour tous les jours. Les collègues, les voisins, les incon­nus, eux n’au­ront plus un vieux passé à oublier devant les yeux, ce qui est bien l’objec­tif.

  • Rede­vances : le gouver­ne­ment veut limi­ter la libre circu­la­tion des connais­sances

    Le droit d’au­teur ne couvre que les créa­tions intel­lec­tuelles origi­nales, et unique­ment jusqu’à 70 ans après la vie de l’au­teur. Plus exac­te­ment, le droit moral sur l’œuvre persiste mais l’ex­clu­si­vité d’ex­ploi­ta­tion dispa­rait. Chacun est donc libre d’en faire des copies, des réuti­li­sa­tions ou des détour­ne­ments, y compris au sein d’une nouvelle œuvre, y compris à titre commer­cial.

    Le critère d’ori­gi­na­lité est plus diffi­cile à appré­cier mais on consi­dère aujourd’­hui que pour être proté­gée, un œuvre doit être une créa­tion impré­gnée de l’es­prit de son auteur. Une photo­gra­phie fidèle d’un objet, fut-elle tech­nique­ment complexe et coûteuse, ne relève pas du droit d’au­teur. Il en va de même des créa­tions banales (la carte postale de la tour Eiffel en pied et sans recherche parti­cu­lière) ou fortuites (par exemple une photo dont le contenu n’est pas direc­te­ment ou indi­rec­te­ment décidé par le photo­graphe). Dans ces diffé­rents cas, vous n’êtes pas l’au­teur de l’œuvre, mais unique­ment l’opé­ra­teur d’un travail tech­nique de maté­ria­li­sa­tion, chose qui n’est pas couverte par le droit d’au­teur.

    Très logique­ment, la numé­ri­sa­tion ou la copie numé­rique fidèle d’une œuvre dont l’au­teur est mort depuis plus de 70 ans est tota­le­ment libre. Vous avez non seule­ment le droit d’en créer une, mais vous avez aussi le droit de réuti­li­ser libre­ment et sans contrainte les copies réali­sées par d’autres.

    * * *

    On peut penser que c’est tout aussi vrai léga­le­ment mais encore plus vrai mora­le­ment pour la copie fidèle d’une œuvre déte­nue et héber­gée par un musée public. En fait non : L’État se bat contre, en faisant entrer les copies numé­riques qu’il réalise dans la défi­ni­tion d’infor­ma­tion publique, qui elles sont proté­gées en tant que telles. L’in­ter­pré­ta­tion semble fran­che­ment hasar­deuse mais c’est celle souvent soute­nue.

    Les poli­tiques récentes d’Open Data, au niveau français comme euro­péen, mettent à mal ce stra­ta­gème. L’au­to­ri­sa­tion de réuti­li­sa­tion des données publiques tend en effet à deve­nir la norme.

    Libé­rer des copies d’œuvres publiques déte­nues par le public ? surtout pas ! Le gouver­ne­ment prévoit donc un nouveau projet de loi pour chan­ger tout ça : Les données cultu­relles publiques devien­draient une excep­tion au prin­cipe de libre circu­la­tion, ouvrant même la porte à de poten­tielles droits exclu­sifs au profits de tiers pendant jusqu’à 10 ans (ah les fameux parte­na­riats public-privé, qui dépos­sèdent le public au profit du privé et où o’ finit par payer deux fois la factu­re…)

    Formi­dable idée où le public serait privée de la libre utili­sa­tion d’un copie numé­rique d’une œuvre cultu­relle du domaine public… à partir du moment où juste­ment elle est déte­nue par une orga­ni­sa­tion publique (donc payée par nos impôts). On marche sur la tête.

    Il n’est pas trop tard pour faire du bruit et influen­cer tout ça. La quadra­ture du net est un bon point de départ. Ne lais­sons pas faire s’il vous plait.

  • Maré­mo­teur

    Il faudrait envi­ron 50 éoliennes pour compen­ser un réac­teur nucléai­re… si elles ne tour­naient pas qu’un tiers du temps. Le solaire n’est pas non plus la solu­tion à tout faire : enso­leille­ment non constant, surface néces­saire, compo­sants rares, faible durée de vie.

    Ça fait désor­mais plusieurs fois que je vois passer des articles sur les centrales élec­triques maré­mo­trices. En France nous en sommes restés au niveau de l’usine de la Rance, qui produit autant qu’un quart d’un unique réac­teur nucléaire moyen, pour au moins 30% plus cher.

    Ça date de 1966. Les tech­no­lo­gies évoluent (et évolue­raient encore plus vite si on y inves­tis­sait autant que dans la R&D nucléaire) et le prix du nucléaire ne fait que monter. Pour une éner­gie qui ne s’épui­sera jamais et qui a une produc­tion constante, ça vaut certai­ne­ment le coût de s’y attar­der.

    Donc les anglais réflé­chissent à une centrale qui produit autant que 2 à 3 réac­teurs nucléaires moyens. Là où c’est inté­res­sant c’est qu’on parle d’une durée de vie prévue de 120 ans (deux à trois fois plus qu’un réac­teur nucléaire) et pas de besoin de combus­tible en entrée. La côte anglaise était pleine de recoins, un autre article parle de dizaines d’em­pla­ce­ments, et de quoi couvrir la majo­rité des besoins de l’île.

    Sur un projet bien plus petit à la Réunion, EDF envi­sage d’un coût qui pour­rait s’ap­pro­cher de 10 centimes le KWh d’ici 10 ans, soit tout à fait compé­ti­tif vis à vis du coût de l’élec­tri­cité conti­nen­tale aujourd’­hui (donc raison­na­ble­ment très bon marché vis à vis des coûts de dans 10 ans).

    La Corée du Sud en a aussi une de prévue équi­va­lente à un peu plus d’un réac­teur nucléaire, en plus de celle qu’elle a déjà (produc­tion équi­va­lente à celle de la Rance). Wiki­pe­dia rapporte que la Russie a quelques projets pharao­niques en évalua­tion, dont un qui produit autant que 87 centrales nucléaires.

  • TLS et vie privée

    Pour répondre à David :

    TLS does not provide privacy. What it does is disable anony­mous access to ensure autho­rity. It changes access patterns away from decen­tra­li­zed caching to more centra­li­zed autho­rity control.
    That is the oppo­site of privacy. […] TLS is NOT desi­rable for access to
    public infor­ma­tion, except in that it provides an ephe­me­ral form of message inte­grity that is a weak repla­ce­ment for content inte­grity.

    Je suis convaincu que ces gens ont réflé­chi à la ques­tion plus long­temps et plus sérieu­se­ment que moi, mais je ne peux m’em­pê­cher de poser les ques­tions :

    Parler de vie privée c’est parler de confi­den­tia­lité. Vis à vis de qui ? De même, à partir de quand parle-t-on d’ano­ny­mat ?

    Consi­dé­rer que TLS est inutile pour accé­der à une infor­ma­tion publique me semble très étrange. La confi­den­tia­lité n’est pas dans le fait que cette infor­ma­tion soit publique, mais à ce que je consulte ou ce que j’en­voie dans le détail.

    Savoir que j’ac­cède à Face­book est une chose. Savoir quel profil j’uti­lise et ce que j’écris en est une autre, quand bien même les textes en ques­tions sont ne sont pas d’ac­cès restreint. Je ne souhaite pas forcé­ment que l’uni­ver­sité de mon fils puisse lire ce qu’il y écrit via le WIFI local.

    Savoir que j’ac­cède à Wiki­pe­dia est une chose. Savoir que les pages que j’y lis parlent de certains problèmes de sexua­lité en est une autre. Je ne souhaite pas forcé­ment que mon employeur puisse savoir ce que j’y lis pendant ma pause de midi.

    Savoir que je consulte la presse est une chose. Savoir quels sont les articles poli­tiques que je lis et ce que je commente en est une autre. Suivant le pays où je suis, je ne souhaite pas faci­li­ter une éven­tuelle analyse au niveau de mon four­nis­seur d’ac­cès ou du gouver­ne­ment.

    Bref, je suis conscient que l’im­plé­men­ta­tion actuelle des navi­ga­teurs peuvent en théo­rie faci­li­ter le tracking à partir du serveur. Je ne suis pas certain que la tech­nique soit mise en œuvre telle­ment d’autres méthodes plus simples sont effi­caces. La confi­den­tia­lité que ça m’ap­porte compense large­ment ce surcoût.

    La démo­cra­ti­sa­tion de TLS est pour moi une vraie bonne nouvelle.

    I have no objec­tion to the IESG propo­sal to provide infor­ma­tion *also* via https. It would be better to provide content signa­tures and encou­rage mirro­ring

    Je ne nie pas que ça puisse être inté­res­sant, mais l’usage est pour moi tota­le­ment diffé­rent. En fait, à réflé­chir, l’es­sen­tiel des cas où j’ai besoin de garan­tir l’in­té­grité du message sont ceux où j’ai besoin d’une authen­ti­fi­ca­tion, donc où le chif­fre­ment de TLS est aussi néces­saire.

    Propo­ser HTTPS en alter­na­tive me semble aussi une fausse bonne idée. Sur mes deux derniers exemples, j’ai poten­tiel­le­ment non seule­ment besoin que le contenu de ma requête soit confi­den­tielle, mais aussi que mon besoin de confi­den­tia­lité le soit aussi. Que j’uti­lise d’un coup TLS me fera paraitre « louche », ce que juste­ment j’au­rais souhaité éviter. Je l’ai d’ailleurs vu récem­ment dans la presse lors de mises en accu­sa­tion : le fait que les suspects aient utilisé des commu­ni­ca­tions cryp­tées faisait partie des éléments à charge, même sans savoir ce qu’ils ont échangé. Dange­reux, au mieux.

    Plus prag­ma­tique : Il serait facile de bloquer HTTPS pour la plupart des sites publics comme Wiki­pe­dia, Doctis­simo, Twit­ter ou Le Monde, obli­geant les gens à se rabattre sur HTTP. Même les geeks les plus au fait des problèmes ont tendance à accep­ter de dégra­der la commu­ni­ca­tion en clair quand le chif­fre­ment ne passe pas. Rendre TLS option­nel revien­drait à le reti­rer là où juste­ment il est le plus néces­saire.

    Le fait que le web avance pas à pas vers un « TLS unique­ment » est un gros pas en avant pour la confi­den­tia­lité vis à vis de mon envi­ron­ne­ment direct.

    TLS everyw­here is great for large compa­nies with a finan­cial stake in Inter­net centra­li­za­tion. It is even better for those provi­ding iden­tity services and TLS-outsour­cing via CDNs. It’s a shame that the IETF has been abused in this way to promote a campaign that will effec­ti­vely end anony­mous access, under the guise of promo­ting privacy.

    Bref, il y a des choses à faire. Par exemple s’as­su­rer de réduire l’iden­ti­fi­ca­tion possible du navi­ga­teur entre deux requêtes ? (le navi­ga­teur utilise-t-il le même certi­fi­cat à chaque fois ? si c’est ça le problème, il y a certai­ne­ment moyen de faire des rota­tions régu­lières, et de ne pas parta­ger un même certi­fi­cat entre diffé­rentes desti­na­tions).

    Quant à mon anony­mat, il est bien plus vidé de son sens à cause de mon IP qu’à cause du tracking : si j’ai vrai­ment besoin, je peux utili­ser un navi­ga­teur ou un profil diffé­rent pour certaines acti­vi­tés, mais mon IP demande un effort plus impor­tant pour être chan­gée.

    L’autre ques­tion est de savoir auprès de qui est-ce que je cherche le plus à être anonyme, et ce que repré­sente mon iden­tité. Google saura proba­ble­ment me relier à mon email. Mon FAI et mon employeur savent me relier à mon iden­tité civile

    Bref, travaillons à amélio­rer les problèmes de tracking. Ils ne me semblent cepen­dant pas inhé­rents à la tech­no­lo­gie TLS (me trompe-je ?). Ne jetons en tout cas pas le bébé avec l’eau du bain. Surtout si nous n’avons rien à la place.

    Roy T. Fiel­ding nous rappelle le prin­ci­pal danger de TLS et de « SSL partout » : la centra­li­sa­tion des auto­ri­tés de certi­fi­ca­tion. Et par exten­sion du Web.

    C’est un vrai problème, mais qui commence à être dépassé. Le nombre d’au­to­ri­tés de mon Fire­fox se rapproche des 200. Si on consi­dère que ces auto­ri­tés délèguent elles-mêmes à de multiples sous-auto­ri­tés, qui parfois font elles aussi de même, on est loin d’une centra­li­sa­tion déran­geante pour la vie privée. En fait il y a tant de délé­ga­tion que le prin­cipe même d’au­to­rité de confiance devient assez théo­rique.

    Il reste un problème de confiance (auto­rité) et un problème commer­cial. DANE et letsen­crypt sont deux initia­tives qui me font croire qu’on va lais­ser ça derrière nous à moyen (pour letsen­crypt) ou long terme (pour DANE).

    Un client qui sait ne pas réuti­li­ser inuti­le­ment le même certi­fi­cat, qui véri­fie le serveur à l’aide de DANE les écueils de confi­den­tia­lité suivants seront surtout dans SNI, DNS et IP.

  • Il ne peut y avoir de choix démo­cra­tique contre les trai­tés euro­péens

    Il ne peut y avoir de choix démo­cra­tique contre les trai­tés euro­péens.

    Jean Claude Juncker

    et

    Je deman­de­rai aux Grecs de voter oui, indé­pen­dam­ment de la ques­tion qui leur est posée […] voter oui parce que les Grecs fiers d’eux-mêmes et de leur pays doivent dire oui à l’Eu­rope

    Jean Claude Juncker

    …font un excellent résumé de la démo­cra­tie au sein de la commu­nauté euro­péenne. L’Eu­rope est en marche, il ne faut pas l’ar­rê­ter. Toute discus­sion ou tout « non » serait une entrave à de complexes compro­mis ou des avan­cées par ailleurs. Il faut voter oui, quoi qu’on vous pose comme ques­tion, sinon c’est que vous êtes contre l’Eu­rope. D’ailleurs même si vous le vouliez, vous avez signé des trai­tés donc vous n’avez pas le droit de voter contre l’Eu­rope, votez oui.

  • Je ne compte pas renon­cer au moindre de mes droits

    « Monsieur l’agent, si je suis placé en garde à vue ou retenu pour une véri­fi­ca­tion d’iden­tité ou toute autre raison, merci de me le dire et de m’ex­pliquer pourquoi. Si je suis libre de partir, merci de me le dire. Je souhaite exer­cer tous mes droits, y compris celui de garder le silence et mon droit à m’en­tre­te­nir avec un avocat avant de faire la moindre décla­ra­tion. Je ne compte pas renon­cer au moindre de mes droits. Je ne consens à aucune fouille ou perqui­si­tion. Je ne consens pas à vider mes poches ou ouvrir mon sac. Cela ne signi­fie pas que j’y cache quelque chose d’illi­cite. Cela signi­fie que si vous me le deman­dez, j’ai le droit de le refu­ser, et que j’exerce ce droit. Je ne consens à aucune audi­tion libre et souhaite repar­tir dès que possible. Je ne signe­rai aucun procès verbal puisque la loi ne m’oblige pas à le faire, pas plus qu’elle ne m’oblige à en donner les raisons. Je vous prie de ne pas me poser de ques­tions car je ne ferai aucune décla­ra­tion avant d’avoir parlé à un avocat, ce qui ne signi­fie pas que je m’en­gage à en faire après. Merci de respec­ter ces droits. »

    Maître Eolas

    Et je découvre, confirmé par sa réponse, que nous ne sommes pas obli­gés de prêter notre concours pour vider nos poches ou ouvrir nos sacs. Sa réponse laisse entendre que parfois ils peuvent le faire, mais que vous nous n’avons aucune obli­ga­tion de les y aider (ça parait mesquin, mais ça permet de faire la diffé­rence entre les cas où ça dépend de votre consen­te­ment et ceux où nous n’avons pas le choix).

  • Je paye beau­coup plus d’im­pôts depuis que je suis aux États-Unis

    La France est un para­dis fiscal. […] C’est rela­ti­ve­ment facile d’opé­rer une entre­prise en France […] Quand je suis arrivé aux États-Unis j’ai rencon­tré des diffi­cul­tés simi­laires [admi­nis­tra­tives] dans leur complexité. […] Je paye beau­coup plus d’im­pôts depuis que je suis aux États-Unis

    Un entre­pre­neur qui a fait les deux, qui dit que la tracas­se­rie admi­nis­tra­tive française est sur-évaluée, que les impôts sont en réalité plus forts aux États-Unis… ça change. Ajou­tez le coût de main d’œuvre dans les NTIC ou le coût des locaux dans la Sili­con Valley…

    Mais on préfère toujours de plaindre, ça donne des excuses, ça permet d’avoir un peu plus d’aides et de justi­fier quelques opéra­tions peu éthiques.


    Jérôme Lecat (Scality): « Vous ne vous rendez…

  • Préca­ri­sa­tion du modèle social… qui l’était déjà

    Quelqu’un peut-il m’ex­pliquer pourquoi dit-on qu’U­ber s’at­taque à la protec­tion sociale ?

    Certes, les chauf­feurs Uber (pop) sont des indé­pen­dants, à priori auto-entre­pre­neurs. Leur revenu dépend direc­te­ment des courses qu’ils font, sans mini­mum ni sécu­rité d’em­ploi. Uber se charge d’or­ga­ni­ser, acco­ler une marque et faire la mise en rela­tion, préle­vant son pour­cen­tage sans assu­mer les risques des travailleurs.

    Mais ne nous leur­rons pas. La majo­rité des taxis sont des arti­sans, à leur compte eux aussi. Leur revenu dépend direc­te­ment des courses qu’ils font, sans mini­mum ni sécu­rité d’em­ploi. Vous voyez le paral­lèle là ? Leur centrale se charge d’or­ga­ni­ser, acco­ler une marque et faire la mise en rela­tion, préle­vant son pour­cen­tage sans (pour les arti­sans indé­pen­dants) assu­mer les risques des travailleurs.

    Certains taxis, mino­ri­taires, sont sala­riés. Dans ce cas leur mini­mum est vrai­ment mini­mum et leur revenu réel dépend des courses (et certains ajou­te­ront : des courses non décla­rées). Vu que pour ceux là la licence appar­tient à la centrale, que sans ça ils ne peuvent simple­ment pas travailler, diffi­cile de dire qu’ils sont telle­ment moins précaires de toutes façons.

    Je crois même comprendre que certains cumulent : indé­pen­dants mais licence appar­ten­nant à la centrale. Des licences ça se paye, très cher, et ça existe en nombre restreint. Ceux là sont même plus précaires que les chauf­feurs Uber pop, tota­le­ment assujet­tis à leur centrale.

    Je ne dis pas que le modèle social ne pose pas problème, mais c’est fina­le­ment ce qui change le moins vis à vis des taxis. Taper sur Uber pour la préca­ri­sa­tion des emplois de taxi, c’est un peu se moquer du monde, ou alors il faut m’ex­pliquer.


    Et quand bien même, rien ne justi­fie les agres­sions physiques, les chasses à l’homme, ou le blocage des voies publiques. Ces faits là sont punis par de la prison, bien plus graves que l’exer­cice d’une profes­sion sans le bon papier admi­nis­tra­tif.

  • Ce n’est pas une ques­tion d’hu­mour

    Elle renverse son dessert sur sa jupe toute neuve. Hugo lui lance le désor­mais fameux « elle a la trem­blotte, c’est trem­blot­tine ! » avant que tout le monde n’en rie de bon cœur. Elle aussi. Pas de réelle méchan­ceté, juste de l’hu­mour, même si un peu bête.

    On parle de trem­blot­tine quand quelqu’un rate un jet évident au sport ou quand quelqu’un fait tomber quelque chose à terre. On en fait même des blagues, certaines assez drôles et bien pensées, d’autres basiques mais qui fonc­tionnent quand même.

    C’est de l’hu­mour, et personne ne cible vrai­ment Juliette, mais tout le monde fait quand même réfé­rence à elle.

    Au fur et à mesure c’est vécu comme du harcè­le­ment, même si personne n’a cette inten­tion. Elle ne peut plus échap­per à l’évo­ca­tion du person­nage qui a été créé à côté d’elle. La petite Juliette a bien tenté d’y mettre le holà mais elle s’est vite fait rétorquer que ce n’était que de l’hu­mour, qu’elle devait accep­ter le second degré.

    Depuis, les élèves ne la choi­sissent plus au sport pour consti­tuer les équipes. Même l’ins­ti­tu­trice et les parents ne font plus appel à elle quand ils ont besoin d’un volon­taire pour une tâche déli­cate. Elle n’est pas plus mauvaise qu’une autre en sport et est même plus atten­tion­née que la moyenne, tout le monde le recon­nait quand on le demande sérieu­se­ment, mais l’in­cons­cient joue à plein.

    L’an­née dernière elle a perdu tous ses moyens sur une tâche d’adresse à réali­ser devant une foule, parce qu’elle s’est mis une pres­sion forte à devoir prou­ver qu’elle n’était pas trem­blot­ti­ne… ce qui a juste­ment montré le contraire a ses cama­rades.

    Aujourd’­hui elle évite de se mettre dans une telle situa­tion. Même si elle sait que c’est juste une étiquette, elle a inté­gré qu’elle n’est peut être pas aussi adroite que les autres, qu’elle n’a pas forcé­ment matière à viser les travaux d’adresse. De toutes façons on ne lui donne­rait pas, pas sans qu’elle prouve deux fois plus que les autres qu’elle y a droit.

    Aujourd’­hui, non seule­ment elle n’est pas adroite, mais en plus elle manque d’hu­mour.


    Nous avons tous connue un ou une trem­blot­tine à l’école, ou quelle que soit la moque­rie en jeu. Certai­ne­ment plusieurs même. Nous ne faisons pour­tant pas mieux à l’âge adulte. Nous passons juste à une autre échelle, mieux accep­tée, moins person­nelle.

    * * *

    J’ai vécu des années sans comprendre, reje­tant ceux qui expliquaient jour après jour, parfois patiem­ment et poli­ment. Il est telle­ment facile de croire que ce sont les autres qui ne comprennent rien.

    Depuis que le cap de la compré­hen­sion est passé, j’ai beau­coup de compas­sion pour ceux qui conti­nuent, inlas­sa­ble­ment, à tenter d’ex­pliquer encore et toujours la même chose, avec patience. Merci à vous, fémi­nistes, d’avoir fait entrer ça dans ma caboche il y a quelques années, à force de répé­ti­tion et de calmes expli­ca­tions polies. Je ne sais pas si j’au­rais eu votre courage.

    * * *

    Est-ce de l’hu­mour, du second degré ? Peu importe. C’est une réponse à côté de la plaque. Personne n’est là pour juger si c’est drôle ou pas. Le problème c’est de renfor­cer toujours la même fausse image jusqu’à en faire un harcè­le­ment, même s’il est invo­lon­taire. Les dommages humains sont réels, et abso­lu­ment pas aussi légers que la bonne blague.

    On peut certes rire de tout, mais on a aussi une respon­sa­bi­lité quand on renforce encore et toujours les mêmes faux stéréo­types, quand outre l’hu­mour on contri­bue aussi au harcè­le­ment. L’im­pact est réel, concret, durable, bien plus que le sourire obtenu pendant 5 secondes.

    Il y en a aussi quelques uns sur les bruns et les hommes ? Possible, mais pas autant, et c’est surtout oublier que le même mot d’hu­mour n’a pas du tout la même portée et le même impact quand il s’ap­plique au domi­nant ou au dominé.

    Notre droit à rire de tout est-il vrai­ment plus impor­tant que leur droit à vivre sans harcè­le­ment, préjugé ou discri­mi­na­tion, quand bien même ce serait invo­lon­taire et incons­cient ? Fina­le­ment, c’est un peu ça la ques­tion.

    Si je ne rigole pas à ces blagues, si je soutiens l’agaçant person­nage qui parle de sexisme, si moi même je joue les rabats-joie, ce n’est pas une ques­tion d’hu­mour ou de second degré, c’est une ques­tion de société dans laquelle je souhaite vivre.

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    Je ne suis pas d’ac­cord avec tout, surtout sur les solu­tions à appor­ter. Je fais aussi mes erreurs, ai parfois des mots malve­nus. Je ne suis pas forcé­ment meilleur qu’un autre.

    Parfois je les regrette rapi­de­ment. Parfois je refuse de voir et d’en­tendre. Pouvoir être léger en restant aveugle au reste est telle­ment confor­ta­ble…, surtout quand on est soi-même bien à l’abri. Il m’ar­rive même proba­ble­ment de parfois reje­ter ceux qui me le font remarquer, ces gens patients et coura­geux. J’es­père juste que c’est de plus en plus rare.

    On ne sort simple­ment pas d’un claque­ment de doigts d’une ornière construite pendant des années. On y revient dès qu’on ne fait pas atten­tion. L’im­por­tant pour moi est déjà de cher­cher acti­ve­ment à en sortir.

    Je n’ai aucun dédain à casser le rire. S’il me manque trop souvent le courage de ne pas lais­ser faire, au risque de partir dans une trop longue embrouille, je n’ai au moins simple­ment aucune envie de parti­ci­per. Lais­sez-moi ça.

    J’ad­mire ceux qui réagissent et expliquent, de façon construc­tive polie et patiente, tout en sachant qu’ils vont quand même passer pour les casse-pieds de service, pour ne pas dire pire. Merci à eux. Merci à vous.

  • Budget de l’Edu­ca­tion natio­nale

    Parce qu’il est facile de rabâ­cher les mêmes intox sur nos dépenses publiques. Nous consa­crons peu à l’édu­ca­tion, moins que la plupart des pays, y compris ceux chez qui l’édu­ca­tion privée (donc non comp­ta­bi­li­sée ici) est plus impor­tante que chez nous.

    Facile de se moquer du recru­te­ment de fonc­tion­naires à l’édu­ca­tion natio­nale mais quand on regarde les chif­fres…

    La France avait, en 2011, le taux d’en­ca­dre­ment scolaire le plus faible de l’OCDE – même si elle a progressé depuis. Selon le dernier rapport de l’OCDE, sorti en 2014, en ce qui concerne le secon­daire, la France n’est plus dernière mais désor­mais pile dans la moyenne de l’OCDE, soit treize élèves par ensei­gnant.

    Mais surtout, nous inves­tis­sons au mauvais endroit :

    Plus en détail, la France inves­tit surtout dans le secon­daire. En termes d’argent public consa­cré aux collèges et lycées, elle est septième en Europe. Mais pour ce qui est du primaire et de l’en­sei­gne­ment supé­rieur, la France est en dessous de la moyenne euro­péenne, aux alen­tours de la 20e place dans les deux cas.

    Quand juste­ment on se plaint du niveau des élèves à l’en­trée au collè­ge… peut-être faudrait-il se poser des ques­tions et juste­ment augmen­ter les moyens humains.

    — Plus sur l’ar­ticle Desin­tox de Libé­ra­tion.