Auteur/autrice : Éric

  • Lettres de cachet dans Mino­rity report

    Nous sommes telle­ment habi­tués au pire que plus rien ne choque.

    L’État dit juste qu’il inter­pelle dans l’ar­bi­traire le plus total des gens contre qui il n’a aucune charge (préven­tif) et pour lesquels on évite la publi­cité (vue la faci­lité avec laquelle on monte une opéra­tion de commu­ni­ca­tion sur chaque mini-victoire, on peut consi­dé­rer que celles-ci sont volon­tai­re­ment cachées).

    On ne parle pas d’une personne parti­cu­lière pour un risque précis, mais *des* inter­pel­la­tions préven­tives *tous les jours*. Rien que ça.

    Et ça ne choque personne. Je me rappelle du concept de lettre de cachet. Nous n’en sommes pas loin.

    Moi ça me fait peur. Si vous croyez que ça ne touche que des terro­ristes, vous avez quand même extrê­me­ment confiance dans nos gouver­ne­ments. Même ainsi, j’es­père que personne n’ose­rait croire que ça ne peut pas déra­per, que ça ne sera jamais détourné à l’ave­nir, que ça ne pose pas un problème immense pour l’état de droit.

  • [Lecture] Appli­ca­tion SAIP – Le minis­tère de l’In­té­rieur lance un nouveau système d’alerte

    Nommée SAIP, pour système d’alerte et d’in­for­ma­tion des popu­la­tions, l’ap­pli­ca­tion vous permet­tra d’être alerté lors d’évé­ne­ments excep­tion­nels (alertes nucléaire, produits dange­reux, rupture d’ou­vrage hydrau­lique, etc.) suscep­tibles de résul­ter d’un atten­tat, surve­nant dans une zone géogra­phique précise, sous réserve que la géolo­ca­li­sa­tion soit acti­vée et que l’ap­pli­ca­tion soit active.

    via Android France

    Bras­sage de vent.

    Il faut que les gens aient installé l’app. Pas besoin d’être grand sorcier pour penser que ça va concer­ner une poignée de personnes, même à grand renfort de pub.

    Il faudra ensuite que les gens ne l’aient pas désins­tal­lée. Parce que oui, l’app demande un canal data tous les quart d’heure pour télé­char­ger les alertes du moment, plus poten­tiel­le­ment une loca­li­sa­tion (j’es­père qu’ils ne font pas de géolo­ca­li­sa­tion en l’ab­sence d’alerte mais je n’y mettrais pas ma main au feu). Réduire signi­fi­ca­ti­ve­ment l’au­to­no­mie de l’ou­til de tous les jours pour aucun béné­fice direct visible, ça va être diffi­cile à faire accep­ter.

    Il faudra ensuite que la noti­fi­ca­tion serve. La véri­fi­ca­tion de nouvelle alerte se fait toutes les 15 minutes. C’est peu mais ça reste énorme. L’alerte concer­nera un événe­ment vieux d’un quart d’heure. Comme il faut le temps que la chaîne hiérar­chique décide d’en­voyer l’alerte, mettons plutôt un événe­ment vieux d’il y a trente minutes. Ensuite il faudra que la personne ouvre ses noti­fi­ca­tions.

    * * *

    Facile de critiquer mais le bon outil existe : le SMS.

    • On peut envoyer l’in­for­ma­tion unique­ment aux personnes dans le rayon d’ac­tion de l’an­tenne radio concer­née. Pas besoin de géolo­ca­li­sa­tion sur le télé­phone.
    • On peut toucher tout le monde, y compris les étran­gers de passage, sans besoin d’avoir installé une appli­ca­tion spéci­fique aupa­ra­vant.
    • On peut le faire en temps quasi réel, sans la latence de 15 minutes néces­saire pour le télé­char­ge­ment régu­lier de l’app android.
    • On peut le faire sans toucher à l’au­to­no­mie du télé­phone. La veille GSM clas­sique suffit. Il n’est même pas utile d’avoir un canal de donnée activé.

    Mieux, il existe un type de SMS parti­cu­lier dit « flash SMS », prévu spéci­fique­ment pour ce type d’usages, qui s’af­fiche d’of­fice sur le télé­phone, en prio­ri­taire.

    Le défaut ? Il faudrait une loi pour obli­ger les opéra­teurs à relayer ces messages d’alertes (ou au moins une conven­tion, parce que j’ima­gine qu’il serait diffi­cile pour eux de refu­ser publique­ment d’y sous­crire) et… il faudrait payer les envois de SMS. D’après un autre article c’est surtout ce dernier point qui pose problème au gouver­ne­ment.

    C’est sur que c’est moins cher de bras­ser du vent (quoique… l’app a bien du coûter 50k€, plus la licence de la tech­no­lo­gie d’alerte utili­sée et louée par un pres­ta­taire).

    * * *

    Et sinon, pour les vrais qui s’en rappellent, on a juste­ment un SAIP depuis la guerre : un système d’alerte et d’in­for­ma­tion aux popu­la­tions, qu’on teste le midi tous les premiers mercredi du mois via des alarmes bien sonores.

    Sauf qu’on ne prend même pas la peine d’in­for­mer les gens de ce que c’est – de mon expé­rience une partie de mes connais­sances ne le savait même pas – et encore moins les codes pour diffé­ren­cier un test d’une vraie alerte.

    Ce SIAP était prévu pour survivre aux catas­trophes. Aujourd’­hui il est laissé à l’aban­don. On le teste, on inven­to­rie (en théo­rie), mais plus personne n’est en charge de corri­ger les problèmes et assu­rer la main­te­nance (ne parlons même pas de l’étendre aux nouvelles zones d’ha­bi­ta­tion). France Tele­com consi­dère que ce n’est plus son rôle depuis que la société a migré du public au privé. Ni les collec­ti­vi­tés ni l’État ne veulent mettre la main à la poche.

    Le problème est connu depuis long­temps, mais ça ne permet pas de faire des commu­niqués de presse aussi sympa qu’un gadget de smart­phone.

  • Compo­si­tion d’une équipe tech­nique produit

    – Dis, on met quoi dans une équipe tech­nique ?

    Ça dépend du temps, du produit, des besoins. Voici ma recette par défaut, à réagen­cer en fonc­tion de la réalité. Il reste qu’à chaque fois je finis par me dire que j’au­rais aimé la voir suivre ce schéma :

    1 et 2 : Donc au début on commence, il faut un ou deux déve­lop­peurs. Idéa­le­ment à ce niveau ils savent toucher un peu de front et un peu de back, et appré­cient de pouvoir inter­ve­nir partout. Pas d’ad­mi­nis­tra­tion système à cette taille, on exter­na­lise un maxi­mum.


    Petit inter­mé­diaire. Il faut une direc­tion tech­nique avant de passer au troi­sième membre de l’équipe. Ce peut être un direc­teur tech­nique à part entière ou un des deux déve­lop­peurs qui a suffi­sam­ment de bouteille mais il faut quelqu’un qui a une vision tech­nique, et pas un néophyte.


    3 : Le troi­sième c’est le grand oublié : le web desi­gner. Il fait de l’UX, de l’UI, et va défi­nir une vraie expé­rience client. Bien évidem­ment tout dépend du métier et du produit mais recru­ter trop tard est habi­tuel­le­ment une erreur. La mode est de consi­dé­rer que ce profil doit même faire partie des fonda­teurs.

    4 : On complète avec un troi­sième déve­lop­peur. On peut commen­cer à envi­sa­ger un spécia­liste qui apporte une exper­tise qui manque aux deux autres mais il faudra quand même qu’il accepte de toucher un peu à tout.

    5 : L’équipe commence à avan­cer, main­te­nant il lui faut quelqu’un pour donner une direc­tion et prendre du recul. On peut l’ap­pe­ler product owner, respon­sable produit, chef de projet fonc­tion­nel, analyste métier… Il aura pour charge de réflé­chir aux usages, imagi­ner le produit, assu­rer la vision. Ce doit être quelqu’un de dédié, sans posi­tion hiérar­chique sur le reste de l’équipe.

    6 (et 7 ?) : L’équipe avance, dans le bon sens, il reste à lui donner un peu de puis­sance avec un ou deux autres déve­lop­peurs. À partir de quatre déve­lop­peurs c’est la taille où l’ef­fort est démul­ti­plié et où on peut commen­cer à assu­rer les impré­vus, ou les congés de chacun. Au delà de 5 déve­lop­peurs on commence à faire des sous-équipes et ça n’a plus grand inté­rêt.
    Les équipes les plus dyna­miques avec lesquelles j’ai travaillé ont des déve­lop­peurs qui travaillent tous sur l’in­té­gra­lité du produit mais on peut aussi avoir quelques experts qui inter­viennent essen­tiel­le­ment sur leur domaine de compé­tence.

    8 : Second grand oublié : Le dev op – ou sys admin, peu importe le nom. Son rôle est d’as­su­rer la produc­tion mais sa réelle valeur est de flui­di­fier tout l’ou­tillage interne, comme la plate­forme d’in­té­gra­tion conti­nue ou les scripts de déploie­ment.
    Il n’a d’in­té­rêt qu’a­vec une équipe qui tourne, mais s’en passer c’est comme conti­nuer en gardant un boulet aux pieds. Avant ce sont les déve­lop­peurs qui sont obli­gés de perdre du temps et du focus avec tout ça.

    9 : Je vais à neuf avant de m’ar­rê­ter mais j’ajoute quand même un dernier profil avec un tech­ni­cien. C’est lui qui va assu­rer les tâches d’ex­ploi­ta­tion courantes, s’oc­cu­per du support tech­nique, du support utili­sa­teur, et soula­ger le product owner.
    On peut s’en passer mais c’est au prix d’un manque de focus non négli­geable, donc d’un peu de gâchis.


    Je n’ai pas parlé de mana­ger mais à neuf le besoin s’est peut-être déjà fait sentir depuis un petit moment. S’il existe, il peut faire le dixième. Le problème du mana­ger mérite plus d’un billet mais je retiens une règle : ni la direc­tion commer­ciale de la société, ni le product owner de l’équipe. Ce peut être le CTO qui gère la direc­tion tech­nique décrite plus haut.


    Je n’ai pas mis de QA non plus. Je conti­nue à penser que l’équipe doit être respon­sable de ce qu’elle livre. Une QA sépa­rée à tendance à déres­pon­sa­bi­li­ser mais aussi à ajou­ter de la distance avec la réalité et du délai lors des livrai­sons. Ça aura du sens quand il y aura plusieurs équipes, pas tout de suite. Le dev op pourra par contre outiller et auto­ma­ti­ser un maxi­mum de tests et de proces­sus entre temps.


    Et vous, vous conseillez quoi comme compo­si­tion ? Qu’ai-je oublié ?

  • Dessin dans le dos

    On parle de pains au choco­lat et de choco­la­tines mais j’ai plus grave : certains éditent des t-shirt avec l’illus­tra­tion devant au lieu de la mettre dans le dos.

    Fran­che­ment, ça mérite une inscrip­tion au registre du mauvais goût, non ?

    Rappel : ok pour un rappel en écus­son au niveau du cœur mais le dessin grande taille il va derrière, dans le dos. Toute autre concep­tion de la vie est forcé­ment erro­née.

  • [Commen­taire] Scan­dale : Steve McCurry en flagrant délit de Photo­shop

    Steve McCurry, dont la photo­gra­phie la plus connue est le portrait de Shar­bat Gula, une jeune afghane de 13 ans réfu­giée au Pakis­tan, est actuel­le­ment sous le feu des projec­teurs après que le photo­graphe italien Paolo Viglione ait décou­vert un petit « couac » sur l’une des photos de Steve McCurry expo­sées au palais Vena­ria Reale à Turin.

    Sur l’une des images expo­sées, plusieurs détails gênent. La photo­gra­phie est prise à Cuba, dans la rue. En regar­dant l’image, on découvre qu’à plusieurs endroits, le tampon de clonage a été utilisé pour dépla­cer certaines zones de la photo­gra­phie, comme ce bout de trot­toir ou ce poteau jaune de signa­li­sa­tion.

    Ce qui me choque dans cette histoire ce n’est pas tant qu’il retouche les photos – l’exemple ici ne montre aucun détour­ne­ment qui change le sens ou le contexte d’une infor­ma­tion de repor­tage – mais qu’un photo­graphe qu’on consi­dère comme une réfé­rence puisse faire un travail de retouche aussi dégueu­lasse.

    Sérieu­se­ment… le poteau est dans le vide à côté de son pied et le passant a vu dispa­raitre le sien. Même moi je ne lais­se­rais par des trucs à moitié aussi gros­siers. Je ne comprends juste pas.

    Le débat sur les retouches reste inté­res­sant cepen­dant. Je trouve inté­res­sant qu’il rappelle que le travail c’est aussi créer des images pour (se) faire plai­sir.

    Hors les photo­gra­phies à objec­tif de repor­tage à visée d’in­for­ma­tion – et encore – je ne comprends pas ce qui pousse certains à refu­ser les retouches. Même les photos à déve­lop­pe­ment manuel faisaient toujours l’objet de choix et de trai­te­ment, parfois lourds, pour créer l’image finale.

    Plus tard, j’ai couvert d’autres guerres et des conflits civils au Moyen-Orient et ailleurs et ai produit des essais photo­gra­phiques pour des maga­zines, mais comme tous les autres artistes, ma carrière est passée par plusieurs stades

    Aujourd’­hui, je défi­ni­rai mon travail comme « conteur d’his­toire visuel » (visual story­tel­ling en anglais) parce que mes images ont été réali­sées dans beau­coup d’en­droits, pour beau­coup de raisons et dans beau­coup de situa­tions. La majeure partie de mon travail récent a été réalisé pour mon propre plai­sir dans des endroits que je souhai­tais visi­ter afin de satis­faire ma curio­sité, sur les peuples et la culture.

    Il reste que la dernière excuse est bien moche.

    J’es­saie d’être aussi impliqué que possible dans la revue et la super­vi­sion de l’im­pres­sion des photos, mais très souvent les tirages sont réali­sés et envoyés lorsque je suis absent. C’est ce qui est arrivé dans ce cas. Bien entendu, ce qui est arrivé avec cette image est une erreur pour laquelle je dois prendre mes respon­sa­bi­li­tés.

    Le déve­lop­pe­ment et trai­te­ment – partie créa­tive essen­tielle qu’il assume quand il dit créer des images plus que de faire du photo­re­por­tage – est laissé à des tiers, sans même de revue de vali­da­tion, alors que c’est son seul nom qui est soumis avec les images.

    Quitte à parler d’éthique, c’est plus ça qui me gêne que la retouche elle-même.

     

  • De la violence légi­time

    On m’a inculqué dès mon jeune âge que la violence doit être le dernier recours. Encore plus la violence physique. Encore plus celle qui se fait contre des indi­vi­dus.

    De mon éduca­tion j’ai tiré une aver­sion impor­tante pour toute forme de trans­gres­sion, moi qui n’en ai jamais eu besoin.

    Au fur et à mesure j’ap­prends, et cette bulle (ainsi que le reste de la planche) exprime une réalité impor­tante avant de critiquer toute action de révolte. Quand c’est l’op­pres­seur qui fait les règle, la violence de l’op­pressé peut se discu­ter.

    Il reste que la situa­tion est compliquée.

    Je comprends que certains mani­fes­tants cherchent à forcer un barrage, que des écolo­gistes démontent un Mac Do, ou qu’ils fauchent un champ d’OGM.

    Je ne vais donc pas dire que je soutiens – ce n’est pas mon mode d’ac­tion – mais au moins je peux comprendre que ça puisse être perti­nent ou légi­time. C’est d’au­tant plus vrai quand on suit les prin­cipes de déso­béis­sance civile et qu’on est prêt à assu­mer les consé­quences légales de ses actes.

    Ça n’est pas un chèque en blanc non plus. Tout n’est pas accep­table simple­ment parce qu’on lutte contre une oppres­sion ressen­tie, et en parti­cu­lier les violences contre les indi­vi­dus ou les violences gratuites qui n’ap­portent rien à la lutte.

    Pour prendre un exemple concret : on peut argu­men­ter autant qu’on veut sur le fumi­gène qui a récem­ment mis feu à une voiture de police mais frap­per à coups de barre le poli­cier désarmé, non offen­sif et isolé qui sort de sa voiture en train de prendre feu, je ne vois toujours pas comment l’ac­cep­ter.

    En face, quand bien même ils repré­sentent l’op­pres­seur supposé, il y a des humains, et il ne faut pas l’ou­blier.

  • Le géoblo­cage ne s’ap­pliquera pas aux livres numé­riques


    Merci au SNE de s’en réjouir.

    Il aurait été telle­ment dommage de diffu­ser la culture française à l’in­ter­na­tio­nal, de permettre d’ac­cé­der faci­le­ment à la tota­lité de l’offre édito­riale en français aux étran­gers qui apprennent ou parlent notre langue, de chez eux ou de passage chez nous, ainsi qu’aux expa­triés et aux français en voyage à l’étran­ger…

    La problé­ma­tique est la même dans l’autre sens : Pour les français d’ac­cé­der aux livres en version non traduite, d’ici ou pendant leurs voyages à l’étran­ger.

    Je suis bien au courant des problé­ma­tiques que pose la vente trans­fron­ta­lière. Il y a les problèmes des légis­la­tions natio­nales comme le prix unique du livre en France et la concur­rence faus­sée qui peut en naître.

    Il y a les éditeurs qui eux-mêmes n’ont pas toujours acquis des droits qui leur permettent de vendre en dehors d’une zone bien défi­nie – ou qui ne souhaitent pas le faire pour pouvoir revendre ces droits à d’autres éditeurs locaux.

    Pour autant, ce ne sont que des problèmes pratiques qu’il serait temps de commen­cer à dépas­ser. C’est d’ailleurs bien l’in­ten­tion du règle­ment euro­péen sur le géoblo­cage : mettre fin à ces situa­tions ubuesques.

    Dire que c’est complexe, que ça néces­site du temps, ça oui. Mais bon, ça fait long­temps qu’on en parle et à part faire barrage, on ne voit pas beau­coup d’ac­tions. Appuyer chaque mesure qui évite d’ou­vrir la culture et s’en réjouir, ça c’est un peu dommage.


    On notera que le « immé­dia­te­ment » de la cita­tion d’ori­gine n’a été ajouté qu’a­près coup, suite aux réac­tions indi­gnées. Vous en concluez ce que vous voulez, surtout que l’in­ten­tion n’a jamais été de simple­ment deman­der une période de tran­si­tion.

  • Mention bot, cibler la revue de code

    À La Ruche qui Dit Oui, comme dans mon équipe précé­dente, on fait des revues de code avec la règle des deux pouces. Pour qu’une modi­fi­ca­tion appli­ca­tive passe en produc­tion il faut qu’elle soit vali­dée par deux pairs, qui vont mettre un ? (le feed­back par emoji, si vous n’avez pas essayé, vous manquez quelque chose).

    En discu­tant avec les équipes d’Al­go­lia, on m’a pointé mention-bot. L’idée est simple : avec un git blame on repère qui est le déve­lop­peur qui a le plus travaillé sur ces parties de code et on le mentionne expli­ci­te­ment auto­ma­tique­ment comme parti­ci­pant poten­tiel à la revue.

    Do you have a GitHub project that is too big for people to subscribe to all the noti­fi­ca­tions? The mention bot will auto­ma­ti­cally mention poten­tial revie­wers on pull requests. It helps getting faster turna­round on pull requests by invol­ving the right people early on.

    Je ne sais pas si ça va vrai­ment s’in­té­grer à notre struc­tu­ra­tion par équipes ici (le déve­lop­peur ciblé risque d’être sur un autre équipe, donc pas la meilleure personne pour faire la revue sur le projet en cours) mais je partage quand même.

  • Vote dans une répu­blique apai­sée, aujourd’­hui et demain

    Il propose alors un système permet­tant aux citoyens soit de lais­ser faire leurs dépu­tés, soit de voter direc­te­ment les lois sur Inter­net. Quand un citoyen s’ex­prime direc­te­ment, sa portion de vote est décomp­tée à tous les parle­men­taires sans distinc­tion. Il s’agit d’ins­tau­rer un droit de veto que « les citoyens exer­ce­raient contre les lois qui leur portent préju­dice. Ils obli­ge­raient ainsi ceux qui dirigent et légi­fèrent à penser beau­coup plus à ce qu’ils vont faire, à faire des lois qui profitent à tous, sinon tout le monde s’y oppo­sera ».

    L’idée est inté­res­sante en ce qu’elle permet la démo­cra­tie directe sans impo­ser à tout un chacun de se dépla­cer pour tout tout le temps. On assure aussi une grada­tion puisque le groupe qui a une opinion assez forte sur un sujet pour s’y expri­mer direc­te­ment a une influence plus forte que ceux qui laissent faire.

    Il y a d’autres biais, comme sur-repré­sen­ter ceux qui ont le temps de s’in­ves­tir par rapport aux autres. Il y a d’autres problèmes, comme encou­ra­ger les gens à expri­mer une opinion rapide, donc souvent infor­mée unique­ment sur la base des cari­ca­tures ou des résu­més portées dans les média.

    Malgré ces défauts, l’idée reste sédui­sante. Ce n’est pas comme si le système actuel n’avait pas des défauts large­ment aussi grands. J’ai bon espoir que le regain de contrôle que pren­draient les citoyens pour­rait relan­cer un peu l’es­prit poli­tique, et donc contre-balan­cer ces défauts.

    * * *

    Ce qui me gêne ce n’est pas tout ça, c’est que par la force des choses on imagine faire repo­ser toute la struc­ture sur le vote élec­tro­nique, encore une fois.

    C’est vrai que c’est pratique mais aujourd’­hui, en l’état de nos connais­sances, le vote élec­tro­nique peut garan­tir la sincé­rité du résul­tat ou le secret du vote, jamais les deux à la fois.

    Là nous ne parlons pas d’un petit défaut mais d’un défaut majeur, de ceux qui font écrou­ler tout un système.

    * * *

    Nous votons aujourd’­hui dans une répu­blique rela­ti­ve­ment apai­sée. Oui, malgré tout ce qui se passe, j’as­sume de le dire.

    Aujourd’­hui reti­rer le secret du vote amène­rait de graves consé­quences pour la démo­cra­tie et pour les citoyens, mais ne chan­ge­rait pas forcé­ment signi­fi­ca­ti­ve­ment le résul­tat en bout d’élec­tion.

    Aujourd’­hui lais­ser le gouver­ne­ment, une auto­rité indé­pen­dante ou un groupe d’ex­perts garan­tir le fonc­tion­ne­ment d’un vote élec­tro­nique ne serait pas un risque impor­tant. Je leur fait rela­ti­ve­ment confiance pour ne pas tricher à ce point.

    Mais demain ?

    Demain expri­mer publique­ment certaines opinions fera porter un risque sérieux sur soi ou sur ses proches.

    Demain le pouvoir aura suffi­sam­ment de poids et assez peu de respect pour oser tricher à grande échelle sur les votes natio­naux, surtout s’il sait qu’il n’y aura pas vrai­ment de traces.

    Les choix je les prends en fonc­tion de demain, pas unique­ment d’aujourd’­hui.

    * * *

    Il ne s’agit pas d’être pessi­miste. Comme dans la maxime « après la pluie vient le beau temps », la ques­tion n’est pas de savoir « si » mais de savoir « quand ». Un jour la situa­tion sera grave.

    Ce demain existe d’ailleurs déjà à plus d’un endroit du globe. Il a aussi existé plus d’une fois dans notre passé à nous. C’est dire combien il est crédible.

    Il suffit parfois de peu, et notre actua­lité le montre encore. Un atten­tat terro­riste et nous sommes prêts à sacri­fier quelques liber­tés. Il suffi­rait d’un quelque chose pour que le futur soit diffé­rent, que les volon­tés ne se résument pas à des jeux poli­tiques en vue de la prochaine élec­tion. Des guerres ont été déclen­chées pour si peu.

    Notre répu­blique apai­sée est encore jeune, fragile. Demain ne sera pas aussi beau. Le système de vote actuel avec le secret du vote et la trans­pa­rence de l’urne ne suffira pas forcé­ment à empê­cher des jours noirs, mais il peut tout de même éviter certains futurs, en frei­ner d’autres, ou donner des leviers pour en sortir plus rapi­de­ment.

    * * *

    Une chose est certaine, sans sacra­li­ser le système actuel – encore moins le vote lui-même – je ne suis pas prêt à imagi­ner aujourd’­hui le vote élec­tro­nique là où il n’est pas indis­pen­sable. Ce serait dange­reux, un peu pour aujourd’­hui, beau­coup pour demain.

    S’il vous plait, aidez-moi à faire un barrage systé­ma­tique à au vote élec­tro­nique. J’ai un fils. Je veux lui lais­ser une frac­tion du rêve démo­cra­tique.

  • Nous nous habi­tuons, et c’est grave

    L’ac­cep­ta­tion gran­dis­sante de l’op­pres­sion quoti­dienne me fait peur.

    ( J’ai vu une vidéo (*) il y a quelques jours où la police a demandé à un mendiant de défaire ses deux prothèses aux jambes, posé toutes ses posses­sions devant lui, lui qui n’avait déjà plus qu’un bras. La vidéo montre la police qui s’en va après, sans répondre aux inter­pel­la­tions, et le mendiant qui tente de tout raccro­cher et remettre son jean avec l’aide d’un passant et de son seul bras. Violence et humi­lia­tion sont le quoti­dien.)

    J’ai vu une vidéo hier où on voyait les senti­nelles de l’ar­mée avec leur famas soute­nir une simple inter­pel­la­tion de police un peu exces­sive et qui se faisait près d’eux, face à la foule. Je suis certain qu’ils n’avaient que de bonnes inten­tions mais le problème est énorme. Nous nous habi­tuons.

    Aujourd’­hui je croise un vigile privé derrière le contrôle à l’em­barque­ment SNCF. Rien de forcé­ment anor­mal, au cas où un voya­geur contrôlé s’ex­cite. Vigile en noir avec bras­sard orange, rangers aux pieds, équipé de gants de combat coqués orien­tés poing améri­cain.

    Sur Inter­net je trouve les mêmes, dans des boutiques para-mili­taires, orienté inter­ven­tion et marqué « forces de l’ordre – mili­taires ».

    Tout ça semble normal mais je veux qu’on m’ex­plique. Je ne parle pas de la police ferro­viaire, qui même si elle est armée ne se permet­trait pas un tel accou­tre­ment, mais bien d’un vigile privé, les mêmes qu’on trouve devant les super­mar­chés… en gants de combat, dans une simple mission d’ac­com­pa­gne­ment pour un filtrage pré-embarque­ment.

    Des vigiles privés habillés pour la bagarre. Contrô­leurs, voya­geurs, tout ceci est devenu telle­ment notre quoti­dien que je n’ai vu personne fron­cer les sour­cils.