Avec le ministre de l’Intérieur, nous avons voulu relancer la construction d’un Islam de France, apaisé, indépendant des influences étrangères. Bernard Cazeneuve fera des propositions ce lundi.
L’Etat est là pour réaffirmer ce qui fait, depuis plus d’un siècle, la condition de notre vie en société : la laïcité
— Manuel Valls
Depuis le début, le concept de laïcité à la française est une vaste blague. Deux visions pas franchement conciliables s’opposent et chacun parle de choses différentes.
D’une part la vision modérée, qui s’impose à l’État. L’État est neutre, ne peut promouvoir ni financer aucun culte. À l’inverse, le citoyen est libre de conscience mais aussi de exercer et manifester sa religion, y compris dans l’espace public. Mieux : C’est le rôle de l’État que d’assurer ces libertés.
D’autre part la vision radicale. Elle ne s’impose plus à l’État mais au citoyen. Là il s’agit de retirer la religion de l’espace public pour la renvoyer à l’intime et au privé. Les manifestations publiques des religions ne sont que des aménagements historiques propres à disparaitre ou être limités à l’insignifiant tel une croix sous une chemise.
Malgré ce qu’on pourrait penser en écoutant nos élus aujourd’hui, c’est la vision modérée d’Aristide Brian qui est portée par notre droit, via la loi de 1905.
Il faut dire que la vision radicale serait contraire aux conventions internationales des droits de l’Homme. Oui, rien que ça.
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Seul ce qui porte atteinte à la sécurité, à la santé, à l’ordre public ou aux droits des autres peut être interdit. Même là, l’importance pour l’État d’assurer la liberté de culte a amené à faire des compromis, par exemple sur l’abattage rituel des animaux à des fins religieuses. Ces principes ont été rappelés récemment par le Conseil d’État. Oui, rien que ça.
Qu’un premier ministre ose dire quel habillement est ou n’est pas légitime dans une religion, qu’il prétendre construire et orienter les choix d’une religion, est en violation directe avec la vision de notre droit.
#Sarkozy : « Nous ne voulons pas de signe extérieur de religion dans notre pays » #Touquet
— mael thierry (@maelthierry) 27 août 2016
Il n’est pas le seul, c’est quasiment toute notre classe politique qui est plus ou moins directement en dehors des clous, au point qu’il serait plus simple de lister ceux qui défendent nos lois et notre constitution.
Avec un peu de recul, entre une vision qui restreint l’État à une situation neutre en donnant la liberté au citoyen et une vision qui restreint le citoyen en permettant à l’État d’en assurer le contrôle… est-ce vraiment étonnant que nos élus cherche à avancer sur la seconde ?
Ce qui est étonnant c’est qu’on les laisse faire. Ça me dépasse encore. Dans d’autres pays il y aurait eu démission et opprobre publique pour bien moins que ça.
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La laïcité n’est qu’un exemple. N’allez pas argumenter sur le Burkini dans les commentaires. Il en va de même quand on parle de respecter la constitution dans le processus législatif.
Là aussi, ce qui m’inquiète c’est qu’on laisse faire. Chaque renoncement, chaque acceptation de ces entailles publiques à nos textes fondateurs nous rapproche chaque jour de la fin de ces derniers.
La plus grande menace est intérieure. Elle ne vient pas de l’Islam. Elle vient de notre laissé faire, de la caste des gouvernants qui s’affranchit du cadre donné par la constitution et par les citoyens. C’est pourtant ce qui distingue un État de droit d’une dictature.
La France a décidément bien du mal à abandonner sa monarchie. L’élire tous les quatre à cinq ans ne la fait pas disparaitre.
4 réponses à “De ces entailles publiques à nos textes fondateurs”
Oui d’autant que s’ils appliquent à la lettre leur position sur une laïcité où la religion ne s’affiche pas. Il va falloir faire tomber les églises, car les clochers sont un prosélytisme évident. Couvrir aussi les couvertures de livres religieux.
Et puis la grosse tarte à la crème : « la construction d’un Islam de France » ce qui revient à définir une religion sanctifiée par l’état. Ma laïcité en prend un coup. Il y a déjà des lois en France. Elles existent. La pratique religieuse ne peut pas s’absoudre de la réalité des lois locales. C’est pour cela que la France a déjà un cadre précis sur les dérives sectaires.
Et mon petit doigt me dit que les hommes politiques préfèrent parler de cela, plutôt que des vrais problèmes de société (par-ce que c’est certainement plus facile d’être dans la parole courte que dans la réflexion et l’action à long terme).
Je suis d’accord sur le principe mais je pense que ton analyse est inversée : je ne pense pas que les politiques tentent de nous imposer leur vision des choses, je pense qu’ils draguent ceux qu’ils estiment être en plus grand nombre parmi les électeurs. Et ceux là même n’ont pas spécialement de problème d’ordre religieux pour la plupart, ça met juste socialement un peu moins mal à l’aise de parler de religion que de parler de race.
« Il y a quand même moins d’étranger que de racistes en France » disait-il il y a une quarantaine d’années
Mais cette drague, c’est le boulot d’un politique en fait, comment le leur reprocher ? Et compter sur un professionnel de la politique pour remettre en cause la notion de professionnalisation de la politique … « On est pas dans la merde … »
Oui ils surfent, mais uniquement là où ça les arrange. Je ne met derrière aucun complot ni volonté de contrôle du peuple. Juste que l’inclinaison est là, parce qu’une fois au pouvoir il est plus facile de penser à un pouvoir qui contrôle le peuple qu’à un peuple qui contrôle le pouvoir.
Pour moi ça revient à ceux qui pensent qu’il est normal d’écraser et exploiter les autres dans le business, qu’il est normal de vouloir dominer l’autre dans les relations. Désolé je n’adhère pas. Chacun est humain et je refuse de donner légitimité aux travers à cause du simple fait qu’ils existent. Non seulement on peut leur reprocher mais on le doit. Et non ce n’est pas le mandat qu’on leur a donné, ça ne l’a jamais été.
Oui je me doutais que j’avais un peu trop résumé mon point de vue pour qu’il soit bien compris. Je n’ai pas dit que je trouvais ça normal en fait, je voulais dire que c’était une conséquence de l’organisation politique, le fait que pour un politicien, il valait mieux chercher à obtenir des voix qu’à diriger la population dans ce qu’il estimait être la bonne direction pour la population. Même un politicien engagé et responsable a besoin d’être élu pour orienter la politique du pays.