Auteur/autrice : Éric

  • « Quoi qu’il en coûte »

    Ces quelques mots du discours de notre Président hier résonnent encore dans mon esprit. En regar­dant le verba­tim c’est normal, et volon­taire : Cette expres­sion appa­raît trois fois telle quelle. Ça ne peut pas être un hasard.

    Mais ça résonne parce que je m’en suis souvenu vis à vis du soutien à l’éco­no­mie. Sur les trois usages, deux sont liés au soutien à l’éco­no­mie. On proté­gera les entre­prises et l’ac­ti­vité quoi qu’il en coûte.

    Ces mots résonnent et me font mal au cœur.

    Ils me font mal parce qu’on n’a jamais osé les sortir pour les SDF qui meurent chaque hiver sur nos pas de portes, pour les fuites d’eau dans les tribu­naux, pour les salles de classe sans chauf­fage, pour les hôpi­taux dont on mesure aujourd’­hui la satu­ra­tion et où parfois certains meurent dans les couloirs.

    Les pauvres, la justice, l’édu­ca­tion et la santé ne méri­taient visi­ble­ment pas ce quoi qu’il en coûte. Si on parle des malades aujourd’­hui, mon esprit cynique me fait croire que c’est unique­ment parce que l’am­pleur actuelle aurait un impact sur l’éco­no­mie.

    Même en dehors du quoti­dien, on a une vague de réfu­giés gigan­tesque, des morts sur nos côtes, à nos fron­tières ou sur le chemin pour y arri­ver. On a un défi comme jamais l’hu­ma­nité n’en a connu avec l’évo­lu­tion du climat.

    Même là, on peine à sortir les grandes mesures et jamais nous n’avons eu un quoi qu’il en coûte. Un mois d’ar­rêt de la produc­tion c’est comme si c’était la fin du monde. Quand on parle effec­ti­ve­ment de la fin du monde tel qu’on le connait, là on ne va surtout pas trop vite pour ne pas impac­ter la produc­tion.

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    Je ne conteste pas les déci­sions annon­cées. Si ce n’est l’hy­po­cri­sie de saluer les services publics, le système de santé et l’im­pli­ca­tion des fonc­tion­naires après avoir cher­ché à casser ces modèles peu avant, je n’ai rien à dire sur le fond.

    Je vois juste que, quand on le souhaite, on peut réser­ver les ressources et prendre des mesures graves, quoi qu’il en coûte. Je regrette que tout ce qu’il a salué hier ou les grands discours sur le climat, eux, ne justi­fiaient pas à ses yeux la même néces­sité impé­rieuse.

    Oui Ron, il est temps de revoir l’ordre de nos prio­ri­tés.

  • Protégé : J’ai sauté dans le vide, par sécu­rité

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  • Strea­ming Netflix et carbone

    Je ne pouvais pas suppor­ter cette étude qui clas­sait la consul­ta­tion de vidéo en strea­ming quasi­ment au même niveau qu’al­ler cher­cher le char­bon de son barbe­cue en pickup 4×4.

    Ok, j’exa­gère, mais les chiffres sortis ne semblaient réalistes à personne autour de moi et… c’est confirmé : Ils ne l’étaient pas. On parle quand même d’une erreur d’un facteur 30 à 60. Rien que ça. L’étude a été jusqu’à confondre bits et octets dans les mesures de trafic.

    Cela dit, oui ça consomme, et il faut donc faire atten­tion.

    La clef c’est toute­fois aussi que tout ce qu’on fait consomme. Si vous rempla­cez le strea­ming par un DVD, il faudra quand même comp­ter la TV dans le calcul (il l’était dans le décompte pour Netflix), y ajou­ter aussi la produc­tion, le trans­port et le stockage du DVD, y compris la voiture pour aller l’ache­ter ou vous le faire livrer, ainsi que la consom­ma­tion élec­trique du lecteur DVD et son coût de construc­tion – trai­te­ment en propor­tion du vision­nage.

    Ça vous parait un peu flou ? Le « bon sens » propo­sait par exemple de lire un bon livre en lieu et place de votre série Netflix. Sauf qu’un livre c’est 2,7 kg de CO2. Si on reprend l’étude corri­gée, un livre c’est 25 à 50h de Netflix (27 à 57 gr par demie-heure). Même les études opti­mistes proposent au moins 1,1 kg de CO2 par livre de poche (et plus pour les grand formats), donc une dizaine d’heures sur Netflix. Sauf si vous lisez très lente­ment ou qu’il est repar­tagé de multiples fois, mieux vaut faire du strea­ming Netflix (et c’est encore plus vrai en France où notre élec­tri­cité produit très peu de carbone).


    Comme l’objec­tif de mes compa­rai­sons semble mal comprise, je précise : Mon but n’est pas de déga­ger un gagnant, ni d’op­po­ser lecture et strea­ming. Il y a plein de variables (combien de fois lit-on le livre, comment est-il trans­mis, combien de personne devant l’écran de strea­ming…)et la ques­tion n’a pas grand inté­rêt. Le message de fond n’est pas non plus de dire « on s’en fout tout va bien », mais juste d’ar­rê­ter d’ima­gi­ner le strea­ming comme tota­le­ment hors de propor­tion par rapport à nos autres acti­vi­tés jugées habi­tuel­le­ment raison­nables.

  • Chan­ger d’ac­ces­soire lumière

    Il parait que je fais du stro­­bisme. Joli nom, n’est-ce pas ? Essen­­tiel­­le­­ment j’ai un flash déporté avec un pied et un diffu­­seur.

    J’ai remplacé mon flash mais j’avais aussi mon pied qui avait cassé il y a peu et mon petit diffu­seur A5 de voyage faisait pâle figure face à mes envies de vraie boite à lumière.

    La vraie contrainte : Ça doit me char­ger et m’en­com­brer un mini­mum quand je pars sur Paris avec ma valise. Boîtier, flash, objec­tifs et acces­soires divers, ça commence à déjà occu­per l’es­sen­tiel de la place.

    Le pied

    Je cher­chais un pied léger, qui monte à 2 mètres 20, si possible qui rentre dans une valise au format cabine. Oh, et plus de 50 €.

    Je n’ai évidem­ment pas trouvé. On m’a prêté un pied récem­ment et le poids comme la taille m’ont semblé déme­su­rés pour mes trajets sur Paris.

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    Je me suis fina­le­ment fixé sur un K&F. Je ne monte qu’à 2 mètres, il n’est pas très fin, mais sinon tout corres­pond. Moins de 1 Kg dans la valise, il faut faire des compro­mis. S’il est en limite de stabi­lité à pleine hauteur chargé avec flash et boite à lumière, il y a un crochet pour ajou­ter un contre­poids. Ça le fera.

    La boite à lumière

    J’avais un petit truc de voyage format A5 pour juste adou­cir un peu le flash. J’ai voulu voir ce que ça donnait et une octo­box para­pluie c’est effec­ti­ve­ment top. Seul reproche : C’est volu­mi­neux et je bloque encore une fois avec mes contraintes de trans­port. Ça doit tenir dans la valise, ou au moins ne pas être volu­mi­neux à côté.

    J’ai trouvé une Godox 80×80 pliable. C’est carré et pas octo­go­nal, ça va bloquer les puristes, mais ça se plie dans un petit sac à plat et c’est accom­pa­gné d’un adap­ta­teur pour flash cobra. Exac­te­ment ce dont j’ai besoin. Suivant la taille et le modèle, c’est entre 30 et 70 €. Accep­table.

    La fixa­tion n’est pas très rassu­rante, le pliage n’est pas évident, mais c’est infi­ni­ment mieux que les para­pluies à monture Bowens type S qui imposent de se trim­bal­ler un tube de 15 cm de diamètre.

  • Protégé : Consen­te­ment et pres­sion

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  • Combien j’au­rais aimé un mana­ger

    J’ai du mal avec la détes­ta­tion française du mana­ger.

    Vous ne pouvez pas savoir combien j’au­rai bien aimé, moi avoir quelqu’un a qui remon­ter mes diffi­cul­tés, qui puisse m’y conseiller, m’orien­ter. À qui parler équi­libre pro et perso ou évolu­tion long terme dans mon métier. Quelqu’un qui sache me dire ce qui ne va pas mais dans une optique d’amé­lio­ra­tion plutôt que dans une optique de reproche.

    Vous pouvez appe­ler ça senior, mentor, réfé­rent ou ce que vous voulez. Je l’ap­pelle juste mana­ger. Ça m’a telle­ment manqué que j’ai voulu le faire pour les autres.

    J’ai parfois l’im­pres­sion qu’en confon­dant le mana­ger et le mauvais capo­ral, certains font une prophé­tie auto-réali­sa­trice.

  • Chan­ger de flash

    Il parait que je fais du stro­bisme. Joli nom, n’est-ce pas ? Essen­tiel­le­ment j’ai un flash déporté avec un pied et un diffu­seur.

    Je suis passé à Sony pour le boîtier et mon ancien maté­riel n’est plus compa­tible. Je vous partage mes notes et retours en vue du rempla­ce­ment.

    Trans­mis­sion

    Mon vieux boîtier Nikon avait un mini flash embarqué. C’était moche même pour débou­cher les ombres mais ça savait envoyer des pré-flash pour contrô­ler un dispo­si­tif externe. Pour peu que l’ex­terne gérait le bon proto­cole, je pouvais régler puis­sance, zoom et groupe à distance depuis le boîtier. Même le TTL pouvait fonc­tion­ner en déporté.

    J’avoue, je suis très frus­tré, les boîtiers hybrides Sony n’ont rien de tout ça. À défaut de mini flash sur la boîtier, je m’at­ten­dais à avoir un dispo­si­tif radio équi­valent. Malgré le prix, rien, nada. Il faut ajou­ter un gros contrô­leur disgra­cieux sur la griffe porte-acces­soires.

    Il y a grosso modo trois proto­coles envi­sa­geables pour Sony : Sony, Cactus ou Godox. Le premier est hors de prix, à exclure d’of­fice. Les deux autres savent pilo­ter plusieurs groupes en puis­sance, zoom, et même TTL.

    Récep­tion

    Récep­teur dédié

    Un récep­teur c’est 40 à 60 €, à placer sous le flash.

    • Cactus V6 II : envi­ron 60 €
    • Godox X1 : envi­ron 40 €

    Cactus est un peu plus cher mais sait faire commu­niquer des boîtiers et flash de marque diffé­rentes. Si vous avez tout un système de flash d’une ancienne marque que vous ne voulez pas revendre, c’est la seule solu­tion.

    Flash compa­tible

    S’il faut ache­ter un flash, ou si c’est l’oc­ca­sion d’en adjoindre un second (*), Cactus et Godox proposent tous deux un flash cobra puis­sant qui sait commu­niquer direc­te­ment sans récep­teur addi­tion­nel. Au final c’est moins cher et plus léger à trans­por­ter.
    Note : Si ces flash sont décli­nés par marque, c’est pour la compa­ti­bi­lité au niveau de la griffe. En mode déporté vous pour­rez connec­ter n’im­porte lequel à n’im­porte quel émet­teur.

    • Cactus RF-60X : envi­ron 165 €
    • Godox V860-II : envi­ron 190 €
    • Godox V1-S : envi­ron 330 €

    La puis­sance est parmi les plus hautes pour des cobra de cette taille. La diffé­rence de prix vient surtout de l’au­to­no­mie. Le Godox fonc­tionne avec une batte­rie qui lui donne 4 fois plus d’au­to­no­mie et des temps de rechar­ge­ment au moins 2 fois plus courts. Rien que pour ne me trim­bal­ler des piles de rechanges, pour moi il n’y a pas photo.

    Le Godox V1 est censé être la Rolls. Il n’est cepen­dant pas plus puis­sant mais a une tête ronde censée donner quelque chose de plus sympa une fois projeté.

    Émet­teur

    Côté Cactus il n’y a que le V6 II-S, qui fait tout ce qu’on peut attendre, y compris pilo­ter des récep­teurs compa­tibles avec des marques de flash diffé­rentes du boîter. C’est le même boîtier qui fait émeteur et récep­teur, il faut juste en ache­ter deux.

    Côté Godox il y a trois modèles, X1T-S, Xpro-S et X2T-S.

    • Cactus V6-II-S : envi­ron 60 €
    • Godox X1T-S : envi­ron 40 €
    • Godox X2T-S : envi­ron 60 €
    • Godox XPro : envi­ron 65 €

    Le X1T-S est le moins cher mais avec une ergo­no­mie répu­tée comme discu­table. Le XPro est la version LCD, donc plus pratique, et permet le réglage à distance du zoom de chaque groupe de flash là où les X*T n’offrent qu’un réglage unique global.

    Le X2T-S est le succes­seur du X1T-S. L’er­go­no­mie a été légè­re­ment revue, on a une bague de serrage rapide plutôt qu’une vis à l’an­cienne et on gagne la capa­cité de pilo­ter le tout depuis un smart­phone via blue­tooth.


    Choix

    Je me suis dit que mon ancien flash risquait de rendre l’âme et que je n’avais pas utilité d’en avoir deux (j’uti­lise de moins en moins celui que j’ai et il est inima­gi­nable de me trim­bal­ler deux pieds, deux diffu­seurs et deux flash dans la valise quand je suis hors de chez moi).

    Je suis donc parti pour rempla­cer l’an­cien et je me suis dit la compa­ti­bi­lité inter-marques de Cactus ne m’ap­por­tait rien, que l’au­to­no­mie du Godox V860-II m’était plus utile.

    Je ne sais toujours pas si c’était forcé­ment le meilleur calcul. La dernière fois j’ai effec­ti­ve­ment utilisé les deux flash, en asser­vis­sant l’an­cien flash sur l’éclair du Godox plutôt que par un récep­teur dédié. Ça fonc­tionne, je perds juste la capa­cité de régler à distance la puis­sance de l’an­cien flash, mais c’est accep­table pour un secon­daire. Un mal pour un bien peut-être (*)

    Retours d’uti­li­sa­tion

    Le flash Godox V860-II s’est révélé une très bonne surprise. Il est légè­re­ment plus épais et plus long que mon ancien Metz 50 AF-1, mais rien d’exa­géré. Il vient avec un sabot, une housse qui donne confiance, et son char­geur.

    J’ai fait la dernière séance photo avec mon Metz et le Godox, j’ai du chan­ger les piles du Metz en plein milieu. Rien de grave mais ça veut dire prévoir et embarquer des rechanges avec soi. Ça me conforte dans le fait de ne pas avoir pris le Cactus à piles.

    Un ami m’a prêté le Godox V1. J’ai pu confir­mer ce que j’ai vu dans les compa­ra­tifs vidéos : La puis­sance est simi­laire, et si l’éclai­rage direct d’un mur n’a vrai­ment rien à voir, je suis beau­coup plus dubi­ta­tif sur la diffé­rence de rendu une fois passé au travers d’un diffu­seur. Je préfère utili­ser les 140 € de diffé­rence ailleurs.

    Je suis moins enthou­siaste à propos de l’émet­teur. Je n’ai pas de vraie critique mais le choix entre le X2T et le XPro ne me semble pas évident. J’ai pris le premier en le pensant bien plus petit. En pratique ce n’est pas le cas. La seule diffé­rence est que le X2T est à plat alors que le XPro est à 60°. J’y gagne le blue­tooth mais ça me semble un peu gadget.

  • Vieux déve­lop­peur, pas mana­ger

    J’en­tends trop souvent des déve­lop­peurs se plaindre d’être forcés de passer dans le mana­ge­ment pour progres­ser en salaire.

    Déjà ça ne reflète pas la réalité. On est dans un métier où le salaire peut doubler avec l’an­cien­neté. Je doute que ce soit vrai pour tant de métiers que ça dans le privé, pas sans chan­ger tota­le­ment de rôle voire de métier.


    L’enjeu est cepen­dant que, effec­ti­ve­ment, la produc­ti­vité indi­vi­duelle n’est pas propor­tion­nelle avec l’an­cien­neté. On progresse souvent bien plus les premières années que les suivantes.

    À péri­mètre iden­tique, on voit plus faci­le­ment la diffé­rence entre deux déve­lop­peurs avec 2 et 5 ans d’ex­pé­rience qu’entre deux déve­lop­peurs avec 10 et 13 ans d’ex­pé­rience.

    Rien d’anor­mal, donc, que la progres­sion sala­riale le reflète.

    Ce n’est pas « la France qui est en retard sur ces ques­tions », c’est juste l’ap­pli­ca­tion du système de marché. Le salaire dépend de ce que vous appor­tez, pas de votre ancien­neté.


    L’avan­tage c’est qu’a­vec l’ex­pé­rience, norma­le­ment, vous pouvez appor­ter plus que votre code. Le péri­mètre n’a aucune raison d’être iden­tique avec les années.

    Vous pouvez former les plus jeunes et les faire progres­ser. Vous pouvez commu­niquer avec le busi­ness, avec la commu­ni­ca­tion, avec le légal, faire l’in­ter­face, comprendre les enjeux de chacun et propo­ser des solu­tions. Vous pouvez parler coût, main­te­nance et stra­té­gie. Vous pouvez iden­ti­fier les problèmes et les solu­tions, amélio­rer l’or­ga­ni­sa­tion de l’équipe. Etc.

    L’idée c’est de lever la tête de son code et commen­cer à embras­ser un péri­mètre plus large. Vous avez de la chance : Contrai­re­ment à beau­coup d’autres domaines, vous pouvez faire ça sans chan­ger de métier (et sans forcé­ment deve­nir mana­ger).

    Pour ma part j’uti­lise ces termes :

    • Senior : Il va guider, orga­ni­ser, former, servir de mentor ou de sage. Ce n’est pas forcé­ment le plus expert, ni même celui qui a le plus d’an­cien­neté, mais c’est lui qui va faire progres­ser tout le monde ou s’as­su­rer qu’on ne parte pas n’im­porte où. Il est souvent mana­ger mais pas forcé­ment, par contre il y a toujours un aspect de mentor et donc donc pas très loin de l’en­ca­dre­ment.
    • Expert : C’est lui le plus pointu mais pas forcé­ment le plus expé­ri­menté. Parfois il est même rela­ti­ve­ment jeune par rapport aux autres. Il n’y a pas forcé­ment besoin d’ex­pert dans toutes les équipes donc ce n’est pas forcé­ment un débou­ché facile.
    • Lead : Souvent avec du bagage tech­nique signi­fi­ca­tif mais pas forcé­ment un expert. Souvent assez expé­ri­menté mais pas forcé­ment le senior non plus. Souvent avec une dose d’en­ca­dre­ment mais pas forcé­ment non plus. J’at­tends de lui qu’il dirige l’équipe, l’or­ga­nise, donne l’im­pul­sion, comprenne et appré­hende les enjeux, y compris les équi­libres busi­ness, plan­ning, main­te­nance, etc. C’est souvent lui qui s’en­gage et prend les respon­sa­bi­li­tés, et qui sait parler avec tout le monde et a tendance a être suivi par tout le monde.

    Les étiquettes sont forcé­ment limi­ta­tives. Ce ne sont pas les seules façons de voir les choses mais ça permet de mettre des nom sur des rôles et des attentes.

    Un déve­lop­peur avec beau­coup d’an­cien­neté est juste un déve­lop­peur avec beau­coup d’an­cien­neté. S’il n’agit pas comme tel, son ancien­neté ne le trans­forme pas de fait en senior, en expert ou en lead.

    Se conten­ter de ne se préoc­cu­per que de son code person­nel tout en ayant 5 ou 10 ans d’ex­pé­rience est tout à fait respec­table, mais si on ne progresse que peu le salaire en fera autant.


    Ce qui précède est démul­ti­plié par un effet de levier.

    Si vous impac­tez plusieurs personnes, vous pouvez géné­rer une valeur supé­rieure à ce que vous pour­riez obte­nir isolé­ment. Amélio­rez les condi­tions de travail d’une équipe, les dix personnes concer­nées n’aug­men­te­ront peut-être leur produc­ti­vité que 5 % chacun, mais cumulé c’est aussi perti­nent qu’aug­men­ter votre effi­ca­cité person­nelle de 50 %… et bien plus facile.

    Quand l’amé­lio­ra­tion de produc­ti­vité indi­vi­duelle baisse, agir sur le collec­tif a un meilleur retour sur inves­tis­se­ment. Dans mes rôles plus haut, c’est ce que font le senior et le lead.

    L’ex­pert, non seule­ment plus rare, est aussi un rôle plus diffi­cile parce que son effet de levier est beau­coup plus complexe à obte­nir (et à quan­ti­fier). Or, quand les déve­lop­peurs parlent d’une progres­sion de carrière « sans mana­ge­ment », ils ont tendance à imagi­ner un expert.

    Je pense que le mythe du « il faut faire mana­ger » vient en partie de là. Un déve­lop­peur avec beau­coup d’ex­pé­rience qui ne perçoit pas son rôle collec­tif a besoin de faire une sacré diffé­rence de produc­tion indi­vi­duelle par rapport aux plus jeunes pour justi­fier son salaire. Au bout d’un moment ça n’est plus viable et le salaire stagne. Le problème n’est pas de faire du mana­ge­ment ou pas, mais de lever un peu la tête pour voir ce qu’on peut appor­ter, où et comment.


    Post-scrip­tum : On vous intro­ni­sera parfois expli­ci­te­ment comme lead alors que vous ne l’étiez pas aupa­ra­vant, plus rare­ment comme expert. Ça n’ar­ri­vera quasi­ment jamais comme senior. De mon expé­rience dire à quelqu’un « désor­mais tu es senior » n’a jamais fonc­tionné. C’est quand on l’est et qu’on agit comme tel qu’on peut ensuite s’y faire recon­naître.

  • « Ce n’est pas une ques­tion, c’est une remarque »

    J’ai encore vu une moque­rie sur le « ce n’est pas une ques­tion, c’est une remarque » en confé­rences.

    Chacun fait comme il veut mais je l’écris ici au moins pour les fois où je serai sur scène à l’ave­nir : Surtout faites des remarques.

    Que quelqu’un corrige une erreur ou complète ce que je dis est bien le mieux qui puisse arri­ver. Je préfère ceux qui donnent une infor­ma­tion utile à tous que ceux qui posent une ques­tion pour leur propre compré­hen­sion ou pour leur propre besoin. Ça on peut le faire en privé par la suite.

    Je m’abs­tiens de faire des remarques parce que la majo­rité ne le souhaite pas, et je le respecte. Par contre s’il vous plait, faites-le avec moi.

    L’exer­cice de pures ques­tions est en plus d’un égo mons­trueux. Certes j’amène un sujet, que je connais et que j’ai réflé­chi, mais je suis rare­ment le seul à le maitri­ser dans l’au­dience, et en tout cas jamais le seul à avoir quelque chose à en dire. Quelques minutes pour que les tiers puissent ajou­ter le petit truc en plus qui aurait manqué à chacun, c’est vrai­ment top.

  • Forts et faibles, vie privée et vie publique

    Le débat à propos des pseu­do­nymes sur les réseaux sociaux n’est qu’une facette de l’op­po­si­tion entre les forts et les faibles. Certains pour­raient même dire de la lutte des classes.

    Non, je ne rigole pas.

    Les puis­sants et privi­lé­giés sont proté­gés par leur statut ou leurs rela­tions. Tout ça est intrin­sèque­ment lié à leur iden­tité. C’est en s’en récla­mant qu’ils peuvent avoir toute la protec­tion de leur posi­tion, de leurs privi­lèges et de leur pouvoir. Deve­nir anonyme c’est à la fois perdre cette protec­tion mais aussi perdre l’im­pact qu’ils ont quand ils s’ex­priment.

    On voit quoti­dien­ne­ment des poli­tiques, des chefs de grandes entre­prises, des artistes connus ou des chro­niqueurs TV avoir des propos into­lé­rables ou d’un mépris que peu de gens pour­raient se permettre publique­ment. C’est leur célé­brité et leur posi­tion qui les protège.


    Pour les autres, c’est le rela­tif anony­mat qui les met à l’abri. C’est ce qui permet…

    • … à Emma, ado, de se cher­cher et discu­ter sexua­lité sans craindre l’in­to­lé­rance de ses parents ou le harcè­le­ment de ses cama­rades de classe ;
    • … à Gabriel de se rensei­gner sur le droit du travail face à ce qu’il vit sans forcé­ment subir une mise au placard de la part de son employeur ;
    • … à Jade de parler de sa séro­po­si­ti­vité sans craindre de voir ses connais­sances s’écar­ter par peur et igno­rance ;
    • … à Raphaël de pratiquer liber­ti­nage ou rela­tions libres via inter­net sans deve­nir la cible des quoli­bets au travail ;
    • … à Louise de discu­ter de possible gros­sesse sans perdre espoir pour son renou­vel­le­ment de CDD par son employeur ;
    • … à Léo d’échan­ger à propos de son mal-être de couple voire de sépa­ra­tion sans que tous les amis soient au courant ;
    • … à Alice, travaillant dans le public d’ex­pri­mer une opinion poli­tique forte et parti­ci­per à la démo­cra­tie de son pays sans qu’on ne lui reproche un manque de neutra­lité ;
    • … à Louis de cher­cher un psy sans que son concierge ne le quali­fie de malade mental et ne lance plein de rumeurs à son sujet ;
    • … à Chloé de parler avor­te­ment avec des gens qui sont passés par là sans que son futur enfant ne lise tout ça 10 ans plus tard et n’en tire de mauvaises conclu­sions qui le pour­sui­vront toute sa vie ;
    • … à Lucas, avocat, de s’ex­pri­mer léga­le­ment sur son métier même s’il ne donne aucun cas concret ;
    • … à Lina, de simple­ment discu­ter de tout et de rien sans être surveillée par son ex et le voir inter­ve­nir partout ;
    • … à Arthur, méde­cin, d’avoir une vie privée sans forcé­ment mettre ses patients au courant de tout et en gardant une certaine distance profes­sion­nelle ;
    • … à Léa, en dépres­sion ou burn out, de vider son sac, oser s’épan­cher et obte­nir de l’aide sans forcé­ment arrê­ter de main­te­nir une façade qui la protège le reste du temps ;
    • … à Adam, qui s’ap­pelle en réalité Moha­med, de pouvoir parti­ci­per à la vie poli­tique sur les réseaux sans être systé­ma­tique­ment renvoyé à l’ori­gine suppo­sée de son prénom, au terro­risme, à l’is­la­misme, ou disqua­li­fié sans son expres­sion à cause de ça ;
    • … à Rose de réflé­chir à une recon­ver­sion profes­sion­nelle ou un chan­ge­ment de travail avec des personnes qui l’ont déjà fait sans que ça ne soit un choix défi­ni­tif qui lui bloque toute oppor­tu­nité à son emploi actuel ;
    • … à Jules d’ex­pri­mer des posi­tions rela­ti­ve­ment accep­tables socia­le­ment aujourd’­hui mais qui pour­raient lui porter tort dans un futur inconnu 5 ou 10 ans plus tard, surtout si elles sont reprises ou comprises sans le contexte d’ori­gine, ou simple­ment s’il a évolué depuis ;
    • … à Anne, trans, de ne pas subir les assauts de tiers qui vont jusqu’à son domi­cile, contac­ter ses proches, essayer de la faire licen­cier auprès de son employeur ;
    • … à Hugo de commu­niquer sur des faits délic­tueux ou problé­ma­tiques qu’il a vu sans se mettre lui-même en danger ou sans avoir à forcé­ment « assu­mer » en cham­bou­lant toute sa vie ;
    • … à Mila d’avoir des contacts dans plusieurs milieux distincts, pouvoir parler macra­més dans ses loisirs sans forcé­ment qu’on lui parle de ses enga­ge­ments poli­tiques ou de ses problé­ma­tiques profes­sion­nelles, et inver­se­ment ;
    • … à Maël de recom­men­cer sa vie sans aban­don­ner toute vie sociale en ligne ni que son passé ne refasse systé­ma­tique­ment surface à chaque échange.

    (je vais m’ar­rê­ter là, vous avez compris le prin­cipe)

    Alors oui, certains font le choix de s’ex­pri­mer à leur nom, parfois ou tout le temps. C’est respec­table et légi­time mais ça doit rester un choix person­nel, aucu­ne­ment un attendu parti­cu­lier de la part de tiers.

    Le pseu­do­nyme est un des éléments primor­diaux à la fois pour proté­ger la liberté d’ex­pres­sion et pour éviter le repli des personnes les plus vulné­rables. S’en couper c’est mettre à risque à la fois la vie démo­cra­tique et celle des indi­vi­dus.


    En réalité, même si elles l’ou­blient faci­le­ment, les person­na­li­tés publiques tiennent elles aussi beau­coup à l’ano­ny­mat et aux pseu­do­nymes.

    Ils sont tous exclus de l’an­nuaire, avec le masquage du numéro sur télé­phone portable, et des pseu­do­nymes et noms de scène quand ils peuvent se le permettre pour garder une iden­tité civile privée. On a eu des litiges pour savoir s’il était raison­nables de publier le vrai nom de certains artistes dans la presse ou sur Wiki­pe­dia.

    S’ils consi­dèrent les pseu­do­nymes sur les réseaux sociaux diffé­rem­ment, c’est que pour eux le réseau social est un espace publi­ci­taire, pas un espace de vie. Ils n’y conçoivent donc que leur vie publique et appliquent aveu­glé­ment le même prin­cipe aux autres. Tant qu’on reste bloqué sur un schéma d’in­ter­net très verti­cal et dédié à la vie publique, c’est certain qu’on ne peut qu’en tirer de mauvaises conclu­sions.

    Pour autant, même pour ceux qui assument leur iden­tité publique, il ne vien­drait à l’es­prit de personne d’em­pê­cher leurs enfants d’uti­li­ser un pseu­do­nyme ou le nom du conjoint sur les réseaux sociaux, pour se disso­cier d’un parent trop connu et reconnu.


    Reve­nons à la ques­tion de lutte entre les forts et les faibles. L’idée de base c’est qu’on a simple­ment un inté­rêt opposé entre la mino­rité publique ou privi­lé­giée et les autres.

    Si la ques­tion semble faire rela­tif consen­sus auprès des person­na­li­tés publiques et personnes déte­nant un peu de pouvoir, de noto­riété ou d’au­to­rité, ce n’est pas qu’il y a consen­sus tout court mais unique­ment qu’ils partagent un contexte commun. Ils militent simple­ment avec un angle de vue qui leur est propre.

    Ils sont pour la levée de l’ano­ny­mat parce qu’ils croient ne pas en avoir besoin — ils sont plus proté­gés par leur statut et leur iden­tité publique — mais aussi parfois parce qu’im­po­ser l’iden­tité publique aux autres qui n’en profitent pas permet de les brider (pas dans le sens « éviter les abus » mais dans le sens « ferme ta gueule sinon… », même si c’est parfois incons­cient).

    Oui c’est une lutte, essen­tiel­le­ment celle des forts contre les faibles. Quand les uns et les autres parlent de proté­ger la vie privée, ils ne parlent simple­ment pas de la même chose, et ne protègent pas les mêmes inté­rêts.


    Oui mais au moins ça mettra fin à l’agres­si­vité sur les réseaux sociaux ?

    Même pas.

    L’in­tui­tion laisse croire que l’iden­tité civile respon­sa­bi­lise, et qu’im­pli­ci­te­ment autrui n’ose­rait pas assu­mer la haine s’il devait commu­niquer en son nom réel. En réalité la haine n’a jamais attendu les pseu­do­nymes.

    Il y a eu des études de faites. Le phéno­mène fonc­tionne en fait dans l’autre sens. Les commen­taires avec un nom public sont même légè­re­ment plus agres­sifs que les commen­taires anonymes. (résumé, anglais, étude, confir­ma­tion par seconde étude)

    Rien d’éton­nant quand on prend un peu de recul. Le pseu­do­nyme est une vraie protec­tion pour sa propre vie privée mais n’est d’au­cune aide quand il s’agit d’at­taquer les autres. La justice saura de toutes façons remon­ter à l’au­teur des propos quand elle le souhaite.

    À l’op­posé, les propos agres­sifs qui ont de la force sont ceux qui sont crédibles et/ou diffu­sés massi­ve­ment. Pour ça avoir une iden­tité publique est un outil, l’ano­ny­mat un boulet.

    Nous avons d’ailleurs des prêcheurs de haine bien iden­ti­fiés qui offi­cient quoti­dien­ne­ment chez nos élus, nos intel­lec­tuels et nos chro­niqueurs TV. Assu­mer leur iden­tité ne leur pose aucun problème, c’est même ça qui donne de la force à leur propos et leur permet de vivre.

    Une autre façon de voir les choses c’est que l’agres­si­vité est souvent là pour attaquer ce qui sort de la norme sociale ou de l’his­to­rique social. Il n’y a pas de crainte à avoir pour soi quand on défend la norme ou ce qu’on croit être la norme, quand on pense être dans le camps des forts et des nombreux.

    Ceux qui ont besoin de la protec­tion du pseu­do­nyme ce sont ceux qui sont en posi­tion de faiblesse ou de mino­rité, ou qui ont le senti­ment de pouvoir l’être un jour. Eux sont par nature prin­ci­pa­le­ment les cibles.

    Forts ou faibles, puis­sants ou gens qui ne sont rien, le combat se situe encore et toujours là. Lais­sons les uns utili­ser leur iden­tité publique et les autres ne pas le faire, à leur choix, tout simple­ment.