Auteur/autrice : Éric

  • Inéga­li­tés

    Droite et gauche en France

    J’ai ajouté la couleur des gouver­ne­ments français en fond sur le graphique.

    En 2017, les niveaux de vie progressent légè­re­ment, les inéga­li­tés sont quasi stables

    INSEE

    Le monde est détenu par une poignée d’in­di­vi­dus

    In 2010, it took 383 billio­naires to have the same combi­ned wealth as the poorest 3.5 billion on Earth. In 2017, it was 8 billio­naires – all white, all male. There’s no Trickle Down – it’s all being sucked up to the billio­naires

    https://twit­ter.com/DoctorKarl/status/1203082258510303232

    Comment pouvons-nous justi­fier que 8 hommes aient autant que 3 milliards et demi d’hu­mains ? Comment pouvons-nous trou­ver ça légi­time, quel que soit le succès et le mérite indi­vi­duel de ces huit personnes ?

    Et ne nous trom­pons pas : S’il faut redis­tri­buer, ce n’est pas sur la classe moyenne occi­den­tale.


    In 2018, 26 people had the same wealth as the 3.8 billion people who make up the poorest half of huma­nity, accor­ding to a January report from Oxfam

    Rapport Oxfam janvier 2019, via CNBC

    Est-ce mieux ? moins bien ? Que ce soit 10, 50 ou 500, je ne suis pas certain que ça change vrai­ment le fond du message.

  • Patients, usagers, clients

    Choi­sis­sez le mot que vous préfé­rez mais je n’ai aucun mal à parler de client là où on fait payer à l’usage. Je suis autant client de mon taxi que de mon TER. Je suis client (je paye) et usager (j’uti­lise) des deux.

    J’ai l’im­pres­sion que les profes­sions de santé sont encore plus atta­chées au terme patient. Un méde­cin libé­ral fait pour­tant autant commerce de son savoir et de son exper­tise qu’une autre profes­sion. Ils parlent d’ailleurs eux-même de clien­tèle quand il s’agit de revendre un cabi­net et de le valo­ri­ser. Les profes­sion­nels de santé libé­raux sont d’ailleurs très remon­tés contre l’idée d’être des fonc­tion­naires non libres de choi­sir leur clien­tèle et leurs condi­tions.

    Ça ne m’em­pêche pas d’être patient ou usager, et parfois d’être aussi un client. Les termes ne sont pas exclu­sifs. Le terme de client n’est pas sale, le commerce pas honteux. À vouloir les bannir, j’ai l’im­pres­sion des mêmes arti­fices de langue de bois que nos poli­tiques.

  • Je vais essayer de chan­ger de commu­ni­ca­tion

    Je sais que je diffuse prin­ci­pa­le­ment mes coups de gueule, ce qui me met hors de moi, ou la décons­truc­tion de discours poli­tiques trom­peurs.

    J’ai conscience de l’im­pact néga­tif que je peux propa­ger. Me taire et lais­ser croire faire n’est pas une option pour autant, ni person­nel­le­ment ni collec­ti­ve­ment. Collec­ti­ve­ment nos réac­tions ont de l’in­fluence. Person­nel­le­ment elles me permettent d’ex­té­rio­ri­ser pour réus­sir à vivre.

    L’équi­libre entre savoir l’ou­vrir et ne pas propa­ger un contexte toxique est déli­cat. Je ne l’ai pas trouvé.


    Je vais peut-être essayer de chan­ger la forme. Regrou­per ce qui est néga­tif par thème, avec des liens et mes commen­taires. Avoir une page, qui peut être diffu­sée moins fréquem­ment mais avec plus d’im­pact. Faire de l’écrit peut aussi m’ame­ner à élimi­ner ce qui est le moins impor­tant.

    Je réflé­chis encore.

  • Ce que j’ai appris hier

    J’ai des amis, bien que je ne les vois qu’une ou deux fois par an et que nous ne discu­tions que peu de temps à ce moments là, qui sont prêts à aider quand j’en ai besoin.

    Merci, juste merci.

  • Demain est impor­tant pour moi

    Grève, pas grève. Mani­fes­ta­tion, pas mani­fes­tion. Cela ne regarde que vous et vous n’avez pas à vous justi­fier quel que soit votre choix.

    Demain c’est un peu diffé­rent pour moi.

    Je tiens aux filets sociaux français. Je pense que ce n’est pas neuf pour mes lecteurs. Je ne sais pas où j’en serais aujourd’­hui sans eux, ou si je serais tout court. Parfois ce qui n’a pas l’air vital l’est quand même.

    Demain l’enjeu n’est pas pour ou contre les régimes spéciaux. Le sujet est inté­res­sant mais bien moins simple que les compa­rai­sons faciles ne le laissent croire (même notre ministre se rend compte qu’ils sont néces­saires).


    L’enjeu pour les retraites c’est le système des X meilleures années qui dispa­rait au profit d’un système à point.

    Aupa­ra­vant vous pouviez commen­cer en bas de l’échelle par des petits boulots mal payés sans que ça ne joue sur votre fin de vie.

    Aupa­ra­vant vous pouviez avoir un temps de chômage, un employeur qui ferme ou qui subit des diffi­cul­tés, un boulot qui ne se révèle pas pour vous ou un démé­na­ge­ment pour suivre votre conjoint·e sans que que cela ne joue sur votre fin de vie.

    Aupa­ra­vant vous pouviez tomber grave­ment malade, en dépres­sion, en cancer, ou avec un acci­dent grave, tout ça sans que ça ne joue exagé­ré­ment sur votre fin de vie.

    Aupa­ra­vant vous pouviez avoir un acci­dent de vie, quel qu’il soit, parce qu’on ne comp­tant que votre nombre d’an­nées de coti­sa­tions et votre rému­né­ra­tion sur les meilleures années.

    L’enjeu c’est la soli­da­rité.


    Si les retraites sont le déclen­cheur, ce n’est pas tout. La réforme du chômage récente est des plus violentes. On s’en prend aux plus faibles, ceux qui ont un parcours haché. Nos admi­nis­tra­tions ont compté que plus d’un chômeur sur deux aurait ses indem­ni­tés réduites ou suppri­mées avec le nouveau calcul.

    Ajou­tez y les attaques sur l’al­lo­ca­tion adulte handi­capé et vous avez un plan d’en­semble qui se dégage. On indi­vi­dua­lise, tout, et on ne garde qu’un mini­mum social en dessous du seuil de pauvreté quand on ne saurait faire autre­ment.

    Ne vous réjouis­sez pas simple­ment parce que vous êtes sala­rié à temps plein et que vous gagnez quelques euros nets de plus par mois. Au moindre acci­dent de vie, c’est vous qui serez concerné et ces quelques euros vous semble­ront bien ridi­cules.


    Dans ma devise il y a frater­nité, et je ne l’ou­blie pas.

  • Crédi­bi­lité jour­na­lis­tique

    En France nous avons une presse natio­nale de confiance.

    • Le jour­na­liste cite une source ? On peut avoir confiance que cette source existe et que le jour­na­liste l’a effec­ti­ve­ment eu en face ;
    • Le jour­na­liste écrit un contenu ? On peut avoir confiance qu’il est de bonne foi et qu’il ne fait pas un faux conscient ;
    • Le jour­nal publie ? On peut avoir confiance qu’ils pensent que l’in­for­ma­tion est à la fois crédible et d’uti­lité publique.

    Ça n’a l’air de rien mais c’est énorme. Les faux de la part des jour­naux eux-même sont très rares et il serait malavisé d’avoir une défiance à cause de ces excep­tions.

    C’est vrai autant à l’Huma qu’à Valeurs actuelles. C’est même vrai chez les petits indé­pen­dants mili­tants.


    Mais ça n’im­plique pas grand chose de plus, et pas forcé­ment une confiance dans les propos eux-même.

    La contra­dic­tion n’est qu’ap­pa­rente. D’ailleurs il ne faut pas cher­cher bien loin pour trou­ver d’énormes conne­ries.

    C’est le jour­nal et le jour­na­liste qui sont de confiance. Le contenu lui-même ne vaut que pour ce que vaut la source et la bonne compré­hen­sion du jour­na­liste.

    • Ça ne dit rien de ce qui est écrit sans indi­ca­tion de la source. C’est parfois vrai­ment sorti du chapeau ou du on-dit ;
    • Ça ne dit pas que ce qui est retrans­crit traduit exac­te­ment ce qui a été formulé, ou que ça corres­pond à ce que la source a voulu dire, ou que c’est ce qu’il fallait en comprendre dans le contexte ;
    • Ça ne dit pas que la source elle même — offi­cielles incluses — a forcé­ment raison, ou n’est pas de mauvaise foi, ou ne se trompe pas, ou n’a pas une vue forte­ment biai­sée, voire n’a pas son propre agenda de commu­ni­ca­tion ;
    • Ça ne dit pas que la compré­hen­sion qu’en a le jour­na­liste n’est pas forte­ment incom­plète, voire biai­sée, que le jour­na­liste a bien fait ses véri­fi­ca­tions, ou même qu’il a réel­le­ment bien compris de quoi il parle ;
    • Ça ne dit pas ce qui a été écarté, ni si le jour­na­liste a prêté une confiance trop impor­tante dans telle ou telle source, surtout quand elle est offi­cielle ou d’au­to­rité ;
    • Ça ne dit pas que tout a été dit ou exploré, ni que l’angle de l’ar­ticle n’a pas été un choix arbi­traire au départ.

    Non les jour­na­listes ne sont pas aux ordres de X ou de Y. Oui ils sont honnêtes et sérieux. Non ça ne doit pas jeter le filtre critique aux orties.

    Ce ne sont que des humains, aussi impar­faits que les autres, dans une machine qu’ils ne contrôlent pas forcé­ment eux-non plus, des contraintes de temps de moyens et de contexte, avec leurs propres biais, leurs propres préju­gés, et leur propre compré­hen­sion des choses.

  • Qui prend la déci­sion ?

    Suite à mes réflexions sur le rôle du mana­ger, j’ai lancé un petit jeu.

    Petit jeu pour les manager, responsables et directeurs techniques.

Votre équipe veut prendre (collectivement) une décision technique dont vous êtes fondamentalement convaincu qu'elle sera une erreur.

La discussion ne résout pas le différent. Quelle décision sera-t-elle prise ?

- Celle de l'équipe 31%
- Celle du manager 13%
- Celle d'un consultant 6%
- (voir les réponses) 50%

254 votes.

    Je suis plutôt agréa­ble­ment surpris des résul­tats du sondage mais j’ai plein de choses à dire sur les réponses qui m’ont été faites.

    Je fais des réponses ici parce que ça me permet d’être plus posé et d’avoir plus d’es­pace que sur Twit­ter mais aussi parce que ces réponses vont évoluer en fonc­tion des commen­taires que vous me ferez.

    Tout ceci n’est qu’un immense brouillon : J’es­père bien que les discus­sions ici ou là bas seront assez riches pour me faire chan­ger d’avis sur plusieurs points. Si c’est le cas, les conte­nus évolue­ront donc en consé­quence.


    Conti­nuer la discus­sion, cher­cher le consen­sus

    Je commence par mettre de côté tous les appels à discus­sion et à consen­sus. Bien évidem­ment que ma ques­tion ne vaut qu’a­près discus­sion éclai­rée et recherche d’un consen­sus. Parfois il y a quand même des avis diver­gents.

    J’irais même plus loin : Il doit y avoir régu­liè­re­ment des avis diver­gents. Quand la recherche du consen­sus va trop loin, on a juste des gens qui s’auto-censurent et aban­donnent. C’est sain et sage de leur part parce que ça permet d’avan­cer mais ça reste un échec collec­tif.

    Au final c’est celui qui a le pouvoir qui gagne. Ce peut-être le pouvoir hiérar­chique, le pouvoir d’in­fluence par le charisme, le pouvoir de nuisance de celui qui ne lâche pas son avis ou qui sera pénible si on ne lui donne pas raison, ou même le pouvoir de celui qui rendra mal à l’aise l’équipe par une posi­tion victi­maire.

    Le pouvoir est un très mauvais indi­ca­teur de stra­té­gie. Pourquoi lui donner ce poids ?

    Il faut espé­rer le consen­sus et le favo­ri­ser par des discus­sions ouvertes où chacun est à l’écoute. Il faut cepen­dant savoir prendre une déci­sion avant que ce consen­sus ne soit forcé.

    L’ab­sence de consen­sus n’est pas un problème, il est le signe d’une richesse. Le problème est dans l’im­pos­si­bi­lité de déga­ger un choix en l’ab­sence de consen­sus. Mon scéna­rio présup­pose d’ailleurs un consen­sus de l’équipe. C’est déjà une situa­tion plus que confor­table.

    Vous avez choisi le consen­sus à mon petit jeu ? Consi­dé­rez que vous ne l’avez pas et rejouez.

    Délé­guer au consul­tant

    J’ai proposé l’op­tion parce que je l’ai vécue dans les grands groupes. J’étais le consul­tant.

    Pour moi c’est la pire des réponses.

    On fait inter­ve­nir le consul­tant dans la phase d’étude. Le consul­tant permet d’ap­por­ter des connais­sances, des compé­tences ou des expé­riences qu’on n’a pas. Il établit une grille d’ana­lyse, pousse de l’in­for­ma­tion et propose des recom­man­da­tions. Il devrait s’ar­rê­ter là.

    Le consul­tant est le pire acteur pour prendre la déci­sion elle-même une fois l’étude bouclée. Il n’a qu’une vue partielle du contexte, géné­ra­le­ment peu de l’his­to­rique de la boite, une compré­hen­sion biaisé des enjeux, et des moti­va­tions propres poten­tiel­le­ment diffé­rentes des inté­rêts internes.

    Au final il n’a aucune raison de prendre une meilleure déci­sion que vous (mana­ger et équipe) qui pour­rez vous baser aussi sur son expé­rience et ses recom­man­da­tions (et les suivre le cas échéant si c’est l’élé­ment le plus impor­tant).

    Le point majeur est surtout que le consul­tant n’est engagé en rien par sa recom­man­da­tion. Ce n’est pas lui qui en assu­mera les consé­quences. Pire, il peut être incité à travailler dans son inté­rêt (valo­ri­ser son travail, ou déclen­cher de nouvelles pres­ta­tions) au lieu de travailler à l’in­té­rêt du projet.

    Faites inter­ve­nir des consul­tants, prenez en compte leurs recom­man­da­tions (vrai­ment, surtout si vous avez embau­ché quelqu’un de compé­tent qui a le recul néces­saire, n’écar­tez pas trop faci­le­ment ce qu’il vous dira) mais ne leur délé­guez pas la déci­sion.

    Les consé­quences de l’er­reur

    Ça dépend, quelles sont les consé­quences de l’er­reur ?

    Je n’avais pas anti­cipé cette réponse. Elle me gêne énor­mé­ment et c’est peut-être la plus révé­la­trice de mon approche des choses.

    Parler de consé­quences de l’er­reur part du préjugé que l’avis d’en face est une erreur, que nous on a raison (peu importe si celui qui parle est dans la posi­tion du mana­ger ou de son équipe). Pourquoi ce préjugé ? Il y a deux avis diffé­rents. J’ai autant de chances de faire une erreur que d’avoir raison. En fait si ça se trouve aucune des deux solu­tions n’est une erreur, ou les deux le sont.

    J’ai bien évidem­ment en mémoire tous les cas où je regrette de ne pas avoir imposé ma solu­tion mais il y a un gros biais du survi­vant. Combien d’autres déci­sions se seraient révé­lées aussi catas­tro­phiques si je m’im­po­sais ? Je suis bien inca­pable de le savoir. En fait même là où j’ai des regrets, si ça se trouve ma solu­tion aurait été encore pire.

    Donc oui, parfois j’ai le senti­ment que les autres sont dans l’er­reur et qu’on va en payer les consé­quences de façon très grave. Quand c’est le cas je le dis, j’ex­plique les consé­quences que j’en­tre­vois. Ces risques sont pris en compte, parfois les autres demandent des expli­ca­tions. Ça fait partie des éléments sur lesquels chacun va baser sa déci­sion mais ça n’em­porte pas déci­sion en soi.

    Prin­cipe de la prise de déci­sion : Avan­cer tout ce qu’on pense, donner la mesure de notre convic­tion. Pour autant, une fois expo­sée, parta­gée et prise en compte par tous, cette intime convic­tion ne doit pas inci­ter à impo­ser quoi que ce soit.

    N’ou­blions pas que les personnes en face ont poten­tiel­le­ment aussi ce même senti­ment de grosse erreur, mais à l’en­contre de ce qu’on pense nous.

    Celui qui a l’ex­pé­rience

    On est ici dans un dérivé du cas précé­dent. Invoquer l’ex­pé­rience n’est ni plus ni moins un prétexte pour dire que mon intime convic­tion devrait l’em­por­ter.

    Si j’ai plus d’ex­pé­rience je l’ai mis sur la table, j’ai expliqué et expli­cité ce que je pouvais, affirmé que mon intui­tion n’est pas forcé­ment expli­cable mais se base sur plusieurs années derrière moi. Cela a déjà été pris en compte par les personne en face de moi dans leur analyse. Ce n’est pas suffi­sant pour m’im­po­ser.

    L’his­to­rique de l’équipe et du mana­ger

    Le mana­ger a-t-il habi­tude de prendre des bonnes déci­sions ? L’équipe ?

    Peu importe en fait, à partir du moment où cet histo­rique est partagé, connu au moment où la déci­sion est prise. Si l’équipe a l’ha­bi­tude de se plan­ter et le mana­ger l’ha­bi­tude d’avoir raison, alors l’équipe pren­dra proba­ble­ment d’elle-même l’avis du mana­ger le temps qu’elle progresse. Si ce n’est pas le cas c’est que le fonde­ment du refus est plus fort que ce critère histo­rique.

    Comme l’ex­pé­rience, l’his­to­rique n’a de poids sur « qui prend la déci­sion » que s’il n’est pas partagé en amont au moment de cher­cher le consen­sus, ou que l’un des deux est fonda­men­ta­le­ment incom­pé­tent au point de ne pas savoir prendre en compte cet élément dans sa prise de déci­sion (et on parle alors d’un niveau d’in­com­pé­tence assez grave).

    Une fois l’his­to­rique partagé, il a fait partie des éléments source de la déci­sion de chacun, et ne doit pas empor­ter la déci­sion collec­tive pour lui-même

    Ceux qui assument les consé­quences

    J’ai vu cet argu­ment employé pour étayer de choix oppo­sés. On laisse la déci­sion à ceux qui en assument les consé­quences. Certains pensent que c’est l’équipe, d’autres que c’est le mana­ger.

    Les deux me gênent parce qu’ils présup­posent que tout le monde n’est pas de la même bonne volonté et dans le même bateau. Si mes équipes souffrent c’est un problème pour moi. Si je souffre ou si je ne suis plus en capa­cité de les proté­ger ou de les aider, c’est un problème pour eux. Si la déci­sion prise ne va pas dans l’in­té­rêt de l’en­tre­prise, c’est un problème pour tous.

    Vouloir distin­guer une personne qui serait plus respon­sable ou qui subi­rait le plus les consé­quences, c’est présup­po­ser qu’il y a inté­rêts diver­gents et ça me pose problème. C’est vrai si on parle de fonda­teurs, action­naires et diri­geants — et c’est pour ça que je les ai expli­ci­te­ment exclu de mon petit jeu — mais c’est plus gênant si on parle de mana­ge­ment inter­mé­diaire.

    Je ne suis pas bisou­nours. Je sais bien que dans beau­coup de struc­tures il y a ces inté­rêts diver­gents, mais c’est bien un problème d’or­ga­ni­sa­tion ou de culture à résoudre. Que des orga­ni­sa­tions dysfonc­tion­nelles engagent des réponses diffé­rentes pour éviter ou compen­ser des problèmes par ailleurs, c’est certain mais ça m’in­té­resse moins.

    Si le mana­ger emporte les déci­sions parce qu’il craint de subir les consé­quences d’une erreur auprès de son N+1, il y a un problème orga­ni­sa­tion­nel à résoudre bien plus impor­tant que de savoir comment sont réali­sés les choix.


    Dans l’idéal ou dans la réalité ?

    C’est la réponse qui m’a fait le plus réflé­chir. Parle-je d’un idéal ou de vécu ?

    Je n’ai pas la réponse. Le fait qu’il y ait un déca­lage entre les deux est forcé­ment incon­for­table, mais la réalité a aussi ses contraintes.

    Je me suis imposé plus que je ne l’au­rais aimé par le passé. Peut-être pour compen­ser d’autres erreurs, peut-être parfois aussi par lâcheté parce que je savais que c’est la concep­tion du mana­ge­ment que la direc­tion atten­dait de moi. Parfois j’ai regretté de ne pas l’avoir fait, mais penser que les consé­quences aurait forcé­ment été meilleures ne relève que de la croyance.

    Le passé permet d’ap­prendre, mais je sais aussi que le futur me réser­vera d’autres cas de conscience et que je ne respec­te­rai pas toujours mes conclu­sions — parfois a raison à cause d’autres dysfonc­tions à prendre en compte, peut-être parfois pour de mauvaises raisons. Je n’ai pas dit que c’était facile.


    Oui mais alors ?

    Je ne donne que ma réponse de prin­cipe. J’es­père qu’elle trans­pa­rait suffi­sam­ment dans ma posi­tion précé­dente et dans les réponses ci-dessus.

    Je me base sur le suppo­sés suivants :

    1. Je travaille avec une équipe respon­sable, compé­tente, impliquée, qui cherche à bien faire, qui pren­dra en compte les éléments de busi­ness d’or­ga­ni­sa­tion et de stra­té­gie que je pose­rai sur la table de la même façon que je pren­drai en compte les éléments pratiques qu’ils remon­te­ront.

    J’ai plus souvent rencon­tré ce cas que le contraire, quoi que les légendes urbaines en disent.

    Je conçois que ce ne soit pas toujours le cas, mais vous avez alors d’abord ce problème à régler. Le reste en découle.

    2. Une fois que chacun a expli­cité ses moti­va­tions, ses expé­riences, ses connais­sances, que les compé­tences respec­tives sont connues de tous, je n’ai pas de raison de consi­dé­rer que ma synthèse est moins juste que celle des autres, mais pas meilleur non plus, sauf à me consi­dé­rer fonda­men­ta­le­ment plus intel­li­gent que mon équipe.

    Avec un tel supposé, si tout le monde a la même impli­ca­tion et que les éléments sources comme les raison­ne­ments de chacun ont été expli­ci­te­ment parta­gés, autant jouer à pile ou face.

    Sauf que j’ai un rôle à mener dans l’or­ga­ni­sa­tion.

    Je suis là pour faire que l’équipe tourne, auto­nome, respon­sable. Mieux : Je suis là pour qu’elle s’amé­liore, par l’ex­pé­rience et la prise en respon­sa­bi­lité.

    Reti­rer à l’équipe la capa­cité de prendre elle-même sa déci­sion irait à l’en­contre de cet objec­tif.

    Certes, ça ne dit rien sur le choix pris, s’il est bon ou pas, mais ne pas leur lais­ser ce choix aura des consé­quences sur l’au­to­no­mie, l’im­pli­ca­tion et la prise de respon­sa­bi­lité.

    Oui. La déci­sion doit être celle de l’équipe, pas la mienne, quelles que soient mon expé­rience et ma posi­tion hiérar­chique.

    Il y a plein de bonnes raison pour s’im­po­ser. Parfois il faut le faire, mais en géné­ral c’est à cause de dysfonc­tions à compen­ser : Des éléments stra­té­giques qu’on ne peut pas parta­ger, une orga­ni­sa­tion qui fonc­tionne mal et à compen­ser, une culture pas encore en place, des membres de l’équipe qui ne sont pas à leur place. Ça doit rester l’ex­cep­tion et ça doit inter­ro­ger.

  • Le rôle du mana­ger

    Mana­ger, direc­teur, respon­sable,
    Pourquoi prends-tu la déci­sion à la place de ton équipe ?
    Pourquoi penses-tu que ton avis doit primer ?

    Non, ce n’est pas ton rôle.

    Ton rôle c’est de permettre à cette équipe de travailler au mieux. C’est de les mettre en capa­cité, de leur donner les moyens, d’ins­tau­rer la bonne culture, d’or­ga­ni­ser, de tran­cher les diffé­rents et cas problé­ma­tiques quand il y en a, de pous­ser à l’amé­lio­ra­tion, de t’as­su­rer que rien n’est oublié ou mal compris, d’in­for­mer de ce qu’ils ne savent pas, de défi­nir puis déployer un cap et une stra­té­gie, de gérer le budget, l’ad­mi­nis­tra­tif, d’ap­por­ter soutien person­nel.

    Pfiou, c’est déjà énorme et j’en oublie.

    Ton rôle est immense mais non, il n’est pas de prendre des déci­sions à la place de ceux qui savent et qui sont au jour le jour sur le sujet. Ton rôle n’est pas tant de diri­ger que de donner la direc­tion.


    S’il y a besoin d’im­po­ser c’est qu’on est dans l’échec.

    Ce peut-être un échec de recru­te­ment (les personnes ne veulent pas s’im­pliquer), un échec de culture (les personnes ne veulent plus s’im­pliquer ou le font mal), un échec d’or­ga­ni­sa­tion ou d’au­to­no­mie (les personnes ne peuvent pas s’im­pliquer), un échec de forma­tion ou d’in­for­ma­tion (les personnes n’ont pas les connais­sances ou compé­tences pour s’im­pliquer), un échec de moyens (les personnes n’ont pas le temps ou les ressources néces­saires à s’im­pliquer), ou encore plein d’autres choses, mais un échec.

    Et ces échecs, tous ceux que j’ai listé, sont liés à votre rôle de mana­ger, votre respon­sa­bi­lité.

    Votre rôle est majeur, et c’est tout ça.

    Il n’est pas de prendre la déci­sion mais de permettre qu’elle soit prise, puis de l’ap­puyer. Si vous la prenez, c’est que vous avez échoué à votre vrai rôle.

  • Dépeindre un monde trop sombre

    Mon souci, étant donné les comptes que je suis, est que le fil d’ac­tua­lité est rempli d’in­for­ma­tions et de messages plutôt critiques à propos de la société dépei­gnant un monde sombre. Avant je consi­dé­rais ces messages inté­res­sants, aujourd’­hui je trouve que la balance penche trop vers le néga­tif et ça a un impact émotion­nel. Je souhai­te­rais égale­ment trou­ver des messages posi­tifs pour conser­ver mon bien-être.

    Ma lassi­tude des réseaux sociaux aujourd’­hui (via David)

    Je contri­bue certai­ne­ment beau­coup à ce climat. Quelque part c’est aussi juste­ment une façon de me proté­ger, pour ne pas garder pour moi, pour sortir les choses. C’est aussi une façon de parta­ger, parce que la prise de conscience me semble utile si on veut chan­ger les choses. C’est parfois ces méca­nismes qui m’ont appris et fait chan­ger.

    Et en même temps je comprends le problème. J’ac­quiesce, même.

    Autre façon de voir les choses : Jusqu’où vouloir filtrer le néga­tif et encou­ra­ger le posi­tif revient à se mettre la tête dans le sable pour ne pas voir la réalité ?

    À quel point filtrer ce côté sombre, même partiel­le­ment, n’est pas une posture de privi­lé­gié qui n’est pas impacté aussi direc­te­ment que d’autres ? Un peu comme faire semblant de ne pas voir le SDF en sortant de la boulan­ge­rie avec un gros éclair au choco­lat en main.

    Ce ne sont pas des juge­ments mais des ques­tions ouvertes chez moi. Je n’ai aucune réponse à tout ça.

  • Zero know­ledge

    Ok, on a expliqué comment fonc­tionne le gestion­naire de mots de passe, mais est-ce du zero know­ledge ?

    La réponse est « ça dépend », ou plus préci­sé­ment « ça dépend de ce qu’on entend par zero know­ledge.

    Sur le prin­cipe, le contrôle du serveur ne suffit pas pour récu­pé­rer les mots de passe en clair. C’est une inca­pa­cité tech­nique impos­sible à contour­ner.

    En pratique c’est plus déli­cat. L’en­tité qui gère vos mots de passe chif­frés gère aussi l’ap­pli­ca­tion web, les exten­sions navi­ga­teurs et les clients lourds sur vos ordi­na­teurs de bureau. Elle peut à tout moment déclen­cher une mise à jour logi­cielle avec un code mali­cieux qui fera fuiter vos mots de passe ou la clef de chif­fre­ment à la prochaine utili­sa­tion.

    Est-ce du zero know­ledge si on ne peut pas relire vos mots de passe actuel­le­ment mais qu’on sait à tout moment déployer un nouveau logi­ciel qui le permet­trait ? à vous de dire.

    À un moment quelqu’un va vous propo­ser de télé­char­ger un logi­ciel ou une mise à jour et il va vous falloir faire confiance. Ceux qui contrôlent ce logi­ciel et les mises à jour peuvent théo­rique­ment faire ce qu’ils veulent avec vos données.


    Les accès à des appli­ca­tions web sont parti­cu­liè­re­ment problé­ma­tiques — les mises à jour sont instan­ta­nées, silen­cieuses, et peuvent cibler des utili­sa­teurs précis — mais le problème est plus géné­ral.

    Les exten­sions navi­ga­teurs sont vali­dées par l’édi­teur du navi­ga­teur en ques­tion. Ça peut ajou­ter un peu de sécu­rité en plus mais ça ajoute une seconde entité au cercle de confiance. Désor­mais non seule­ment il faut faire confiance à l’au­teur de l’ex­ten­sion — il est probable qu’il arrive à faire passer une porte déro­bée à travers la vali­da­tion s’il le veut vrai­ment — mais aussi à Mozilla, Google et Apple qui peuvent à tout moment déployer d’eux-même une exten­sion corrom­pue.

    Même chose pour les mises à jour via l’App Store d’Apple ou le Play Store d’An­droid.


    Alors quoi ?

    Une solu­tion serait de couper toutes les mises à jour auto­ma­tiques. On s’ex­pose alors à d’autres problèmes bien plus probables, comme l’im­pos­si­bi­lité de corri­ger rapi­de­ment un problème de sécu­rité invo­lon­taire.

    La fiabi­lité peut venir du fait de docu­men­ter les API entre les logi­ciels clients et le serveur. Chacun peut alors ne pas faire confiance à l’édi­teur d’ori­gine et utili­ser des logi­ciels clients alter­na­tifs. C’est une preuve de bonne foi de la part de l’en­tité qui contrôle le serveur mais on ne fait cepen­dant que dépor­ter le problème : Il faut alors faire confiance aux éditeurs de ces logi­ciels alter­na­tifs.

    La seule solu­tion si on a une vision jusque boutiste du zero know­ledge serait de compi­ler soi-même son logi­ciel à partir des codes sources. Bien entendu cela implique d’avoir le temps et les compé­tences pour audi­ter ce code source et toutes ses évolu­tions. Pour la plupart des gens ce n’est pas réaliste.

    À un moment donné il faut faire confiance, tout ce qu’on peut faire c’est vous lais­ser choi­sir en qui vous faites confiance.


    Plutôt qu’un oui ou non je vous propose des niveaux :

    0Il n’y a aucun chif­fre­ment
    1Les données sont chif­frées mais le serveur sait accé­der aux clef de façon pérenne
    2Les données sont chif­frées mais le serveur a accès aux clefs de façon tempo­raire le temps d’in­te­ra­gir avec les données
    3Les données sont chif­frées ; le serveur n’a pas accès aux clefs de déchif­fre­ment, mais il est possible de déployer une nouvelle version du logi­ciel qui donne accès aux clefs ou aux données
    4Les données sont chif­frées ; les API de commu­ni­ca­tion entre le serveur et les clients sont docu­men­tées ; il est possible d’uti­li­ser des clients alter­na­tifs de son choix
    5Les données sont chif­frées ; les API de commu­ni­ca­tion entre le serveur et les clients sont docu­men­tées ; le code source d’un client est dispo­nible et audi­table ; il est possible de compi­ler soi-même son propre client auprès audit si on en a le temps et les compé­tences

    Pour la plupart des gens les niveaux de sécu­rité 2 à 4 sont déjà tout à fait perti­nents. La diffé­rence se fait en fonc­tion de ce contre quoi on cherche à se proté­ger et de en qui on a confiance.

    Se retreindre au niveau théo­rique où les enti­tés tierces n’ont réel­le­ment aucune capa­cité à récu­pé­rer les mots de passe même indi­rec­te­ment implique le niveau 5, mais ce n’est proba­ble­ment pas réaliste pour grand monde. Il faut savoir relire du code source, avec suffi­sam­ment de compé­tence et de temps pour savoir iden­ti­fier quelqu’un qui cherche à y cacher une porte déro­bée, mais aussi toutes les dépen­dances de ce code source. En pratique on a vu des anoma­lies ou portes déro­bées dans des logi­ciels open source cœur dans la sécu­rité de quasi­ment tous les serveurs (ssh, openssl) rester des années. Autant dire que c’est un niveau de sécu­rité plus théo­rique qu’autre chose. Même les experts finissent par faire confiance à d’autres experts, avec le risque qu’un des maillons de la chaîne ne mérite pas cette confiance.