Preuve que la lecture numérique devient grand public : On voit arriver des modèles « no name » réalisés sous des marques premier prix comme ici Boulanger avec la liseuse Essentiel B à 99 €. Pas de wifi ni de tactile, et aspect un peu soviétique. L’offre est peu intéressante par rapport à la concurrence mais sa seule existence est un signe.
Auteur/autrice : Éric
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Le Nook Tablet n’octroie qu’un seul 1 Go aux fichiers venus d’ailleurs
Je vous parle de modèle fermé pour le Kindle en abordant les questions d’export des annotations, de format de fichier ou de pérennité des achats. Parfois c’est vague alors mieux vaut un bon exemple qu’un mauvais discours.
Ici il s’agit de Barnes & Nobble plutôt que d’Amazon mais l’exemple reste éclairant sur le principe même de travailler contre le lecteur là où ça n’a pourtant aucun sens : Le Nook Tablet n’octroie qu’un seul 1 Go aux fichiers venus d’ailleurs, sur les 16 au total. Si vous pensiez pouvoir y mettre vos mp3 et vidéos, vous voilà fort marri. L’idée étant bien de profiter du client pour l’enfermer et le forcer à consommer dans la chaîne fermée.
L’incitation est compréhensible et même peut être souhaitable, l’obligation par une contrainte artificielle est contre mes valeurs, le faire comme ici sur un critère qui ne sera pas vraiment visible de l’acheteur est d’autant plus problématique.
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L’étude affligeante d’Ernst & Young sur la propriété intellectuelle
Bon, des études sur la propriété intellectuelle il y en a pour tous les gouts. Il est habituel de voir simplement un agrégat de positions choisies par avance par le commanditaire ou par le contexte. L’étude affligeante d’Ernst & Young sur le propriété intellectuelle a l’air de celles là.
Je ne peux me retenir de vous donner la meilleure citation de l’année :
les entreprises dans l’incapacité de vendre un même contenu aux consommateurs plusieurs fois (pour différents supports, plateformes) risquent d’accuser des pertes de chiffres d’affaires
Où on voit que les offres « dans les nuages » sont un danger parce qu’ils empêchent les gentils distributeurs de vendre plusieurs fois le même contenu au même utilisateur, afin qu’il puisse le lire sur ses différents appareil. Que je puisse lire ma vidéo et sur pc et sur téléphone et sur tv c’est, pour E&Y, une perte de chiffre d’affaire. C’est certain qu’en voyant les choses sous cet angle, la contrefaçon n’est pas prête de s’arrêter.
Le plus navrant c’est que ce rapport arrive au moment où on rediscute de la rémunération liée à la copie privée. Nous payons depuis maintenant des années une taxe relativement lourde sur tous les stockages numériques, de la clef USB à la carte mémoire de votre appareil photo en passant par votre GPS. Cette taxe est à destination des sociétés de collecte des droits d’auteurs, pour compenser *justement* le droit de copier un contenu d’un appareil vers un autre. Nous payons ce droit exagérément cher, souvent sans possibilité de le mettre en oeuvre à cause des DRM, et voilà que de l’autre côté on nous dit que l’impossibilité de nous vendre plusieurs fois le contenu pour cela serait une perte gênante de chiffre d’affaire.
Tous ces gens se tirent une balle dans le pied. L’Allemagne commence à faire grossir son parti pirate qui a désormais des députés aux assemblées régionales. S’il est difficile de transposer cela en France, il est clair qu’un mouvement finira forcément par éclater ici aussi. À force d’excès, le retour de bâton sera violent et c’est tout le droit d’auteur qui risque d’être secoué voire mis à terre. Tant va la cruche à l’eau qu’à un moment …
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Media Can Avoid NYPD Arrest By Getting Press Pass They Can’t Get
Outre la petite histoire de la police qui demande des passes presse qu’elle ne propose pas de donner, il y a là un problème de fond avec cette croissante habitude de demander des cartes de presse pour autoriser quelqu’un à filmer ou à se trouver sur un lieu pour rapporter un événement.
C’est pour moi totalement contraire au principe même de liberté d’expression, liberté d’information, et capacité du citoyen à contrôler ce qu’il se passe. Le journaliste est un professionnel qui fait de l’information son métier. Forcément, on lui donne des accréditations parce que parfois il faut contrôler des entrées, gérer des relations avec les journaux, etc. Maintenant rien ne doit rendre nécessaire un statut spécial avant de rapporter, enregistrer ou être témoin d’événement.
C’est ainsi qu’on dérobe au citoyen son droit à l’information. Ce droit n’est pas une délégation ni réservé à une profession, c’est un droit personnel de chacun. C’est d’ailleurs quand l’État veut restreindre la portée ou la diffusion d’un événement public qu’on commence à demander des accréditations, ce qui marque bien que l’objectif est d’aller contre l’information et le témoignage.
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La voix obligée de l’Élysée
Quand on parle d’hyper président et de volonté de contrôle de Nicolas Sarkozy, voici un exemple où les maires sont la voix obligée de l’Élysée.
Bon, pas si obligée que ça, mais combien se laisseront finalement avoir et feront le discours demandé ? Quel est le droit du Président de faire une telle demande. N’abuse-t-il pas de sa position en faisant une telle demande qui n’est fondé sur aucun texte lui donnant ce rôle ou ce pouvoir ?
J’ai l’honneur de vous faire parvenir, sous ce pli, le message du président de la République, qui devra être lu lors de la cérémonie commémorative du 11 novembre que vous organiserez dans votre commune. [la graisse est de moi]
Mais surtout ce qui gêne c’est que ce n’est même pas une question de simple abus ou exagération de rôle de Président, c’est l’utilisation de ce rôle à des fins de communication politique partisane, voire de campagne. Parce que n’en doutons pas un instant, il s’agit là d’un sujet fait pour rallier ou faire parler, à des fins de combat entre partis, pas d’une volonté de fond au nom de la France. Et ça c’est peut être ce que je trouve le plus inacceptable.
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Aujourd’hui, Coluche serait avec Marine Le Pen
Je n’ai aucune envie de savoir si aujourd’hui Coluche serait avec Martine Le Pen ou non. La question contient en elle-même la réponse qu’elle cherche à provoquer, peu importe si cette réponse a du sens.
Par contre je ne peux m’empêcher, à chaque fois que j’entends de vieux sketchs, et pas que de Coluche, que ces comiques seraient aujourd’hui mis au ban de la société. Je suis même convaincu qu’ils finiraient probablement pour beaucoup dans les extrêmes, à force de rejet. Les extrêmes sont les seuls espaces où il est possible d’accepter des gens dont les idées sont rejetées par les autres. Ceux qui refusent de se plier au consensuel finissent forcément soit par se taire soit par s’y faire plus ou moins happer, même si les idées ne s’y assimilent pas..
Ce n’est pas qu’une question de contexte social, ou le racisme étaient moins jugé inacceptable et donc encore sujet à l’humour, c’est un enjeu plus large de capacité à s’exprimer sur tous les sujets. Nous avons plus de tabous, et nous n’acceptons plus aucune pensée hors du consensus. C’est très dangereux pour notre avenir. C’est ainsi que la société peut se faire embrigader, contrôler, ou simplement qu’elle s’empêche d’évoluer et progresser.
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Joue-la comme Copé à la télé, en douze leçons
Rien de neuf, les politiques font de la langue de bois. Rue89 s’amuse à jouer comme Copé à la télé et à repérer les manœuvres. Il est vrai qu’en ce moment c’est peut être lui qui joue le plus de mauvaise foi (rôle de porte parole du parti dominant oblige ?) mais ça pourrait tout à fait se faire avec la plupart des politiques actuels.
Et si le problème était plutôt dans l’absence de vrais journalistes pour insister et contrer ces systèmes de communication éculés ? C’est plutôt là notre problème en France. Si on subit ce genre de communication, c’est parce que nulle part on ne l’empêche. Il ne tient qu’à nous d’avoir de vrais journalistes comme dans les pays qui ont un vrai débat politique, et de boycotter les autres.
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Serai-je emprisonnée pour avoir dénoncé les dérives de magistrats ?
Je vous laisse lire l’article sur le combat d’une journaliste dénonçant des dérives et des juges dénoncés par cette journaliste, que ce soit à raison ou à tort. Le fond ne m’est pas assez profondément connu pour que je le commente. Il est intéressant en lui-même et je ne veux pas vous détourner de ce qu’il exprime. Je me permets toutefois deux hors-sujets partiel :
- L’outrage est de plus en plus un jugement arbitraire de ceux qui agissent au nom de la loi. On voit beaucoup de dérapages dans les outrages réclamés par les policiers. On voit ici que finalement le problème est éventuellement diffamatoire, peut être un sérieux abus de liberté d’expression, mais probablement pas un outrage. Quand bien même cela en sera un dans les textes (ce qui serait douteux), il s’agirait d’un fait par trop arbitraire à première vue.
- Mais ce qui dérange beaucoup c’est finalement que celui qui juge est celui mis en cause, du moins à ce que j’en lis dans l’article. Et ça, dans quel État de droit est-ce possible ? Là il y a forcément un problème indéniable.
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Kindle or not Kindle ?
Kindle or not Kindle ? Finalement, est-ce gênant ce modèle fermé du Kindle d’Amazon ?
On peut dire que c’est un problème de technicien mais la pérennité des contenus achetés, le fait qu’on puisse ou pas changer de librairie à l’avenir ou qu’on reste bloqué par ses achats passés, le fait qu’on soit plus tard à la merci d’un acteur monopolistique, je suis convaincu que ce sont des questions qui ne sont pas réservées aux techniciens. Certes il faut les expliquer, mais c’est justement notre rôle en tant que techniciens, pour que faire la lumière sur ce qui n’est pas évident à tous.
Amazon est exceptionnel
Amazon fait des bons produits. Ils innovent, et ont globalement fait beaucoup de bien au marché, du moins de ce que j’en ai vu de mon côté. Je peux même aller plus loin en disant qu’à l’heure actuelle ils ont l’écosystème le plus complet et le plus abouti. Je ne sais pas où en serait le livre numérique sans eux et leur volonté d’avancer mais je doute que j’en parlerai ici ou que vous pensiez à acheter une liseuse en ce moment. Encore mieux : Il semble qu’ils aient beaucoup fait pour les petites maisons d’édition et les auteurs indépendants, là où les libraires classiques s’en désintéressent trop. Bref, l’image métier et technique que j’en ai est au plus haut.
Ça méritait d’être dit parce qu’en montrant trop mon désaccord avec l’écosystème du Kindle je pourrai renvoyer une image manichéenne d’Amazon. Mon sentiment est bien moins binaire qu’il n’y parait. J’aurai même tendance à penser qu’ils sont à la fois excellent, commercialement et techniquement, exceptionnels pour avancer sur de nouveaux usages, et pourtant inacceptables dans leur approche de l’écosystème.
Mais le modèle du Kindle n’est pas acceptable en l’état
Il n’y a cependant pas que l’excellence technique ou commerciale qui compte. C’est cet écosystème fermé qui me fait rejeter toute la solution quelles que soient ses qualités par ailleurs. Ne pas nous mettre des fers et ne pas nous lier irrémédiablement à un acteur est trop important pour le renier sur l’autel du compromis. Ne pas laisser un acteur dominer un marché si critique que le livre (je ne parle pas de criticité économique mais de liberté d’expression, de liberté de rêver, d’accès à l’histoire, etc.) est primordial pour la société elle-même. Même si pour l’instant nous prêtons de bonnes intentions à Amazon, peut être à raison, le risque serait trop grand. Tant pis pour la solution excellente et toutes les avancées qu’ils font sur les usages, je ne peux accepter d’y souscrire.
J’irai même plus loin que le texte en lien : et que ferons nous quand un acteur qui a 80 % du marché décide de boycotter un éditeur qui n’accepte pas ses nouvelles conditions ? nous avec notre bibliothèque faite depuis des années dans le Kindle. Abandonnerons nous tout, par respect pour nos principes ? ou serons nous lâches à nous battre faiblement sans oser faire le pas ? Ce pouvoir, spécifiquement dans le domaine du livre et de l’information, est démeusuré.
À ce moment là l’emprise d’Amazon sur nos lectures sera peut être trop stable et nous n’aurons pas la force de changer. Faire le pas maintenant, faire un choix différent, c’est par contre encore possible et abordable.
Il nous reste à faire mieux, et ce n’est pas simple
Tout a un prix. En refusant le modèle Amazon, il nous revient de faire avancer nous aussi la barque dans le bon sens, et de proposer des solutions aussi confortables, efficaces et innovantes que ce dernier. Si nous ne le faisons pas non seulement Amazon creusera l’écart et il deviendra d’autant plus difficile d’y résister, et d’autant plus risqué d’y céder, mais en plus cela nous donne le rôle de celui qui critique de loin sans proposer mieux. Pas simple comme défi, j’espère que je pourrai participer à le relever.
Entre temps, ne cédons pas trop vite. Et puis il y a encore l’espoir que Kindle finisse par beaucoup plus s’ouvrir, et là je serai le premier à les féliciter. Si nous ne faisons que les exclure, nous finirons en ennemis et ce n’est pas ainsi que nous pourrons avancer le mieux pour le bénéfice de tous.
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Le déséquilibre des échanges impose-t-il vraiment d’attenter à la neutralité du net ?
Le billet de Ludovic Pénet sur le déséquilibre des échanges réseau et la neutralité du net ne parle finalement que peu de déséquilibres mais j’en profite pour m’accrocher à la discussion.
Tout d’abord je suis agacé quand j’entends parler de ce fameux déséquilibre. Un tuyau fait passer des données. Elles consomment une partie de la bande passante du tuyau, nécessite des ressources pour les routeurs et l’acheminement, mais finalement rien dans tout ça n’est dépendant du sens de l’information lui-même. L’asymétrie n’est en rien un « problème ».
Fut-ce t’il d’ailleurs un problème qu’il serait franchement hypocrite de la part des opérateurs de s’en plaindre. On ne peut décemment pas offrir un accès à l’utilisateur 20 fois plus large en descente qu’en montée, puis râler ensuite qu’il y a plus de descente que de montée. Il faudrait rester un minimum cohérent.
La question est par contre éventuellement de savoir sur quel réseau circule la donnée avant d’arriver à son point de chute, ainsi que de savoir qui est responsable du trafic, et donc de son paiement.
Là aussi je trouve le comportement des opérateurs très hypocrite. Le contenu transféré l’est parce qu’il est demandé par le réseau de l’opérateur (par l’abonné). Le responsable est-il celui qui répond à la demande ou celui qui demande ? Finalement, ne serait-ce pas plutôt à l’opérateur de payer le fournisseur de service pour les ressources serveur qu’il consomme ? Ces ressources serveur coûtent certainement plus cher que les ressources réseau.
Ludovic parle de marges arrières et je pense qu’il est en plein dans le sujet. L’opérateur est bien dans une démarche de distribution d’un contenu payé par ses clients et fournit par d’autres. Il remplit un service qui mérite financement mais sa position de force trop importante finit par lui permettre des comportements nocifs pour tout le monde.
À long terme ces comportements sont même nocifs même pour l’opétateur lui même, mais à la limite c’est peu important. Ici on touche de trop près à la à la capacité de communiquer, d’informer, au lien social, à la capacité d’accéder au monde, pour qu’on ait le droit de laisser faire un jeu qui favorise certains fournisseurs de services (qui payent) par rapport à d’autres.
Il faut convaincre nos politiques de bouger pour faire de l’accès à Internet un service neutre et protégé, comme peut l’être l’accès à l’électricité. Problème : ces derniers voient encore Internet comme un ennemi qu’il faut surveiller et contrôler. Leur voie se situe sur le DPI (contrôle profond du transit réseau), ce qui arrivera forcément si on renforce le contrôle des opérateurs.