Auteur/autrice : Éric

  • Peu importe la bonne foi

    The deal was simple: We’ll pay you 20–50% below market rate, but in exchange, you get stabi­lity, reaso­nable work-life balance, and most impor­tantly, no layoffs. This wasn’t writ­ten in any employee hand­book, but everyone unders­tood it.

    Daniel Sada

    Et, comme toujours, ils se retrouvent à avoir fait des conces­sions sans en avoir les retours. Le licen­cie­ment massif arrive quand même.

    Je m’im­plique toujours tota­le­ment. Je ne sais pas faire autre­ment, et ne le veux pas, mais je ne fais plus de conces­sions sur mes reve­nus sur l’au­tel de valeurs ou de promesses. Je les prends en compte, peut-être trop, mais j’ai appris bien trop de fois que ce sont des choses qui ne tiennent pas dans la durée, peu importe la bonne foi de ceux qui les font.

  • Inter­dire les milliar­daires

    « Vouloir inter­dire les milliar­daires c’est confis­ca­toire, et contre la liberté d’en­tre­prendre. »

    trop souvent entendu

    Je suis contre les milliar­daires juste­ment parce que je suis contre la confis­ca­tion et pour la liberté.

    Je suis convaincu que personne n’a une telle valeur ajou­tée par rapport aux autres. Deve­nir milliar­daire se fait forcé­ment en exploi­tant autrui, en leur confisquant la part de richesse qui devrait reve­nir aux autres.

    Entre le manque de richesse des uns et le grand pouvoir obtenu par quelques autres, on crée un verrouillage et un système de domi­na­tion qui est tout sauf créa­teur de liberté pour tous.

  • Je ne crains pas de perdre mon travail

    Je ne demande même que ça.

    Travail n.m. (lat. pop. tripa­lium ; de tres, trois et palus pieu) instru­ment de torture puis appa­reil où l’on place les bœufs pour les ferrer

    Quelle mouche a donc piqué notre société pour qu’on veuille sauve­gar­der le travail ? Je suis des plus heureux que l’au­to­ma­ti­sa­tion m’épargne une quan­tité de travaux des siècles derniers, et qu’elle nous ait permis d’avoir un meilleur confort et une meilleure vie.

    J’ai une machine à laver le linge et une pour la vais­selle. J’ai une calcu­lette ainsi qu’un micro-ordi­na­teur portable. L’élec­tri­cité m’ap­porte aussi la lumière, la cuis­son, un ascen­seur et certai­ne­ment cent autres appa­reils quoti­diens.

    On est telle­ment entou­rés de travail auto­ma­tisé qu’on oublie que le travail manuel n’est plus que l’ex­cep­tion.

    Et tant mieux. Je n’en­vie pas le temps des labours manuels, des porteurs d’eau, de la coupe du bois de chauf­fage, des dépla­ce­ments à pieds peu importe la distance, etc.

    C’est la part des richesses appor­tée à chacun qu’il faut sauve­gar­der, pas le travail.

    Confondre les deux relève quand même d’un aveu­glé­ment assez profond.

    Richesses, subst. fém.
    Tout ce qui est suscep­tible de combler, de satis­faire les désirs, les besoins de l’homme.

    Le problème n’est pas que l’au­to­ma­ti­sa­tion retire du travail, ni même qu’on manque de richesses. Le problème c’est que l’au­to­ma­ti­sa­tion du travail modi­fie la répar­ti­tion des richesses (vers une plus grande concen­tra­tion).

    Dans un monde capi­ta­liste, la richesse appar­tient d’abord à celui qui contrôle les moyens de produc­tion. Il y a long­temps c’était la terre. Désor­mais ce sont les machines et les infra­struc­tures. Demain ce sera peut-être ce qu’on nomme les intel­li­gences arti­fi­cielles.

    Pour partie, les emplois perdus sont recréés ailleurs. L’enjeu c’est d’as­su­rer la tran­si­tion. Le chômage et la forma­tion sont des réponses mais elles ne sont que partielles. Ceux qui perdent un emploi ne sont pas forcé­ment les mêmes que ceux qui en trouvent un nouveau.

    Malheu­reu­se­ment, nos élus tendent à rabo­ter le chômage et culpa­bi­li­ser les personnes qui perdent leur emploi. Tout ceci est pour­tant struc­tu­rel, attendu. Il ne reste qu’un RSA de misère qui repré­sente à peine la moitié du seuil de pauvreté.

    Pour ne rien gâcher, nos élus tendent à vouloir augmen­ter le temps de travail, donc concen­trer l’em­ploi et les richesses acquises ainsi sur moins de personnes, avec forcé­ment plus de lais­sés pour compte.

    Prépa­rer la révo­lu­tion

    Ce qu’on nomme intel­li­gence arti­fi­cielle rend envi­sa­geable à une révo­lu­tion à court terme. On y croit ou on n’y croit pas, mais c’est un avenir possible, crédible.

    La diffé­rence avec la révo­lu­tion de la vapeur, de l’au­to­ma­ti­sa­tion des usines et de l’élec­tro­nique, c’est la vitesse à laquelle on imagine l’au­to­ma­ti­sa­tion prendre place.

    Ça peut être sanglant, à un point diffi­ci­le­ment compa­rable avec le passé.

    Le chômage ne peut pas être la solu­tion. L’es­poir dans la créa­tion de nouveaux types d’em­plois non plus. L’échelle des temps n’est pas la bonne.

    Il faut autre chose. D’au­cuns parlent de revenu de base, de revenu d’exis­tence ou de salaire à vie. Peu importe. Ça peut être ça ou autre chose, mais on a besoin d’une solu­tion, et on a très peu de temps pour la mettre en place.

    Si nous ne sommes pas prêts c’est un autre type de révo­lu­tion qui peut venir, tout aussi sanglant.

    Lâcheté et absence du poli­tique

    Sauve­gar­der le travail est déjà un non-sens à la base. Faire faire du travail inutile pour éviter de penser la répar­ti­tion des richesses, c’est botter en touche.

    Ça peut fonc­tion­ner pour quelques mois, quelques années, mais pas plus, et à petite échelle. Face à l’am­pleur du chan­ge­ment qu’on entre­voit, ça n’est même pas une possi­bi­lité. On mérite un peu plus de hauteur et de vision.

    Entre temps, tout ce qu’on obtient c’est de soli­di­fier le rapport de domi­na­tion entre les déten­teurs du capi­tal et ceux qui vendent leur travail, physique ou intel­lec­tuel. Comme les second n’ont pas le choix, que les premiers voient venir la possi­bi­lité d’agir seuls, on entame un cycle de régres­sions sociales.

    Tout poli­tique qui trouve sa réponse dans la sauve­garde du travail ou qui cède aux chan­tages à l’em­ploi des grandes socié­tés devrait être hué et renvoyé chez lui. Ceux qui ignorent la ques­tion ne méritent guère mieux.

    Malheu­reu­se­ment les propo­si­tions alter­na­tives ne se croisent pas ailleurs que sur les sites web. Il n’y a aucune vraie action en ce sens.

    Le fascisme qui vient

    Le fascisme et l’au­to­ri­ta­risme qui ne sont pas étran­gers à tout ça.

    On arrive au bout d’un système. On le fait perdu­rer en renforçant le main­tient de l’ordre (police, lois, enfer­me­ment, pouvoirs de l’exé­cu­tif) et en bridant la capa­cité de s’or­ga­ni­ser (répres­sion des mouve­ments sociaux, guerre ou jeux, menaces socié­tales réelles ou fantas­mées, renfor­ce­ment de la pola­ri­sa­tion, dési­gna­tion de coupables, oppo­ser les uns et les autres).

    Il n’y a pas de complot, juste un engre­nage qui se met en place de lui-même par la lâcheté ou la courte vue de nos respon­sables poli­tiques.

    Les déten­deurs du capi­tal sont malheu­reu­se­ment histo­rique­ment assez à l’aise voire acteurs dans ces périodes, et c’est encore le cas aujourd’­hui. Leur pouvoir s’y renforce.

    Ça tient un temps, jusqu’à soit explo­ser soit sentir très mauvais. Les deux ne s’ex­cluant pas.

  • Approche des coûts et des oppor­tu­ni­tés

    J’ai toujours du mal avec la gestion des coûts d’une partie de l’in­dus­trie française, boites tech incluses.

    En France on est prin­ci­pa­le­ment sur le mode « les salaires coûtent déjà telle­ment cher qu’il faut réduire au maxi­mum tous les coûts addi­tion­nels, maté­riels et licences ».

    Aux US je perçois quand même l’op­posé, au moins dans les boites tech : « les salaires coûtent déjà telle­ment cher que ce serait un gâchis de ne pas en libé­rer tout le poten­tiel possible en payant les meilleurs outils et les meilleures condi­tions de travail ».

    Choi­sis ton camp.
    Moi il y en a un des deux qui me semble quand même plus censé.


    Ça n’a rien de neuf, on est dans le point 9 de la liste de Joel Spolsky. Elle a quand même 25 ans désor­mais.

    Do you use the best tools money can buy?

    Mes premières années en étaient arri­vées à me faire croire qu’il était normal d’avoir du maté­riel plus effi­cace pour mes loisirs que pour le travail. Sans trou­ver ça normal, je crains qu’une large partie des déve­lop­peurs français ne vivent encore cette situa­tion hallu­ci­nante. Quand on parle de télé­tra­vail, c’est d’ailleurs souvent une des moti­va­tions qui ressort : Ce n’est pas que le temps de trajet, c’est aussi le maté­riel à dispo­si­tion qui est meilleur chez soi.

    On trouve par contre encore trop souvent accep­table voire normal de compen­ser les manques d’al­lo­ca­tion par du maté­riel person­nel.

    • J’ai déjà ramené un écran au travail, qui y est resté des années jusqu’à ce que je quitte l’en­tre­prise.
    • J’ai vu régu­liè­re­ment au cours de ma carrière des déve­lop­peurs rame­ner leur ordi­na­teur portable person­nel au travail malgré des inter­dic­tions strictes, faute d’en avoir un offi­ciel qui permette de travailler correc­te­ment.
    • J’ai quasi­ment toujours vu des déve­lop­peurs rame­ner un clavier externe, parfois une souris, souvent des casques anti-bruits, essen­tiels pour travailler effi­ca­ce­ment.
    • Je ne compte même pas toutes les entre­prises qui profitent des usages mobiles ou de pouvoir joindre les déve­lop­peurs hors du bureau mais qui refusent de finan­cer le smart­phone corres­pon­dant.
    • J’ai même croisé des équipes en ESN qui travaillent sur des app mobiles sans avoir aucun appa­reil mobile pro pour tester leurs appli­ca­tions.
    • Damned, j’ai même vu des entre­prises oser propo­ser de finan­cer moitié-moitié des équi­pe­ments pour­tant néces­saires, ou de dire que ceux qui travaillent de chez eux n’au­ront pas autant de maté­riel pro parce qu’ils peuvent utili­ser du maté­riel person­nel.

    Je prends des exemples de maté­riel mais c’est encore pire dès qu’on parle licences et coûts factu­rés à l’usage. Même quand c’est possible, parfois l’ef­fort ou le temps deman­dés pour l’ob­ten­tion sont dispro­por­tion­nés par rapport au montant à débour­ser.

    Les budgets français sont rare­ment là pour donner de l’au­to­no­mie. Ils sont là pour réduire les coûts et empê­cher de dépen­ser sur ce que le mana­ge­ment n’avait pas prévu et validé.

    Heureu­se­ment ce n’est pas vrai partout, et pas toujours dans ces propor­tions, mais ça reste encore trop souvent le cas.


    Comment voulez-vous créer des oppor­tu­ni­tés ? voir appa­raitre de l’in­no­va­tion ? libé­rer la créa­ti­vité ? provoquer des chan­ge­ments ?

    S’il faut tout négo­cier et justi­fier, si ça demande un effort supplé­men­taire pour tout, il ne faut pas s’éton­ner qu’en­suite rien ne bouge.

    Il faut lais­ser des marges de manœuvre et de l’au­to­no­mie. Il faut savoir ne pas tout surveiller, ne pas tout maitri­ser, et ne pas tout mesu­rer immé­dia­te­ment. Il faut accep­ter qu’on se trompe, et qu’on ne corrige qu’a­près-coup.

    Et oui, ça veut dire aussi que parfois on dépen­sera du budget au mauvais endroit. On le verra, on corri­gera, et peut-être que la prochaine fois ça portera ses fruits.

    Ne pas essayer est la seule façon de ne pas réus­sir.

  • Lâcher les coûts

    L’ar­ri­vée des LLMs dans le déve­lop­pe­ment web met pas mal en lumière l’ap­proche inco­hé­rente de la plupart des socié­tés françaises par rapport aux coûts.

    Un Cursor c’est 40$ par mois et par déve­lop­peur. C’est moins d’une heure de travail d’un déve­lop­peur stan­dard en France.

    On est en dessous des paliers où on devrait même en parler. Si l’au­to­no­mie de vos déve­lop­peurs ne va pas jusqu’à leur faire confiance pour une heure de travail, vous avez pas mal de choses à remettre en cause dans votre orga­ni­sa­tion.

    En réalité, les équipes qui font d’ores-et-déjà un usage inten­sif de l’IA sur tout leur process — et pas unique­ment la côté complé­tion de code dans l’édi­teur —1 ont proba­ble­ment des factures qui sont au-delà des 100$ ou 200$ par mois et par déve­lop­peur.

    Je ne serais pas étonné que, dans ces équipes, on trouve faci­le­ment la demie-jour­née de travail gagnée qui justi­fie l’abon­ne­ment Ultra à 200$.

    En fait, dans mes lectures actuelles, je vois même parler de 2000$ par mois et par déve­lop­peur. Là on commence à parler. Là ça demande de savoir si on démul­ti­plie vrai­ment la force de travail ou si on se contente de faci­li­ter le travail.

    Peut-être que le coût se justi­fie déjà, et on a un chan­ge­ment struc­tu­rel dans la façon de travailler. Peut-être que ce n’est pas encore le cas, mais lais­ser ceux qui le veulent jouer à ce niveau rend possible de voir appa­raitre un tel chan­ge­ment2.

    Le vrai enjeu est ici. Je suis heureux de débattre sur comment on peut chan­ger la donne, pas de me battre sur le coûts d’ou­tils qui repré­sentent moins d’une poignée d’heures par mois.


    1. Il parait que le quadra­tin est désor­mais devenu un marqueur pour détec­ter l’usage de textes rédi­gés par IA. Je ris jaune. Vous trou­ve­rez dans mes textes sur ce blog un usage régu­lier de cette typo­gra­phie depuis 15 ou 20 ans. Tirez-en les conclu­sions que vous voulez. ↩︎
    2. On dit que l’in­no­va­tion nait par la contrainte. Elle nait aussi par l’op­por­tu­nité et la liberté de sortir du terrain connu pour essayer, sans savoir ce que ça peut donner. ↩︎
  • IA : L’élé­­phant dans le couloir (ter)

    Je n’ai pas encore résolu mes inter­ro­ga­tions et mes contra­dic­tions sur le sujet de l’IA et de son impact sur la planète.

    Je retiens toute­fois quatre points :

    1– Personne ne peut prétendre savoir ce que sera l’ave­nir.

    On ne sait pas à quel point les usages vont s’en­vo­ler ou pas. On ne sait pas quels seront ces usages. On ne sait pas s’ils vont rempla­cer d’autres usages, ni lesquels ni en quelle propor­tion. On ne sait pas quelle sera la consom­ma­tion ni la taille des modèles futurs.

    On ne sait honnê­te­ment pas grand chose.

    Si les projec­tions sont des exer­cices inté­res­sants, il ne faut pas confondre ça avec des prédic­tions.

    2– Il y a certains futurs possibles où l’im­pact de ces outils sur la planète pour­rait deve­nir signi­fi­ca­tif, voire un des enjeux à résoudre dans le cadre de la lutte contre le chan­ge­ment clima­tique.

    Les limites de notre planète et le chan­ge­ment clima­tique sont à mes yeux peut-être les plus grands enjeux que l’hu­ma­nité ait eu depuis qu’elle existe, et les consé­quences seront proba­ble­ment désas­treuse.

    Ajou­ter au problème ou frei­ner les mesures d’at­té­nua­tion sont des risques loin d’être anodins.

    3– Il faut garder en tête les ordres de gran­deur.

    Les esti­ma­tions récentes descendent à 0.3Wh pour une requête stan­dard à un ChatGPT-like. Si les chiffres varient, on peut dessi­ner une borne supé­rieure à 3Wh.

    À 0,3Wh1, perdre 5 minutes à rédi­ger une conclu­sion ou un listing d’ac­tions, à faire une relec­ture d’or­tho­graphe ou de gram­maire sur un docu­ment, ou à faire une traduc­tion rapide, c’est entre 5 et 10 requêtes2. Ouvrir le frigo une fois de trop c’est de l’ordre de 30 à 40 requêtes3. Réchauf­fer des restes 3 minutes au micro-onde au lieu de manger froid c’est 150 requêtes4.

    Les plus curieux trou­ve­ront plein d’autres compa­rai­sons dans le point d’étape précé­dent.

    J’ajoute au moins que faire soirée raclette dans l’an­née c’est de l’ordre de 25 000 requêtes ChatGPT-like par personne, soit 60 tous les jours pendant un an5.

    Ça ne veut pas dire que ça n’a pas d’im­por­tance, et tout ajout est un ajout de trop, mais se foca­li­ser sur les usages actuels risque de géné­rer beau­coup d’at­ten­tion au mauvais endroit. C’est vrai autant à titre indi­vi­duel qu’à titre collec­tif.

    4– Certains usages ont un gain net.

    En repre­nant les exemples plus haut, utili­ser l’IA pour faire traduire, résu­mer, relire des docu­ments ou recher­cher dans ceux-ci plutôt que le faire à la main permet proba­ble­ment de dimi­nuer l’im­pact sur la planète.

    C’est pareil si l’as­sis­tance de l’IA pour cher­cher et réali­ser des menus peut permettre une fois de temps en temps d’évi­ter un aller-retour au frigo, de jeter un reste ou d’avoir une recette froide plutôt que chaude.

    Culpa­bi­li­ser l’usage par prin­cipe ressemble aux mêmes mauvaises idées derrières de bonnes inten­tions que le tri des emails qui impose de passer du temps sur l’or­di­na­teur ou le pipi sous une douche qui dure plus long­temps.


    Je n’ai toujours pas de conclu­sion.

    Ce n’est pas un décompte.

    Le second point a tendance à réveiller ma trouille déjà exis­tante sur ce que sera la vie des géné­ra­tions suivantes, dont celle de mon fils.

    Je ne veux surtout pas que les autres points incitent quiconque à mini­mi­ser ce risque ou son impor­tance.

    Agiter le chif­fon rouge ne me parait pas pour autant une bonne idée et je pense que ce serait une erreur que de trai­ter la chose de façon binaire par anti­ci­pa­tion.

    Pour l’ins­tant j’en suis là.

    Comme je disais en intro­duc­tion, j’ai encore plus de ques­tions que de réponses, et encore des contra­dic­tions.


    1. C’est ce qui semble ressor­tir de mes lectures. Si on prend 3Wh comme réfé­rence certaines compa­rai­sons sont moins impres­sion­nantes mais le prin­cipe reste. ↩︎
    2. 10W pour un ordi­na­teur portable en très faible acti­vité + 20W pour un écran externe de taille clas­sique. ↩︎
    3. Ordre de gran­deur de 1kWh par jour, consom­ma­tion augmen­tée de 17% pour 15 ouver­tures par jour ↩︎
    4. Micro-onde à 900W ↩︎
    5. Esti­ma­tion de 2,5kg d’eqCO2 par personne traduite en consom­ma­tion éner­gé­tique à l’aide du mix des USA de 365 g d’eqCO2 par kWh ↩︎
  • Tu as l’air fati­gué ce matin

    Je me pose la ques­tion depuis un mois, savoir si ce trai­te­ment contre l’apnée du sommeil a ou pas un effet concret sur ma vie.

    Ma famille me dit que la diffé­rence est flagrante dans ma façon d’être.

    Pour ma part c’est plus diffi­cile à dire. Ce n’est pas forcé­ment que l’ef­fet soit faible, c’est que je suis extrê­me­ment mauvais à ressen­tir ce qui m’ar­rive.

    Cette nuit, la seule fois sur le mois, j’ai arrêté la machine après quelques heures et me suis recou­ché sans penser à la remettre.

    Tu as l’air fati­gué ce matin

    Ce matin, pour la première fois avec ces collègues, on me dit que j’ai l’air très fati­gué.

    C’est peut-être une coin­ci­dence mais je me dis que oui, cette machine contre l’apnée du sommeil a peut-être des effets visible sur ma vie.

    Je suis curieux de revoir des personnes avec qui j’ai travaillé l’an­née dernière, comprendre comment ils me perce­vaient.

  • Taux d’ac­ti­vité et répar­ti­tion des richesses

    Le chômage est à des niveaux extrê­me­ment élevé depuis des années en France.

    En 1975 le chômage est entre 3 et 4%. Il monte à plus de 9% en 1959 puis oscille entre 8 et 11% jusqu'en 2015, où il se met à baisser (avec un regain temporaire en 2021) jusqu'à passer sous les 8%
    Taux de chômage en France entre 1975 et 2024

    C’est vrai, mais c’est aussi trom­peur.

    « Le taux d’ac­ti­vité des 15–64 ans est de 73,6 %, son plus haut niveau depuis que l’In­see le mesure au sens du BIT (1975). »

    Le taux d’ac­ti­vité est en crois­sance lente mais conti­nue depuis 35 ans. Il est plus haut aujourd’­hui qu’il ne l’a jamais été.

    Pensez-y la prochaine fois qu’une personne de pouvoir vous dira que les français ne cherchent plus réel­le­ment à travailler.

    Les statis­tiques démontrent le contraire.

    Taux d'activité selon l'âge de 1975 à 2022. 

Le taux des hommes de 30 à 54 ans baisse en continu mais reste au-delà de 90%
Le taux des femmes de 30 à 54 ans monte lui fortement, de moins de 60% à plus de 85%.

Les jeunes, 15 à 29 ans, baissent eux notablement et de façon continue, de plus de 65% à moins de 60% voire moins de 55%.

Le taux des plus âgés, de 55 à 64 ans, démarre à 50%, baisse fortement jusqu'à fleurter les 30%, puis monte de façon continue depuis 25 ans pour dépasser aujourd'hui les 60%

    C’est d’ailleurs aussi très clai­re­ment le cas pour les seniors. Leur taux d’ac­ti­vité monte très forte­ment et de façon conti­nue depuis 25 ans. Il n’a jamais été aussi haut.

    Pensez-y quand les mêmes vous diront qu’on arrête de travailler de plus en plus tôt.

    Les statis­tiques démontrent le contraire.

    Le problème c’est plutôt que les français et françaises veulent travailler, et que le nombre d’em­ploi n’a pas augmenté aussi vite.

    Il y a certai­ne­ment une ques­tion de libé­ra­tion des femmes, et on le voit à l’aug­men­ta­tion de leur taux d’ac­ti­vité, mais il n’y a pas que ça.

    L’aug­men­ta­tion du taux d’ac­ti­vité des seniors tend plutôt à montrer que si les français travaillent plus c’est parce qu’ils en ont besoin [pour vivre correc­te­ment ?].

    Si les gens travaillent plus, plus vieux, c’est qu’il n’y a pas de manque d’ef­fort ou de volonté. Il ne sert à rien de deman­der aux français de travailler encore plus. C’est déjà ce qu’ils demandent, et ce que traduisent les chiffres du chômage.

    Moi je pose­rais surtout le problème de la répar­ti­tion des richesses.

  • IA sans l’in­tel­li­gence

    Je n’aime pas ce terme d’IA, intel­li­gence arti­fi­cielle.

    On trompe les gens. On provoque un imagi­naire de science fiction avec les robots conscients d’Asi­mov et des intel­li­gences arti­fi­cielles éthé­rées de cyber­punk.

    Ce qui est sous nos doigts aujourd’­hui ne réflé­chit pas. Ce n’est pas de l’« intel­li­gence » au sens où on l’en­tend commu­né­ment mais ça reste majeur. Ça reste un poten­tiel boule­ver­se­ment socié­tal majeur.


    J’ai tenté de parler de LLM, large language model, mais c’est cibler une tech­no­lo­gie spéci­fique. Je vais conti­nuer à parler d’IA, mais je n’aime pas ça.

    Gardez-vous de vous moquer parce que ChatGPT fait une erreur sur une addi­tion de nombres à deux chiffres. L’enjeu n’est pas là.

  • Virage pro

    J’ai peu parlé de ma nouvelle aven­ture profes­sion­nelle. J’ai fait un virage assez fort. J’ai tardé à en parler parce que je ne suis pas encore sorti du virage, et j’ai toujours un peu peur de la sortie de route.

    J’ai inté­gré un poste de Lead Soft­ware Engi­nee­ring dans un accé­lé­ra­teur à Sanofi.

    Chan­ge­ment de contexte

    Si je mets à part ma première année à faire le site web d’une choco­la­te­rie locale, j’ai toujours baigné dans des entre­prises tech avec un produit tech, où le déve­lop­pe­ment logi­ciel était le cœur de l’en­tre­prise.

    Ici c’est diffé­rent.

    Je ne travaille pas direc­te­ment sur le cœur de l’ac­ti­vité. Le digi­tal1 est au service du reste de l’ac­ti­vité. Le déve­lop­pe­ment logi­ciel c’est une partie du digi­tal, et pas forcé­ment la plus impor­tante.

    C’est un pied dans l’in­connu. Je m’at­tends à une façon diffé­rente d’abor­der la tech­nique, les inves­tis­se­ments et les déci­sions.

    Les process de qualité sont déjà un enjeu majeur vu que je vais travailler dans la branche usine. C’est aussi plein de choses à apprendre et décou­vrir, et ça c’est enthou­sias­mant.

    Accé­lé­ra­teur

    Pendant long­temps j’ai entendu autour de moi des gens dire qu’il fallait être dans une boite tech, que c’est là que tout se faisait, que je ne trou­ve­rai pas d’équi­valent ailleurs.

    Je suis passé au-delà de l’image exté­rieure. Je ne veux pas aban­don­ner ce que j’ai appris de posi­tif dans les boites tech, dont le fait de bouger vite, la liberté d’ac­tion, l’au­to­no­mie, la confiance, l’exi­gence tech­nique, etc.

    L’ac­cé­lé­ra­teur c’est juste­ment ça : Faire des bureaux et une hiérar­chie sépa­rés, y récu­pé­rer une culture et des pratiques de boites tech, avec les moyens et soutiens qui vont avec de la part de la direc­tion, puis insuf­fler ça par l’exemple dans le reste de l’en­tre­prise.

    J’es­père y trou­ver le meilleur des deux mondes, ou au moins un compro­mis inté­res­sant. En tout cas c’est le plan. De ce que j’en ai vu jusqu’à présent, le pari est plutôt réussi.

    C’est un chan­ge­ment d’échelle

    Si je mets de côté mon passage à Yahoo! et celui dans une ESN de moyenne impor­tance, j’ai fait 20 ans dans des boites de 10 à 200 personnes, géné­ra­le­ment moins de 200.

    Ici c’est 80 à 90 000 employés.

    Je vais être un rouage d’une grande machine, avec les process qui vont avec, une proxi­mité humaine diffé­rente, proba­ble­ment moins de flexi­bi­lité, et peu de capa­cité d’in­fluen­cer les déci­sions stra­té­giques à l’échelle de l’en­tre­prise.

    Je ne sais pas encore trop ce que ça va impliquer, pas forcé­ment du néga­tif, mais ça va être clai­re­ment diffé­rent.

    Là aussi, cepen­dant, peut-être ce chan­ge­ment d’échelle sera mitigé par le côté accé­lé­ra­teur, et le senti­ment d’ap­par­te­nance à un groupe plus raison­nable qui a une mission à part entière.

    Une ques­tion de péren­nité et stabi­lité

    Je cherche un peu de stabi­lité et d’im­pli­ca­tion long terme que je n’ai pas réussi à trou­ver jusque là. Il y a certai­ne­ment des causes intrin­sèques à ma personne2, mais aussi d’autres liées à l’en­vi­ron­ne­ment que j’ai côtoyé jusque là.

    Une start-up c’est quelques personnes, quelques dizaines. Je ne sais pas jusqu’où je peux parler de star­tup mais ça s’ar­rête certai­ne­ment à quelques centaines.

    L’idée c’est qu’on n’est pas censé rester entre 20 et 200 personnes. Soit ça croit, soit ça tombe. Si je n’ai fait que ça, que je ne sais faire que ça, je vais conti­nuer à devoir passer d’une boite à l’autre.

    L’in­ten­tion est qu’ici ce soit diffé­rent.

    Au-delà de tout ça, j’ai quand même aussi la petite musique de l’âge. À 45 ans3 je commence à me poser des ques­tions sur l’ave­nir. Il y aura un âge où on ne m’em­bau­chera plus, surtout dans le milieu big tech, encore plus dans l’en­vi­ron­ne­ment start-up & scale-up. Ça fait déjà des années que je fleure déjà le top 10 des plus âgés dans les entre­prises que je rejoins.

    Bref, il y a un moment où il faudra que je trouve une place ailleurs, une place qui soit pérenne. Peut-être est-ce tôt pour y penser, peut-être pas, mais ça fait partie de la réflexion en tâche de fond, de pourquoi c’est peut-être le bon moment pour moi d’es­sayer ce grand virage. En tout cas je ne me crois pas assez vieux pour avoir peur ou envie d’es­sayer, et ça c’est posi­tif.

    C’est un chan­ge­ment de rôle

    Le vrai chan­ge­ment possible c’est le chan­ge­ment de rôle.

    La hiérar­chie est bien plus écra­sée qu’on ne le pense mais, dans une struc­ture de 80 ou 90 000 personnes, mon posi­tion­ne­ment est forcé­ment diffé­rent de mes précé­dents.

    Je crois que c’est ce qui m’a fait le plus réflé­chir.

    J’ai besoin de liberté, d’im­pact, de fierté. Dès mes premières années, même en ESN, j’ai été élec­tron libre, expert et pompier, puis consul­tant. Je suis sur des rôles de direc­tion depuis quasi­ment 15 ans, avec la capa­cité et la liberté de prendre mes déci­sions.

    Exécu­ter les instruc­tions d’un autre sans être entendu m’use très rapi­de­ment les nerfs. La fin de mes aven­tures a d’ailleurs souvent été suite à une période de ce type.

    Bref, je suis Lead, ce qui ne veut rien dire. En pratique j’ai la respon­sa­bi­lité des équipes logi­cielles de l’ac­cé­lé­ra­teur lyon­nais qui va s’oc­cu­per des usines, autant sur la tech­nique que sur l’or­ga­ni­sa­tion. Mon direc­teur semble vouloir me lais­ser faire mes choix et prendre mes respon­sa­bi­li­tés, peut-être plus que je ne m’y atten­dais.

    Il y a certaines choses où je serai très cadré mais dans l’en­semble j’ai l’im­pres­sion que j’au­rai une grande auto­no­mie, ce qui me convient très bien. Il y a même des sujets où j’ai l’im­pres­sion que je vais être plus libre ici que je ne l’ai en réalité été vis-a-vis de mes CEO en CTO ou VP Engi­nee­ring de start-up/scale-up.

    Un chan­ge­ment de titre

    Je dis toujours que les titres ne sont pas l’im­por­tant. Je le pense, vrai­ment. Avec le chan­ge­ment de rôle vient un chan­ge­ment de titre qui quand même imposé un vrai moment de réflexion, voire de doute.

    Ce n’était pas une ques­tion de ce que je fais, c’était une ques­tion de ce que j’af­fiche. Avec le temps, je me suis rendu compte que la fierté joue un grand rôle pour moi. J’ai besoin d’être fier de ce que je fais, de ce que je suis, et le voir dans le regard d’au­trui.

    Je fais sur ce poste de Lead ce qu’on aurait appelé Direc­teur ou Head Of dans la plupart des entre­prises de la tech mais je ne l’af­fiche pas. C’est peut-être un des éléments qui, incons­ciem­ment, m’a fait retar­der mon annonce.

    Le chemin intel­lec­tuel n’est pas encore terminé. Il avance. Je vais trou­ver d’autres raisons d’être fier qu’un titre Linke­din. C’est proba­ble­ment aussi bien.

    Il y a aussi ce qui ne change pas

    Le terme « entre­prises à mission » me fait toujours un peu sourire mais, au moins, j’ai depuis long­temps essayé de choi­sir des entre­prises que je trou­vais utiles socia­le­ment, dont le produit avait du sens pour moi.

    Je n’ai aucune envie d’être le CTO de la dernière brosse à dent connec­tée, ni de parti­ci­per à je ne sais quelle spécu­la­tion autour du Web3 et des NFT. Je n’ai pas envie de travailler à la publi­cité ou au pistage de la popu­la­tion.

    Sanofi fait de la santé. Le cœur c’est la R&D phar­ma­ceu­tique et les vaccins, puis les usines pour produire. C’est utile à la société. Ça compte énor­mé­ment pour moi.

    Bref, j’ai tout changé

    C’est un gros virage dans mon envi­ron­ne­ment pro.

    Depuis trois semaines, même si je reste dans un envi­ron­ne­ment cultu­rel très connu, je découvre un nouveau monde et j’ap­prends ce que sera mon terrain de jeu.

    Grand groupe oblige, je ne peux ni ne veux en dire trop publique­ment, mais si on se connait vous êtes les bien­ve­nus à venir en parler avec moi en privé.


    1. Ils parlent anglais, la divi­sion c’est la divi­sion digi­tal. Je ne sais pas comment traduire ça complè­te­ment alors je laisse tel quel. ↩︎
    2. J’en ai quelques unes, dont certaines sur lesquelles j’ai pu agir derniè­re­ment, mais l’in­tros­pec­tion n’est jamais termi­née que le jour où on décide d’ar­rê­ter de cher­cher. ↩︎
    3. En fait non, 46 depuis quelques jours. Commen­cer à se mentir à soi-même sur son âge n’in­dique-t-il pas qu’on est passé chez les vieux ? ↩︎