J’espère qu’elle me pardonnera d’avoir repris le dessin verbatim. La version lisible grand format est chez Ellène Siber Dijoux. À partir d’une intervention de Ludovic Cinquin à Devoxx
Et ça rejoint totalement mes réflexions précédentes.
J’espère qu’elle me pardonnera d’avoir repris le dessin verbatim. La version lisible grand format est chez Ellène Siber Dijoux. À partir d’une intervention de Ludovic Cinquin à Devoxx
Et ça rejoint totalement mes réflexions précédentes.
L’idée de base c’est que s’il se passe quelque chose d’imprévu, les veilles de jours chômés sont les moins bons jours pour cela.
Au pire on ne le détecte pas et on a une catastrophe à gérer au retour. Au mieux on le détecte et on fait intervenir les personnes d’astreinte. Dans les cas intermédiaires il faut faire déranger l’équipe opérationnelle pendant les jours de repos, ce qui n’est pas idéal non plus. Rien de très attirant.
Et s’il y a des centaines de mini-déploiements réussis par jour ? des tests unitaires, un déploiement automatisé, un triple environnement iso dev / test / prod, une capacité de revenir à la version antérieure sur simple requête, et un monitoring complet … ?
Génial. C’est un bon objectif qui améliore sacrément le niveau de confiance.
Maintenant on ne parle pas niveau de risques, on parle équilibre de risques. Si le risque d’emmerdement est faible mais que le bénéfice d’une livraison le vendredi soir plutôt que le lundi matin est encore plus faible… autant attendre.
Cet équilibre seul vous pouvez le connaitre, mais ne vous leurrez pas quant à votre couverture de test. Elle ne couvre que ce que vous avez pensé à couvrir. La question n’est pas de savoir si vous aurez des problèmes mais de quand vous les aurez, et dans quelles conditions.
Du coup oui, j’ai tendance à conseiller par défaut d’éviter de livrer dans les périodes qui arrangent le moins. Les fins de journée les veilles d’opérations techniques planifiées importantes, vendredis après midi, veilles de jours chômés, et quelques dates très spécifiques genre autour de Noël pour le e-commerce.
Ça ne veut pas dire « on ne bosse pas » (on peut même livrer en pré-production), ça ne veut même pas dire « on ne livre pas » (parfois le rapport bénéfice/risque est assez haut, par exemple pour des correctifs), ça veut juste dire « ne pas faire comme si rien ne pouvait se passer » et garder une vision objective de la situation – impact d’un imprévu compris.
J’ai vu des commerciaux tenter par tous les moyens d’avancer la facturation ou la signature de clients pour faire rentrer le chiffre correspondant dans la période en cours et atteindre l’objectif.
(même si vous ne lisez pas tout, planifiez de regarder les deux vidéo de 10 et 2 minutes, vraiment)
Une part importante de l’énergie était dépensée non à signer ou facturer, mais à avancer ces évènements de quelques semaines. La valeur ajoutée est faible pour l’entreprise. C’est autant d’efforts et de fatigue qui sont perdus pour réaliser de nouveaux contrats.
Bien entendu, pour y réussir, on grille quelques faveurs, on fait des remises exceptionnelles qu’on aurait pu éviter, et on signe des contrats discutables au niveau de la rentabilité. Peu importe, ça permet de joindre l’objectif. Là on est dans une une perte directe pour l’entreprise.
Il faudra recommencer la période suivante mais il y faudra en plus compenser les projets qui manquent, ceux qui ont été avancé à la période précédente. Magnifique effet boule de neige et fuite en avant. Jusqu’à épuisement ou effondrement.
Je ne l’ai pas vu une seule fois. Je l’ai vu dans trois entreprises différentes, avec des gens différents, dans des contextes relativement différents.
Ne croyez pas qu’il s’agisse uniquement d’une culture commerciale : J’ai vu des chefs de projet traiter ou ne pas traiter les anomalies – voire ne pas les enregistrer – uniquement pour optimiser les résultats en fonction des objectifs, au détriment du projet lui-même. J’ai vu des managers demander à leurs collaborateurs de tricher dans les rapports d’activité – faussant du même coup la facturation et le contrôle de gestion – pour tenir les objectifs.
Je ne saurais même pas dire combien j’ai vu de collaborateurs, de l’exécutant au directeur, travailler au détriment de l’intérêt de l’entreprise uniquement pour atteindre les objectifs fixés, qu’ils soient personnels ou collectifs.
Je n’ai par contre jamais vu d’effet positif, et je dis bien jamais. Peut-être ai-je toujours eu la chance de travailler avec des gens responsables qui ont toujours cherché d’eux-même l’intérêt de l’entreprise quand ils n’avaient pas instruction de faire autrement (et parfois même malgré les instructions de faire autrement), qu’ils aient des objectifs ou pas.
Netflix s’efforce de ne recruter que des “adultes responsables” : ils parleront ouvertement des problèmes qu’ils rencontrent à leurs collègues et leurs supérieurs et jamais n’abuseront des avantages qui leur sont donnés. La confiance érigée en valeur supérieure entraîne des pratiques différentes en matière de contrôle. Ainsi, on part du principe que les employés dépensent l’argent de l’entreprise comme s’il s’agissait du leur et on contrôle moins les notes de frais. Si l’employé prend des vacances, c’est qu’il en a besoin et qu’il sera plus performant après s’être reposé.
Les primes habituellement distribuées dans les grandes entreprises sont abandonnées car elles n’améliorent pas la performance des “adultes responsables” qui, payés au juste prix du marché, sont de toute manière déjà intéressés au succès de l’entreprise qu’ils servent. Ils ont décidé eux-mêmes de la part du salaire et des stock options dans leur rémunération, en fixant l’équilibre correspondant le mieux à leurs besoins et à leur degré d’aversion au risque
Une stratégie claire et expliquée, un suivi par le manager ou par l’équipe pour garder la motivation, un environnement qui permet la confiance, l’autonomie, des moyens adaptés, une rémunération décente et un droit à l’erreur… ça vaut tous les objectifs du monde.
La pression du management suffit le plus souvent à obtenir les dérives citées en début de texte mais si en plus on rémunère le comportement par des bonus… vous vous doutez bien qu’il va y avoir du répondant.
Jusque là les exemples restent assez soft.
J’ai aussi vu des commerciaux faire des signatures pour les annuler ensuite – avec pénalités – un peu après le calcul d’atteinte des objectifs. J’ai vu des managers modifier après coup les imputations des mois ou années précédentes pour obtenir de faux résultats. J’ai vu des directions décaler des primes et des rémunérations variables de plusieurs mois pour tenir l’objectif de résultat net. J’ai vu des chefs de projet livrer des projets incomplets ou avec des trous béants uniquement pour tenir la date.
J’ai vu de nombreuses choses illégales ou simplement très immorales, toutes au détriment de l’intérêt de l’entreprise mais dans l’intérêt de la rémunération variable de leur auteur.
Vous pourriez me dire qu’un variable sur objectif significatif permet au moins de motiver et d’assurer une meilleure productivité. Vous auriez tort.
Il y en a même une seconde depuis :
We find that financial incentives can result in a negative impact on overall performance
— Dr. Bernd Irlenbusch, London school of economics
Parfois les faits, quand ils sont analysés froidement, ne valident pas le ressenti et l’intuition : Plus la prime à l’objectif est forte, moins nous sommes productifs. L’argent n’est pas source de motivation, c’est son manque qui est source de démotivation (hey! non, ça ne veut pas dire la même chose, pensez-y).
À défaut de permettre de meilleurs résultats, et en plus de provoquer des dysfonctionnements voire des actions contre-productives dans l’entreprise, on ajoute surtout de la démotivation et du stress.
Le stress pour chercher à atteindre les objectifs court terme (qui remplace celui de faire son travail le mieux possible, sur le long terme). Le stress de savoir si la prime sera bien versée (et ce d’autant plus si le management n’a pas toujours été très clean, même si ce n’est qu’en apparence). On cherche à courir des sprints épuisants alors que l’entreprise devrait être une course de fond qui se mesure dans la durée.
Mais aussi la démotivation quand les objectifs ne sont pas atteints et la prime non versée (alors que si la prime n’avait simplement pas été prévue, à rémunération identique, il n’y aurait pas eu démotivation) – démotivation démultipliée si le collaborateur a l’impression de ne pas avoir été entièrement en contrôle des résultats et en moyen de les atteindre. Même effet si la prime est quand même finalement versée (trop tard, l’effet négatif a déjà eu lieu car anticipé, au mieux on arrivera à un solde de motivation neutre mais pas une motivation positive due à la réception de la prime).
La démotivation est d’ailleurs valable indépendamment de l’origine de la prime. Qu’elle soit sur objectifs personnels, objectifs collectifs ou intéressement aux bénéfices, elle introduit un stress dès qu’elle est attendue ou espérée, puis une démotivation en cas d’annulation ou un effet positif extrêmement court terme en cas de versement. (quant à ceux qui croient encore au stress positif : vous êtes dangereux et vous n’en avez pas conscience).
The facts are absolutely clear. There is no question that in virtually all circumstances in which people are doing things in order to get rewards, extrinsic tangible rewards undermine intrinsic motivation.
— New Scientist 9th April 2011. pp 40–43
Le pire arrive quand l’employé commence à avoir le choix entre réaliser ce qu’il sait être dans l’intérêt de l’entreprise et réaliser ce qui est inscrit sur ses objectifs. Comme les objectifs sont fixés plusieurs mois à l’avance et ne s’encombrent pas des détails, ça arrive régulièrement.
Certains choisiront leurs objectifs. Vous venez de leur dire que travailler pour l’entreprise n’est pas dans leur intérêt, et de leur prouver qu’ils ont raison. Les rembarquer va être très difficile.
D’autres choisiront l’intérêt de l’entreprise et vous allez les sanctionner pour ça en leur refusant leur prime. Au mieux ils devront s’en justifier auprès de leur direction pour que vous allouiez quand même la prime de façon discrétionnaire. Ça sera quand même trop tard. Ils devront se battre pour avoir le droit de privilégier l’entreprise.
Ça fonctionne une fois, deux fois, peut-être trois. Ensuite ça finit en résignation et désillusion. Ça peut finir en burn-out, en démission, ou en résignation et désimplication. Une fois que vous aurez perdu ceux qui ont essayé par bonne volonté, les récupérer est mission impossible.
Seule solution : la prime exceptionnelle surprise, qui elle aura un effet uniquement positif, long terme. Malheureusement elle finira par être attendue si elle devient fréquente ou régulière.
Comme beaucoup d’ingénieurs, je suis réticent à donner des estimations.
Tous les jours, je résous des problèmes nouveaux, pour lesquels je n’ai encore jamais implémenté de solution.
Si vous n’avez jamais fait d’informatique, mettez-vous bien ça dans la tête : Contrairement au maçon qui peut construire des dizaines de maisons, l’informaticien ne fait jamais deux fois la même chose. Il peut réutiliser la solution précédente à l’infini, en quelques heures. Qu’un développeur fasse deux fois exactement la même chose est le symptôme d’un problème d’organisation.
Si je passe plus de quelques heures, c’est qu’il y a un problème nouveau ou quelque chose de nouveau dans le problème, même si de haut il ressemble à un autre. Mon travail c’est uniquement de créer ce qui manque, ce qui est nouveau par rapport à d’éventuelles solutions précédentes.
Et pour ce nouveau, je vais devoir étudier le problème posé, probablement découvrir des sous-problèmes qu’on n’imaginait pas. Je ne sais pas ce quelles difficultés je vais rencontrer, quelles solutions vont devoir être appliquées, comment les mettre en œuvre, si elles vont réussir ou échouer, et encore moins si le besoin racine va effectivement être couvert à la fin de tout cela.
Il y a plein de textes qui expliquent la problématique de l’estimation mais j’ai trouvé plus d’une fois que le récit de voyage de Michael Wolfe illustre très bien les enjeux avec une analogie que tout le monde comprend.
J’ai croisé de nombreuses personnes qui annonçaient savoir estimer assez correctement, et quelques unes qui semblaient effectivement le faire. Vous en connaissez peut-être aussi.
En pratique à chaque fois qu’on y regarde de plus près, l’estimation n’est pas plus juste qu’une autre. Au mieux on compense les mauvaises estimations en jouant sur le contexte. L’estimation est potentiellement respectée, mais elle n’en est pas plus juste. Et quand compenser ne suffit pas, on se rassure en considérant que ça ne compte pas parce que c’est exceptionnel, qu’il y a une cause extérieure, ou en reportant la faute sur un tiers.
Même les itérations de la tant aimée méthodologie SCRUM jouent sur le même registre : Donner une cible avec un engagement permet d’avoir un peu de pression sur l’équipe. C’est de la pression dite « positive », pour avoir envie d’atteindre l’objectif.
Au final c’est de la pression tout de même, qui souvent se retrouve sur l’amplitude horaire ou sur la fatigue. Quand le management n’a pas une attention et une culture extrêmement forte sur le sujet, ça joue aussi sur une baisse de qualité ou une création de dette technique. C’est humain. À défaut c’est le périmètre qui bouge, mais l’estimation n’en est pas meilleure. Bref, on pallie la mauvaise estimation en jouant sur le contexte.
Si vraiment quelqu’un estime toujours juste à plus de 90%, sans compenser sur le contexte, c’est qu’il est en train de passer du temps à refaire ce qu’il a déjà fait. S’il travaille pour vous : virez-le et embauchez quelqu’un qui saura réutiliser plutôt que perdre du temps.
Même l’estimation par petits lots itératifs n’est qu’une illusion. On estime effectivement mieux des petites tâches qu’on sait percevoir, mais c’est uniquement parce qu’on réfléchit déjà à la problématique et à sa solution au moment de donner l’estimation.
Par la suite on se trompe autant qu’ailleurs. On compense là aussi par l’amplitude horaire, le stress de la pression personnelle, la qualité ou la dette technique. C’est juste que plus la tâche est petite, plus le décalage probable est petit et donc moins il se voit de l’extérieur quand on regarde unitairement.
Vous avez déjà remarqué qu’on ne fait pas tenir 8 tâches d’une heure dans une journée ou 5 tâches d’une journée dans une semaine ? Des tâches d’une heure dans une journée, prévoyez-en 6, moins le temps pour les réunions.
Et des fois on a juste oublié un cas d’usage ou manqué une problématique. Sur un lot important on aurait assumé et dérapé un peu. Sur une petite tâche le cas manqué peut prendre plusieurs fois l’estimation de la tâche initiale. On en fait donc une nouvelle tâche, avec sa propre estimation. Là aussi, l’excuse du cas exceptionnel ou de la sortie de périmètre permet d’éviter de remettre en cause ses estimations.
Alors oui, les estimations sur des petits lots ont tendance à être plus souvent respectées mais elles n’en sont pas beaucoup plus justes. Tout ceci n’est qu’œillères et illusions.
C’est mieux – et c’est logique vu qu’on estime au fur et à mesure du projet, une fois la connaissance acquise – mais ce n’est toujours pas bon.
On peut discuter de l’utilité des estimations, de la capacité du genre humain à savoir donner des estimations absolues. On peu aussi s’enfoncer dans un projet d’opposition, scander #noestimate… mais qu’apporterait-on comme valeur ?
Je suis surtout agacé qu’on se pose surtout la mauvaise question. Au jour le jour je n’ai aucunement besoin d’estimer. J’ai besoin d’apporter de la valeur. La seule question à me poser est « qu’est-ce qui amènera à priori le plus de valeur demain si je le fais aujourd’hui ? » et mettre mes ressources dessus.
La question n’est pas simple pour autant. J’ai besoin d’évaluer si le niveau d’effort à fournir est rentable par rapport à la valeur ajoutée attendue. Ensuite j’ai besoin de prioriser les évolutions entre elles, en fonction de la valeur et du niveau d’effort.
Sauf que justement, je n’ai besoin pour ces usages que d’un ordre de grandeur : Est-ce 10, 100 ou 1000 ? Est-ce beaucoup plus ou beaucoup moins que l’autre évolution à laquelle je pense ? Tout autre détail est aussi utile qu’un parachute pour monter sur une échelle.
L’évaluation de la valeur attendue subit de toutes façons les mêmes incertitudes que le niveau d’effort à fournir. Même s’il est fait à base d’une page pleine de formules, calcul de la valeur attendue dépend parfois totalement de paramètres estimés au doigt mouillé, où même un ordre de grandeur relève plus de la conviction que de l’estimation.
Vous posez-vous vraiment la bonne question ?
En cherchant à savoir si votre projet dérape vous êtes simplement en train de regarder s’il se conforme au plan prévu, à son estimation. Vérifier la validité d’une estimation ne vous apportera aucune valeur, surtout quand on sait dès le départ qu’elle est soumise à des aléas imprévisibles.
Pire, en imposant l’estimation préalable comme indicateur, on freine l’initiative (si je le fais, on prend un risque, même si je sais qu’il faut le faire), on freine la capacité de changer (si on le fait, il faut recalculer le plan, re-estimer, négocier cette estimation, expliquer le mauvais indicateur, ça ne vaut pas le coût ici, tant pis), et on oublie notre objectif (l’indicateur est bon, tant pis si en fait on s’est rendu compte que ça ne créait pas la valeur attendue et qu’il aurait fallu faire autre chose, ça aurait remis en cause le plan).
Vous pouvez vous dire que vous saurez déjouer tout cela, rester agile et pragmatique. Vous vous mentez, du moins tant que votre question sera « où est-ce qu’on en est par rapport aux estimations ? ».
C’est encore pire si vous utilisez l’estimation comme métrique pour apprécier l’efficacité ou la compétence de l’équipe de production. Là non seulement vous comparez juste des choux et des carottes, mais en plus vous inversez votre résultat : Ce sont des équipes qui respectent toutes leurs estimations que vous devriez avoir peur. Elles masquent leurs erreurs en les compensant, volontairement ou non, et ça faussera toutes vos analyses sur la production passée ou future.
Les méthodes agiles vont dans le bon sens mais il est trop facile de s’arrêter aux artefacts sans en comprendre l’objectif. Le principe n’est pas que de découper en petits lots plus faciles à estimer pour pouvoir reprendre une décision entre les différents lots.
Il y a aussi une philosophie derrière, celle de l’apport de valeur.
Seul le présent créé de la valeur. La stratégie envisage le futur, les rétrospectives tirent les leçons du passé. Si vous n’êtes ni dans un contexte de choix stratégique ni en train de tirer des leçons en rétrospective, vous ne devez que vous préoccuper de la meilleure façon d’apporter de la valeur là, maintenant, tout de suite, peu importe ce que vous aviez pu prévu ou estimé par le passé.
Que dois-je faire aujourd’hui et maintenant pour apporter le plus de valeur ?
La pertinence de l’estimation passée ne m’est jamais d’aucune utilité pour répondre à cette question. J’insiste : Jamais. Je prends en compte les difficultés et facilités dans des rétrospectives pour m’améliorer. Je les prends en compte pour évaluer l’effort à fournir sur le reste à faire, et donc l’opportunité de continuer. Que ces facilités ou difficultés aient été prévues ou non, que j’ai divisé par 2 ou multiplié par 20 mon estimation n’importe finalement aucunement.
Estimez, c’est utile, important. Ensuite oubliez-les et surtout ne les réutilisez pas pour autre chose.
(sur le même sujet We don’t need no stinking estimates)
J’ai regardé deux ou trois fois comment déclarer des revenus tirés de la vente de livres auto-édités. Quelques notes pour ceux que ça peut aider, sans aucune garantie juridique (mais vous êtes invités à commenter et corriger) :
Vous détenez bien des droits d’auteur sur vos livres, mais votre activité n’est pas liée à la vente de ces droits d’auteur.
C’est assez difficile à avaler mais en fait la logique est assez simple : L’auteur édité vend des droits d’auteurs sur une oeuvre originale. Vous, vous vendez des copies de livres, ce qui est très différent. Il se trouve que le contenu du livre est le votre, mais ce qui est vendu est bien une simple copie de livre.
Oubliez donc le fait qu’il y a « droits d’auteurs » dans la case « traitements et salaires » de votre fiche d’impôts sur le revenu, car ce n’est pas de là que viennent vos revenus.
Mais surtout ce qui doit attirer votre attention c’est le paiement des cotisations sociales. Dans le cas d’un auteur édité, c’est l’éditeur qui s’en occupe et cotise pour vous à l’Agessa. En auto-édité c’est à vous de vous en occuper et les rappels URSSAF peuvent faire très mal pour ceux qui ont « oublié ».
En fait, qui découle de ce qui précède, vous êtes bien auteur de vos livres, mais pour ce qui est du fisc vous êtes un vendeur, ce qui est différent.
Vous pouvez probablement vous considérer comme éditeur, comme libraire ou comme simple commerçant de livres, mais vous n’êtes pas artiste-auteur. Vous serez refusé à l’Agessa et dans les statuts réservés aux auteurs ou artistes si vous tentez d’y cotiser directement.
Tout au plus, vous pourriez prétendre à une activité d’auteur si vous ne vendez volontairement qu’une poignée d’exemplaires numérotés de vos œuvres originales, un peu comme un photographe qui vend ses tirages. Je doute que ce modèle soit adapté à grand monde, et ça vous imposera en plus de sortir des plateformes classiques de vente de livres.
Franchement, c’est le plus dommage est le plus difficile à avaler, mais tous les statuts protecteurs liés aux auteurs de livres vous sont irrémédiablement fermés si vous n’êtes pas avalisés par un éditeur.
Alors il faut vous déclarer en travailleur indépendant ou monter une entreprise plus classique.
En travailleur indépendant vous relevez à priori du RSI (et vous avez toute ma compassion pour cela, car vous allez souffrir), et les cotisations qui vont avec. Il semble que certains arrivent à se faire enregistrer auprès de l’URSSAF avec le code APE 9003B « autres activités artistiques » et être exonérés de la CFE, ce qui est loin d’être négligeable pour une petite activité.
Il vous faudra envisager une structure plus classique et moins avantageuse si vous dépassez le plafond de 32 900 €, mais ça laisse déjà de quoi voir venir pour beaucoup d’auto-édités.
Pour les joueurs il doit y avoir moyen de déclarer une activité d’auto-entrepreneur « éditeur » et de vous acheter vous-même vos droits d’auteurs, ouvrant droit à l’AGESSA pour cette seconde activité d’auteur édité. Dans certaines conditions, via la vente de livres papier, cette activité pourrait même être considérée comme une activité commerciale de vente et non une activité de service, amenant une taxation plus légère et un plafond de chiffre d’affaire plus que doublé.
Je n’ai pas connaissance de gens qui aient essayé (mais en cherchant ça doit se trouver), donc il est possible que j’ai manqué une bonne raison pour ne pas le faire. Si rien ne vient l’empêcher et pour peu que vous vendiez assez, il est possible que ce soit un des montages les plus intéressants. Il faut par contre être prêt à passer pas mal de temps entre la gestion de l’administratif et le montage (mais j’espère qu’on vous avait prévenu : être indépendant c’est aussi subir la paperasse).
Reste à voir si en étant en même temps auteur et éditeur et si votre maison d’édition n’édite que vous, certains ne considèreront pas que vous êtes à compte d’auteur plutôt qu’à compte d’éditeur (et là : finie la fiscalité d’auteur).
Certains tentent visiblement de déclarer les ventes en BNC (bénéfices non commerciaux) mais ça me semble hautement discutable. Le fisc avait exclu la chose quand j’avais posé la question de l’auto-édition il y a quelques années, vous êtes prévenus (et un rappel de cotisations sociales ça peut faire très mal).
Ça ne serait valable que si l’activité n’est pas conçue comme une activité professionnelle.
Quelle est votre intention d’auteur ? Si vous vivez ça comme une activité professionnelle en cherchant à vendre et en écrivant pour vendre, vous avez à priori une activité professionnelle. Le fait d’échouer à avoir un volume de vente significatif n’est à priori pas un critère pour entrer dans les BNC.
Est-ce que vous faites de la promotion, de la publicité ? Cherchez-vous à en tirer votre revenu principal (ou un revenu significatif par rapport à votre revenu principal) ? Vous présentez-vous comme « auteur » quand on vous demande votre activité professionnelle ? Y passez-vous vos heures ouvrées en semaine ? Ça peut être autant d’indices que vous le vivez à priori comme une activité professionnelle.
Si effectivement vous écrivez comme une activité de loisir et avez choisi de finalement proposer le résultat à la vente pour voir, de façon accessoire sans que ce ne soit l’objectif initial, et qu’en plus les gains sont peu significatifs, alors pourquoi pas. Mais dans ce cas vous ne vous considérerez à priori pas comme auteur indépendant (ce qui est l’objet du billet), pas plus que celui qui a fait de la gouache le week-end dernier ne se considère artiste-peintre.
À ma connaissance, il faut oublier (et c’est aussi ce que m’avait répondu le fisc il y a quelques années). Toute activité professionnelle doit être déclarée en entreprise (l’auto-entrepreneur n’est qu’un sous-cas d’entreprise individuelle), sans exception, quel que soit le montant des gains. Le reste ça s’appelle du travail au noir.
Tourne en ce moment le retour de quelqu’un qui a monté une association « loi 1901 » pour son activité d’auto-édition, en se rémunérant en salarié de cette association.
Le problème est dans l’objectif de l’association, qui doit être absolument non-lucratif. Or monter une association dans l’objectif de vendre ses propres livres et d’en tirer une rémunération c’est typiquement une volonté commerciale et lucrative.
Tenter de formuler astucieusement l’objet de l’association ne trompera personne et fera tomber tout argument de bonne foi dans le cas d’un contrôle ou de la plainte d’un auteur ou éditeur inamical.
On peut tout à fait monter une maison d’édition via une association. Être salarié de sa propre association me semble plus que borderline. Si tant est que ça puisse être légal, ça demanderait de séparer très fortement l’activité salariée de la gestion de l’association.
Si par contre se salarier est dès le départ l’objectif et non le moyen, là on tombe non seulement dans le lucratif, mais dans l’exploitation de l’association au bénéfice de ses gérants, et ça peut faire très mal (on parle de prison).
Pour moi c’est peut-être le pire des montages à faire. La déclaration de BNC ou le simple report dans « traitements et salaires » sur la déclaration de revenus me semblent presque moins risqués car on peut au moins arguer de sa bonne foi si les montants sont faibles. Contrairement au détournement du statut associatif, ça se résolvera au pire sous forme d’un douloureux rappel de cotisations sociales avec pénalités.
Il y a ceux qui travaillent pour [nom de la boîte]
Il y a ceux qui travaillent en tant que [fonction, rôle]
Il y a ceux qui travaillent avec [équipe, supérieur, personne célèbre]
Il y a ceux qui travaillent dans [domaine d’activité, département fonctionnel]
Il y a ceux qui travaillent à [activité, tâches, objectifs]
Et vous ? (j’oublie certainement des formulations intéressantes, et vous êtes invités à compléter)
Il y a quelques histoires dont on ne peut pas parler sur le moment mais qui restent en mémoire.
Je me rappelle un projet de grosse-boite-publique. Il s’agissait grosso modo de faire de l’archivage de fichiers personnels. Comme dans toute grosse-boite-publique, les développements sont confiés à une grosse-SSII.
Un an et demi après, le projet n’est toujours pas officiellement lancé, mais ça n’étonnera pas grand monde. Il y avait de gros problèmes de performances, et d’autres d’architecture, probablement de méthodologie. Pas certain que ça étonne beaucoup plus les professionnels de l’informatique.
Grosse-SSII facturait environ 30 personnes dédiées au projet, c’est à dire plus que la R&D de Dropbox à cette époque alors que cette dernière gérait déjà 175 pays, 4 plateformes, 25 millions d’utilisateurs et 200 millions de nouveaux fichiers quotidiens.
La perle c’est que sur cette équipe, environ la moitié était dédiée à la maintenance applicative bien que le projet ne soit toujours pas officiellement promu au grand public.
Donc voilà, j’ai croisé aujourd’hui un développeur de cette grosse-SSII. Comme à chaque fois, je ne peux pas m’empêcher de me rappeler cette histoire.
J’ai suivi le formulaire de Chris et j’avoue trouver la démarche intéressante :
Considérant ce que vous connaissez de moi, ma façon d’être, mes compétences, ma localisation, mes aspirations, mes expériences, mes valeurs… Où me verriez-vous travailler ?
Je ne donne volontairement aucune directive ni aucun élément explicite moi-même. L’idée c’est justement aussi de ne pas se contraindre par sa propre auto-évaluation et de sortir de la boite qu’on se dessine pour soi-même.
Vous pouvez parler société, métier, rôle, domaine d’activité, … aucune limite.
Il n’y a pas de bonne ou mauvaise réponse, pas de forme ou de détail obligatoire. Vous pouvez laisser un commentaire ici, anonyme ou non, ou m’envoyer un email plus privé.
C’est encore mieux – mais pas obligatoire – si c’est argumenté sur le pourquoi vous pensez que ça peut correspondre. Bonus si l’idée est réaliste. Super-Bonus si c’est actionnable. Super-Méga-Bonus s’il s’agit de quelque chose de concret (une offre existante, être prêt à signer un contrat, etc.) même si je reste moi-même au niveau des idées.
Exceptionnellement j’aimerai vraiment que vous participiez *tous*. Vraiment tous. En fonction de ce que vous connaissez de moi, même si vous en connaissez peu ou quasiment pas, même si c’est uniquement de réputation ou par mes écrits. Je vous remercie d’avance.
750 € nets de bonus annuel pour profiter de vos vacances
Si je n’ai aucune indication de ce que sera le salaire de départ (fixe ou variable, peu importe), savoir qu’on y ajoute 750€ ne m’aide pas.
Je peux me dire que c’est 750€ en plus, mais en fait non vu que la rémunération est forcément négociée ou déterminée en tenant compte de cette somme (sauf à gérer la boite avec légèreté, c’est forcément budgeté et pris en compte dès le départ).
Au final, formulé autrement, c’est juste 750€ d’une rémunération totale qui au lieu d’être répartie sur 12 mois sera donnée d’un coup au milieu d’année. Sauf si le fait d’avoir les sous en une fois par an au lieu d’un petit peu par mois est un vrai facteur de motivation, ça n’amène pas grand chose.
C’est juste dommage parce qu’il n’y a aucune raison de penser que la rémunération (*) ou le job soient inintéressants, mais insister sur ce point pour une somme fixe qui de plus représente 3% ou moins, ça m’a accroché l’oeil… en négatif. C’est encore plus vrai considérant que ça inclut probablement la prime de vacance conventionnelle syntec qui est déjà de l’ordre de 1%.
(*) et encore moins après leur retour sur twitter, où on m’a répondu avoir une grille ouverte en interne, du type de celle de Buffer. Aller la publier n’apporte pas grand chose, mais la diffuser en interne démontre de certains principes que je ne peux qu’apprécier.
Et les responsables réagissent sur twitter, avec calme et en détail. Ça aussi c’est positif.
Tiens, ce sont plutôt ces deux points – ouverture et fonctionnement interne transparent – que j’aurais aimé voir comme indication plus que la prime de vacances. Dommage.
Mon outil de travail idéal serait un gros macbook pro 13″ ou un Lenovo équivalent type X1, donc entre 1750 et 2500 € avec la garantie 3 ans. Ajoutez clavier et trackpad déportés, les adaptateurs, une housse qui protège vraiment, et un écran fixe 24 à 27″. Ça commence à chiffrer :
Macbook | 2250 € |
---|---|
Apple Care | 250 € |
Clavier bluetooth | 70 € |
Trackpad bluetooth | 70 € |
Adaptateur Ethernet | 30 € |
Adaptateur VGA | 30 € |
Housse | 50 € |
Sac transport | 150 € |
Écran | 550 € |
Je prévois clairement plutôt large mais il y a aussi certainement une ou deux licences logicielles à ajouter. On peut certainement faire moins cher mais attention, économiser sur le matériel informatique professionnel a tendance à être contre-productif.
Amorti sur plusieurs années, le retour sur investissement d’un outil de travail de haut niveau est assez rapide. Je suis prêt à parier que le rapport entre le coût de l’outil de travail et le salaire doit être plus élevé dans beaucoup d’autres métiers.
Il y a aussi un coût récurrent au niveau des licences. Mettons du Google Apps, du Microsoft Office, du Crashplan, du Github et quelques autres SAAS.
La bonne idée pour les développeurs, c’est une Dedibox ou une Kimsuffi dédiée à la mise en ligne d’outils internes, tests et prototypes. Les graphistes auront certainement besoin d’une licence Adobe malgré le prix prohibitif.
Dans l’idéal on ajoute peut être aussi un appareil type smartphone ou tablette par an pour mettre à jour l’environnement de test et d’exploration matériel.
Ajoutons encore une vraie chaise de bureau, et c’est toujours perdant de mégoter là dessus même si je ne sais pas trop quoi recommander.
Quel est votre environnement de travail ? Quelle expérience positive ou négative en tirez-vous ?
Quel serait votre idéal utile ? que recommandez-vous ?
Qu’est-ce qui vous semble indispensable ou superflu ? Quels compromis feriez-vous au lancement d’une nouvelle activité où forcément chaque euro compte au départ ?