Catégorie : Vie professionnelle

  • Toute l’es­time que je vous porte

    Toute l’es­time que je vous porte

    Comme beau­coup d’in­gé­nieurs, je suis réti­cent à donner des esti­ma­tions.

    je ne sais pas esti­mer

    Tous les jours, je résous des problèmes nouveaux, pour lesquels je n’ai encore jamais implé­menté de solu­tion.

    Si vous n’avez jamais fait d’in­for­ma­tique, mettez-vous bien ça dans la tête : Contrai­re­ment au maçon qui peut construire des dizaines de maisons, l’in­for­ma­ti­cien ne fait jamais deux fois la même chose. Il peut réuti­li­ser la solu­tion précé­dente à l’in­fini, en quelques heures. Qu’un déve­lop­peur fasse deux fois exac­te­ment la même chose est le symp­tôme d’un problème d’or­ga­ni­sa­tion.

    Si je passe plus de quelques heures, c’est qu’il y a un problème nouveau ou quelque chose de nouveau dans le problème, même si de haut il ressemble à un autre. Mon travail c’est unique­ment de créer ce qui manque, ce qui est nouveau par rapport à d’éven­tuelles solu­tions précé­dentes.

    Et pour ce nouveau, je vais devoir étudier le problème posé, proba­ble­ment décou­vrir des sous-problèmes qu’on n’ima­gi­nait pas. Je ne sais pas ce quelles diffi­cul­tés je vais rencon­trer, quelles solu­tions vont devoir être appliquées, comment les mettre en œuvre, si elles vont réus­sir ou échouer, et encore moins si le besoin racine va effec­ti­ve­ment être couvert à la fin de tout cela.

    Il y a plein de textes qui expliquent la problé­ma­tique de l’es­ti­ma­tion mais j’ai trouvé plus d’une fois que le récit de voyage de Michael Wolfe illustre très bien les enjeux avec une analo­gie que tout le monde comprend.

    vous non plus

    J’ai croisé de nombreuses personnes qui annonçaient savoir esti­mer assez correc­te­ment, et quelques unes qui semblaient effec­ti­ve­ment le faire. Vous en connais­sez peut-être aussi.

    En pratique à chaque fois qu’on y regarde de plus près, l’es­ti­ma­tion n’est pas plus juste qu’une autre. Au mieux on compense les mauvaises esti­ma­tions en jouant sur le contexte. L’es­ti­ma­tion est poten­tiel­le­ment respec­tée, mais elle n’en est pas plus juste. Et quand compen­ser ne suffit pas, on se rassure en consi­dé­rant que ça ne compte pas parce que c’est excep­tion­nel, qu’il y a une cause exté­rieure, ou en repor­tant la faute sur un tiers.

    Même les itéra­tions de la tant aimée métho­do­lo­gie SCRUM jouent sur le même registre : Donner une cible avec un enga­ge­ment permet d’avoir un peu de pres­sion sur l’équipe. C’est de la pres­sion dite « posi­tive », pour avoir envie d’at­teindre l’objec­tif.

    Au final c’est de la pres­sion tout de même, qui souvent se retrouve sur l’am­pli­tude horaire ou sur la fatigue. Quand le mana­ge­ment n’a pas une atten­tion et une culture extrê­me­ment forte sur le sujet, ça joue aussi sur une baisse de qualité ou une créa­tion de dette tech­nique. C’est humain. À défaut c’est le péri­mètre qui bouge, mais l’es­ti­ma­tion n’en est pas meilleure. Bref, on pallie la mauvaise esti­ma­tion en jouant sur le contexte.

    Si vrai­ment quelqu’un estime toujours juste à plus de 90%, sans compen­ser sur le contexte, c’est qu’il est en train de passer du temps à refaire ce qu’il a déjà fait. S’il travaille pour vous : virez-le et embau­chez quelqu’un qui saura réuti­li­ser plutôt que perdre du temps.

    même par petits lots

    Même l’es­ti­ma­tion par petits lots itéra­tifs n’est qu’une illu­sion. On estime effec­ti­ve­ment mieux des petites tâches qu’on sait perce­voir, mais c’est unique­ment parce qu’on réflé­chit déjà à la problé­ma­tique et à sa solu­tion au moment de donner l’es­ti­ma­tion.

    Par la suite on se trompe autant qu’ailleurs. On compense là aussi par l’am­pli­tude horaire, le stress de la pres­sion person­nelle, la qualité ou la dette tech­nique. C’est juste que plus la tâche est petite, plus le déca­lage probable est petit et donc moins il se voit de l’ex­té­rieur quand on regarde unitai­re­ment.

    Vous avez déjà remarqué qu’on ne fait pas tenir 8 tâches d’une heure dans une jour­née ou 5 tâches d’une jour­née dans une semaine ? Des tâches d’une heure dans une jour­née, prévoyez-en 6, moins le temps pour les réunions.

    Et des fois on a juste oublié un cas d’usage ou manqué une problé­ma­tique. Sur un lot impor­tant on aurait assumé et dérapé un peu. Sur une petite tâche le cas manqué peut prendre plusieurs fois l’es­ti­ma­tion de la tâche initiale. On en fait donc une nouvelle tâche, avec sa propre esti­ma­tion. Là aussi, l’ex­cuse du cas excep­tion­nel ou de la sortie de péri­mètre permet d’évi­ter de remettre en cause ses esti­ma­tions.

    Alors oui, les esti­ma­tions sur des petits lots ont tendance à être plus souvent respec­tées mais elles n’en sont pas beau­coup plus justes. Tout ceci n’est qu’œillères et illu­sions.

    C’est mieux – et c’est logique vu qu’on estime au fur et à mesure du projet, une fois la connais­sance acquise – mais ce n’est toujours pas bon.

    la mauvaise ques­tion

    On peut discu­ter de l’uti­lité des esti­ma­tions, de la capa­cité du genre humain à savoir donner des esti­ma­tions abso­lues. On peu aussi s’en­fon­cer dans un projet d’op­po­si­tion, scan­der #noes­ti­ma­te… mais qu’ap­por­te­rait-on comme valeur ?

    Je suis surtout agacé qu’on se pose surtout la mauvaise ques­tion. Au jour le jour je n’ai aucu­ne­ment besoin d’es­ti­mer. J’ai besoin d’ap­por­ter de la valeur. La seule ques­tion à me poser est « qu’est-ce qui amènera à priori le plus de valeur demain si je le fais aujourd’­hui ? » et mettre mes ressources dessus.

    La ques­tion n’est pas simple pour autant. J’ai besoin d’éva­luer si le niveau d’ef­fort à four­nir est rentable par rapport à la valeur ajou­tée atten­due. Ensuite j’ai besoin de prio­ri­ser les évolu­tions entre elles, en fonc­tion de la valeur et du niveau d’ef­fort.

    Sauf que juste­ment, je n’ai besoin pour ces usages que d’un ordre de gran­deur : Est-ce 10, 100 ou 1000 ? Est-ce beau­coup plus ou beau­coup moins que l’autre évolu­tion à laquelle je pense ? Tout autre détail est aussi utile qu’un para­chute pour monter sur une échelle.

    L’éva­lua­tion de la valeur atten­due subit de toutes façons les mêmes incer­ti­tudes que le niveau d’ef­fort à four­nir. Même s’il est fait à base d’une page pleine de formules, calcul de la valeur atten­due dépend parfois tota­le­ment de para­mètres esti­més au doigt mouillé, où même un ordre de gran­deur relève plus de la convic­tion que de l’es­ti­ma­tion.

    le mauvais usage

    Vous posez-vous vrai­ment la bonne ques­tion ?

    En cher­chant à savoir si votre projet dérape vous êtes simple­ment en train de regar­der s’il se conforme au plan prévu, à son esti­ma­tion. Véri­fier la vali­dité d’une esti­ma­tion ne vous appor­tera aucune valeur, surtout quand on sait dès le départ qu’elle est soumise à des aléas impré­vi­sibles.

    Pire, en impo­sant l’es­ti­ma­tion préa­lable comme indi­ca­teur, on freine l’ini­tia­tive (si je le fais, on prend un risque, même si je sais qu’il faut le faire), on freine la capa­cité de chan­ger (si on le fait, il faut recal­cu­ler le plan, re-esti­mer, négo­cier cette esti­ma­tion, expliquer le mauvais indi­ca­teur, ça ne vaut pas le coût ici, tant pis), et on oublie notre objec­tif (l’in­di­ca­teur est bon, tant pis si en fait on s’est rendu compte que ça ne créait pas la valeur atten­due et qu’il aurait fallu faire autre chose, ça aurait remis en cause le plan).

    Vous pouvez vous dire que vous saurez déjouer tout cela, rester agile et prag­ma­tique. Vous vous mentez, du moins tant que votre ques­tion sera « où est-ce qu’on en est par rapport aux esti­ma­tions ? ».

    C’est encore pire si vous utili­sez l’es­ti­ma­tion comme métrique pour appré­cier l’ef­fi­ca­cité ou la compé­tence de l’équipe de produc­tion. Là non seule­ment vous compa­rez juste des choux et des carottes, mais en plus vous inver­sez votre résul­tat : Ce sont des équipes qui respectent toutes leurs esti­ma­tions que vous devriez avoir peur. Elles masquent leurs erreurs en les compen­sant, volon­tai­re­ment ou non, et ça faus­sera toutes vos analyses sur la produc­tion passée ou future.

    arrê­ter de navi­guer dans le passé

    Les méthodes agiles vont dans le bon sens mais il est trop facile de s’ar­rê­ter aux arte­facts sans en comprendre l’objec­tif. Le prin­cipe n’est pas que de décou­per en petits lots plus faciles à esti­mer pour pouvoir reprendre une déci­sion entre les diffé­rents lots.

    Il y a aussi une philo­so­phie derrière, celle de l’ap­port de valeur.

    Seul le présent créé de la valeur. La stra­té­gie envi­sage le futur, les rétros­pec­tives tirent les leçons du passé. Si vous n’êtes ni dans un contexte de choix stra­té­gique ni en train de tirer des leçons en rétros­pec­tive, vous ne devez que vous préoc­cu­per de la meilleure façon d’ap­por­ter de la valeur là, main­te­nant, tout de suite, peu importe ce que vous aviez pu prévu ou estimé par le passé.

    Que dois-je faire aujourd’­hui et main­te­nant pour appor­ter le plus de valeur ?

    La perti­nence de l’es­ti­ma­tion passée ne m’est jamais d’au­cune utilité pour répondre à cette ques­tion. J’in­siste : Jamais. Je prends en compte les diffi­cul­tés et faci­li­tés dans des rétros­pec­tives pour m’amé­lio­rer. Je les prends en compte pour évaluer l’ef­fort à four­nir sur le reste à faire, et donc l’op­por­tu­nité de conti­nuer. Que ces faci­li­tés ou diffi­cul­tés aient été prévues ou non, que j’ai divisé par 2 ou multi­plié par 20 mon esti­ma­tion n’im­porte fina­le­ment aucu­ne­ment.

    Esti­mez, c’est utile, impor­tant. Ensuite oubliez-les et surtout ne les réuti­li­sez pas pour autre chose.

    (sur le même sujet We don’t need no stin­king esti­mates)

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par Mark Notari

  • Quelques notes sur la décla­ra­tion en auteur indé­pen­dant

    J’ai regardé deux ou trois fois comment décla­rer des reve­nus tirés de la vente de livres auto-édités. Quelques notes pour ceux que ça peut aider, sans aucune garan­tie juri­dique (mais vous êtes invi­tés à commen­ter et corri­ger) :

    Vous ne perce­vez pas de droits d’au­teur

    Vous déte­nez bien des droits d’au­teur sur vos livres, mais votre acti­vité n’est pas liée à la vente de ces droits d’au­teur.

    C’est assez diffi­cile à avaler mais en fait la logique est assez simple : L’au­teur édité vend des droits d’au­teurs sur une oeuvre origi­nale. Vous, vous vendez des copies de livres, ce qui est très diffé­rent. Il se trouve que le contenu du livre est le votre, mais ce qui est vendu est bien une simple copie de livre.

    Coti­sa­tions sociales

    Oubliez donc le fait qu’il y a « droits d’au­teurs » dans la case « trai­te­ments et salaires » de votre fiche d’im­pôts sur le revenu, car ce n’est pas de là que viennent vos reve­nus.

    Mais surtout ce qui doit atti­rer votre atten­tion c’est le paie­ment des coti­sa­tions sociales. Dans le cas d’un auteur édité, c’est l’édi­teur qui s’en occupe et cotise pour vous à l’Agessa. En auto-édité c’est à vous de vous en occu­per et les rappels URSSAF peuvent faire très mal pour ceux qui ont « oublié ».

    Pas d’Agessa ou de MDA

    En fait, qui découle de ce qui précède, vous êtes bien auteur de vos livres, mais pour ce qui est du fisc vous êtes un vendeur, ce qui est diffé­rent.

    Vous pouvez proba­ble­ment vous consi­dé­rer comme éditeur, comme libraire ou comme simple commerçant de livres, mais vous n’êtes pas artiste-auteur. Vous serez refusé à l’Agessa et dans les statuts réser­vés aux auteurs ou artistes si vous tentez d’y coti­ser direc­te­ment.

    Tout au plus, vous pour­riez prétendre à une acti­vité d’au­teur si vous ne vendez volon­tai­re­ment qu’une poignée d’exem­plaires numé­ro­tés de vos œuvres origi­nales, un peu comme un photo­graphe qui vend ses tirages. Je doute que ce modèle soit adapté à grand monde, et ça vous impo­sera en plus de sortir des plate­formes clas­siques de vente de livres.

    Fran­che­ment, c’est le plus dommage est le plus diffi­cile à avaler, mais tous les statuts protec­teurs liés aux auteurs de livres vous sont irré­mé­dia­ble­ment fermés si vous n’êtes pas avali­sés par un éditeur.

    Alors auto-entre­pre­neur ?

    Alors il faut vous décla­rer en travailleur indé­pen­dant ou monter une entre­prise plus clas­sique.

    En travailleur indé­pen­dant vous rele­vez à priori du RSI (et vous avez toute ma compas­sion pour cela, car vous allez souf­frir), et les coti­sa­tions qui vont avec. Il semble que certains arrivent à se faire enre­gis­trer auprès de l’URSSAF avec le code APE 9003B « autres acti­vi­tés artis­tiques » et être exoné­rés de la CFE, ce qui est loin d’être négli­geable pour une petite acti­vité.

    Il vous faudra envi­sa­ger une struc­ture plus clas­sique et moins avan­ta­geuse si vous dépas­sez le plafond de 32 900 €, mais ça laisse déjà de quoi voir venir pour beau­coup d’auto-édités.

    Quid d’une double acti­vité auteur – éditeur sépa­rée ?

    Pour les joueurs il doit y avoir moyen de décla­rer une acti­vité d’auto-entre­pre­neur « éditeur » et de vous ache­ter vous-même vos droits d’au­teurs, ouvrant droit à l’AGESSA pour cette seconde acti­vité d’au­teur édité. Dans certaines condi­tions, via la vente de livres papier, cette acti­vité pour­rait même être consi­dé­rée comme une acti­vité commer­ciale de vente et non une acti­vité de service, amenant une taxa­tion plus légère et un plafond de chiffre d’af­faire plus que doublé.

    Je n’ai pas connais­sance de gens qui aient essayé (mais en cher­chant ça doit se trou­ver), donc il est possible que j’ai manqué une bonne raison pour ne pas le faire. Si rien ne vient l’em­pê­cher et pour peu que vous vendiez assez, il est possible que ce soit un des montages les plus inté­res­sants. Il faut par contre être prêt à passer pas mal de temps entre la gestion de l’ad­mi­nis­tra­tif et le montage (mais j’es­père qu’on vous avait prévenu : être indé­pen­dant c’est aussi subir la pape­rasse).

    Reste à voir si en étant en même temps auteur et éditeur et si votre maison d’édi­tion n’édite que vous, certains ne consi­dè­re­ront pas que vous êtes à compte d’au­teur plutôt qu’à compte d’édi­teur (et là : finie la fisca­lité d’au­teur).

    Pas dans les BNC

    Certains tentent visi­ble­ment de décla­rer les ventes en BNC (béné­fices non commer­ciaux) mais ça me semble haute­ment discu­table. Le fisc avait exclu la chose quand j’avais posé la ques­tion de l’auto-édition il y a quelques années, vous êtes préve­nus (et un rappel de coti­sa­tions sociales ça peut faire très mal).

    Ça ne serait valable que si l’ac­ti­vité n’est pas conçue comme une acti­vité profes­sion­nelle.

    Quelle est votre inten­tion d’au­teur ? Si vous vivez ça comme une acti­vité profes­sion­nelle en cher­chant à vendre et en écri­vant pour vendre, vous avez à priori une acti­vité profes­sion­nelle. Le fait d’échouer à avoir un volume de vente signi­fi­ca­tif n’est à priori pas un critère pour entrer dans les BNC.

    Est-ce que vous faites de la promo­tion, de la publi­cité ? Cher­chez-vous à en tirer votre revenu prin­ci­pal (ou un revenu signi­fi­ca­tif par rapport à votre revenu prin­ci­pal) ? Vous présen­tez-vous comme « auteur » quand on vous demande votre acti­vité profes­sion­nelle ? Y passez-vous vos heures ouvrées en semaine ? Ça peut être autant d’in­dices que vous le vivez à priori comme une acti­vité profes­sion­nelle.

    Si effec­ti­ve­ment vous écri­vez comme une acti­vité de loisir et avez choisi de fina­le­ment propo­ser le résul­tat à la vente pour voir, de façon acces­soire sans que ce ne soit l’objec­tif initial, et qu’en plus les gains sont peu signi­fi­ca­tifs, alors pourquoi pas. Mais dans ce cas vous ne vous consi­dé­re­rez à priori pas comme auteur indé­pen­dant (ce qui est l’objet du billet), pas plus que celui qui a fait de la gouache le week-end dernier ne se consi­dère artiste-peintre.

    Et sans se décla­rer ?

    À ma connais­sance, il faut oublier (et c’est aussi ce que m’avait répondu le fisc il y a quelques années). Toute acti­vité profes­sion­nelle doit être décla­rée en entre­prise (l’auto-entre­pre­neur n’est qu’un sous-cas d’en­tre­prise indi­vi­duelle), sans excep­tion, quel que soit le montant des gains. Le reste ça s’ap­pelle du travail au noir.

    Surtout pas d’as­so­cia­tion loi 1901

    Tourne en ce moment le retour de quelqu’un qui a monté une asso­cia­tion « loi 1901 » pour son acti­vité d’auto-édition, en se rému­né­rant en sala­rié de cette asso­cia­tion.

    Le problème est dans l’objec­tif de l’as­so­cia­tion, qui doit être abso­lu­ment non-lucra­tif. Or monter une asso­cia­tion dans l’objec­tif de vendre ses propres livres et d’en tirer une rému­né­ra­tion c’est typique­ment une volonté commer­ciale et lucra­tive.

    Tenter de formu­ler astu­cieu­se­ment l’objet de l’as­so­cia­tion ne trom­pera personne et fera tomber tout argu­ment de bonne foi dans le cas d’un contrôle ou de la plainte d’un auteur ou éditeur inami­cal.

    On peut tout à fait monter une maison d’édi­tion via une asso­cia­tion. Être sala­rié de sa propre asso­cia­tion me semble plus que border­line. Si tant est que ça puisse être légal, ça deman­de­rait de sépa­rer très forte­ment l’ac­ti­vité sala­riée de la gestion de l’as­so­cia­tion.

    Si par contre se sala­rier est dès le départ l’objec­tif et non le moyen, là on tombe non seule­ment dans le lucra­tif, mais dans l’ex­ploi­ta­tion de l’as­so­cia­tion au béné­fice de ses gérants, et ça peut faire très mal (on parle de prison).

    Pour moi c’est peut-être le pire des montages à faire. La décla­ra­tion de BNC ou le simple report dans « trai­te­ments et salaires » sur la décla­ra­tion de reve­nus me semblent presque moins risqués car on peut au moins arguer de sa bonne foi si les montants sont faibles. Contrai­re­ment au détour­ne­ment du statut asso­cia­tif, ça se résol­vera au pire sous forme d’un doulou­reux rappel de coti­sa­tions sociales avec péna­li­tés.

  • Tu fais quoi dans la vie, côté profes­sion­nel ?

    Il y a ceux qui travaillent pour [nom de la boîte]

    Il y a ceux qui travaillent en tant que [fonc­tion, rôle]

    Il y a ceux qui travaillent avec [équipe, supé­rieur, personne célèbre]

    Il y a ceux qui travaillent dans [domaine d’ac­ti­vité, dépar­te­ment fonc­tion­nel]

    Il y a ceux qui travaillent à [acti­vité, tâches, objec­tifs]

    Et vous ? (j’ou­blie certai­ne­ment des formu­la­tions inté­res­santes, et vous êtes invi­tés à complé­ter)

  • Grosse-SSII dans grosse-boite-publique

    Il y a quelques histoires dont on ne peut pas parler sur le moment mais qui restent en mémoire.

    Je me rappelle un projet de grosse-boite-publique. Il s’agis­sait grosso modo de faire de l’ar­chi­vage de fichiers person­nels. Comme dans toute grosse-boite-publique, les déve­lop­pe­ments sont confiés à une grosse-SSII.

    Un an et demi après, le projet n’est toujours pas offi­ciel­le­ment lancé, mais ça n’éton­nera pas grand monde. Il y avait de gros problèmes de perfor­mances, et d’autres d’ar­chi­tec­ture, proba­ble­ment de métho­do­lo­gie. Pas certain que ça étonne beau­coup plus les profes­sion­nels de l’in­for­ma­tique.

    Grosse-SSII factu­rait envi­ron 30 personnes dédiées au projet, c’est à dire plus que la R&D de Drop­box à cette époque alors que cette dernière gérait déjà 175 pays, 4 plate­formes, 25 millions d’uti­li­sa­teurs et 200 millions de nouveaux fichiers quoti­diens.

    La perle c’est que sur cette équipe, envi­ron la moitié était dédiée à la main­te­nance appli­ca­tive bien que le projet ne soit toujours pas offi­ciel­le­ment promu au grand public.

    Donc voilà, j’ai croisé aujourd’­hui un déve­lop­peur de cette grosse-SSII. Comme à chaque fois, je ne peux pas m’em­pê­cher de me rappe­ler cette histoire.

  • Où me verriez-vous travailler ?

    Où me verriez-vous travailler ?

    J’ai suivi le formu­laire de Chris et j’avoue trou­ver la démarche inté­res­sante :

    Consi­dé­rant ce que vous connais­sez de moi, ma façon d’être, mes compé­tences, ma loca­li­sa­tion, mes aspi­ra­tions, mes expé­riences, mes valeurs… Où me verriez-vous travailler ?

    Je ne donne volon­tai­re­ment aucune direc­tive ni aucun élément expli­cite moi-même. L’idée c’est juste­ment aussi de ne pas se contraindre par sa propre auto-évalua­tion et de sortir de la boite qu’on se dessine pour soi-même.

    Vous pouvez parler société, métier, rôle, domaine d’ac­ti­vité, … aucune limite.

    Il n’y a pas de bonne ou mauvaise réponse, pas de forme ou de détail obli­ga­toire. Vous pouvez lais­ser un commen­taire ici, anonyme ou non, ou m’en­voyer un email plus privé.

    C’est encore mieux – mais pas obli­ga­toire – si c’est argu­menté sur le pourquoi vous pensez que ça peut corres­pondre. Bonus si l’idée est réaliste. Super-Bonus si c’est action­nable. Super-Méga-Bonus s’il s’agit de quelque chose de concret (une offre exis­tante, être prêt à signer un contrat, etc.) même si je reste moi-même au niveau des idées.

    Excep­tion­nel­le­ment j’ai­me­rai vrai­ment que vous parti­ci­piez *tous*. Vrai­ment tous. En fonc­tion de ce que vous connais­sez de moi, même si vous en connais­sez peu ou quasi­ment pas, même si c’est unique­ment de répu­ta­tion ou par mes écrits. Je vous remer­cie d’avance.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY par Geor­gie Pauwels

  • 750 € nets de bonus annuel

    750 € nets de bonus annuel pour profi­ter de vos vacances

    Oui mais non.

    Si je n’ai aucune indi­ca­tion de ce que sera le salaire de départ (fixe ou variable, peu importe), savoir qu’on y ajoute 750€ ne m’aide pas.

    Je peux me dire que c’est 750€ en plus, mais en fait non vu que la rému­né­ra­tion est forcé­ment négo­ciée ou déter­mi­née en tenant compte de cette somme (sauf à gérer la boite avec légè­reté, c’est forcé­ment budgeté et pris en compte dès le départ).

    Au final, formulé autre­ment, c’est juste 750€ d’une rému­né­ra­tion totale qui au lieu d’être répar­tie sur 12 mois sera donnée d’un coup au milieu d’an­née. Sauf si le fait d’avoir les sous en une fois par an au lieu d’un petit peu par mois est un vrai facteur de moti­va­tion, ça n’amène pas grand chose.

    C’est juste dommage parce qu’il n’y a aucune raison de penser que la rému­né­ra­tion (*) ou le job soient inin­té­res­sants, mais insis­ter sur ce point pour une somme fixe qui de plus repré­sente 3% ou moins, ça m’a accro­ché l’oeil… en néga­tif. C’est encore plus vrai consi­dé­rant que ça inclut proba­ble­ment la prime de vacance conven­tion­nelle syntec qui est déjà de l’ordre de 1%.

    (*) et encore moins après leur retour sur twit­ter, où on m’a répondu avoir une grille ouverte en interne, du type de celle de Buffer. Aller la publier n’ap­porte pas grand chose, mais la diffu­ser en interne démontre de certains prin­cipes que je ne peux qu’ap­pré­cier.

    Et les respon­sables réagissent sur twit­ter, avec calme et en détail. Ça aussi c’est posi­tif.

    Tiens, ce sont plutôt ces deux points – ouver­ture et fonc­tion­ne­ment interne trans­pa­rent – que j’au­rais aimé voir comme indi­ca­tion plus que la prime de vacances. Dommage.

  • Outil et envi­ron­ne­ment de travail

    Outil et envi­ron­ne­ment de travail

    Mon outil de travail idéal serait un gros macbook pro 13″ ou un Lenovo équi­valent type X1, donc entre 1750 et 2500 € avec la garan­tie 3 ans. Ajou­tez  clavier et track­pad dépor­tés, les adap­ta­teurs, une housse qui protège vrai­ment, et un écran fixe 24 à 27″. Ça commence à chif­frer :

    Macbook 2250 €
    Apple Care 250 €
    Clavier blue­tooth 70 €
    Track­pad blue­tooth 70 €
    Adap­ta­teur Ether­net 30 €
    Adap­ta­teur VGA 30 €
    Housse 50 €
    Sac trans­port 150 €
    Écran 550 €

     

    Je prévois clai­re­ment plutôt large mais il y a aussi certai­ne­ment une ou deux licences logi­cielles à ajou­ter. On peut certai­ne­ment faire moins cher mais atten­tion, écono­mi­ser sur le maté­riel infor­ma­tique profes­sion­nel a tendance à être contre-produc­tif.

    Amorti sur plusieurs années, le retour sur inves­tis­se­ment d’un outil de travail de haut niveau est assez rapide. Je suis prêt à parier que le rapport entre le coût de l’ou­til de travail et le salaire doit être plus élevé dans beau­coup d’autres métiers.

    Si on veut être complet

    Il y a aussi un coût récur­rent au niveau des licences. Mettons du Google Apps, du Micro­soft Office, du Crash­plan, du Github et quelques autres SAAS.

    La bonne idée pour les déve­lop­peurs, c’est une Dedi­box ou une Kimsuffi dédiée à la mise en ligne d’ou­tils internes, tests et proto­types. Les graphistes auront certai­ne­ment besoin d’une licence Adobe malgré le prix prohi­bi­tif.

    Dans l’idéal on ajoute peut être aussi un appa­reil type smart­phone ou tablette par an pour mettre à jour l’en­vi­ron­ne­ment de test et d’ex­plo­ra­tion maté­riel.

    Ajou­tons encore une vraie chaise de bureau, et c’est toujours perdant de mégo­ter là dessus même si je ne sais pas trop quoi recom­man­der.

    Et vous ?

    Quel est votre envi­ron­ne­ment de travail ? Quelle expé­rience posi­tive ou néga­tive en tirez-vous ?

    Quel serait votre idéal utile ? que recom­man­dez-vous ?

    Qu’est-ce qui vous semble indis­pen­sable ou super­flu ? Quels compro­mis feriez-vous au lance­ment d’une nouvelle acti­vité où forcé­ment chaque euro compte au départ ?

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-ND par Hans Splin­ter

  • Working with desi­gners

    Working with desi­gners

    J’ai lu récem­ment le Working with desi­gners, et ça me donne l’oc­ca­sion de publier une réflexion qui me trotte dans la tête depuis long­temps :

    Vous avez besoin d’un graphiste dans votre équipe.
    En interne, à demeure.

    Oui, on peut très bien faire un peu tout sans graphisme, et trou­ver un pres­ta­taire quand il s’agit quelques fois dans l’an­née de faire une charte, un design ou une illus­tra­tion. Vous manquez juste 80% de la valeur ajou­tée.

    En fait c’est plus large que ça. On peut tech­nique­ment avoir juste un CEO, qui achète des pres­ta­tions de déve­lop­pe­ment infor­ma­tique à une SSII, délègue le cahier des charges à un cabi­net d’as­sis­tance MOA, fait distri­buer la solu­tion par des vendeurs multi­cartes.

    Ça peut même fonc­tion­ner, dans de rares cas. Vous manquez juste la valeur qui est de réflé­chir au produit, de faire des évolu­tions perma­nentes et progres­sives, de lais­ser les gens s’ex­pri­mer, colla­bo­rer, avoir des initia­tives, appor­ter de la valeur, de l’ému­la­tion… On ne parle pas que de produc­tion sur le projet, mais de parti­ci­per et enri­chir la vie de l’en­tre­prise à tous les niveaux.

    * * *

    En régime de croi­sière, pour une boite techno web, vous aurez besoin d’un déve­lop­peur back, d’un déve­lop­peur front, d’un expert produit/métier, d’un graphiste, d’un commer­cial/marke­ting, d’une personne pour le support client, et d’une personne pour gérer l’ad­mi­nis­tra­tif.

    On peut bien entendu parler aussi d’un direc­teur des opéra­tions ou d’un sys admin, mais ils ne font pas autant parti du même coeur mini­mum pour moi.

    Chacune de ces sept personnes vous appor­tera quelque chose dans l’en­tre­prise,mettra de l’huile dans les rouages, même en dehors du projet lui-même.

    *

    Au départ il n’y a pas le choix, il faut porter plusieurs casquettes et faire quelques impasses. Par la suite vous avez tout inté­rêt à ce que les rôles soient poreux, que chacun soit incité à travaillé sur plus que sa petite case.

    Si par contre vous êtes une dizaine et que vous n’avez pas une personne diffé­rente qui joue le guide pour chacun des rôles, vous ne faites pas une écono­mie, vous vous ampu­tez d’une grosse valeur ajou­tée.

    *

    Votre boite n’est pas une boite techno web ? Dans ce cas vous pouvez peut être éviter d’avoir deux déve­lop­peurs distincts, mais il faudra au mini­mum les rempla­cer par un bidouilleur infor­ma­tique à tout faire (au sens noble, si vous croi­sez le terme anglais hacker, c’est de ça qu’on parle), qui devien­dra vite indis­pen­sable.

    Dans ce cadre, j’aime beau­coup la notion « hacker in resi­dence » et « desi­gner in resi­dence » de eFoun­ders. C’est la compré­hen­sion que même parta­gés entre plusieurs projets, pour faire émer­ger de la valeur il faut des gens impliqués à demeure, au milieu des équipes.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-SA par Axel Hart­mann

  • Usure mentale de la non-qualité

    Usure mentale de la non-qualité

    Vous pouvez argu­men­ter à propos du retour sur inves­tis­se­ment de haus­ser un peu le niveau de qualité – je l’ai fait aussi – mais il faut avouer que sauf à connaitre le futur, ces chiffres auront la même fiabi­lité et la même préci­sion que l’ho­ro­scope de l’an­née dernière.

    Tout au plus peut-on tracer une ligne en dessous de laquelle le manque de qualité rend vrai­ment le travail diffi­cile, mais en réalité nous cher­chons tous à mettre la barre bien plus haut.

    Le coût de non-qualité est en fait bien plus basique. Il se cache dans la fatigue mentale, l’épui­se­ment, mais aussi la baisse d’en­vie, de moti­va­tion, de résis­tance à la frus­tra­tion ou de celle aux petits accrocs trop fréquents du quoti­diens…

    Le terme anglais est burn-out, et c’est bien plus une ques­tion de qualité et de bien-être que de temps de travail ou de pres­sion.

    C’est Nico­las qui le forma­lise le mieux :

    Ces petites erreurs aux grandes consé­quences font de plus en plus mal. Autant sur les personnes (le moral, l’es­time de soi, la frus­tra­tion) que sur le busi­ness (image, etc.). […] Je crois que ces galères de coûts de non-qualité et l’usure sur nos corps et nos esprits sont trop souvent sous-esti­mées.

    La ques­tion est : Où avez-vous envie de travailler ? Où vos colla­bo­ra­teurs ont-ils envie de travailler ? Combien de temps tien­dront-ils avant d’être usés et rési­gnés, sans moti­va­tion ni initia­tive ? Qui voulez-vous atti­rer ?

    Cet aspect est trop souvent oublié dans la logique produc­ti­viste du retour sur inves­tis­se­ment, pour­tant ce sont les ques­tions essen­tielles : À côté de l’im­por­tance du dyna­misme de l’équipe, tout gain de produc­ti­vité lié à une baisse des exigences revient à travailler à la bougie pour écono­mi­ser l’élec­tri­cité.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY par Intan­gi­bleArts

  • Deci­sions are made by people…

    Certaines fois certaines cari­ca­tures en bande dessi­née sont telle­ment proches de certaines expé­riences passées…

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