Catégorie : Politique et société

  • Infor­ma­tions person­nelles pour les sites e-commerce

    J’ai­me­rai tant un site e-commerce qui ne me deman­de­rait pas de créer un compte pour faire un achat. Qu’il me soit obli­ga­toire de décli­ner nom et adresse pour par exemple ache­ter un livre en ligne… est plus que gênant

    Je regarde la super lampe déco, je clique sur « ache­ter », je saisis une éven­tuel­le­ment adresse de livrai­son, puis mon numéro de carte bancaire, je valide, et voilà !

    Je n’ai pas besoin de plus pour ache­ter mon pain à la boulan­ge­rie, un lit ou une armoire dans mon maga­sin de meuble, ou un livre à ma librai­rie. Tout ce qui vient en plus avant la fina­li­sa­tion de la commande me fera fuir.

    Parce qu’il y a parfois un besoin d’une rela­tion après vente, je peux comprendre qu’on me demande aussi un numéro de télé­phone ou un email, même si ce n’est pas stric­te­ment néces­saire. On pourra m’y envoyer un jeton d’ac­cès pour me relier à mes commandes ou m’au­then­ti­fier si besoin.

    Je ne vois aucune raison incon­tour­nable d’im­po­ser la saisie de plus d’in­for­ma­tions [en fait si, voir commen­taires]. Je n’ai ni besoin d’un compte ou d’un mot de passe, ni besoin de décli­ner mon iden­tité.

    Rien n’em­pêche de propo­ser la saisie de bien plus d’in­for­ma­tions, mais après la commande, et de façon tota­le­ment option­nelle.

  • Loi Macron : un réduc­tion d’im­pôts de 900 millions d’eu­ros

    Diffi­cile de s’y retrou­ver dans la loi Macron, car il y a tout et n’im­porte quoi […] mais il y a un article de loi injus­te­ment méconnu : il s’agit de l’ar­ticle 34 sur l’al­lè­ge­ment de la fisca­lité des actions gratuites. […]

    « Actuel­le­ment impo­sable à l’im­pôt sur le revenu selon les règles de droit commun appli­cables aux trai­te­ments et salaires, la valeur de ces actions sera désor­mais impo­sée selon les prin­ci­pales moda­li­tés appli­cables aux plus-valeurs mobi­lières »

    […] cela signi­fie que les actions gratuites béné­fi­cie­ront d’un abat­te­ment de 50% avant impo­si­tion, ce qui réduit de moitié l’im­po­si­tion. […]

    « Les conseils d’ad­mi­nis­tra­tion des entre­prises du CAC 40 ont voté, en 2014, l’at­tri­bu­tion d’ac­tions gratuites pour un montant de 6,4 milliards. Et, dans l’im­mense majo­rité des cas, à leurs cadres diri­geants les mieux payés ».

    Le capi­ta­lisme qui se renforce lui-même, comme un objec­tif en soi. Si on te donne une part du capi­tal, c’est aux frais de l’État, qui rece­vra moins d’im­pôts.

    Bien entendu, vu qu’on parle d’im­pôts sur le revenu, ça ne peut allé­ger que la moitié la plus riche de la popu­la­tion (l’autre ne gagne pas assez pour en payer), et même proba­ble­ment le décile le plus haut quand on parle de rému­né­ra­tion en actions.

    Les star­tup servi­ront proba­ble­ment de justi­fi­ca­tion, mais pour ça il y a les BSPCE (bons de sous­crip­tion pour créa­teurs d’en­tre­prise). Non, ça va servir surtout aux diri­geants de grandes entre­prises. Tiens, un exemple avec un scan­dale récent, celui de la CDC Entre­prise.

    Source sur poli­tique.net.

  • Never trust a corpo­ra­tion to do a library job

    For years, Google’s mission inclu­ded the preser­va­tion of the past. […]

    In the last five years, star­ting around 2010, the shif­ting prio­ri­ties of Google’s mana­ge­ment left […] archi­val projects in limbo, or aban­do­ned enti­rely.

    On parle de la plus grande archive Usenet de l’époque, de Google Books qui tentait de scan­ner tous les livres de la planète pour archive, ou de la News Archive qui gardait des histo­riques de presse ayant jusqu’à 200 ans d’an­cien­neté.

    Two months ago, Larry Page said the compa­ny’s outgrown its 14-year-old mission state­ment. Its ambi­tions have grown, and its prio­ri­ties have shif­ted. […]

    As it turns out, orga­ni­zing the world’s infor­ma­tion isn’t always profi­table. Projects that preserve the past for the public good aren’t really a big profit center. Old Google knew that, but didn’t seem to care.

    Tout est dans le titre : Never trust a corpo­ra­tion to do a library job.

    The Inter­net Archive is mostly known for archi­ving the web, a task the San Fran­cisco-based nonpro­fit has tire­lessly done since 1996, two years before Google was foun­ded.

    Archives du web, mais aussi audio et vidéo diverses, musiques, films, enre­gis­tre­ments TV, livres et même vieux logi­ciels.

    Le problème c’est que notre société a tendance à consi­dé­rer que tout doit être rentable, que si ça a un inté­rêt de le faire alors ça doit pouvoir être vendu et géré par une société privée. Même l’État se désin­té­resse au fur et à mesure de ses missions légi­time en calcu­lant la renta­bi­lité finan­cière des projets.

    Nous faisons de l’ar­chéo­lo­gie pour connaitre notre passé, mais jetons notre présent au lieu de l’ar­chi­ver, alors que c’est tech­nique­ment faisable, et poli­tique­ment souhai­table.

  • Mensonges sur le dimanche

    [Nous allons] accor­der des déro­ga­tions au repos domi­ni­cal […] pour éviter un préju­dice « au public » ou « au fonc­tion­ne­ment de l’en­tre­prise ». Avant le critère juri­dique c’était : « si cela ne portait pas préju­dice »… aux sala­riés ».

    Le glis­se­ment est très symp­to­ma­tique, et est plutôt la norme ces dernières années. La société doit passer par l’éco­no­mie et le déve­lop­pe­ment des entre­prises, avec le postu­lat que ça rejaillira forcé­ment en posi­tif sur les citoyens eux-même.

    Au final c’est l’in­té­rêt des proprié­taires d’en­tre­prises qui prévaut sur celui de l’en­semble des citoyens. Gênant, pour ne pas dire plus.

    Dans ces « zones touris­tiques inter­na­tio­nales », la loi décide que, dans ces zones, la nuit commence après 24 h, il sera possible de bosser jusqu’à 23 h 59 en « soirée ». Seule « contrainte » : l’em­ployeur « veille » à ce que le sala­rié « dispose d’un moyen de trans­port pour rega­gner son domi­cile ». Qui y croit une seconde ?

    On ne libère rien. Il aurait été possible d’au­to­ri­ser le travail de nuit jusqu’à 23h59 dans ces zones. On a préféré recu­ler la nuit. Astuce admi­nis­tra­tive qui n’a qu’un seul avan­tage : reti­rer des protec­tions aux sala­riés.

    Quant à s’as­su­rer qu’il existe un moyen de trans­port, n’y voyez aucune action posi­tive. Ça veut juste dire que l’em­ployeur refu­sera d’em­ployer un candi­dat qui n’a pas le permis voiture, et ça même si se garer dans ces zones sans payer une fortune est juste inac­ces­sible pour le vendeur payé au lance-pierre.

    La loi [ne] fixe AUCUNE [majo­ra­tion de salaire pour travail le dimanche]. Le projet Macron renvoie au « dialogue social » aléa­toire

    … c’est à dire au rapport de force patro­nat / syndi­cat, pas très équi­li­bré en ce moment dans le domaine du commerce de détail. À la loi du plus fort quoi…

    Cita­tions de Gérard Filoche, avec les même préci­sions qu’hier.

  • Ayez envie de deve­nir milliar­daires

    Deve­nez milliar­daires ! Il y a 78 milliar­daires en France, le record d‘Eu­rope.

    Ce chiffre d’un un relief parti­cu­lier à tous les cris contre les impôts, les charges sociales et le système français qui ferait fuir tous les riches dont on a besoin pour la France. Il faut croire que…

    Le travail n’en­ri­chit personne, c’est l’ex­ploi­ta­tion du travail des autres qui enri­chit. Et pour s’en­ri­chir au point d’être milliar­daires il faut avoir pillé abusi­ve­ment des milliers de travailleurs pendant des géné­ra­tions !

    Il y a de quoi discu­ter en dessus, mais les faits sont têtus : La plupart des milliar­daires ont hérité d’une fortune consé­quente. Les quelques rares autres sont à la tête d’en­tre­prises dont une grosse partie de la richesse se base sur les salaires peu élevés des travailleurs à la base de la pyra­mide. En fait c’est souvent les deux à la fois.

    80 milliards de fraude fiscale « offi­cielle » recon­nue par Bercy […]

    Il suffit d’em­bau­cher 2000 inspec­teurs des impôts, des centaines d’in­for­ma­ti­ciens, de faire un pont d’or aux jour­na­listes d’off­shore-leaks, de prendre les mesures légales pour traquer la fraude, et d’avoir la volonté poli­tique d’af­fron­ter l’oli­gar­chie, les 1 %, les 58 socié­tés qui trichent…

    Nous avons choisi. Nous recru­tons des milliers de consul­tants Pôle Emploi pour contrô­ler que nos chômeurs culpa­bi­lisent bien de leur statut. Ques­tion de choix.

    Cita­tions tirées de Gérard Filoche

    (Je rappelle que je mets ici des commen­taires ou réac­tions à certaines de mes lectures, pour les parta­ger, pour enclen­cher des discus­sions, pour réflé­chir, pour fixer par écrit des pensées. Il n’y a aucun soutien, aucune caution ou ni aucune affi­lia­tion autres que ce que j’écris expli­ci­te­ment)

  • Non, le tirage au sort n’est pas repré­sen­ta­tif

    J’avais travaillé les aspects du tirage au sort dans le cadre d’une réflexion sur la démo­cra­tie dans un groupe poli­tique. Je pose ça là quelques temps après, un peu refor­mulé :

    On nomme X personnes d’une popu­la­tion donnée par tirage au sort. Ces personnes votent et tombent d’ac­cord à 55% contre 45%. Peut-on consi­dé­rer qu’ils repré­sentent la popu­la­tion d’ori­gine ?

    Mathé­ma­tiques

    Tout ça sont des mathé­ma­tiques bien connues des insti­tuts de sondage. On y parle de marge d’er­reur et d’in­dice de confiance :

    • Une marge d’er­reur de ±5pt, c’est dire que le vote direct de la popu­la­tion d’ori­gine aurait proba­ble­ment donné un score quelque part entre 50% et 60% et pas forcé­ment de 55%.
    • Un indice de confiance de 95%, c’est dire qu’il y a 95% de chances que la popu­la­tion d’ori­gine serait effec­ti­ve­ment restée dans la marge d’er­reur donnée, et 5% de chances que le résul­tat aurait été tout autre (mais poten­tiel­le­ment *vrai­ment* tout autre).

    Je tiens à insis­ter sur le fait qu’une marge d’er­reur de ±5pt ça reste énorme. N’im­porte quelle déci­sion vali­dée ou reje­tée par moins de 55% des tirés au sorts n’au­rait que peu de valeur. Et des déci­sions qui arrivent avec moins de 55%, c’est quand même fréquent…

    Idem, un indice de confiance de 95% c’est plutôt bon, mais ça laisse quand même 1 chance sur 20 de dire n’im­porte quoi. C’est loin d’être négli­geable : Vous joue­riez des déci­sions impor­tantes sur un dé à 20 faces vous ?

    Des exemples

    Répondre à la ques­tion d’ori­gine demande de connaitre le nombre de personnes tirées au sort et la taille de la popu­la­tion d’ori­gine.

    Je vous propose de fonc­tion­ner à l’in­verse : En fonc­tion de la taille de la popu­la­tion d’ori­gine et de la préci­sion souhai­tée, combien de personnes devrions-nous tirer au sort ? Atten­tion ça pique…

    Popu­la­tion d’ori­gine Préci­sion de ±5pt à 95% Préci­sion de ±2pt à 95% Préci­sion de ±2pt à 99%
    100 79 96 98
    500 217 414 446
    1000 277 706 806
    5000 384 1622 2271
    10000 384 1936 2938
    100000 et + 384 2401 4160

    Autant dire que le tirage au sort au sein d’un groupe de moins de 100 person­nes… autant réunir tout le monde ou tirer les déci­sions à pile ou face, ça revien­dra au même. Même au sein de groupe de 1000 personnes, il faut en réunir plus du quart pour avoir un semblant de préci­sion.

    Si vous voulez tran­cher des ques­tions qui divisent à presque égalité avec un bon indice de confiance, là vous pouvez oublier tout de suite, sauf à réunir 10 000 personnes dans une très grande salle.

    Si vous ne prévoyez pas au moins quelque chose de simi­laire, votre tirage au sort n’a pas beau­coup de chances d’être repré­sen­ta­tif. Si vos déci­sions ne sont pas binaires, si les avis doivent être nuan­cés, s’il y a un biais parce que certains accep­te­ront d’être nommé et d’autres décli­ne­ront, ou si certains tirés au sort ne votent pas, alors c’est encore pire.

    Alors ?

    L’his­toire ne dit pas si le tirage au sort est une bonne idée ou pas. Tout dépend des tâches qui sont dévo­lues aux personnes nommées ainsi, s’il y a une étape de vali­da­tion externe, s’il y a des contre-pouvoirs, s’il y a une censure possible, etc.

    Ce qui est certain c’est que sauf à faire des réels parle­ments de grande taille au sein de groupes eux aussi impor­tants, le tirage au sort a peu de chances d’être la solu­tion à un manque de repré­sen­ta­ti­vité.

    Le tirage au sort est aléa­toire, il ne crée pas une répar­ti­tion homo­gène, et n’a même que très peu de chances de le faire.

  • 1984 comme manuel de savoir-vivre

    1984 comme manuel de savoir-vivre

    Au nom de la liberté d’ex­pres­sion, les enfants qui ne disent pas ce qu’on attend d’eux sur des sujets qu’ils ne comprennent de toutes façons pas seront inter­ro­gés par les forces de l’ordre, pour enquête sur requête du procu­reur du procu­reur de la répu­blique.

    Au nom de la propriété privée, ceux qui volent des choses jetées à la poubelle par ceux qui n’en veulent plus seront arrê­tés, inter­ro­gés et pour­sui­vis sur requête du procu­reur de la répu­blique.

    La guerre c’est la paix,
    La liberté c’est l’es­cla­vage,
    L’igno­rance c’est la force.

    Nous vivons une époque formi­dable depuis que nous avons pris 1984 comme manuel de savoir-vivre.

    Pour l’oc­ca­sion nous avons même mis la promo­tion de l’ENA de cette année sous le patro­nage de Georges Orwell. J’ai du mal à en mesu­rer l’iro­nie…


    Aujourd’­hui et depuis trois semaines j’ai peur à chaque fois que j’en­tends ce qu’il se passe dans mon pays et dans les autres.

    Je n’ai pas peur d’un terro­risme qui fait moins de morts que le froid sur les SDF dans nos rues. J’ai peur de notre propre réac­tion, nous qui déclen­chions déjà régu­liè­re­ment des guerres sous des prétextes consciem­ment falla­cieux.

    Il nous a suffit d’un fait divers pour voir nos élus tous unis cher­cher la fin de toute commu­ni­ca­tion non inter­cep­tée et non contrô­lée, récla­mer obéis­sance et rituels à l’école plutôt qu’ap­pren­tis­sage de l’es­prit critique. Tout ça avec le soutient d’une majo­rité de la popu­la­tion, parce que présenté comme indis­pen­sable contre le terro­risme, quand bien même ça ne fait que l’ali­men­ter.

    Nous décons­trui­sons à vitesse rapide tout l’idéal rêvé sur plusieurs siècles. Jusqu’où serions-nous prêts à nous enfon­cer au prochain fait divers impré­vi­sible ? Serions-nous prêts à accep­ter un apar­theid ? une dicta­ture ? une guerre civile ? une guerre mondiale ? J’ai peur que oui et ça me fait peur.

    La Terreur de la fin du 18ème siècle pour­rait reve­nir bien bien plus vite qu’on ne le pense. Terro­risme avez-vous dit ? nous n’avons encore rien vu, et il risque de ne pas venir de là où on nous dit.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par Xaime

  • J’ai peur. Non, pas des terro­ristes.

    On s’énerve quand on voit nos poli­tiques s’en­fon­cer dans une logique auto­ri­taire, mais fran­che­ment nous ne faisons pas mieux.

    J’ai très peur quand je vois tout autour de moi la réac­tion aux condam­na­tions récentes. On parle dans au moins deux cas de personnes à moitié bour­rées qui insultent la police après s’être fait arrê­ter. Autre­fois ça aurait été menaces de venir casser la gueule et autres injures, et ça se serait terminé sous le quali­fi­ca­tif d’ou­trage.

    Ces jours ci c’est « les jiha­distes vont vous mettre une balle dans la tête ». D’un coup la quali­fi­ca­tion passe à apolo­gie de terro­risme et on parle de 16 mois de prison dont 8 fermes avec mandat de dépôt (donc réel­le­ment départ en prison).

    Et autour de moi ça parle de tolé­rance zéro, et ça ne choque pas grand monde.

    Perdre le boulot, les liens avec la famille, pour avoir dit des conne­ries parce qu’on s’est énervé sous l’em­prise de l’al­cool… J’ai peur. Non, pas des terro­ristes.

  • Mon dialogue avec les élèves à propos de Char­lie Hebdo

    « Mais M’sieur, si on dessine le prin­ci­pal tout nu et avec des cornes, bah ça s’fait pas et du coup vous allez le censu­rer et bah voilà Char­lie Hebdo ils auraient du être censu­rés. »

    Et *paf* en pleine tête.

    C’est telle­ment vrai. Alors on a beau jeu de dire que c’est diffé­rent, qu’on ne les aurait pas tué pour ça.

    C’est vrai. Il n’em­pêche qu’on cherche à valo­ri­ser chez eux exac­te­ment ce qu’on leur inter­dit. Un dessin avec je ne sais quoi sodo­mi­sant le provi­seur, quand bien même le provi­seur aurait été pris comme symbole de l’au­to­rité, ça aurait été l’ex­clu­sion directe, c’est à dire la sanc­tion la plus forte possible dans le cadre de ce que permet la loi. Pour peu que ça vienne d’un agita­teur, ça aurait même pu tomber sous le pénal de l’in­sulte à profes­seur, avec un poten­tiel de 6 mois de prison ferme à la clef.

    On a beau jeu de dire que les jeunes sont perdus, alors que nous leur impo­sons nos propres contra­dic­tions.

    À l’op­posé, ce profes­seur semble les avoir consi­déré comme des gens capables de réflé­chir, et ça semble avoir fait réflé­chir. Un gros merci à lui.

    Je note d’ailleurs qu’ici, contrai­re­ment au récit précé­dent, on se moque de savoir si tel élève est musul­man ou non, on ne cherche pas à les culpa­bi­li­ser, on ne quali­fie pas les élèves voyant les choses autre­ment comme « retord ». Ça change tout, même si le fond du message est proba­ble­ment le même, même s’il y en reste tout autant qui n’au­ront pas compris ce fond.

     

  • J’ai cher­ché à comprendre

    J’ai cher­ché à comprendre

    Repor­ters sans fron­tières (RSF) s’in­digne de la présence à la “marche répu­bli­caine” à Paris de diri­geants de pays dans lesquels les jour­na­listes et les blogueurs sont systé­ma­tique­ment brimés, tels l’Egypte, la Russie, la Turquie, l’Al­gé­rie et les Emirats arabes unis. Au Clas­se­ment mondial de la liberté de la presse publié par RSF, ces pays sont respec­ti­ve­ment 159e, 148e, 154e, 121e et 118e sur 180.

    Il faut dire que la liste de ceux qui viennent mais auraient du s’abs­te­nir est encore plus longue, et que le détail est fran­che­ment catas­tro­phique. Je me suis demandé pourquoi des diri­geants, connus pour ne pas être tendre avec les liber­tés, voire ayant empri­sonné, tué ou exilé leurs propres jour­na­listes, cherchent à parti­ci­per à la mani­fes­ta­tion d’aujourd’­hui.

    Je ne crois pas une seconde qu’ils soient assez naïfs ou imbé­ciles pour croire que ça leur redon­nera une virgi­nité ou un vernis posi­tif.

    J’ai cher­ché, et puis je me suis souvenu qu’of­fi­ciel­le­ment ces diri­geants ne font eux aussi que lutter contre le terro­risme, contre leur terro­ristes à eux, selon eux. Offi­ciel­le­ment ils ne font que prendre des mesures excep­tion­nelles et néces­saires pour sauve­gar­der l’ordre public. Il faut dire que la notion de terro­risme  est telle­ment large qu’on peut y faire entrer tout et son contraire en fonc­tion de ses propres inté­rêts.

    Je ne saurais dire s’ils espèrent nous voir sombrer dans les mêmes travers pour justi­fier les leurs ou si, de bonne foi, ils cherchent à nous appor­ter leur soutient en pensant honnê­te­ment avoir déjà traversé cette épreuve et mis en oeuvre ce qu’ils pensent indis­pen­sable.

    Ils semblent bien avoir raison

    Je me retiens géné­ra­le­ment de voir de la malveillance là où il ne pour­rait y avoir que de la bêtise navrante. D’un autre côté ils ne sont pas si bêtes, car ils semblent bien avoir raison.

    Je pour­rais conti­nuer mais Le Monde a fait sa propre liste, plus courte mais qui tend à faire croire que la mienne n’est pas très grave en compa­rai­son. Centres de réédu­ca­tions de la pensée, réou­ver­ture du bagne, présomp­tion de culpa­bi­lité, retrait des allo­ca­tions aux parents d’en­fants ne faisant pas la minute de silen­ce… l’ima­gi­na­tion de nos poli­tiques est débor­dante et n’im­porte quelle propo­si­tion inac­cep­table pour­rait passer comme modé­rée quand voit ces délires.

    N’est pas la Norvège qui veut

    Mon rêve d’hier est déjà bien loin, même si j’avais peu d’es­poir. N’est pas la Norvège qui veut, et nos repré­sen­tants avaient déjà montré plus d’une fois que reti­rer nos liber­tés était pour eux la meilleure solu­tion pour qu’on ne nous les menace pas.

    Dans mes rêves les plus fous, aujourd’­hui, la France aurait pris la suite de RSF, avec le courage d’ex­pri­mer haut et fort « non, il n’est pas sain que vous vous asso­ciez à cet événe­ment aujourd’­hui » aux diri­geants des pays peu favo­rables à la liberté d’ex­pres­sion, ainsi qu’à ceux qui utilisent le prétexte de lutte contre le terro­risme dans leurs inté­rêts.

    Cela aurait posé des problèmes de rela­tion diplo­ma­tique, nous aurait certai­ne­ment perdu quelques inté­rêts écono­miques. Nos valeurs ont visi­ble­ment bien peu de poids à côté de tout cela. Une marche collec­tive, c’est bien tout ce qu’on peut espé­rer visi­ble­ment. Savou­rons-la, malgré sa compo­si­tion.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Neil Mora­lee