Catégorie : Politique et société

  • J’ai­me­rais qu’elle serve à ça

    J’ai­me­rais qu’elle serve à ça

    Nous allons répondre à la terreur par plus de démo­cra­tie, plus d’ou­ver­ture et de tolé­rance

    — Jens Stol­ten­berg, après les atten­tats en Norvège

    Si cette émotion devait servir à quelque chose d’utile, j’ai­me­rais qu’elle serve à ça.

    N’ou­blions pas : Depuis qu’on parle de terro­risme, ce dernier n’a jamais réel­le­ment réduit nos liber­tés en occi­dent. Les liber­tés que nous avons perdu, nous nous les sommes reti­rés nous-mêmes.

    Depuis 15 ans notre réponse a été de culpa­bi­li­ser les pauvres et les chômeurs, de faire la guerre aux étran­gers et enfants d’étran­gers, d’igno­rer les souf­frances et les brimades subies par les mino­ri­tés visibles, d’iso­ler nos repré­sen­tants poli­tiques de la diver­sité des opinions, d’in­ter­dire autant que possible tout ce qui peut repré­sen­ter la reli­gion musul­mane, de cliver et monter les uns contre les autres.

    Notre poli­tique a été de faire du spec­tacle, du marke­ting, des prises de paroles gran­di­lo­quentes. Notre poli­tique a été de prendre chaque fait comme excuse pour inter­dire, pour exclure, pour renfor­cer la surveillance et réduire les liber­tés civiles.

    Le danger du regrou­pe­ment dans l’émo­tion c’est cette union natio­nale qui ne fait émer­ger qu’une seule voix, c’est ce repli sur soi sous prétexte de patrio­tisme, c’est cette volonté sécu­ri­taire qui ne fait qu’en­tre­te­nir la peur et la défiance.

    Si cette émotion devait servir à quelque chose, j’es­père que ce sera, pour une fois, à monter plus d’édu­ca­tion, plus de soli­da­rité, plus de démo­cra­tie et plus de justice. Il ne tient qu’à nous.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Davide Cassa­nello

  • Le désar­roi d’une prof qui parle de « Char­lie » à ses élèves – Amal­game au quoti­dien

    Le désar­roi d’une prof qui parle de « Char­lie » à ses élèves – Amal­game au quoti­dien

    Parce que parmi toutes les bonnes volon­tés du monde, il est temps de commen­cer par se rendre compte que nous ne sommes nous-même pas neutres.

    J’ai d’abord eu un échange avec ma classe de 5e, compo­sée de collé­giens de 12 ans en moyenne. Ils étaient très silen­cieux. Sauf un qui m’a demandé : « Pourquoi respec­ter une minute de silence pour des gens que je ne connais­sais pas ? » J’ai trouvé cette réac­tion violente. Ses cama­rades ont été choqués égale­ment. Ils sont jeunes, sans doute plus émotifs que leurs aînés. Je voyais que cet élève faisait semblant, il ne pesait pas ses mots. Il était dans la provo­ca­tion.

    J’ai rappelé les faits en commençant pas l’évi­dence : on a tué des êtres humains. Pour que la minute de silence soit ensuite respec­tée, j’ai dû « plom­ber l’am­biance », sinon ça n’au­rait pas fonc­tionné. Je leur ai dit : « Vous vous rendez compte que les victimes sont parties hier matin en disant à tout à l’heure à leur famille ? »

    Et en même temps, cette ques­tion est immen­sé­ment perti­nente. Se conten­ter de dire que ce sont des êtres humains ? mais des êtres humains il en meure tous les jours, avec des familles dans le déses­poir.

    À 12 ans ils sont capables de comprendre que c’est qu’il doit y avoir quelque chose de diffé­rent, que la dernière fois qu’un élève a perdu un parent il n’y a pas eu de minute de silence.

    C’était peut être la seule ques­tion et la seule expli­ca­tion de texte utile dans toute cette histoire, bien plus que la minute de silence elle-même. À vrai dire, sauf à avoir déjà compris tous les tenants et abou­tis­sants, ce sont juste­ment ceux qui ne posent pas la ques­tion qui néces­sitent de l’at­ten­tion, parce que ce ceux eux qui subissent et repro­duisent l’émo­tion sans la comprendre.

    Celui qui pose la ques­tion est celui qui commence à réflé­chir et à prendre du recul. La ques­tion que je me pose, c’est si la profes­seur avait elle-même ce recul, vu la réac­tion.

    Le pire c’est que sans cette expli­ca­tion de texte, il ne serait pas éton­nant que juste­ment certains croient comprendre que la diffé­rence ici c’est que la réac­tion a eu lieu au nom de la reli­gion musul­mane. Bref, y voient une stig­ma­ti­sa­tion.

    Je venais de voir quelques-unes de mes élèves de confes­sion musul­mane debout, la tête bais­sée, presque gênées, pour elles, pour leurs familles, ça doit être dur de voir certains faire l’amal­game.

    Quant à ce qui s’est passé dans ma classe, cette provo­ca­tion, ce n’est rien à côté de ce que certains de mes collègues ont dû affron­ter. Durant la minute de silence, dans les autres classes, il y a eu plusieurs expul­sions d’élèves, les uns parlaient, disaient des choses affreuses, les autres rigo­laient. Un petit de 6e de confes­sion musul­mane a carré­ment refusé de respec­ter la minute de silence. Tous ces élèves un peu « retors » ont été envoyés chez le prin­ci­pal de l’éta­blis­se­ment et chez l’in­fir­mière scolaire pour entendre un discours diffé­rent de celui qu’ils entendent sans doute chez eux.

    Et pour­tant, c’est juste­ment ça l’amal­game et la discri­mi­na­tion. Quand il y a eu plusieurs élèves qui ont refusé de faire la minute de silence, mais que celui dont on parle est juste­ment le musul­man – je suppose que tous les autres ne l’étaient pas alors pour eux c’est juste de la disci­pline. Pour le musul­man par contre, c’est forcé­ment à cause de la reli­gion. Même la formu­la­tion de « confes­sion musul­mane », pour éviter de dire « musul­man »… est-ce donc un terme néga­tif ou stig­ma­ti­sant dans l’es­prit de l’au­teur ?

    « Madame, me dit-elle, on ne va pas se lais­ser insul­ter par un dessin du prophète, c’est normal qu’on se venge. C’est plus qu’une moque­rie, c’est une insulte ! » Contrai­re­ment au précé­dent, cette petite pesait ses mots, elle n’était pas du tout dans la provoc. À côté d’elle, l’une de ses amies, de confes­sion musul­mane égale­ment, soute­nait ses propos. J’étais choquée, j’ai tenté de rebon­dir sur le prin­cipe de liberté et de liberté d’ex­pres­sion. Puis c’est un petit groupe de quatre élèves musul­mans qui s’est agité : « Pourquoi ils conti­nuent, madame, alors qu’on les avait déjà mena­cés ? »

    Plusieurs élèves ont tenté de calmer le jeu en leur disant que Char­lie Hebdo faisait de même avec les autres reli­gions. Leur profes­seur de français avait eu l’in­tel­li­gence de leur montrer les unes de Char­lie pour leur montrer que l’is­lam n’était pas la seule reli­gion à être moquée. Mais ils réagissent avec ce qu’ils ont entendu à la maison.

    Et je me mets à leur place, c’est leur dire qu’ils doivent garder pour eux toute brimade pour autant que d’autres sont aussi visés.

    Je me rappelle combien trou­vaient normal que Zine­dine Zidane ait donné un coup de tête légen­daire à la coupe du monde de 2006, parce qu’il avait été provoqué par une insulte sur sa soeur. Je me rappelle et vois aussi autour de moi qu’à l’école on répond parfois aux enfants qu’il faut qu’ils apprennent à se défendre, à ne pas venir faire le rappor­teur quand ils reçoivent un coup. Pas partout, mais c’est une voix qui n’est pas si mino­ri­taire que ça.

    Il ne s’agit pas de compa­rer avec un homi­cide, mais l’en­sei­gne­ment qu’on donne aujourd’­hui c’est aussi ça. Allez leur expliquer ensui­te… eux n’y voient plus qu’une ques­tion d’ordre de gran­deur mais aucu­ne­ment un problème à la base.

    Tout ceci est partagé, pas spéci­fique à la reli­gion. Dans les faits divers on retrouve d’autres gens qui ont fini par prendre le fusil parce que le voisin a provoqué, a fait trop de bruit. La stig­ma­ti­sa­tion c’est noter et appuyer la confes­sion de son amie, parce que elle était musul­mane, alors c’est diffé­rent, c’est forcé­ment à cause de ça.

    Ce qui me désole, c’est la frac­ture que cet événe­ment tragique a créée dans des classes d’ha­bi­tude soudées. Tout cela a divisé les élèves. Il régnait aujourd’­hui une ambiance glauque, parti­cu­lière. Cette classe de 4e sympa, dyna­mique, était soudain sépa­rée en deux clans. Les commu­nau­ta­rismes ont resurgi d’un coup. Et ça me fait peur pour la suite.

    L’école doit trans­mettre nos valeurs, mais on est parfois un peu trahis par les parents. On apprend les prin­cipes répu­bli­cains aux enfants, mais une fois à la maison ils en font bien ce qu’ils veulent. Ils n’ont plus confiance en nous, profes­seurs. Ils ne nous prennent pas pour des alliés, mais pour des enne­mis. En tant que prof, tu te demandes ce qu’ils peuvent penser de toi, de nous ensei­gnants, nous qui avons la foi de leur apprendre. Nous avons devant nous des jeunes citoyens qui ont des idées telles qu’on est obligé de se deman­der : « Où allons-nous ? »

    Sauf que juste­ment, rien n’est rapporté sur le fait que ce sont des propos venant de la maison. De ce qui ressort de l’ar­ticle, c’est unique­ment un pré-supposé de la profes­seur. Pourquoi ? Parce qu’on parle de musul­mans, ça ne peut venir que de là.

    Des parents musul­mans, c’est donc compré­hen­sible qu’ils donnent des prin­cipes non répu­bli­cains et fassent ce qu’ils veulent à la maison, non ?

    L’en­sei­gne­ment, les valeurs, auraient pu conduire à consi­dé­rer les enfants de 12 ans comme capables de réflé­chir, de ne pas leur préter par défaut les mots de leurs parents. Ça aurait été de consi­dé­rer qu’il y a des enfants qui n’ont pas compris qu’être ciblé n’au­to­rise pas à faire justice soi-même, qu’il y a des enfants (et des adultes) qui ne comprennent pas en quoi ces morts là sont parti­cu­liers. Ça aurait été de leur expliquer, plutôt que de simple­ment noter qu’ils sont musul­mans et que ça explique tout à cause de leurs parents.

    C’est certai­ne­ment invo­lon­taire, mais cet article est l’exemple même qui montre la stig­ma­ti­sa­tion et l’amal­game au quoti­dien, que le vivre ensemble est cassé. Pas que par des parents hors des valeurs de la répu­blique qui font ce qu’ils veulent chez eux, mais à la base même chez ceux qui veulent combattre tout ça, y compris chez cette ensei­gnante.

    En première lecture l’ar­ticle y montre une ensei­gnante qui fait ce qu’elle peut, dépas­sée par une divi­sion de société sur lequel elle n’a pas de contrôle. À la seconde lecture j’ai en plus envie de donner un miroir à l’en­sei­gnante.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC par Chris­tos Tsoum­ple­kas

  • Parce qu’il y a des écrits utiles

    Parce qu’il y a des écrits utiles

    Personne ne se demande comment on en est arrivé là, comment des jeunes pari­gots en sont venus à massa­crer des jour­na­listes et des artistes à la Kalash après un séjour en Syrie, sans avoir aucune idée de la vie et des idées des gens qu’ils ont tué: ils étaient juste sur la liste des cibles d’AlQaeda dans la Pénin­sule Arabique. Personne ne veut voir que cette société française, derrière l’una­ni­misme de façade devant l’hor­reur, est en réalité plus que jamais complè­te­ment anomique, qu’elle jette déses­pé­ré­ment les plus dému­nis les uns contre les autres, et qu’elle a généré en un peu plus d’une décen­nie ses propres enne­mis inté­rieurs.

    Si je ne retiens qu’un seul écrit, c’est le para­graphe cité de l’ar­ticle d’Ar­rêt sur Image – Je ne suis pas Char­lie, et croyez-moi je suis aussi triste que vous. Recul indis­pen­sable, sans pour autant jeter la pierre à ceux qui sont dans l’émo­tion. Un énorme merci à la rédac­tion.

    La première mention spéciale du jour va à Donald Trump, preuve vivante que l’argent ne peut pas tout ache­ter puisque sa fortune n’a pas réussi à lui ache­ter un cerveau. Il a déclaré que si les gens avaient des armes, ils auraient au moins eu une chance et qu’il était inté­res­sant que cela se soit produit dans un des pays ayant une des plus fortes légis­la­tions sur les armes.

    La seconde va à Apple Inc., oui oui la firme à la pomme, dont la page Web du site français affiche un beau bandeau noir « Je suis Char­lie » alors que l’Apple Store censure en perma­nence des écrits, des appli­ca­tions, impose aux déve­lop­peurs des condi­tions bafouant la liberté d’en­tre­prendre. Et ce matin encore. Vous croyez vrai­ment que Char­lie Hebdo est dispo­nible dans le kiosque à maga­zines d’Apple, hein ? Alors qu’Apple a censuré des diction­naires parce que des mots conte­nus dedans ne lui plai­saient pas, comment osent-ils affi­cher l’es­prit de Char­lie ?

    Daniel n’a jamais eu sa langue dans sa poche, mais l’hy­po­cri­sie de ces deux exemples est énorme. S’il est un bal tragique, c’est celui des hypo­crites. Si et les poli­tiques et les entre­prises sont légi­times à expri­mer leur émotion à et à se joindre à tout mouve­ment, y compris à commu­niquer et se préva­loir de leur posi­tion, atten­tion au marke­ting : Ils utilisent votre indi­gna­tion à leurs propres fins.

    Pendant près de 24 heures, Mourad H., 18 ans, a fait partie des trois « terro­ristes » accu­sés d’avoir attaqué Char­lie Hebdo et d’avoir tué 12 personnes.

    Pendant près de 24 heures, certains médias et de nombreuses personnes sur les réseaux sociaux ont estimé qu’il était néces­saire de bafouer la déon­to­lo­gie jour­na­lis­tique en relayant son iden­tité complète. Jusqu’à ce qu’il soit mis hors de cause ce jeudi après-midi.

    Cette chasse à l’homme à la limite du lynchage sur les réseau sociaux, elle pue. Je comprends le besoin d’exu­toire et de trou­ver un coupable, mais vous niez l’État de droit comme la présomp­tion d’in­no­cence, ce qui me parait d’au­tant plus grave vu la cause de tout cela.

    Accusé à tort d’être terro­riste, Mourad a bien de la chance, car il s’est exprimé publique­ment par le passé contre le djihad. Imagi­nons qu’il ait eu une posi­tion plus complexe, on l’au­rait trouvé en prison encore dans deux ans, à ensuite devoir suppor­ter l’ac­cu­sa­tion toute sa vie. Même ainsi, j’es­père que la police lui four­nira une protec­tion pour les prochaines semaines, parce que des imbé­ciles prêt à tuer il y en a des deux côtés.

    Je n’ima­gine même pas s’il avait fui devant la police ou menti en garde à vue, que ce soit par réflexe débile, par peur ou pour crédi­bi­li­ser un discours. C’est pour­tant fréquent, parce que personne ne réagit ration­nel­le­ment dans ces moments là. Alors imagi­nons même un instant qu’un des suspects soit un radi­cal, à la limite du parti­san, mais inno­cent de la tuerie. Impos­sible pour lui de s’en sortir.

    Le lynchage devrait nous faire honte. Surtout main­te­nant. Il ne nous ressemble pas, ne devrait pas nous ressem­bler, quelle que soit la situa­tion. Après la guerre en Irak, après Guan­ta­namo, nous n’avons toujours rien appris.

    Ces méca­nismes de pouvoir se donnent à voir dans ce qu’on pour­rait appe­ler le para­doxe du discours moderne et huma­niste. Alors que ce discours accorde a priori une valeur égale à toutes les vies, il orga­nise en réalité la hiérar­chi­sa­tion des souf­frances et l’in­dif­fé­rence de fait (ou l’in­di­gna­tion pure­ment passa­gère) par rapport à certaines morts : les morts de la « forte­resse Euro­péenne » (19 144 depuis 1988 d’après l’ONG Fortress Europe) et les enfants de Gaza – pour prendre deux exemples étudiés par Butler – ou encore les 37 personnes tuées dans un atten­tat au Yemen le jour même du drame de Char­lie Hebdo, pour prendre un exemple plus récent.

    […] De même, aucun chef de gouver­ne­ment ne pense­rait à décré­ter l’Etat d’ex­cep­tion après avoir pris connais­sance du nombre de meurtre sexiste et intra-fami­lial en France. Pourquoi cet unani­misme, dans la presse de ce matin, au sujet de la néces­sité de ne pas bais­ser les pouces dans le cadre de la guerre (mili­taire et non méta­pho­rique) au terro­risme isla­miste ?

    […] À l’in­verse, le discours moderne et huma­niste est aveugle par rapport à sa propre violence. Qui a une idée, même approxi­ma­tive, du nombre de morts géné­rés par la guerre améri­caine en Afgha­nis­tan en 2001, par celle des États-Unis et du Royaume-Uni en Irak en 2003 ou encore par l’in­ter­ven­tion de la France au Mali en 2013 ? L’une ou l’autre de ces guerres était peut-être légi­time. Mais le fait que personne ne soit capable de donner une esti­ma­tion du nombre de morts qu’elles ont généré doit nous inter­ro­ger. Dans ces moments où nous sommes submer­gés par les émotions, il peut être inté­res­sant de penser à tous ces précé­dents et à ces morts, à venir, que nous n’al­lons pas pleu­rer.

    Ces morts que nous n’al­lons pas pleu­rer. Le point est diffé­rent de celui que j’ai exprimé hier, mais j’y trouve des simi­li­tudes.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Linh Ngyuen

  • Aujourd’­hui je suis Shel­don

    Aujourd’­hui je suis Shel­don

    Je lis des gens qui disent pleu­rer, qui disent ne pas pouvoir se remettre au travail, qui disent avoir mal au coeur. Certains ne sont là que dans l’es­ca­lade à la démons­tra­tion émotion­nelle, surtout parmi les personnes publiques. D’autres plus proches émettent tout de même des émotions très fortes, person­nelles.

    J’ai l’im­pres­sion d’être Shel­don Cooper. Je ne sais pas parta­ger cette émotion, ou même la ressen­tir. Je la comprends mais je la trouve trop peu ration­nelle et je ne sais pas décon­nec­ter cette réalité.

    Onze morts c’est grave. Pour leur famille, pour leurs collègues restés vivants. Je compa­tis à leur peine, profon­dé­ment. Mais en même temps des morts nous en avons tous les jours, et leurs familles ou leurs amis n’ont pas une détresse moindre que ceux qui feront les jour­naux demain.

    Reste symbole pour la liberté d’ex­pres­sion. Ce symbole là est fort, mais je ne peux m’em­pê­cher de penser aux SDF morts en France cette année, aux 1 500 morts civils pales­ti­niens suite à l’of­fen­sive israé­lienne dans les 6 derniers mois selon l’ONU, à tous ceux qui sont encore vivants là bas mais qui vivent à la limite de la survie du fait de l’oc­cu­pa­tion, à tous ces travailleurs que nous exploi­tons en Asie du sud-est et qui meurent de leurs condi­tions de travail, aux 5 000 soldats et centaines de milliers de civils morts en Irak pour une guerre déclen­chée en toute impu­nité par un mensonge de nos repré­sen­tants poli­tiques, à la mort de 3 000 000 d’en­fants de moins de 5 ans chaque année – excu­sez du peu – à cause de la malnu­tri­tion.

    Pourquoi j’écris tout ça ? Parce que toutes nos lois liber­ti­cides n’em­pê­che­ront jamais deux personnes isolées d’al­ler déclen­cher une fusillade avec dix morts à la clef, jamais. Alors que donner un abri aux SDF, arrê­ter la guerre Israélo-pales­ti­nienne, stop­per l’ex­ploi­ta­tion indus­trielle, arrê­ter la faim dans le monde, ne pas déclen­cher de guerre par inté­rêt… tout ça est collec­ti­ve­ment à notre portée. Pour peu que nous soyons tous prêts à nous y enga­ger, ce serait presque simple.

    Rien n’est jamais compa­rable, mais réagir avec autant d’in­ten­sité et de force collec­tive pour 11 morts impos­sible à empê­cher au nom d’une liberté que nous n’avons juste­ment jamais perdu, après s’être tu face à tout le reste, c’est aussi un symbole. Un symbole très fort, même si à tendance cynique et dépres­sive, de privi­lé­giés dans leur fauteuil.

    On risque de dépen­ser bien plus suite à l’aug­men­ta­tion du niveau d’alerte Vigi­pi­rate, que ce qui est néces­saire pour sortir de la merde nos sans abris. Ça n’a peut être rien à voir avec l’évé­ne­ment récent, mais ça me retourne bien plus l’es­to­mac.

    Mon discours est peut être poli­tique­ment incor­rect et mal placé, mais les prio­ri­tés de notre société me font bien plus honte que ces quelques lignes. Seul ce qui touche notre classe sociale élevée occi­den­tale mérite tout ça. La faim, le froid, la mala­die, la guerre, l’es­cla­vage par le travail ? ça va, on laisse faire, c’est le problème des autres, pauvres, orien­taux ou de l’hé­mi­sphère sud.

    Je me sens comme Shel­don, inca­pable d’être dans l’émo­tion du moment, tota­le­ment décalé. Trai­tez-moi de monstre insen­sible, mais croyez-moi : Je ne reproche cette émotion à personne. J’ai même essayé d’être comme vous. Je n’y arrive simple­ment pas.

    Sur le même sujet (media­part) : Ces morts que nous n’al­lons pas pleu­rer

    Texte écrit hier, jour de la fusillade, partagé initia­le­ment en privé pour ne pas offen­ser l’émo­tion de chacun. Je compte sur chacun pour n’y voir qu’une expres­sion de mes propres senti­ments et en aucun cas un juge­ment de ceux des autres
    Photo d’en­tête sous licence CC BY par Vinoth Chan­dar

  • En finir avec la voiture à Paris

    En finir avec la voiture à Paris

    quand on payé une bagnole 10.000 boules, c’est bien la hausse du tarif pour 3m2 d’es­pace public occupé nuit et jour au prix exubé­rant de 9 euros par semaine qui décré­di­bi­lise l’hé­ri­tage de Jean Jaurès.

    Oui, 9 euros la semaine pour 2 à 4m2 de surface occu­pée en plein Paris. Avenue Montaigne incluse. A la saison où les SDF gèle sur carton au pied de ton immeuble à double digi­code, ce loyer pour un gros bout de plas­tique laid priva­tif, avec air condi­tionné et GPS, est tout simple­ment le meilleur deal immo­bi­lier de France, province incluse.

    Je n’au­rais pu mieux répondre que Seb Musset à ce délire cari­ca­tu­ral du chro­niqueur de Le Plus.

    Sérieu­se­ment, à Paris, ne pas se rendre compte qu’on ne fait pas les poches aux auto­mo­bi­listes mais qu’au contraire ils sont subven­tion­nés… les infra­struc­tures de circu­la­tion auto­mo­biles et tout l’im­pact finan­cier de la surcharge de circu­la­tion – ne parlons même pas de la pollu­tion – coûte un fric qui ne sera jamais remboursé par un ticket de parking à 9 € par semaine.

  • Les salaires des PDG sont sans rapport avec leurs perfor­mances

    Les salaires des PDG sont sans rapport avec leurs perfor­mances

    qu’en­tend-on par “meilleur PDG” ? Celui qui a prouvé une judi­cieuse vision stra­té­gique sur le long terme ? Qui innove ? Qui crée de l’em­ploi ? Celui dont l’en­tre­prise a pris la plus grande valeur en bourse ? Ce dernier critère, très quan­ti­ta­tif, est celui du clas­se­ment cité par Le Monde : il a été établi par l’In­sead, une grande busi­ness school inter­na­tio­nale, à partir des perfor­mances finan­cières des entre­prises sur plusieurs années. Les 100 meilleurs patrons ont accru la valeur de leurs entre­prises de 40 milliards de dollars, les 100 moins bons ont fait bais­ser cette valeur de 14 milliards.

    Et cette dernière manière de calcu­ler, qui est aussi la plus admise, est une gigan­tesque arnaque. C’est décon­nec­ter tota­le­ment la rému­né­ra­tion de ce que l’in­di­vidu apporte effec­ti­ve­ment comme valeur, pour le rému­né­rer à partir de ce que tous ses subor­don­nés apportent comment valeur. Il y a comme une erreur dans l’équa­tion.

    Qu’est-ce qui peut nous faire croire qu’un homme mérite, par son travail, 120, 200 ou même 800 fois le salaire moyen de tous les autres, et un ratio encore plus grand face à ceux qui bossent toute la jour­née à la chaine dans des condi­tions diffi­cile souvent en mettant en jeu leur santé ?

    Tout ça n’a aucun sens, et la dérive est fina­le­ment rela­ti­ve­ment récente : tout juste une tren­taine d’an­nées.

    Même en imagi­nant que le diri­geant soit prin­ci­pal respon­sable direct des résul­tats, et donc rému­néré en fonc­tion des gains qu’il fait réali­ser, l’équa­tion est fausse d’après l’étude :

    1 – Il n’existe pas de corré­la­tion entre la rému­né­ra­tion des P-DG et les perfor­mances finan­cières de leurs entre­prises.

    La classe sociale la plus haute, celle des 1% ou 1‰, s’est tota­le­ment décon­necté du reste de la société. Entre-soi écono­mique, mais aussi rela­tion­nel. Ils ne voient pas la dérive et vont jusqu’à penser méri­ter ces écarts de rému­né­ra­tions, en toute bonne foi.

    2 – Le fait qu’une entre­prise crée en interne un Comité des Rému­né­ra­tions a plutôt pour effet de faire monter le salaire des diri­geants.

    3 – La présence d’ad­mi­nis­tra­teurs indé­pen­dants au CA de l’en­tre­prise ne garan­tit aucu­ne­ment une modé­ra­tion du salaire du P-DG.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par Ross Pollack

  • Quand le « Finan­cial Times » soutient les propo­si­tions de la gauche radi­cale en Europe

    Quand le « Finan­cial Times » soutient les propo­si­tions de la gauche radi­cale en Europe

    « Consi­dé­rons que vous parta­gez le consen­sus global sur ce que devrait faire immé­dia­te­ment l’eu­ro­zone. Concrè­te­ment, vous voulez davan­tage d’in­ves­tis­se­ments publics et de restruc­tu­ra­tion de la dette. Main­te­nant, posez-vous la ques­tion suivante : si vous étiez citoyen d’un pays de l’eu­ro­zone, quel parti poli­tique soutien­driez-vous pour que cela advienne ? Vous serez proba­ble­ment surpris de consta­ter qu’il n’y a pas beau­coup de choix. En Alle­magne, la seule forma­tion qui soit proche d’un tel agenda est Die Linke, les anciens commu­nistes. En Grèce, ce serait Syriza. En Espagne, ce serait Pode­mos qui est sorti de nulle part et se retrouve en tête dans les sondages ».

    […] Pour reprendre le titre déli­bé­ré­ment provo­ca­teur d’un article récent (30 décembre 2014) du Finan­cial Times – oui, encore lui –, « les élec­teurs sont le maillon faible de l’eu­ro­zone ». On ne saurait mieux décrire la concep­tion de la « démo­cra­tie » qui prévaut au sein de l’Union euro­péen­ne…

    Bernard Cassen

    Photo d’en­tête sous licence CC BY par Pasu Au Yeung

  • J’au­rai essayé

    J’au­rai essayé

    La nouvelle ligne en créa­tion n’était peut être ni le Paris-Lille ni l’Orient Express, mais la direc­tion choi­sie avait trouvé un écho chez moi. J’ai pris un billet, bien déter­miné à pous­ser ma part de char­bon s’il y avait besoin d’ali­men­ter la loco­mo­tive.

    Le train avance, je ne sais pas vrai­ment où il va, mais je sais que je n’adhère pas au comment il y va, et qu’en tout cas je ne saurais consi­dé­rer y être impliqué.

    Je lui souhaite bonne route, mais il va falloir passer un sacré nombre d’ai­guillage afin de réorien­ter le train sur les bons rails.

    Je ne lui souhaite que d’y arri­ver, mais je crois que je m’en sorti­rai quand même mieux à pieds. Je m’ar­rête à la prochaine gare.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC par Diego Sevilla Ruiz

  • Typo­gra­phie à l’école

    Typo­gra­phie à l’école

    Quelles bases de typo­gra­phie sont donc ensei­gnées à l’école ?  Le mot « typo­gra­phie » est-il utilisé ? — Emma­nuel

    Ques­tion inté­res­sante. J’ai fouillé mes souve­nirs.

    Au niveau carac­tère

    On m’a appris les majus­cules, les minus­cules, les chiffres, les ponc­tua­tions et l’es­pace.

    On ne m’a pas appris la diffé­ren­cia­tion entre majus­cule et capi­tale, ou même l’exis­tence des petites capi­tales, ni le fait que les points de suspen­sions est un carac­tère à part entière et pas trois points sépa­rés.

    On ne m’a pas appris non plus les cadra­tin et demi cadra­tin, les chevrons pour faire des cita­tions à l’in­té­rieur d’autres cita­tions ou le sens des crochets. On ne m’a pas appris non plus qu’il y a diffé­rentes tailles d’es­pace (mais ça s’est fait tout seul à l’usage pour l’écri­ture manus­crite). Je ne parle même pas de savoir ce qu’est une liga­ture.

    On m’a aussi expli­ci­te­ment mal appris que les majus­cules ne prennent jamais d’ac­cent ou de cédille, et je crois que ce mauvais appren­tis­sage perdure encore aujourd’­hui.

    On m’a aussi expli­ci­te­ment appris le mauvais genre pour « une espace », et j’ai encore du mal aujourd’­hui à me corri­ger.

    Au niveau du mot

    On m’a appris à sépa­rer les mots par des espaces, à capi­ta­li­ser les noms propres, ce qu’est un sigle ou une abré­via­tion. On m’a même appris la césure et qu’elle se fait entre deux syllabes.

    On ne m’a par contre pas appris – ou je ne m’en souviens pas – comment arbi­trer entre les diffé­rentes écri­tures des sigles et acro­nymes (capi­tales ou non, points entre les lettres ou non).

    Sur la césure on ne m’a pas non plus appris à faire des coupures élégantes, ou quand éviter de les faire.

    Au niveau de la phrase

    On m’a appris la majus­cule en début de phrase et le point en fin de phrase, quelle ponc­tua­tion prend une espace avant ou après.

    On m’a toujours appris à ne pas mettre de virgule entre les deux derniers éléments d’un inven­taire quand un « et » ou un « ou » est présent, même si j’ai appris à parfois le faire moi-même plus tard.

    On ne m’a par contre pas appris à gérer la ponc­tua­tion des listes.

    On ne m’a pas appris non plus la notion d’es­pace insé­cable, même si en pratique la « règle du bon sens » fait qu’on m’a inter­dit de reve­nir à la ligne avant une ponc­tua­tion autre que l’ou­ver­ture de guille­met ou de paren­thèse, avant les symboles d’unité, ou (pour les profes­seurs les plus tatillons) au milieu d’un « 15 septembre ».

    La capa­cité de ne pas mettre une capi­tale après les deux points quand il s’agit d’un inven­taire a été diffé­rente chaque année suivant le profes­seur. Pour le coup on m’a appris tout et son contraire.

    Au niveau du para­graphe

    On m’a appris la notion de para­graphe, le saut de ligne et même l’in­den­ta­tion. On m’a appris la notion de titre, l’es­pace sous et sur le titre.

    On ne m’a pas appris que c’est norma­le­ment soit un sauf de ligne soit une inden­ta­tion mais pas forcé­ment les deux – et assez rapi­de­ment plus personne n’a demandé ou fait atten­tion à la présence ou non d’une inden­ta­tion. On ne m’a pas appris non plus à réel­le­ment conce­voir une diffé­rence entre un nouveau para­graphe et un simple retour à la ligne – même si j’ai finis par la faire de moi-même.

    On ne m’a pas appris à gérer les veuves ou les orphe­lines.

    La notion de phrase : On m’a appris la majus­cule en début de phrase

    Autres

    On m’a appris le souli­gné, on m’a donné très tardi­ve­ment la signi­fi­ca­tion de l’ita­lique mais jamais du gras. On ne m’a par contre jamais donné les armes pour faire de l’écri­ture clavier avec un usage élégant entre les guille­mets et l’ita­lique plutôt que le gras et le souli­gné.

    De manière géné­rale on ne m’a jamais appris à vrai­ment utili­ser le clavier ou que l’in­for­ma­tique permet plus que le simple ASCII : majus­cules accen­tuées, cadra­tins, espace insé­cable, espace fine, apos­trophe et guille­met typo­gra­phique, et encore moins les traits d’union et traits de césure expli­cite ou la césure option­nelle. On ne m’a globa­le­ment pas appris l’in­for­ma­tique du tout en fait, que ce soit clavier ou trai­te­ment de texte – je ne parle même pas de choix des fontes. Ça peut expliquer aussi le faible niveau typo­gra­phique des échanges élec­tro­niques actuels.

    Je regrette aussi qu’on ne m’ait pas ensei­gné les ques­tions typo­gra­phiques en tant que tel, peut-être rien que pour me dire que la typo­gra­phie est diffé­rente dans d’autres langues.

    Clai­re­ment, dans tous les cas, personne n’avait même abordé le terme de typo­gra­phie. À l’heure où on parle de la perti­nence d’en­sei­gner l’écri­ture à la main, c’est surpre­nant.

    Et vous ?

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par Relly Annett-Baker

  • Écri­ture digi­tale

    Écri­ture digi­tale

    Ça gonfle, ça enfle, et ça commence à dire n’im­porte quoi dans la presse.

    Non, on ne va pas arrê­ter l’en­sei­gne­ment de l’écri­ture à nos chéru­bins pour leur impo­ser d’uti­li­ser un clavier dès le primaire. Ni en France, ni aux États Unis, ni en Finlande.

    Ce dont on parle dans ces deux derniers pays c’est d’ar­rê­ter l’en­sei­gne­ment obli­ga­toire dans le tronc commun de la calli­gra­phie cursive – les écri­tures dites liées ou atta­chées. En paral­lèle on parle aussi d’in­tro­duire les claviers dans les ensei­gne­ments, mais dans aucun des cas il n’a été ques­tion de rempla­cer l’un par l’autre : On conti­nuera l’en­sei­gne­ment de l’écri­ture à la main. Ce sera juste poten­tiel­le­ment du script – carac­tères d’im­pri­me­rie, lettres bâtons.

    En fait c’est même déjà le cas en Finlande, ma femme ayant vu arri­ver dans sa classe une petite fille nordique qui n’avait jusqu’a­lors appris que le script – et qui donc était tota­le­ment inca­pable au début de relire ce qui était écrit en cursif au tableau, dont juste­ment l’en­sei­gne­ment est obli­ga­toire en France. Il semble qu’au États Unis le niveau fédé­ral auto­rise désor­mais les États internes à prendre le même chemin s’ils le souhaitent.

    Dans tous les cas on parle de ne plus rendre obli­ga­toire, pas d’in­ter­dire. Mieux : Dans le cas des États-Unis on parle de permettre de ne plus rendre obli­ga­toire. Plus souple tu meurs.

    * * *

    Quelques images pour se convaincre, s’il le fallait encore, que l’écri­ture cursive n’est rien d’autre qu’une commo­dité pour soi, un frein à la commu­ni­ca­tion et un moyen de sélec­tion pour l’école. S’il est bien préfé­rable d’écrire encore en script, il est aussi indis­pen­sable de commen­cer à apprendre à écrire avec un clavier, réel ou virtuel, et de se prépa­rer pour de bon à d’autres modes de saisie, y compris oraux. Histoire de mieux s’at­ta­cher enfin au fond de ce que l’on écrit et aux enjeux de la publi­ca­tion…
    — Michel Guillou, « qui se plain­dra de la fin de l’écri­ture cursive ?« 

    Il faut dire qu’on lit – et écrit – désor­mais très majo­ri­tai­re­ment de l’im­primé papier ou l’élec­tro­nique. Les mots échan­gés avec une belles calli­gra­phie liée se font plus rares. Les cartes postales, les mots sur le frigo et les ordon­nances médi­cales sont peut être aujourd’­hui les usages majo­ri­taires restants.

    Même pour les formu­laires ou pour les post-its, je vois fréquem­ment des écri­tures scriptes pour éviter des ennuis de relec­ture – quasi­ment à chaque fois sur des noms de personne, de ville ou de rue – ou simple­ment par honte du style de calli­gra­phie cursive. Même ceux qui conti­nuent à écrire en cursif y importent géné­ra­le­ment les majus­cules d’im­pri­me­ries, parfois même certaines minus­cules comme le v.

    Qu’en sera-t-il dans 20 ans quand nos enfants seront à notre place ?

    Est-ce donc vrai­ment perti­nent main­te­nir l’ap­pren­tis­sage de deux calli­gra­phies distinctes, si la cursive est à la fois peu fréquente, complexe à écrire et diffi­cile à relire ? Il y a l’avan­tage de la vitesse d’écri­ture face à l’écri­ture manuelle scripte, mais si les textes longs finissent de toutes façons sur clavier…

    Ça me rappelle l’usage des stylos plumes en primaire, avec les doigts et cahiers plein d’encre et les cartouches vides. Il y aura toujours des gens qui leur trou­ve­ront mille avan­tages pour l’ap­pren­tis­sage de l’écri­ture, mais je me rappelle encore mon père me deman­der « pourquoi tu utilises encore un stylo plume ? nous on a utilisé des stylos à billes dès qu’on a pu » comme si l’évo­lu­tion avait subi une régres­sion incom­pré­hen­sible.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par i k o