Catégorie : Politique et société

  • On nous prend pour des imbé­ciles

    Marlène Schiappa, au 7–9 de France Inter ce matin : « fait confiance aux parte­naires sociaux pour ne pas remettre en cause les congés mater­ni­tés dans les entre­prises ».

    Le gouver­ne­ment auto­rise désor­mais les entre­prises à négo­cier des durées et condi­tions de congés mater­ni­tés plus défa­vo­rables que les conven­tions collec­tives.

    Dire ensuite qu’on fait confiance aux parte­naires pour ne pas s’en servir, c’est de la pure mauvaise foi. La seule fina­lité possible de cette ouver­ture aux accords défa­vo­rables sur le sujet, c’est bien d’es­pé­rer que certaines entre­prises en profi­te­ront, sinon autant ne pas la mettre en place.

    Bref… on nous prend pour des imbé­ciles.

    D’au­cuns me diront que ça permet aussi certaines avan­cées posi­tives pour les femmes enceintes. C’est vrai, mais il n’y avait pour cela nulle besoin d’au­to­ri­ser des condi­tions plus défa­vo­rables.

    D’ailleurs ça se pour­suit ensuite

    On vient d’ou­vrir la possi­bi­lité d’ac­cords au niveau de l’en­tre­prise, donc par défi­ni­tion d’avoir des condi­tions diffé­rentes partout. Et en réac­tion à cette nouvelle notre secré­taire d’État nous annonce qu’ils sont en train d’ho­mo­gé­néi­ser les condi­tions des congés mater­nité.

    Oui messieurs-dames, parce que plus c’est gros plus ça passe. L’im­por­tant est ce qu’on dit, même si c’est en déca­lage total avec les faits, et qu’ils le savent très bien.

    La commu­ni­ca­tion passe large­ment devant l’hon­nê­teté intel­lec­tuelle.

  • On vient de tuer le CDD (expli­ca­tions)

    Rien de moins. Ou est-ce le CDI qu’on a tué ? Je ne sais pas bien…

    Petit calcul pour une entre­prise de plus de 11 sala­riés

    Si vous prenez quelqu’un en CDI pour le licen­cier arbi­trai­re­ment quand vous voulez (illé­ga­le­ment donc) vous risquez de payer jusqu’à 1 mois de salaire par année d’an­cien­neté. Tout compris. En gros c’est une prime de 8,3% de salaire pour compen­ser l’abus de licen­cie­ment.

    Si vous prenez quelqu’un en CDD et que le contrat va léga­le­ment jusqu’à sa fin, vous devez lui verser en fin de période une prime de préca­rité de 10% de son salaire sur la période.

    À la place de l’em­ployeur vous feriez quoi ?

    * * *

    Oui, ce petit calcul n’est vrai que si on licen­cie au bout d’un an ou deux ans pile. Ça reste inté­res­sant dans les deux à trois mois avant la date anni­ver­saire, beau­coup moins sinon.

    Main­te­nant, consi­dé­rant que les deux premiers mois (au moins) sont couverts par la période d’es­sai et son renou­vel­le­ment, et qu’en échange vous n’avez aucune contrainte de renou­vel­le­ment, de durée fixe, de moti­va­tion à donner pour employer en CDD… et que cette prime couvre tout ce qui peut se passer : Au pire vous licen­ciez plus tôt que prévu, sans être tenu à quoi que ce soit.

    J’ai aussi pris le cas margi­nal. Dans la réalité tous les sala­riés n’ose­ront pas ou n’au­ront pas la force d’al­ler aux Prud’­hommes. Tous n’ob­tien­dront pas non plus le montant maxi­mum, surtout s’ils ne sont pas au maxi­mum d’an­cien­neté de la case qui s’ap­plique à eux, ou si l’em­ployeur arrive à moti­ver un prétexte qui atté­nue l’ar­bi­traire du licen­cie­ment. La moyenne réelle sera certai­ne­ment bien en dessous de ce maxi­mum, qui reste­rait toute­fois inté­res­sant pour l’em­ployeur.

    Sérieu­se­ment, sauf pour des contrats courts, autant prendre un CDI et licen­cier sans cause réelle ni sérieuse.

    On vient de tuer le CDD… et le CDI par la même occa­sion.

  • Un système de classes sociales tout à fait arti­fi­ciel

    Je soupire quand je vois des recherches de CTO sur Paris pour 35 K€ bruts annuels. Je ne discute pas du chiffre en valeur absolu (je sais qu’il est élevé) mais la moyenne pour un ingé­nieur logi­ciel jeune diplômé pari­sien est plutôt dans les 37 K€ brut.

    On me dit « si c’est trop bas ils ne trou­ve­ront pas et ils augmen­te­ront ». Oui, peut-être, mais atten­tion à ne pas croire à la légende du marché ration­nel qui module les rému­né­ra­tions en fonc­tion de l’offre et de la demande.

    * * *

    Peu importe combien de postu­lants tout à fait formés vous trou­ve­rez sur une posi­tion de cadre. Peu importe le manque persis­tant d’as­sis­tantes mater­nelles partout en France. Les premiers seront toujours bien payés et les secondes mal payées, avec une fausse justi­fi­ca­tion de « c’est le marché », parce que « c’est normal ».

    Les rému­né­ra­tions sont globa­le­ment beau­coup plus dépen­dantes de la répu­ta­tion sociale d’un métier et des logiques de classes. On a admis une hiérar­chie dans les métiers et dans les rému­né­ra­tions, et cette hiérar­chie posée compte beau­coup plus que tout le reste.

    C’est telle­ment ancré qu’on repro­chera le trop plein de certains cadres haute­ment diplô­més à un problème d’orien­ta­tion à l’uni­ver­sité et qu’on repro­chera le manque de person­nel pour la petite enfance à un défaut de l’État. Personne ne songera que, peut-être, on pour­rait faire évoluer notre balance de rému­né­ra­tions.

    Le fait que ce soient ceux qui sont les mieux payés qui décident des rému­né­ra­tions des autres n’est pas tota­le­ment un hasard non plus.

    * * *

    « C’est le marché » parce que ceux qui en décident l’ont décidé ainsi, avec tous leurs biais idéo­lo­giques, pas unique­ment pour une ques­tion d’offre et de demande.

    Si la logique de l’offre et de la demande fonc­tion­nait, l’as­sis­tante mater­nelle ne serait pas payée une misère. L’agent de propreté, l’éboueur et l’ou­vrier en situa­tion pénible seraient bien plus proches de la médiane natio­nale.

    * * *

    Je ne reproche pas à ceux qui sont bien payés de l’être. Le marché le leur permet et s’ils s’y refusent ça n’ira certai­ne­ment pas pour autant dans la poche des moins favo­ri­sés.

    Ça n’em­pêche pas d’être conscient de la situa­tion. Oui les compé­tences et la personne jouent (heureu­se­ment) mais les équi­libres tiennent aussi énor­mé­ment à un système de classes sociales tout à fait arti­fi­ciel.

  • Vivre avec un SMIC

    Pendant un mois, le patron d’une société italienne a essayé de vivre avec le Smic, comme ses sala­riés. Il n’a pas tenu trois semaines. Résul­tat : tous ses employés ont été augmen­tés de 200 euros. — Europe 1

    Pour ceux qui gagnent bien leur vie et qui veulent essayer, ce n’est pas bien compliqué.

    Regar­dez combien vous avez dépensé ces 12 derniers mois hors charges fixes (loyer, rembour­se­ment de crédits, impôts, mutuelle, élec­tri­cité, abon­ne­ments tv, télé­phone et inter­net). Pas besoin d’être super précis non plus.

    Compa­rez ça avec un SMIC net par adulte (1153 €) auquel vous retran­chez des charges fixes stan­dard (mettons 650 € par mois pour loyer + inter­net + télé­phone + élec­tri­cité + gaz + chauf­fage + taxes diverses) (*)

    Vous faites la diffé­rence et divi­sez par 15 (ça devrait être 12 mais il faut garder un rab’ suffi­sant pour Noël, les vacances et les coups durs genre la voiture qui tombe en rade). Impo­sez-vous d’éco­no­mi­ser cette somme le mois prochain.

    Ne trichez pas. Vous ne pouvez pas dire « oui mais là j’ai un spec­tacle, des chaus­sures à chan­ger et l’an­ni­ver­saire de ma fille, je pour­rais m’en passer donc je ne les compte pas ». C’est juste­ment ça la diffi­culté, se rendre compte de ce que ça veut dire, impré­vus inclus, des choix diffi­ciles à faire.

    Le vivre au lieu de l’ima­gi­ner. Juste un mois.


    (*) Oui, c’est du très très grosse maille. Je ne compte pas les aides mais je ne compte pas les impôts, la taxe des ordures ména­gères et plein d’autres choses, et je compte un loyer pas cher. Je compte aussi un salaire plein temps par adulte, ce qui est déjà opti­miste. Je suis certain qu’au total j’ai plutôt sous-évalué.

  • Apathéiste

    apathéiste \a.pa.te.ist\ (Reli­gion) Indi­vidu qui se désin­té­resse de la ques­tion de l’exis­tence de dieu ou des divi­ni­tés.

    À la ques­tion « Croyez-vous en Dieu? », un apathéiste vous répon­dra: la ques­tion n’a aucun inté­rêt.

    Parce que j’ai parfois du mal à expliquer que non, je ne suis ni athée ni agnos­tique. Je ne conçois même pas la ques­tion.

    Ce n’est pas que je crois au divin ou que je n’y crois pas, c’est que je ne vois pas bien ce que ça change au final.

    Et en coro­laire, les gens peuvent bien croire ce qu’ils veulent à ce sujet. J’y suis tota­le­ment indif­fé­rent. Je ne vois pas la diffé­rence entre une opinion reli­gieuse et une opinion vesti­men­taire. Ce n’est ni mieux ni moins bien et chacun accorde de l’im­por­tance à ce qu’il veut : Je ne me vois pas dire que ce sujet est plus ou moins impor­tant qu’un autre.

    Tant qu’on ne parle que de la foi elle-même, savoir si mon inter­lo­cu­teur est catho­lique ou musul­man m’in­té­resse presque autant que de savoir s’il préfère les t-shirt ou les chemises. Le voir exer­cer son culte me concerne autant que de savoir s’il porte la chemise dont on vient de parler.

  • Israël, sionisme et anti­sio­nisme

    Je ne comprends même pas comment on peut être contre l’exis­tence d’Is­raël aujourd’­hui.

    Je connais trop peu les discus­sions préa­lables à la créa­tion de l’État d’Is­raël pour savoir si c’était la meilleure solu­tion. Je ne prétends certai­ne­ment pas en avoir de meilleure. Tout ça est une ques­tion d’his­to­rien. Peu importe donc, je m’oc­cupe du présent.

    Aujourd’­hui le pays existe. La nation et le peuple qui le sous-tendent aussi. Comment peut-on nier le droit à l’exis­tence de ce pays et l’au­to­no­mie de ses habi­tants ?

    Pour autant je ne recon­nais aucun droit à. Peu importe l’his­toire ances­trale, peu importe les aspi­ra­tions, les croyances ou les textes reli­gieux, je ne crois pas au droit de certains de s’ins­tal­ler sur des terres au détri­ments d’autres peuples.

    Je ne recon­nais droit ni à Israël ni aux juifs ni aux sémites dans leur ensemble de conti­nuer la colo­ni­sa­tion au delà des fron­tières d’Is­raël. On peut discu­ter de la posi­tion des fron­tières mais on peut diffi­ci­le­ment contes­ter qu’aujourd’­hui il y a encore une poli­tique d’oc­cu­pa­tion et de colo­ni­sa­tion active en partie au nom du droit aux terres ances­trales.

    Mon CNRTL chéri lui donne le temre de sionisme [mouve­ment poli­tique et reli­gieux […] visant à l’ins­tau­ra­tion d’un Foyer natio­nal juif sur la terre ances­trale].

    Aujourd’­hui le sionisme ce n’est plus l’exis­tence d’Is­raël. Ça c’est le passé. Aujourd’­hui c’est la colo­ni­sa­tion et l’oc­cu­pa­tion.

    Et donc, bien que sachant ces ques­tions très complexes et abso­lu­ment pas binaire, je refuse la colo­ni­sa­tion et l’oc­cu­pa­tion, je refuse ce qui consti­tue le sionisme aujourd’­hui.

    Ça ne remet pas en cause l’exis­tence d’Is­raël en tant que pays. Ça ne remet pas en cause l’exis­tence d’Is­raël en tant que foyer juif (je ne suis ni juif ni israë­lien, aux premiers de déci­der ce qu’ils recon­naissent ou pas comme foyer et aux seconds de déci­der souve­rai­ne­ment si leur pays conti­nue de s’as­so­cier à une reli­gion et à laquelle).

    Ça remet en cause le droit à, la légi­ti­mité divine ou ances­trale, celle qui fait passer certains au dessus des autres.

    Et donc oui, cette décla­ra­tion me gêne énor­mé­ment car elle semble m’in­ter­dire de remettre en cause le sionisme d’aujourd’­hui, celui de la colo­ni­sa­tion et de l’oc­cu­pa­tion.

    En bon apathéiste, les croyances reli­gieuses m’in­dif­fèrent. Elles ne sont pour moi ni plus ni moins légi­times ou impor­tantes que les croyances poli­tiques ou plus géné­ra­le­ment les croyances et choix de vies de chacun. Tout au plus elles s’ac­com­pagnent aussi d’une culture et poten­tiel­le­ment d’un senti­ment de nation, mais c’est aussi le cas de croyances non-reli­gieuses.

    Je n’ai jamais cru qu’un peuple ou une culture était hiérar­chique­ment au dessus d’une autre et je suis fonda­men­ta­le­ment atta­ché tant à la liberté de croyance qu’à la liberté de culte.

    Je ne vois pas en quoi refu­ser la légi­ti­mité d’un droit à des terres pour motif divin ou ances­tral (le sionisme) et les actions qui sont menées aujourd’­hui au nom de ce droit, revien­drait à avoir de la haine ou de la discri­mi­na­tion envers un peuple ou une reli­gion (l’an­ti­sé­mi­tisme).

    Par amal­game j’ai l’im­pres­sion à la fois que non seule­ment on me refuse le droit de critiquer et refu­ser les actions faites au nom du sionisme cette décen­nie, mais qu’en plus, faisant cette décla­ra­tion lors de la célé­bra­tion du vél d’hiv, on cherche à m’as­so­cier à ce passé atroce.

    Je trouve ça indigne, honteux ; plus que ça mais je n’ai pas les termes adap­tés.

    Tout le problème des termes. D’une part parce que visi­ble­ment certains asso­cient le sionisme unique­ment à la créa­tion d’Is­raël en y disso­ciant toute la poli­tique moderne qui pour­tant vient de la même aspi­ra­tion. D’autre part parce que on CNRTL chéri – toujours lui – me rappelle que le terme anti­sio­nisme a été histo­rique­ment un autre terme pour la haine des juifs.

    Je pense avoir légi­ti­me­ment le droit de pas soute­nir le sionisme, mais pas de me dire anti­sio­niste puisque ça veut dire autre chose. J’ai l’im­pres­sion d’être pris dans le même amal­game que plus haut, mais sans ici pouvoir même le contes­ter. Faut-il que je me dise contre-sioniste ? a-sioniste ?

    On me dit que je suis simple­ment contre la colo­ni­sa­tion. C’est vrai, en partie, mais ce serait nier que je suis contre le fonde­ment de cette colo­ni­sa­tion, contre l’idée même que le mouve­ment qui le fonde puisse y donner une légi­ti­mité ou un droit. Vouloir le réduire à une oppo­si­tion à la colo­ni­sa­tion c’est consi­dé­rer que le droit à la terre ances­trale ne peut être contesté, qu’il est juste­ment divin et qu’on ne peut que discu­ter de comment il est appliqué. Ça ne me va pas non plus…


    Je ferme les commen­taires. Vous êtes les bien­ve­nus à en discu­ter avec moi en privé, et ça a été fait de façon tout à fait produc­tive avec certains, mais je ne veux pas avoir à modé­rer les déra­pages d’in­con­nus, qu’ils soient d’un bord ou de l’autre, ni juste­ment donner un espace aux anti-sémites divers.

    Bien évidem­ment, comme toujours, je me réserve aussi le droit de chan­ger d’avis, de me rendre compte qu’il y a des choses que je ne connais pas qui sont à prendre en compte.

  • Profes­seur des écoles

    J’en ai marre de lire les habi­tuels poncifs sur les profes­seurs des écoles fainéants, qui ne travaillent pas et toujours en vacances. Bien loin de la réalité.

    Certes,  le temps de cours est assez faible, que ce soit en heures sur la semaine ou en semaines sur l’an­née. Ces heures ne repré­sentent cepen­dant pas la moitié du travail réel. Ajou­tez-y l’ad­mi­nis­tra­tif mais aussi les correc­tions, les prépa­ra­tions des cours et les discus­sions avec les parents. D’un coup on ne parle plus de la même chose.

    J’ai du mal à évaluer le temps de prépa­ra­tion mais je sais que quand je faisais de la forma­tion profes­sion­nelle, on comp­tait 1 jour­née de concep­tion pour 1 heure d’ani­ma­tion… et je n’avais pas à adap­ter les conte­nus au fur et à mesure en fonc­tion de l’ap­pren­tis­sage indi­vi­duel de chacun. Je serais étonné qu’on compte moins de 1h pour 1h au moins les premières années (et c’est le résul­tat de l’étude de l’INSEE aussi).

    Quant au temps de présence devant les parents, je sais que pour récu­pé­rer ma femme en fin de jour­née c’est une guerre de tran­chées où je compte chaque mètre gagné en direc­tion de la voiture telle­ment elle se fait arrê­ter à chaque parent croisé.

    * * *

    Plutôt que de me faire confiance, utili­sons les chiffres de l’INSEE. Ils estiment le temps de travail des profes­seurs des écoles à 44h par semaine ; et plus de 52h les premières années.

    Rapporté à 36 semaines de cours, on en vient à entre 96% et 113% d’un 35h plein temps annuel effec­tif. Pas les plus à plaindre du monde, mais pas fran­che­ment favo­ri­sés non plus.

    Bien entendu tout ça suppose que les profes­seurs des écoles ne travaillent que pendant les périodes de cours, ce qui est bien évidem­ment faux. Il faut bien les prépa­rer les années scolaires, surtout avec les programmes qui changent chaque année pendant l’été. On est donc trèèès large­ment au delà du plein temps dans tous les cas.

    On ne parle là que du temps de travail formel. Se faire alpa­guer en sortie des classes pendant 1h30 en discus­sions infor­melles avec les parents, c’est en plus de ces 44h.

    Si vous voulez critiquer le temps de travail réel d’un corps de métier, je vous propose de cibler quelqu’un d’autre.

    * * *

    Pour ce travail on les paye 24 000 € bruts annuels pour deux ans d’ex­pé­rience, 41 000 € bruts annuels en fin de carrière.

    Certes, c’est beau­coup par rapport au SMIC (17 750 € bruts) mais bien moins que la moyenne des autres BAC +5 au même niveau d’ex­pé­rience, et pour des condi­tions de travail déplo­rables. Parce que oui, on parle de diplôme BAC+5 obli­ga­toire en plus du concours.

    * * *

    Les condi­tions ne sont déjà pas faciles : allez ensei­gner dans une classe de 27 gamins, et faire en sorte qu’ils sachent lire et écrire en fin d’an­née. Si les décro­chages et arrêts mala­die s’en­chaînent dans le métier, ce n’est pas par hasard.

    La plupart de ceux qui critiquent ne tien­draient pas une année. Person­nel­le­ment je doute d’en être capable.

    Main­te­nant ce qui doit être sacré­ment lourd nerveu­se­ment ce sont les commen­taires et les lieux communs à propos de la fainéan­tise, des avan­tages ou des vacances des profs par des gens qui ne connaissent visi­ble­ment rien au métier. Ça a de quoi détruire ceux qui sont conscien­cieux, ou leur faire aban­don­ner leur moti­va­tion. Est-ce vrai­ment votre but ?

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    Exemple très person­nel : Hier ma femme devait être sur place vers 7h30 le matin. Elle a dû repar­tir vers 19h le soir. Ce n’est pas tous les jours mais c’est loin d’être la première fois non plus. Parfois à 6h30 elle est en train d’im­pri­mer des choses à la maison (ne comp­tez pas sur la photo­co­pieuse ou les outils de l’école, surtout le matin).

    Petite infor­ma­tion pour comprendre : C’est un poste à mi-temps.

    À mi-temps et à un poste précaire sans aucune garan­tie d’em­ploi ni cumul d’an­cien­neté pour son salaire, à l’an­cienne grille des insti­tu­teurs plutôt qu’à celle des profes­seurs des écoles malgré qu’on lui ai demandé son BAC+5 avant de l’ac­cep­ter. La rumeur veut même que l’Édu­ca­tion natio­nale refuse les renou­vel­le­ments au bout de 6 ans, pour éviter que les concer­nés ne puisse récla­mer une titu­la­ri­sa­tion.

    Fran­che­ment il faut avoir la voca­tion, et le courage de se farcir les bêtises de ceux qui ne connaissent rien au métier.

  • Ne lais­sez pas des tiers vous faire croire qu’il n’y a pas le choix

    Fuyez ceux qui en poli­tique disent « il faut » ou « nous n’avons pas le choix ».

    C’est vrai, à condi­tion de tenir comme acquis que les problèmes à résoudre sont ceux qu’ils ont choisi, que les prio­ri­tés sont celles qu’ils ont choisi, et que pour y arri­ver il n’y a pas d’al­ter­na­tive au modèle de société.

    Prenez du recul. Ne vous lais­sez pas confisquer les choix fonda­men­taux dont découlent les mesures qu’on vous propose.

    Choi­sis­sez le modèle de société auquel vous adhé­rez. Choi­sis­sez ce qui vous importe comme valeurs et comme prin­cipes. Ne lais­sez pas des tiers vous faire croire qu’il n’y a pas le choix.

  • J’ef­face mes traces

    Il y a désor­mais 5 ans que j’ef­face mes traces.

    J’avais fait un petit billet pour expliquer que j’ef­façais mes tweets après 48h. Je l’ai fait un temps mais via des scripts lancés à la main, pour garder le contrôle. Je l’ai fait de façon irré­gu­lière, puis plus du tout pendant un temps.

    La moti­va­tion n’a toute­fois pas chan­gée.

    Je m’y remets avec un script un peu plus évolué qui devrait à terme pouvoir être lancé en auto­ma­tique (quand j’au­rais un peu plus confiance). Désor­mais la plupart de mes tweets pour­ront être suppri­més au bout d’une dizaine de jours.

    Si j’ai le courage j’éten­drai ça à Masto­don et aux autres réseaux. Plus géné­ra­le­ment, tout ce qui n’est pas dans un espace que je contrôle person­nel­le­ment est poten­tiel­le­ment amené à dispa­raitre. Ce qui m’im­porte est géné­ra­le­ment retrans­crit sur le site que vous êtes en train de lire.

  • Des règles et des délais trop courts

    Une respon­sable contourne volon­tai­re­ment les procé­dures de dépense d’argent public. Ce n’est pas une erreur, c’est une faute : Elle le fait malgré les alertes d’au moins un de ses direc­teurs, puis ajoute d’autres irré­gu­la­ri­tés pour solder le précé­dent contour­ne­ment.

    Bref, elle dépense et contrôle un orga­nisme public en s’af­fran­chis­sant volon­tai­re­ment du mandat et des règles qu’on lui a donné.

    Ce n’est *pas* le water­gate mais ça me semble gênant pour quelqu’un a qu’on place désor­mais en posi­tion de ministre. Parce que ça concerne sa fonc­tion et son acti­vité publique, ça me semble plus gênant que ce qui a justi­fié la mise à l’écart récente de Richard Ferrand.

    Si cette affaire allait jusqu’à une condam­na­tion, l’ap­pli­ca­tion pure et dure du programme de LREM rendrait notre ministre inéli­gible. Voilà à quel point c’est sérieux.

    Je trouve très gênant qu’en France on s’ha­bi­tue telle­ment aux entorses publiques que tout beau­coup se résignent à l’ac­cep­ter, parce qu’il y a pire.

    * * *

    Ajou­tons que cet argent a servi à une opéra­tion de commu­ni­ca­tion dispro­por­tion­née, dans le milieu star­tup/entre­pre­neur tech.

    Le porte-parole du gouver­ne­ment a offi­ciel­le­ment demandé à la presse de ne pas affai­blir cette respon­sable désor­mais deve­nue ministre. Rien que ça est un scan­dale mais, depuis, la presse a montré l’opé­ra­tion a été pilo­tée en partie direc­te­ment par le cabi­net du ministre de l’éco­no­mie de l’époque, désor­mais président. C’était peu avant le début de sa campagne prési­den­tielle fondée en grande partie sur le soutien de ce milieu entre­pre­neur.

    Je ne sous-entends pas un grand-complot, juste un trop grande perméa­bi­lité et une mauvaise hiérar­chie entre le mandat public et la personne qui l’oc­cupe. Ce n’est pas le scan­dale du siècle, mais juste grave pour un respon­sable public.

    * * *

    Et non, tout ça ça ne peut pas être justi­fié par les délais trop courts.

    Pour ceux qui ne savent pas, il y a des procé­dures pour écour­ter voire sauter les appels d’offre quand une situa­tion urgente le néces­site. Ce ne sont pas les procé­dures qui ont été employées.

    Il aurait été ridi­cule de justi­fier en quoi orga­ni­ser une saute­rie pro-star­tup était suffi­sam­ment impor­tant pour légi­ti­mer une procé­dure d’ur­gence, mais au moins ça aurait été plus cohé­rent avec le discours.

    Nous n’avons pas eu une procé­dure écour­tée de façon trans­pa­rente faute d’avoir les délais. Là tout le monde a nié avoir su, nié être impliqué, jusqu’à ce que la presse publie des extraits d’email qui démontrent le contraire.

    L’ur­gence semble d’au­tant moins justi­fiable qu’à défaut d’avoir les délais, on aurait pu réduire les préten­tions à moins des 200 000 € qui justi­fient un appel d’offre public. Ça aurait été d’au­tant plus perti­nent que l’évé­ne­ment et son coût ont ensuite été décrits comme tota­le­ment dispro­por­tion­nés.

    Tout ça est un choix, un choix de croire que la loi n’est là que pour embê­ter ceux qui décident et qu’on peut s’en passer, un choix de ne pas s’em­bê­ter avec les règles que le citoyen a imposé à ceux qu’il nomme aux postes de respon­sa­bi­lité publics, un choix de ne même pas essayer.

    * * *

    Je n’at­tends pas des ministres parfaits et sans erreur passée. Ce sont des gens comme tout le monde, et je ne connais personne de parfait.

    Main­te­nant à un rôle de ce type, j’at­tends de l’hon­nê­teté dans les décla­ra­tions, un respect des règles, des précau­tions dans l’uti­li­sa­tion de l’argent public, et la capa­cité de résis­ter aux coups de force des diffé­rents cabi­nets. Visi­ble­ment on n’a rien de tout ça.

    À ceux qui pensent que ça ne justi­fient pas la démis­sion d’un ministre, j’en­cou­rage à regar­der ce qu’il se passe dans d’autres pays qui prennent les mandats publics et la démo­cra­tie au sérieux.