Catégorie : Politique et société

  • Israël, sionisme et anti­sio­nisme

    Je ne comprends même pas comment on peut être contre l’exis­tence d’Is­raël aujourd’­hui.

    Je connais trop peu les discus­sions préa­lables à la créa­tion de l’État d’Is­raël pour savoir si c’était la meilleure solu­tion. Je ne prétends certai­ne­ment pas en avoir de meilleure. Tout ça est une ques­tion d’his­to­rien. Peu importe donc, je m’oc­cupe du présent.

    Aujourd’­hui le pays existe. La nation et le peuple qui le sous-tendent aussi. Comment peut-on nier le droit à l’exis­tence de ce pays et l’au­to­no­mie de ses habi­tants ?

    Pour autant je ne recon­nais aucun droit à. Peu importe l’his­toire ances­trale, peu importe les aspi­ra­tions, les croyances ou les textes reli­gieux, je ne crois pas au droit de certains de s’ins­tal­ler sur des terres au détri­ments d’autres peuples.

    Je ne recon­nais droit ni à Israël ni aux juifs ni aux sémites dans leur ensemble de conti­nuer la colo­ni­sa­tion au delà des fron­tières d’Is­raël. On peut discu­ter de la posi­tion des fron­tières mais on peut diffi­ci­le­ment contes­ter qu’aujourd’­hui il y a encore une poli­tique d’oc­cu­pa­tion et de colo­ni­sa­tion active en partie au nom du droit aux terres ances­trales.

    Mon CNRTL chéri lui donne le temre de sionisme [mouve­ment poli­tique et reli­gieux […] visant à l’ins­tau­ra­tion d’un Foyer natio­nal juif sur la terre ances­trale].

    Aujourd’­hui le sionisme ce n’est plus l’exis­tence d’Is­raël. Ça c’est le passé. Aujourd’­hui c’est la colo­ni­sa­tion et l’oc­cu­pa­tion.

    Et donc, bien que sachant ces ques­tions très complexes et abso­lu­ment pas binaire, je refuse la colo­ni­sa­tion et l’oc­cu­pa­tion, je refuse ce qui consti­tue le sionisme aujourd’­hui.

    Ça ne remet pas en cause l’exis­tence d’Is­raël en tant que pays. Ça ne remet pas en cause l’exis­tence d’Is­raël en tant que foyer juif (je ne suis ni juif ni israë­lien, aux premiers de déci­der ce qu’ils recon­naissent ou pas comme foyer et aux seconds de déci­der souve­rai­ne­ment si leur pays conti­nue de s’as­so­cier à une reli­gion et à laquelle).

    Ça remet en cause le droit à, la légi­ti­mité divine ou ances­trale, celle qui fait passer certains au dessus des autres.

    Et donc oui, cette décla­ra­tion me gêne énor­mé­ment car elle semble m’in­ter­dire de remettre en cause le sionisme d’aujourd’­hui, celui de la colo­ni­sa­tion et de l’oc­cu­pa­tion.

    En bon apathéiste, les croyances reli­gieuses m’in­dif­fèrent. Elles ne sont pour moi ni plus ni moins légi­times ou impor­tantes que les croyances poli­tiques ou plus géné­ra­le­ment les croyances et choix de vies de chacun. Tout au plus elles s’ac­com­pagnent aussi d’une culture et poten­tiel­le­ment d’un senti­ment de nation, mais c’est aussi le cas de croyances non-reli­gieuses.

    Je n’ai jamais cru qu’un peuple ou une culture était hiérar­chique­ment au dessus d’une autre et je suis fonda­men­ta­le­ment atta­ché tant à la liberté de croyance qu’à la liberté de culte.

    Je ne vois pas en quoi refu­ser la légi­ti­mité d’un droit à des terres pour motif divin ou ances­tral (le sionisme) et les actions qui sont menées aujourd’­hui au nom de ce droit, revien­drait à avoir de la haine ou de la discri­mi­na­tion envers un peuple ou une reli­gion (l’an­ti­sé­mi­tisme).

    Par amal­game j’ai l’im­pres­sion à la fois que non seule­ment on me refuse le droit de critiquer et refu­ser les actions faites au nom du sionisme cette décen­nie, mais qu’en plus, faisant cette décla­ra­tion lors de la célé­bra­tion du vél d’hiv, on cherche à m’as­so­cier à ce passé atroce.

    Je trouve ça indigne, honteux ; plus que ça mais je n’ai pas les termes adap­tés.

    Tout le problème des termes. D’une part parce que visi­ble­ment certains asso­cient le sionisme unique­ment à la créa­tion d’Is­raël en y disso­ciant toute la poli­tique moderne qui pour­tant vient de la même aspi­ra­tion. D’autre part parce que on CNRTL chéri – toujours lui – me rappelle que le terme anti­sio­nisme a été histo­rique­ment un autre terme pour la haine des juifs.

    Je pense avoir légi­ti­me­ment le droit de pas soute­nir le sionisme, mais pas de me dire anti­sio­niste puisque ça veut dire autre chose. J’ai l’im­pres­sion d’être pris dans le même amal­game que plus haut, mais sans ici pouvoir même le contes­ter. Faut-il que je me dise contre-sioniste ? a-sioniste ?

    On me dit que je suis simple­ment contre la colo­ni­sa­tion. C’est vrai, en partie, mais ce serait nier que je suis contre le fonde­ment de cette colo­ni­sa­tion, contre l’idée même que le mouve­ment qui le fonde puisse y donner une légi­ti­mité ou un droit. Vouloir le réduire à une oppo­si­tion à la colo­ni­sa­tion c’est consi­dé­rer que le droit à la terre ances­trale ne peut être contesté, qu’il est juste­ment divin et qu’on ne peut que discu­ter de comment il est appliqué. Ça ne me va pas non plus…


    Je ferme les commen­taires. Vous êtes les bien­ve­nus à en discu­ter avec moi en privé, et ça a été fait de façon tout à fait produc­tive avec certains, mais je ne veux pas avoir à modé­rer les déra­pages d’in­con­nus, qu’ils soient d’un bord ou de l’autre, ni juste­ment donner un espace aux anti-sémites divers.

    Bien évidem­ment, comme toujours, je me réserve aussi le droit de chan­ger d’avis, de me rendre compte qu’il y a des choses que je ne connais pas qui sont à prendre en compte.

  • Profes­seur des écoles

    J’en ai marre de lire les habi­tuels poncifs sur les profes­seurs des écoles fainéants, qui ne travaillent pas et toujours en vacances. Bien loin de la réalité.

    Certes,  le temps de cours est assez faible, que ce soit en heures sur la semaine ou en semaines sur l’an­née. Ces heures ne repré­sentent cepen­dant pas la moitié du travail réel. Ajou­tez-y l’ad­mi­nis­tra­tif mais aussi les correc­tions, les prépa­ra­tions des cours et les discus­sions avec les parents. D’un coup on ne parle plus de la même chose.

    J’ai du mal à évaluer le temps de prépa­ra­tion mais je sais que quand je faisais de la forma­tion profes­sion­nelle, on comp­tait 1 jour­née de concep­tion pour 1 heure d’ani­ma­tion… et je n’avais pas à adap­ter les conte­nus au fur et à mesure en fonc­tion de l’ap­pren­tis­sage indi­vi­duel de chacun. Je serais étonné qu’on compte moins de 1h pour 1h au moins les premières années (et c’est le résul­tat de l’étude de l’INSEE aussi).

    Quant au temps de présence devant les parents, je sais que pour récu­pé­rer ma femme en fin de jour­née c’est une guerre de tran­chées où je compte chaque mètre gagné en direc­tion de la voiture telle­ment elle se fait arrê­ter à chaque parent croisé.

    * * *

    Plutôt que de me faire confiance, utili­sons les chiffres de l’INSEE. Ils estiment le temps de travail des profes­seurs des écoles à 44h par semaine ; et plus de 52h les premières années.

    Rapporté à 36 semaines de cours, on en vient à entre 96% et 113% d’un 35h plein temps annuel effec­tif. Pas les plus à plaindre du monde, mais pas fran­che­ment favo­ri­sés non plus.

    Bien entendu tout ça suppose que les profes­seurs des écoles ne travaillent que pendant les périodes de cours, ce qui est bien évidem­ment faux. Il faut bien les prépa­rer les années scolaires, surtout avec les programmes qui changent chaque année pendant l’été. On est donc trèèès large­ment au delà du plein temps dans tous les cas.

    On ne parle là que du temps de travail formel. Se faire alpa­guer en sortie des classes pendant 1h30 en discus­sions infor­melles avec les parents, c’est en plus de ces 44h.

    Si vous voulez critiquer le temps de travail réel d’un corps de métier, je vous propose de cibler quelqu’un d’autre.

    * * *

    Pour ce travail on les paye 24 000 € bruts annuels pour deux ans d’ex­pé­rience, 41 000 € bruts annuels en fin de carrière.

    Certes, c’est beau­coup par rapport au SMIC (17 750 € bruts) mais bien moins que la moyenne des autres BAC +5 au même niveau d’ex­pé­rience, et pour des condi­tions de travail déplo­rables. Parce que oui, on parle de diplôme BAC+5 obli­ga­toire en plus du concours.

    * * *

    Les condi­tions ne sont déjà pas faciles : allez ensei­gner dans une classe de 27 gamins, et faire en sorte qu’ils sachent lire et écrire en fin d’an­née. Si les décro­chages et arrêts mala­die s’en­chaînent dans le métier, ce n’est pas par hasard.

    La plupart de ceux qui critiquent ne tien­draient pas une année. Person­nel­le­ment je doute d’en être capable.

    Main­te­nant ce qui doit être sacré­ment lourd nerveu­se­ment ce sont les commen­taires et les lieux communs à propos de la fainéan­tise, des avan­tages ou des vacances des profs par des gens qui ne connaissent visi­ble­ment rien au métier. Ça a de quoi détruire ceux qui sont conscien­cieux, ou leur faire aban­don­ner leur moti­va­tion. Est-ce vrai­ment votre but ?

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    Exemple très person­nel : Hier ma femme devait être sur place vers 7h30 le matin. Elle a dû repar­tir vers 19h le soir. Ce n’est pas tous les jours mais c’est loin d’être la première fois non plus. Parfois à 6h30 elle est en train d’im­pri­mer des choses à la maison (ne comp­tez pas sur la photo­co­pieuse ou les outils de l’école, surtout le matin).

    Petite infor­ma­tion pour comprendre : C’est un poste à mi-temps.

    À mi-temps et à un poste précaire sans aucune garan­tie d’em­ploi ni cumul d’an­cien­neté pour son salaire, à l’an­cienne grille des insti­tu­teurs plutôt qu’à celle des profes­seurs des écoles malgré qu’on lui ai demandé son BAC+5 avant de l’ac­cep­ter. La rumeur veut même que l’Édu­ca­tion natio­nale refuse les renou­vel­le­ments au bout de 6 ans, pour éviter que les concer­nés ne puisse récla­mer une titu­la­ri­sa­tion.

    Fran­che­ment il faut avoir la voca­tion, et le courage de se farcir les bêtises de ceux qui ne connaissent rien au métier.

  • Ne lais­sez pas des tiers vous faire croire qu’il n’y a pas le choix

    Fuyez ceux qui en poli­tique disent « il faut » ou « nous n’avons pas le choix ».

    C’est vrai, à condi­tion de tenir comme acquis que les problèmes à résoudre sont ceux qu’ils ont choisi, que les prio­ri­tés sont celles qu’ils ont choisi, et que pour y arri­ver il n’y a pas d’al­ter­na­tive au modèle de société.

    Prenez du recul. Ne vous lais­sez pas confisquer les choix fonda­men­taux dont découlent les mesures qu’on vous propose.

    Choi­sis­sez le modèle de société auquel vous adhé­rez. Choi­sis­sez ce qui vous importe comme valeurs et comme prin­cipes. Ne lais­sez pas des tiers vous faire croire qu’il n’y a pas le choix.

  • J’ef­face mes traces

    Il y a désor­mais 5 ans que j’ef­face mes traces.

    J’avais fait un petit billet pour expliquer que j’ef­façais mes tweets après 48h. Je l’ai fait un temps mais via des scripts lancés à la main, pour garder le contrôle. Je l’ai fait de façon irré­gu­lière, puis plus du tout pendant un temps.

    La moti­va­tion n’a toute­fois pas chan­gée.

    Je m’y remets avec un script un peu plus évolué qui devrait à terme pouvoir être lancé en auto­ma­tique (quand j’au­rais un peu plus confiance). Désor­mais la plupart de mes tweets pour­ront être suppri­més au bout d’une dizaine de jours.

    Si j’ai le courage j’éten­drai ça à Masto­don et aux autres réseaux. Plus géné­ra­le­ment, tout ce qui n’est pas dans un espace que je contrôle person­nel­le­ment est poten­tiel­le­ment amené à dispa­raitre. Ce qui m’im­porte est géné­ra­le­ment retrans­crit sur le site que vous êtes en train de lire.

  • Des règles et des délais trop courts

    Une respon­sable contourne volon­tai­re­ment les procé­dures de dépense d’argent public. Ce n’est pas une erreur, c’est une faute : Elle le fait malgré les alertes d’au moins un de ses direc­teurs, puis ajoute d’autres irré­gu­la­ri­tés pour solder le précé­dent contour­ne­ment.

    Bref, elle dépense et contrôle un orga­nisme public en s’af­fran­chis­sant volon­tai­re­ment du mandat et des règles qu’on lui a donné.

    Ce n’est *pas* le water­gate mais ça me semble gênant pour quelqu’un a qu’on place désor­mais en posi­tion de ministre. Parce que ça concerne sa fonc­tion et son acti­vité publique, ça me semble plus gênant que ce qui a justi­fié la mise à l’écart récente de Richard Ferrand.

    Si cette affaire allait jusqu’à une condam­na­tion, l’ap­pli­ca­tion pure et dure du programme de LREM rendrait notre ministre inéli­gible. Voilà à quel point c’est sérieux.

    Je trouve très gênant qu’en France on s’ha­bi­tue telle­ment aux entorses publiques que tout beau­coup se résignent à l’ac­cep­ter, parce qu’il y a pire.

    * * *

    Ajou­tons que cet argent a servi à une opéra­tion de commu­ni­ca­tion dispro­por­tion­née, dans le milieu star­tup/entre­pre­neur tech.

    Le porte-parole du gouver­ne­ment a offi­ciel­le­ment demandé à la presse de ne pas affai­blir cette respon­sable désor­mais deve­nue ministre. Rien que ça est un scan­dale mais, depuis, la presse a montré l’opé­ra­tion a été pilo­tée en partie direc­te­ment par le cabi­net du ministre de l’éco­no­mie de l’époque, désor­mais président. C’était peu avant le début de sa campagne prési­den­tielle fondée en grande partie sur le soutien de ce milieu entre­pre­neur.

    Je ne sous-entends pas un grand-complot, juste un trop grande perméa­bi­lité et une mauvaise hiérar­chie entre le mandat public et la personne qui l’oc­cupe. Ce n’est pas le scan­dale du siècle, mais juste grave pour un respon­sable public.

    * * *

    Et non, tout ça ça ne peut pas être justi­fié par les délais trop courts.

    Pour ceux qui ne savent pas, il y a des procé­dures pour écour­ter voire sauter les appels d’offre quand une situa­tion urgente le néces­site. Ce ne sont pas les procé­dures qui ont été employées.

    Il aurait été ridi­cule de justi­fier en quoi orga­ni­ser une saute­rie pro-star­tup était suffi­sam­ment impor­tant pour légi­ti­mer une procé­dure d’ur­gence, mais au moins ça aurait été plus cohé­rent avec le discours.

    Nous n’avons pas eu une procé­dure écour­tée de façon trans­pa­rente faute d’avoir les délais. Là tout le monde a nié avoir su, nié être impliqué, jusqu’à ce que la presse publie des extraits d’email qui démontrent le contraire.

    L’ur­gence semble d’au­tant moins justi­fiable qu’à défaut d’avoir les délais, on aurait pu réduire les préten­tions à moins des 200 000 € qui justi­fient un appel d’offre public. Ça aurait été d’au­tant plus perti­nent que l’évé­ne­ment et son coût ont ensuite été décrits comme tota­le­ment dispro­por­tion­nés.

    Tout ça est un choix, un choix de croire que la loi n’est là que pour embê­ter ceux qui décident et qu’on peut s’en passer, un choix de ne pas s’em­bê­ter avec les règles que le citoyen a imposé à ceux qu’il nomme aux postes de respon­sa­bi­lité publics, un choix de ne même pas essayer.

    * * *

    Je n’at­tends pas des ministres parfaits et sans erreur passée. Ce sont des gens comme tout le monde, et je ne connais personne de parfait.

    Main­te­nant à un rôle de ce type, j’at­tends de l’hon­nê­teté dans les décla­ra­tions, un respect des règles, des précau­tions dans l’uti­li­sa­tion de l’argent public, et la capa­cité de résis­ter aux coups de force des diffé­rents cabi­nets. Visi­ble­ment on n’a rien de tout ça.

    À ceux qui pensent que ça ne justi­fient pas la démis­sion d’un ministre, j’en­cou­rage à regar­der ce qu’il se passe dans d’autres pays qui prennent les mandats publics et la démo­cra­tie au sérieux.

  • Ce n’est pas ce qui est en jeu en ce moment

    Je fatigue de voir les réformes du code du travail justi­fiées au nom de la complexité règle­men­taire. J’ai l’im­pres­sion qu’à force de le répé­ter depuis 10 ans, ça s’im­prime chez chacun comme une évidence, sans fonde­ment concret.

    Le code du travail est complexe. Oui. Proba­ble­ment.

    Il s’agit d’équi­li­brer un rapport de force qui ne l’est pas par nature, pour des métiers et des situa­tions très diffé­rentes les unes des autres. Oui c’est complexe, et poten­tiel­le­ment épais. L’es­sen­tiel du code lui-même tient d’ailleurs aux conven­tions collec­tives et aux diffé­rentes couches d’ex­cep­tions règle­men­taires, pas aux règle­ments aux-même.

    Je vous en prie, oubliez au moins les bêtises sur le poids ou l’aug­men­ta­tion du nombre de pages  du Dalloz. L’es­sen­tiel de l’aug­men­ta­tion au fur et à mesure des années n’est du ni au légis­la­tif ni au règle­men­taire, mais à la juris­pru­dence.

    De manière inté­res­sante, en augmen­tant la part négo­ciable au niveau des branches et surtout au niveau de l’en­tre­prise, on va juste­ment devoir démul­ti­plier la juris­pru­dence à venir. Autant dire qu’on travaille dans le mauvais sens si c’est ça la moti­va­tion.

    C’est du poin­tillisme règle­men­taire. Oui, mais ce n’est pas forcé­ment si mal.

    Nous avons des textes pour tout. Je suis certain qu’on doit trou­ver quelque part un texte qui défi­nit à quelle hauteur un sala­rié sans quali­fi­ca­tion peut monter sur une échelle, et à quelle condi­tion le baudrier devient obli­ga­toire.

    Ce n’est pas spéci­fique au code du travail. C’est tout notre droit qui est ainsi. Il doit aussi certai­ne­ment y avoir un texte qui défi­nit l’écar­te­ment maxi­mum entre les barreaux ou la résis­tance mini­male des maté­riaux en fonc­tion de la tempé­ra­ture.

    Les améri­cains sont à l’autre bout du spectre. Ils ont un droit assez court, avec des prin­cipes géné­raux, et une grande lati­tude au niveau des tribu­naux. L’es­sen­tiel se passe au niveau des juris­pru­dences.

    Les deux systèmes ont des avan­tages et des défauts. Un juriste saura proba­ble­ment mieux en faire une disser­ta­tion mais ça n’a en tout cas rien à voir avec le code du travail.

    Ce qui est certain c’est que notre droit ouvre une sécu­rité juri­dique bien plus forte. Certes on peut excep­tion­nel­le­ment outre­pas­ser un règle­ment sans le savoir mais c’est encore plus vrai si le règle­ment n’est qu’im­pli­cite.

    Au moins ici la limite est connue, codi­fiée. L’em­ployeur sait à l’avance s’il peut ou s’il ne peut pas, au lieu de se retrou­ver à argu­men­ter dans le subjec­tif en s’épau­lant de 20 juge­ments passés contra­dic­toires.

    Reti­rons la complexité inutile. Facile à dire.

    Je dis oui. Qui serait pour garder l’inu­tile ?

    Main­te­nant, même en restant entre gens construc­tifs je mets au défi de trou­ver si faci­le­ment ce qui est inutile. La plupart des règles ne sortent pas de nulle part. Elles sont toutes la consé­quence d’une situa­tion passée, où on a jugé qu’elles étaient néces­saires.

    Bref. Il y a certai­ne­ment du ménage à faire mais c’est un gros boulot de fond, sur une myriade de points de détail, à prendre un par un. Un travail qui néces­site de se rensei­gner sur l’his­toire de chacun de ces points pour comprendre la moti­va­tion à son origine, puis compa­rer à la situa­tion d’aujourd’­hui en s’ap­puyant sur les statis­tiques concer­nées, voire d’en comman­der à l’INSEE si elles n’existent pas.

    Ça va être long, et c’est une démarche tota­le­ment oppo­sée à la commu­ni­ca­tion actuelle du « allons vite et bouclons ça avant la fin de l’an­née ».

    La diffé­rence est d’ailleurs simple à faire. La complexité règle­men­taire est… règle­men­taire. Il n’y a pas besoin de loi ou d’ha­bi­li­ta­tion d’or­don­nances, pas besoin d’ac­cord entre les parte­naires sociaux. Il suffit de simples décrets.

    Si on parle de lois et d’ha­bi­li­ta­tions d’or­don­nances, c’est que ce n’est pas à ça qu’on touche. La complexité règle­men­taire est l’ex­cuse de façade.

    Simpli­fions le code du travail. Chiche.

    Sérieu­se­ment, chiche. Les indem­ni­tés de départ d’un sala­rié ? Il y a la règle géné­rale. Puis il y a la conven­tion collec­tive. Mais ça dépend géné­ra­le­ment du statut cadre, non-cadre, direc­tion. Mais certaines règles ne s’ac­tivent qu’à partir d’une certaine ancien­neté. Mais l’an­cien­neté prend parfois en compte les congés mala­die et parfois pas tota­le­ment. Et je suis certain que certaines conven­tions collec­tives ont des règles encore plus complexes.

    Bref, si on veut simpli­fier on peut déjà unifor­mi­ser, au moins sur ce qui n’est pas propre à un métier. Que les horaires de travail se gèrent diffé­rem­ment pour un boulan­ger et pour un employé de bureau, ça se conçoit. Qu’ils aient des règles de calcul diffé­rentes en fonc­tion de leur ancien­neté, c’est plus diffi­cile à moti­ver.

    Des règles claires et communes, et donc une juris­pru­dence elle-aussi plus lisible et plus faci­le­ment géné­ra­li­sa­ble… moi je suis pour. Le code sera plus léger et plus simple.

    Main­te­nant quand je regarde la dernière loi sur le travail ou ce qu’on prépare prochai­ne­ment, il n’y a aucune simpli­fi­ca­tion à l’ordre du jour. *Aucu­ne*. Le code géné­ral garde toute sa complexité, voire s’en voit ajou­ter. Par contre on veut enri­chir les cas parti­cu­liers, les capa­ci­tés de négo­cia­tion au niveau de la branche, puis celles au niveau de l’en­tre­prise.

    Chacun aura des règles diffé­rentes, dont les équi­libres seront à inter­pré­ter (surtout si on ne veut pas avoir de poin­tillisme règle­men­taire), avec le risque qu’un juge fasse primer une règle sur un autre le jour où il aura à tran­cher. La juris­pru­dence elle-même en sera complexi­fiée vu que les termes seront diffé­rents d’un texte à l’autre et qu’en plus l’ac­cord devra s’in­ter­pré­ter dans le contexte d’une entre­prise parti­cu­lière. Simpli­fier, vrai­ment ? des clous !

    Choix de société. Soyons honnêtes.

    Les futurs chan­ge­ments ne résolvent pas le poin­tillisme règle­men­taire. Ils ne simpli­fient pas la situa­tion juri­dique. Ils la complexi­fie­ront dras­tique­ment.

    Non, ce qui vient c’est d’une part une modi­fi­ca­tion de l’équi­libre au niveau du code de travail, et ensuite un chan­ge­ment de modèle sur la protec­tion des sala­riés.

    On peut être pour ou contre ces deux évolu­tions, mais soyons honnêtes et arrê­tons de nous cacher derrière les lieux communs du « code du travail trop lourd et trop complexe ». Que ce soit vrai ou pas, ce n’est pas ce qui est en jeu en ce moment.

    Ça permet­tra au moins d’abor­der le débat de fond, de savoir quelle société nous voulons, quels équi­libres nous souhai­tons. C’est bien de ça dont on parle, et certai­ne­ment pas de la complexité du code du travail.

  • Voiture écolo­gique ?

    Une voiture élec­trique c’est émis­sion zéro… mais en réalité on déplace surtout le problème au niveau de la produc­tion d’élec­tri­cité, qui elle n’est pas à zéro émis­sion.

    * * *

    En pure consom­ma­tion d’éner­gie produire l’élec­tri­cité à partir d’éner­gie fossile, la trans­por­ter, la stocker dans des batte­ries pour ensuite la renvoyer dans des moteurs c’est beau­coup de pertes.

    En même temps l’es­sence du véhi­cule ther­mique il faut aussi la trans­por­ter, et la perte est proba­ble­ment énorme là aussi. Je me doute aussi qu’une centrale ther­mique a une effi­ca­cité plus impor­tante qu’un petit moteur de voiture.

    Si on ajoute que la voiture ther­mique consomme beau­coup inuti­le­ment en ville là où au contraire l’élec­trique sait récu­pé­rer une partie de l’éner­gie lors des frei­na­ges… je suis inca­pable de savoir ce qui consomme le plus au final.

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    Ensuite vient la pollu­tion. Une maigre partie de la produc­tion élec­trique vient du renou­ve­lable. C’est peu mais ça fait une diffé­rence par rapport à l’ex­trac­tion puis le brûlage du pétrole ou du char­bon. J’ai aussi l’in­tui­tion que les centrales élec­triques à base de pétrole filtrent mieux certains rejets que les moteurs indi­vi­duels.

    De l’autre côté les batte­ries sont elles-mêmes très toxiques et pas recy­clées à l’heure actuelle. Si j’ajoute les déchets nucléaires dus à la produc­tion éner­gé­tique française, je ne sais plus vrai­ment faire le tri.

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    Je ne dois pas être le premier à me poser toutes ces ques­tions mais je manque diable­ment de chiffres. Quelqu’un a-t-il des liens ?

  • Indém­nité de fin de mandat des dépu­tés

    On commence déjà à voir quelques amis d’an­ciens dépu­tés qui pleurent sur la préca­rité de leur fonc­tion et sur la dégres­si­vité de leurs indem­ni­tés après mandat.

    Les dépu­tés ont effec­ti­ve­ment des indem­ni­tés dégres­sives mais la première année elles sont à 100% puis 70% de leur indem­nité de base, là où un sala­rié est indem­nisé à 57% de son salaire moyen.

    Il suffit de faire petit tableau pour voir que le régime est outra­geu­se­ment avan­ta­geux.

    Comparé à un sala­rié, leur indem­nité est 75% plus élevée le premier semestre. Si on raisonne en cumulé, comparé à un sala­rié, ils y gagnent 14 500 € s’ils retrouvent un emploi au bout de six mois, 18 900 € s’ils le retrouvent au bout d’un an.

    L’avan­tage se réduit la seconde année mais reste de 10 700 € au mini­mum… avant de remon­ter jusqu’à 27  500 € à la fin des trois ans puisque le député est indem­nisé une année de plus que le sala­rié dans le cas géné­ral.

    À véri­fier mais je doute aussi qu’ils passent par Pôle Emploi et les obli­ga­tions/contrôles de recherche d’em­ploi. Ça n’a l’air de rien mais ceux qui sont passés par là compren­dront combien cette diffé­rence est fonda­men­tale.

    * * *

    Le régime parti­cu­lier n’est pas non plus scan­da­leux puisqu’il n’y a ni indem­ni­tés de licen­cie­ment ni prime de préca­rité.

    Les dépu­tés célèbres, ayant une acti­vité libé­rale ou venant du service public repren­dront une acti­vité immé­diate. Un député issu du privé qui n’ayant pas une célé­brité média­tique devra se mettre à recher­cher, et ne pourra pas forcé­ment valo­ri­ser ses cinq ans hors entre­prise.

    Bref, pas forcé­ment scan­da­leux mais j’ai­me­rais tout de même qu’on arrête de les plaindre, ou de les lais­ser se plaindre, parce que c’est un peu abusé quand même.

  • 228 ans après la prise de la Bastille

    228 ans après la prise de la Bastille, nous allons réins­tal­ler les lettres de cachet. Seule diffé­rence : on est empri­sonné chez soi.

    Je n’ai pas l’im­pres­sion que tout le monde mesure la gravité de l’as­si­gna­tion à rési­dence et de la perqui­si­tion admi­nis­tra­tive.

    Il suffit d’avoir des raisons de penser que, peut-être, dans le futur, vous pour­riez atten­ter à l’ordre public. Peut-être. Dans le futur. Autant dire que l’État fait ce qu’il veut, d’au­tant que la moti­va­tion peut être soute­nue par des notes blanches non signées auxquelles les juges font toute confiance à priori.

    On envi­sage aujourd’­hui de péren­ni­ser ces mesures dans le droit commun. (Media­partLe Monde)

    Ça serait inima­gi­nable dans la plupart des démo­cra­ties. Ça devrait l’être dans la nôtre, mais personne ne se lève.

    Pire : Si on en croit les sondages, on va voter en masse et donner une assem­blée quasi entiè­re­ment affi­liée aux promo­teurs de ce projet. Hallu­ci­nant.

    Sérieu­se­ment, elles sont où les mani­fes­ta­tions ? Ils sont où tous les édito­riaux incen­diaires dans la presse ? Et vous faites quoi, vous ? Je ne vous vois pas râler non plus, à défaut de mieux. Et moi que puis-je faire ?

    Je sais que la prési­den­tielle a créé un ras-le-bol poli­tique, mais on joue là nos liber­tés fonda­men­tales, et celles de nos enfants.

    Ce n’est pas théo­rique. Ce n’est pas que pour les grands méchants terro­ristes. Ces outils ont déjà été expli­ci­te­ment utili­sés pour muse­ler des mani­fes­tants, pour éloi­gner des repor­ters. Certes ce n’est pas un empri­son­ne­ment de masse, mais ce n’en est pas plus accep­table.

    Réveillez-vous. RÉVEILLONS-NOUS !

  • Votez infor­més

    Nous avons choisi une consti­tu­tion où le président ne contrôle pas le parle­ment, où les pouvoirs s’équi­librent. Il s’agit de voter en fonc­tion de ce qu’on croit, et pas simple­ment en fonc­tion du président.

    J’as­sume tota­le­ment avoir voté pour Emma­nuel Macron mais ça n’oblige pas à signer un chèque en blanc aux légis­la­tives.

    Le président aura la majo­rité à l’As­sem­blée. C’est joué d’avance. Par contre on peut faire en sorte qu’il y ait aussi d’autres voix qui soient enten­dues, qu’il y ait des compro­mis, de la modé­ra­tion.

    Quelques liens et cita­tions en vue d’un vote informé dimanche. Chacun fait ses choix, mais Nico­las Sarokzy en aurait même envi­sagé la moitié que tout le monde aurait été dans la rue.