Auteur/autrice : Éric

  • Cop Detains Black Man for « Walking With His Hands in His Pockets »

    Cop Detains Black Man for « Walking With His Hands in His Pockets »

    L’ar­ticle vaut le détour, même si le titre décrit très bien l’in­té­gra­lité de l’his­toire.

    A Michi­gan man was stop­ped and ques­tio­ned by police last week after « nervous » passersby called 911 to report he was « walking with his hands in his pockets. »

    The cop, who also recor­ded the inci­dent, appa­rently stop­ped and ques­tio­ned the man about his hand place­ment around 4:30 p.m. on Thanks­gi­ving in Pontiac, MI.

    « You were walking by, you were making people nervous, » the cop explains in the video, which was origi­nally uploa­ded on Face­book. « They said you had your hands in your pockets. »

    Chaque situa­tion est diffé­rente, mais la France est loin d’être exclue de ce type de ségré­ga­tion.  C’est un peu moins vrai depuis que je suis à Lyon, mais à Paris je voyais quoti­dien­ne­ment des gens se faire arrê­ter pour des contrôles autour de moi : iden­tité, titre de trans­port et souvent la fouille – oui, tech­nique­ment c’est proba­ble­ment une palpa­tion de sécu­rité avec une demande insis­tante de vider les poches et ouvrir les sacs sous peine de finir en garde à vue pour appro­fon­dir le contrôle, mais ça revient un peu au même au final.

    Par une extra­or­di­naire coin­ci­dence, je n’ai jamais été ciblé. Plus préci­sé­ment je n’ai jamais fait l’objet de ma vie d’un contrôle indi­vi­duel pour mon iden­tité,et, quand j’ai été contrôlé pour mon titre de trans­port, c’est que tout le monde l’a été sans excep­tion.

    Je sais que je suis plutôt du genre passe-partout qui se tient correc­te­ment donc peu de raisons d’at­ti­rer un contrôle indi­vi­duel, mais il en va de même pour certains autres qui sont quand même contrô­lés.

    Ce doit être la même extra­or­di­naire coïn­ci­dence qui fait que c’étaient quasi­ment toujours des gens de couleur qui étaient arrê­tés  à la Garde du Nord dans la zone métro – rer. Ils devaient avoir les mains dans les poches. Il faut dire que moi ça m’ar­rive rare­ment.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC par Thomas Hawk

  • Working with desi­gners

    Working with desi­gners

    J’ai lu récem­ment le Working with desi­gners, et ça me donne l’oc­ca­sion de publier une réflexion qui me trotte dans la tête depuis long­temps :

    Vous avez besoin d’un graphiste dans votre équipe.
    En interne, à demeure.

    Oui, on peut très bien faire un peu tout sans graphisme, et trou­ver un pres­ta­taire quand il s’agit quelques fois dans l’an­née de faire une charte, un design ou une illus­tra­tion. Vous manquez juste 80% de la valeur ajou­tée.

    En fait c’est plus large que ça. On peut tech­nique­ment avoir juste un CEO, qui achète des pres­ta­tions de déve­lop­pe­ment infor­ma­tique à une SSII, délègue le cahier des charges à un cabi­net d’as­sis­tance MOA, fait distri­buer la solu­tion par des vendeurs multi­cartes.

    Ça peut même fonc­tion­ner, dans de rares cas. Vous manquez juste la valeur qui est de réflé­chir au produit, de faire des évolu­tions perma­nentes et progres­sives, de lais­ser les gens s’ex­pri­mer, colla­bo­rer, avoir des initia­tives, appor­ter de la valeur, de l’ému­la­tion… On ne parle pas que de produc­tion sur le projet, mais de parti­ci­per et enri­chir la vie de l’en­tre­prise à tous les niveaux.

    * * *

    En régime de croi­sière, pour une boite techno web, vous aurez besoin d’un déve­lop­peur back, d’un déve­lop­peur front, d’un expert produit/métier, d’un graphiste, d’un commer­cial/marke­ting, d’une personne pour le support client, et d’une personne pour gérer l’ad­mi­nis­tra­tif.

    On peut bien entendu parler aussi d’un direc­teur des opéra­tions ou d’un sys admin, mais ils ne font pas autant parti du même coeur mini­mum pour moi.

    Chacune de ces sept personnes vous appor­tera quelque chose dans l’en­tre­prise,mettra de l’huile dans les rouages, même en dehors du projet lui-même.

    *

    Au départ il n’y a pas le choix, il faut porter plusieurs casquettes et faire quelques impasses. Par la suite vous avez tout inté­rêt à ce que les rôles soient poreux, que chacun soit incité à travaillé sur plus que sa petite case.

    Si par contre vous êtes une dizaine et que vous n’avez pas une personne diffé­rente qui joue le guide pour chacun des rôles, vous ne faites pas une écono­mie, vous vous ampu­tez d’une grosse valeur ajou­tée.

    *

    Votre boite n’est pas une boite techno web ? Dans ce cas vous pouvez peut être éviter d’avoir deux déve­lop­peurs distincts, mais il faudra au mini­mum les rempla­cer par un bidouilleur infor­ma­tique à tout faire (au sens noble, si vous croi­sez le terme anglais hacker, c’est de ça qu’on parle), qui devien­dra vite indis­pen­sable.

    Dans ce cadre, j’aime beau­coup la notion « hacker in resi­dence » et « desi­gner in resi­dence » de eFoun­ders. C’est la compré­hen­sion que même parta­gés entre plusieurs projets, pour faire émer­ger de la valeur il faut des gens impliqués à demeure, au milieu des équipes.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-SA par Axel Hart­mann

  • Dans des chaus­sures de grand

    Visi­ble­ment l’af­fiche du salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil fait débat. On y verrait un reflet sexiste de mauvais gout.

    Je retrouve parfai­te­ment mon fils dans l’image du petit qui joue au grand, essayant et trai­nant les chausses de ses parents. Il a l’âge en ce moment, et si ça ne lui arrive pas tous les jours, ça reste plusieurs fois par semaine. Oh qu’il est fier quand il fait ça ! autant avec les chaus­sures de sa mère que de son père d’ailleurs.

    J’ai person­nel­le­ment pensé à ça en voyant l’af­fiche. J’ai souri, et trouvé l’image excel­lente pour un salon jeunesse qui a pour thème l’âge adulte.

    * * *

    Main­te­nant je suis forcé­ment un peu moins sensible au sexisme, n’en étant géné­ra­le­ment pas la cible. Parfois j’ai besoin qu’on m’ex­plique, qu’on me montre, avant de prendre conscience. Ici je sèche même avec les expli­ca­tions.

    Ce que je lis tourne autour du choix d’avoir mis des chaus­sures rouges à talon pour iden­ti­fier l’ave­nir de la petite fille et du fait que c’est très stéréo­typé, que ça contraint la petite fille à un rôle précon­di­tionné, sexua­lisé.

    Même en seconde lecture, j’avoue que j’ai beau­coup de mal à y lire ça.

    Pourquoi avoir utilisé des chaus­sures rouges à talon ? Aucune idée, il faudrait deman­der à l’au­teur.

    En pratique ça reste quand même une des formes les plus ingé­nieuses pour le thème. Non seule­ment l’angle permet plus faci­le­ment de voir la diffé­rence de taille entre le pied et la chaus­sure, mais on ajoute intel­li­gem­ment une montée en hauteur, ce qui illustre double­ment juste­ment le sujet : faire grand.

    Je ne prétends nulle­ment que ces deux réflexions étaient dans les réflexions de l’au­teur, mais je n’ai non plus aucun élément pour douter qu’a­près plusieurs essais il ou elle ait pu trou­ver cette illus­tra­tion comme la plus adéquate.

    Dans tous les cas je trouve qu’on va un peu vite en besogne quand on y voit forcé­ment la simple appli­ca­tion du stéréo­type sexiste « femme objet sexuel » comme avenir de la petite fille. Je le vois d’au­tant moins que mon fils se moque bien de savoir s’il essaye les chaus­sures de sa mère ou de son père.

    *

    Et pourquoi rouge ? Aucune idée, il faudrait deman­der à l’au­teur (si vous y voyez un bottage en touche, ce n’est pas par hasard : je n’ai simple­ment pas envie de présup­po­ser les raisons du choix de l’au­teur, qu’elles soient conscientes ou incons­cientes).

    Peut-être est-ce effec­ti­ve­ment parce que les talons sont stéréo­ty­pés avec une image de désir, donc asso­cié au rouge (même si dans les faits ils sont rare­ment de cette couleur).

    Peut-être est-ce aussi plus basique­ment la couleur la plus basique pour faire ressor­tir un élément dans un crayonné noir blanc et bleu. On voit d’ailleurs que plus que la couleur, ce qui diffé­ren­cie les chaus­sures est qu’il s’agit du seul élément « rempli » de couleur ; il y a donc bien une inten­tion de mise en avant forte.

    Bref, je n’en sais rien, et il y a proba­ble­ment des deux, mais je suis loin de sauter sur la conclu­sion de sexisme ou de sexua­li­sa­tion, même invo­lon­taire.

    * * *

    Ce qui me gêne c’est qu’à jouer les inter­prètes du pourquoi de ces choix, on aurait pu avoir la même conclu­sion avec tout à fait d’autres chaus­sures.

    • Des chaus­sures d’homme ? Mais pourquoi être grand serait-il forcé­ment une ques­tion d’homme, c’est infan­ti­li­ser les femmes
    • Des chaus­sures de chan­tier type Cater­pillar ? Malheu­reu­se­ment, même si elles sont mixtes, le rendu est proche de la cari­ca­ture de chaus­sure homme et aurait encore plus renforcé l’idée grand = homme qui travaille
    • Des chaus­sons ? Horreur, l’ave­nir de la petite fille est-il forcé­ment d’être mère au foyer avec des chaus­sures d’in­té­rieur ?
    • Des chaus­sures neutres et plates types tennis de toile ? Pourquoi lui nier la possi­bi­lité d’avoir des chaus­sures femme, nier son sexe ?

    Je cari­ca­ture bien évidem­ment, mais le pire c’est qu’en le faisant je me demande si je n’ai effec­ti­ve­ment pas déjà vécu ces réac­tions à d’autres occa­sions.

    * * *

    Est-ce à dire que l’af­fiche n’est pas sexiste ? Je n’en sais rien. Tout simple­ment. Je ne vois pas ce sexisme ici mais je veux aussi bien croire qu’il puisse exis­ter sans que je ne le vois ; le contexte et l’his­to­rique social ont forcé­ment un poids qu’il n’est pas toujours simple à éviter. Je trouve de toutes façons plutôt sain qu’on puisse avoir ce débat, que des personnes puissent aler­ter sur du sexisme qui leur appa­rait.

    C’est juste que j’en ai lu ici ne m’a pas convaincu. J’ai l’im­pres­sion qu’on sur-inter­prète les conno­ta­tions asso­ciées au choix des chaus­sures à talon quasi­ment autant qu’on sur-inter­pré­tait les impli­ca­tions et chaque mot ou tour­nure de phrase lors des analyses de texte en prévi­sion du BAC au lycée. L’au­teur doit avoir bien mal, ici comme au lycée.

    N’ou­blions pas : Quand on prête arbi­trai­re­ment des inten­tions à d’autres, et encore plus quand on prête des influences incons­cientes liées au cadre social, on peut prou­ver n’im­porte quelle thèse à partir de n’im­porte quel fait, ou de son contraire.

    Si quelqu’un y voit autre chose, ou que j’ai manqué une image, une conno­ta­tion, une histoire, n’hé­si­tez pas à me le signa­ler en commen­taire, c’est en fait surtout pour ça que je publie ce billet.

  • Date dans les API : Préci­ser l’heure et le déca­lage horaire

    Date dans les API : Préci­ser l’heure et le déca­lage horaire

    – Cette méthode donne la date et l’heure de publi­ca­tion
    – L’heure dans quel réfé­ren­tiel ? c’est l’heure UTC ?
    – Non, nous avons des conte­nus français, c’est l’heure française
    – OK, je suppose qu’on parle de la métro­pole et de l’heure de Paris donc. Comment gérez-vous les chan­ge­ments d’heure légale ? Si je prends comme réfé­rence 2h30 du matin le 26 octobre 2014, je risque d’opé­rer certains trai­te­ments deux fois, ou dans le désordre.
    – Pas de problème, nous livrons en réalité à des heures program­mées et il n’y a norma­le­ment pas de livrai­son entre 1h et 3h du matin, donc le cas n’ar­ri­vera pas.

    Je brode un peu mais la conver­sa­tion a déjà eu lieu, plus d’une fois dans ma vie profes­sion­nelle. Je passe sur ceux qui ne compre­naient pas qu’une date devait être soumise aux fuseaux horaires, parce que c’est en réalité toujours une heure (minuit précises) et que le 26 octobre n’est pas le 26 octobre partout en même temps.

    Règle simple :
    Toujours préci­ser l’heure et le fuseau horaire quand on donne une date dans un échange infor­ma­tique.

    On peut argu­men­ter que trans­mettre toutes les heures en UTC pour­rait suffire, et que le fuseau horaire est super­flu. En pratique ce serait oublier une autre règle essen­tielle : « tout ce qui peut être mal inter­prété le sera ». Un jour, quelqu’un pren­dra votre date et l’uti­li­sera comme une date locale et pas une date UTC. Promis, garanti. OK, ça ne sera pas de votre faute, mais si vous voulez que ça fonc­tionne et pas simple­ment renvoyer les respon­sa­bi­li­tés, il va falloir préci­ser.

    Seule solu­tion : Préci­ser le fuseau horaire ou le déca­lage horaire. J’irai même plus loin : Le préci­ser direc­te­ment dans la date elle-même, pour qu’il ne puisse pas être ignoré à la lecture et qu’il ne puisse pas être un simple para­mètre par défaut à l’en­voi qu’on reco­pie sans y penser. La conven­tion de base sur les échanges Inter­net c’est la section 5.6 de la RFC 3339.

    Exemples simples :
    2014–10–26T02:30:59+01:00 et 2014–10–26T01:30:59Z

    L’avan­tage de cette syntaxe est qu’il existe des solu­tions pour la lire dans tous les langages de program­ma­tion, et que toutes ou presque sauront gérer le déca­lage horaire correc­te­ment. Il faut être sacré­ment tordu pour tenter de l’ana­ly­ser soi-même et donc risquer d’igno­rer la partie liée au déca­lage horaire.

    Même à l’écri­ture, préci­ser expli­ci­te­ment le déca­lage horaire va gran­de­ment limi­ter les erreurs d’inat­ten­tion ou d’in­com­pré­hen­sion liées aux ques­tions de fuseaux horaires.

    De toutes façons il faut utili­ser UTC

    Rien ne vous impose pour autant d’ac­cep­ter des heures avec n’im­porte quel déca­lage horaire. L’idée est unique­ment d’avoir une syntaxe expli­cite sur le réfé­ren­tiel utilisé.

    Si vous souhai­tez impo­ser des heures UTC, faites-le. Tout ce que je vous demande c’est d’uti­li­ser une syntaxe expli­cite à ce niveau, et de reje­ter en entrée les dates qui ne seraient pas elles aussi expli­cite quant au déca­lage horaire.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par John Britt

  • Faites passer la synthèse

    Faites passer la synthèse

    Je suis fati­gué par cette mode de plus en plus courante de vouloir juger sur la base de synthèses d’une demie page ou de réunions équi­va­lentes.

    Non, tout n’est pas résu­mable en quelques minutes, ou même en une heure. La synthèse permet de comprendre les conclu­sions, de savoir s’il y a lieu de s’y inté­res­ser. Elle ne remplace pas les travaux eux-même.

    Si vous souhai­tez contes­ter les conclu­sions ou ne pas les suivre, alors impliquez-vous suffi­sam­ment pour discu­ter du fond des choses : faites l’ef­forts de vous impliquer dans les travaux, de mener les recherches néces­saires, de consul­ter les docu­ments liés et de parler avec les gens concer­nés.

    Oui, ça prend du temps. Il n’y a aucune honte à faire l’im­passe, à condi­tion de s’abs­te­nir de juger le sujet et en s’in­ter­di­sant de se forger sa propre opinion en atten­dant, ou à défaut en suivant les recom­man­da­tions de ceux qui ont mené les travaux en profon­deur. Toute autre atti­tude est d’une préten­tion critique.

    Je n’ai jamais cru à la perti­nence du direc­teur qui se garde les déci­sions en délé­gant à des tiers des études dont il n’écou­tera au mieux que la synthèse.  Je ne crois pas plus à celle du citoyen qui vote ou forge ses idées poli­tiques sur des sujets complexes – ils le sont tous – à partir de vidéos de deux minutes, de flyers ou de meetings de campagne.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC à partir d’une photo de Vasile Hurghis

  • Nom et iden­tité

    Nom et iden­tité

    Qu’al­lez-vous faire de mon nom et de mon prénom ? Pourquoi me les deman­der ? Savoir qui je suis ? et pourquoi faire ?

    Mais… qui suis-je ?

    Qu’ap­por­tera de savoir si mes parents m’ont nommé Éric à la mairie à ma nais­sance plutôt que Ahmed ou John ? Ce que je dis est-il moins perti­nent ? mes réfé­rences moins utiles ? mon avis moins impor­tant ?

    Il y a déjà erreur dans l’énoncé. Vous ne voulez pas connaitre mon iden­tité : Vous voulez vous rassu­rer avec un nom civil vrai­sem­blable. Un faux Paul Bismuth sera pris avec bien moins de pincettes que ce qu’é­crira un vrai Paci­fique Noël.

    Ce qui est amusant, Paul Dupont, c’est que vous êtes peut être bien plus anonyme vous avec votre iden­tité civile que moi avec mon iden­tité tronquée ou mon pseu­do­nyme. Éton­nant, non ?

    Votre nom et votre prénom n’ap­portent rien pour vous connaitre, savoir qui vous êtes réel­le­ment. Vous êtes un nom parmi 70 millions d’autres, voire plus. Votre iden­tité civile n’ap­por­tera aucun élément perti­nent à quiconque, si ce n’est peut être des préju­gés liés à l’ori­gine de votre nom.

    Je n’ose penser que ce sont ces pré-jugés qui vous inté­ressent. Alors regar­dons. Même avec mon nom tronqué ou mon pseu­do­nyme, vous savez proba­ble­ment qui je suis, c’est à dire quelles sont mes prises de posi­tion et mes écrits passés. Vous pouvez me les attri­buer, me les repro­cher, m’iden­ti­fier à eux.

    Cette iden­tité qui vous parait anonyme est en fait bien plus « qui je suis » que n’im­porte quel nom qui aurait pu ou pas m’être attri­bué à la nais­sance : Un tour sur les moteurs de recherche pour­rait même vous en apprendre plus sur moi que vous n’en connais­sez sur le présen­ta­teur du jour­nal télé­visé à qui vous ne repro­che­riez jamais son anony­mat. Il y aura poten­tiel­le­ment mon iden­tité civile dans le lot, mais pas que, pas forcé­ment, et ce n’est pas ça qui vous appor­tera grand chose de toutes façons.

    En fait, il est même possible que vous puis­siez en savoir plus sur moi à partir de cette iden­tité que vous quali­fiez d’ano­nyme, que vos inter­lo­cu­teurs n’en sauront jamais sur vous à partir de votre « vrai nom ». N’y a-t-il pas là matière à réflé­chir ?

    Penser autre­ment

    Votre boulan­gère ne vous a proba­ble­ment jamais demandé votre carte d’iden­tité, peut être même pas votre prénom. Il est tout à fait possible que certains collègues de bureau ou amis proches n’ar­rivent même pas à épeler voire à se rappe­ler votre nom de famille sans regar­der leur carnet d’adresse.

    Le cais­sier ne connait pas votre prénom. Avez-vous l’im­pres­sion d’être anonyme pour autant ? Ne payez-vous pas pour­tant avec votre carte bancaire ? N’avez-vous pas une carte de fidé­lité qui vous iden­ti­fie plei­ne­ment ? Le vigile ne vous aurait-il pas reconnu si vous aviez fait du grabuge la dernière fois ?

    Force est de consta­ter que les ques­tions d’iden­tité sont complexes, et qu’in­diquer un état civil en regard d’un écrit web ne corres­pond aucu­ne­ment à une approche de solu­tion.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-SA par Thomas Leth-Olsen

  • Ensei­gnants gratuits, promo­tion excep­tion­nelle

    Ensei­gnants gratuits, promo­tion excep­tion­nelle

    J’en­tends encore autour de moi les gens râler sur ces ensei­gnants trop payés, qui font toujours grève et qui sont toujours en vacances. Je rage parce que pas un n’ac­cep­te­rait les condi­tions de travail des profes­seurs des écoles.

    Sans salaire depuis la rentrée, des ensei­gnants reçoivent des bons alimen­taires

    Ce n’est que le titre de l’ar­ticle de presse, mais le contenu ne vient nulle­ment modé­rer le sens initial. Après deux mois sans salaire, on leur fait même l’in­sulte de leur donner des bons alimen­taires. Et encore, c’est au profes­seur de s’hu­mi­lier à quéman­der pour les obte­nir.

    Ils ont réussi le concours, sortent d’un diplôme BAC+5 – oui, il faut avoir un master pour ensei­gner désor­mais – souvent jeunes diplô­més donc sans le sou. Vous en connais­sez beau­coup qui dans ces condi­tions conti­nue­raient à travailler après plus de deux mois sans salaire sur un nouveau job ? Vous le feriez ?

    Même quand tout fonc­tionne, le salaire n’est jamais versé à plein le ou les premiers mois. C’est dans le proces­sus « normal » de l’édu­ca­tion natio­nal : Le profes­seur reçoit un simple acompte, et le solde au mieux fin octobre.

    Quant aux congés ou aux horaires soit-disant tranquilles, je vous laisse lire la petite histoire de septembre dernier – lisez-la, vrai­ment. Oh, et le sala­rié trop payé n’est en réalité payé que 2000 € bruts par mois (envi­ron 1550 € net), pour un BAC +5 une fois le concours en poche. Quant à la sécu­rité de l’em­ploi, 13 ans d’exer­cice avec une bonne nota­tion ne garan­tit pas une place de titu­laire.

    Pensez-y avant de vous moquer de la prochaine grève qui parle de mauvaises condi­tions de travail.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Jeyheich

  • Recom­man­da­tions pour une liseuse à Noël 2014

    Recom­man­da­tions pour une liseuse à Noël 2014

    Une liseuse pour Noël ? oui mais laquelle ?

    –> Allez plutôt voir la nouvelle recom­man­da­tion pour l’hi­ver 2015 – 2016 <–

    Lire partout, souvent

    Votre amour lit des romans, des nouvelles, des séries, essen­tiel­le­ment du texte. Le numé­rique lui permet­tra de lire dans les trans­ports, dans la salle d’at­tente de votre méde­cin, sur un banc public, ou chez lui sur votre canapé et dans votre lit.

    pb_sense_kenzoIl lui faut quelque chose qui tient dans la poche, avec un écran qui reste lisible en pleine lumière et une auto­no­mie longue sans rechar­ger. L’encre élec­tro­nique est indis­pen­sable, oubliez les tablettes LCD.

    Le cadeau sympa est la Pocket­book Sense. Elle est vendue dans une édition limi­tée siglée Kenzo, accom­pa­gnée d’une couver­ture inté­grée avec un rendu façon cuir croco­dile fran­che­ment sympa. En alter­na­tive vous aurez les Aura et Aura H2O de chez Kobo.

    Laquelle ?

    Les trois sont de bonnes liseuses, avec les mêmes clas­siques : design sympa, tactiles,  bon contraste de lecture, possi­bi­lité de sur-éclai­rage, ouver­ture des livres au format epub avec ou sans drm, un diction­naire inté­gré, et librai­rie embarquée qui donne accès à l’in­té­gra­lité du cata­logue français dispo­nible.

    La Sense est ma préfé­rée, l’édi­tion limi­tée Kenzo est superbe pour un cadeau : la couver­ture est sympa, la griffe Kenzo discrète, et la couver­ture vrai­ment collée à la liseuse au lieu de rajou­ter une sorte de sur-embal­lage comme partout ailleurs. La Sense a aussi l’avan­tage de garder des boutons physiques pour tour­ner les pages en plus de l’écran tactile. Ça rassure au départ pour ceux qui viennent du papier et ça permet de fonc­tion­ner l’hi­ver avec des gants pendant les trans­ports. Les plus tech­no­philes y trou­ve­ront une synchro­ni­sa­tion des livres avec leur compte Drop­box : appré­ciable même si pas indis­pen­sable.

    La Aura simple est très proche de la Sense, même format compact malgré l’écran clas­sique de 6″. Une superbe promo­tion pour Noël la met à 100 €, mais une fois que vous ajou­tez la couver­ture – indis­pen­sable – vous remon­tez au même prix que la Sense by Kenzo sans avoir le côté « inté­gré » de la couver­ture. Le choix Aura se révè­lera surtout perti­nent si ache­ter des livres en anglais direc­te­ment depuis la liseuse est indis­pen­sable pour vous (sinon vous pour­rez toujours le faire depuis le web).

    Quant à la Aura H2O, on monte signi­fi­ca­ti­ve­ment en gamme. Ça se ressent à la lecture, mais aussi sur le porte­feuille : Plus de 200 € si on ajoute la couver­ture – et à ce prix, qui a envie de risquer une rayure ? Elle a aussi un format un peu plus grand, inté­res­sant pour lire, mais qui devient trop large pour pas mal de poches. Plus quali­ta­tive, mais du coup un peu moins mobile.

    Et le reste ?

    Je décon­seille les liseuses bas de gamme premier prix. On sacri­fie la qualité de l’écran, le sur-éclai­rage, et l’ex­pé­rience de lecture s’en ressent. Au final ça aura tendance à rester sur l’éta­gère, voire à faire reje­ter la lecture numé­rique.

    Évitez aussi les Kindle. Même si la Paperw­hite est un excellent maté­riel, vous entrez dans un envi­ron­ne­ment qui s’ap­pa­rente à une prison dorée : Vous ne pour­rez pas sortir vos livres de l’en­vi­ron­ne­ment Kindle, ni impor­ter la plupart des livres ache­tés ailleurs. Le jour où vous voudrez sortir de l’éco­sys­tème Amazon, vous devrez aban­don­ner tous vos achats. Inac­cep­table.

    Litté­ra­ture, dans le lit et le canapé

    Votre amour lit à domi­cile, sur le canapé ou dans le lit. Pas vrai­ment besoin de se dépla­cer avec la liseuse en poche. Vous pouvez garder la recom­man­da­tion précé­dente – qui restent très bien – ou inves­tir un peu plus pour des modèles plus grand format et plus quali­ta­tifs.

    0190000007374577-photo-pocketbook-inkpad (1)Celle que je vous conseille est la Pocket­book Inkpad. Elle a une très haute réso­lu­tion (250 point par pouce, c’est à dire mieux que les liseuses « haute défi­ni­tion » habi­tuelles) et une surface d’af­fi­chage équi­va­lente à un livre grand format (8″). Bref, elle avance là où c’est le plus impor­tant : la qualité de lecture. Elle aura sinon tous les avan­tages de la Sense citée plus haut, plus la sortie audio qui permet entre autres les mp3 et la synthèse vocale (text to speech).

    La seule autre que je recom­mande est la Kobo Aura H2O : écran à fort contraste et très haute défi­ni­tion, elle gagne aussi une résis­tance à l’eau (notez le signe « H2O », sans ce dernier il s’agit de modèles de taille ou de géné­ra­tion/qualité diffé­rente). Elle est par contre d’une taille plus réduite (6,8″ pour la H2O contre 8″ pour la Inkpad). À vous de voir si vous privi­lé­giez la surface de lecture ou la taille pour le range­ment.

    Et le reste ?

    Les grands formats sont encore rares, et le choix plus que limité. La seule alter­na­tive crédible est la Cybook Ocean. C’est une 8″, mais avec un écran basse densité produit par un concur­rent de e-ink (l’usine qui four­nit l’en­semble des écrans à encre élec­tro­nique haute qualité, sur toutes les liseuses citées jusqu’à présent). Elle n’est pas vrai­ment moins chère de toutes façons.

    N’hé­si­tez toute­fois pas à jeter un oeil aux formats 6″ clas­siques décrits plus haut. La lecture y reste tout à fait confor­table. Pour lire dans le lit j’au­rais même tendance à conseiller un format 6″ qui tient faci­le­ment en main (taille d’un livre de poche).

    Bandes dessi­nées, jeunesse, et hors litté­ra­ture (cuisine, photo)

    Pour les illus­trés il vous faudra quit­ter les liseuses à encre élec­tro­nique. Il y a bien eu de l’encre élec­tro­nique couleur chez Pocket­book mais vous n’au­rez pas l’éclat attendu pour appré­cier la lecture.

    Vous pouvez cher­cher dans les tablettes LCD clas­siques, pas forcé­ment spéci­fiques au livre. Privi­lé­giez un écran de très bonne qualité et haute réso­lu­tion. N10_Overview_bottom-1200 (1)

    Pour de la BD belge clas­sique, préfé­rez une tablette 9 ou 10″ qui aura la surface utile pour ne pas avoir à zommer sur chaque case.  La Nexus 9 a de loin le meilleur rapport qualité/prix. Oui, ça fait presque 400€ mais ça les vaut. Plus petit ça sera diffi­cile pour tout ce qui n’est pas litté­ra­ture.

    Côté concur­rence il y a les les iPad, mais ça vaut encore plus cher. Fuyez les tablettes premier prix (disons celles qui valent moins de 60/50% des prix que je vous donne) et faites atten­tion aux autres (le prix ou une marque connue ne sont pas toujours révé­la­teurs d’un contenu de qualité).


    Si vous le souhai­tez, vous pouvez aussi vous aider du compa­ra­tif auto­ma­tisé : Il vous construit une recom­man­da­tion à partir de vos propres critères

    Rappel : J’ai un emploi partie prenante dans le domaine de la distri­bu­tion de livre numé­rique. Je ne prétends donc pas être objec­tif, mais je ne fais que des conseils que je soutiens person­nel­le­ment, pas de la publi­cité. À vrai dire c’est juste­ment parce que je crois en une solu­tion que je travaille avec, pas l’in­verse. Ces recom­man­da­tions sont données à titre pure­ment person­nel, juste­ment parce que j’ai eu la chance de tester moi-même les diffé­rents modèles que je recom­mande.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-ND par Saad Sarfraz Sheikh

  • Raising capi­tal in the US vs EU: a biased compa­ra­tive study

    Raising capi­tal in the US vs EU: a biased compa­ra­tive study

    Si vous enten­dez de gros chiffres à propos de star­tup, sauf événe­ment excep­tion­nel, ça se passe ailleurs qu’en France, voire qu’en Europe.

    US funds invest in case your company succeeds, whereas in Europe, they invest because your company succee­ded.

    Another way to phrase this? The biggest fear for a US inves­tor is to miss out on a big hit. When Peter Thiel was asked what his worst invest­ment was, he replied “not (doing) the Series B round of Face­book”. See the diffe­rence? Instead of going over the many invest­ments he made that turned out to be failures, he’s blaming himself for a risk not taken.

    Et ça cadre très bien avec ce que j’ai pu voir. Ici on inves­tit à minima, pour alimen­ter un busi­ness qui a déjà prouvé son fonc­tion­ne­ment, ou pas loin, avec des busi­ness plan à 3 ans. Là bas ils analysent plutôt la capa­cité de l’équipe à créer quelque chose, et la soli­dité du projet.

    At the seed stage, US inves­tors know that spen­ding weeks analy­zing the ‘total addres­sable market’ (or TAM) is a waste of time. The most inter­es­ting compa­nies are those that expand their TAM as they go. For example, before Google came along, the market for PPC SERP ads was non-existent; today it’s a multi-billion dollar market with a clear leader.

    But that doesn’t deter Euro­pean inves­tors from reques­ting a full deck, inclu­ding a three-year busi­ness plan as a prerequi­site to any form of conver­sa­tion. If your path to profi­ta­bi­lity is not already proven, you will have a hard time getting as much as a phone call.

    Diffé­rence de culture, mais pas que. Le reste du billet vaut aussi la lecture.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA à partir d’un travail de Marc Thur­man

  • Le jardin ferme, il n’était pas ouvert

    Le jardin ferme, il n’était pas ouvert

    J’ai parfois du mal à faire passer l’in­for­ma­tion qu’a­che­ter du livre numé­rique sur Kindle est aber­rant. Micro­soft (via Nokia) vient de nous donner un excellent exemple :

    Les lecteurs qui ont encore l’ap­pli­ca­tion Nokia Reader sur leur télé­phone ont 45 jours pour télé­char­ger leurs livres en local sur l’ap­pli­ca­tion. Si le stockage du télé­phone est déjà plein, il faudra faire des choix, effa­cer des choses.

    Ensuite ils pour­ront lire… jusqu’à ce que le télé­phone soit hors d’usage, remplacé, ou simple­ment mis à jour vers une version d’OS incom­pa­tible avec l’ap­pli­ca­tion de lecture. Ensuite les livres ache­tés seront défi­ni­ti­ve­ment perdus, sans recours.

    Les autres ? ceux qui ont tempo­rai­re­ment désins­tallé l’ap­pli­ca­tion, ceux qui n’ont plus de place sur le stockage du télé­phone, ceux qui ne verront pas l’email reçu dans la boite à spam, ceux qui utilisent au jour le jour autre chose que leur Lumia pour lire ? Ils ont déjà tout perdu. Tant pis.

    Une ques­tion d’en­vi­ron­ne­ment fermé

    À cause d’une DRM spéci­fique à Nokia, les livres ne pour­ront pas être trans­fé­rés ailleurs. Le tout est verrouillé. C’est typique­ment le problème que je reproche à l’en­vi­ron­ne­ment Kindle.

    Samsung, Sony, Micro­soft sont des gros acteurs, qui aurait prédit l’ar­rêt de leurs solu­tions ebook ? À son époque, Yahoo! avait aussi arrêté son service de musique en ligne. Quand j’étais en école Google n’exis­tait pas et personne n’ima­gi­nait la fin d’Al­ta­vista, d’ICQ, d’AOL ou de Yahoo!

    Nook (un des services phare de livres numé­riques aux États Unis) est lui même dans une situa­tion diffi­cile à prévoir. Micro­soft a préféré recom­man­der Kindle comme alter­na­tive à Nokia Reader alors qu’il détient 300 M$ dans la solu­tion Nook, pour­tant large­ment quali­ta­tive.

    Parier que le livre numé­rique sera toujours stra­té­gique chez Amazon c’est s’en­ga­ger sur un terrain abso­lu­ment impré­vi­sible. Quand le jour tant redouté arri­vera, tout sera perdu. Pas parce qu’A­ma­zon est une mauvaise société – leur service est même excep­tion­nel – mais unique­ment parce qu’ils verrouillent tout dans un envi­ron­ne­ment proprié­taire fermé.

    D’ailleurs il n’y a aucun besoin d’ima­gi­ner le pire. Il suffira qu’un jour vous ayez envie d’al­ler à la concur­ren­ce… Vous ne pour­rez y trans­fé­rer aucun livre sous DRM Kindle.

    Une prison dorée, c’est pratique, agréable, mais c’est une prison quand même. Plus on y reste, plus il est coûteux d’en sortir.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA à partir d’un travail de Antoine Walter