Auteur/autrice : Éric

  • Usure mentale de la non-qualité

    Usure mentale de la non-qualité

    Vous pouvez argu­men­ter à propos du retour sur inves­tis­se­ment de haus­ser un peu le niveau de qualité – je l’ai fait aussi – mais il faut avouer que sauf à connaitre le futur, ces chiffres auront la même fiabi­lité et la même préci­sion que l’ho­ro­scope de l’an­née dernière.

    Tout au plus peut-on tracer une ligne en dessous de laquelle le manque de qualité rend vrai­ment le travail diffi­cile, mais en réalité nous cher­chons tous à mettre la barre bien plus haut.

    Le coût de non-qualité est en fait bien plus basique. Il se cache dans la fatigue mentale, l’épui­se­ment, mais aussi la baisse d’en­vie, de moti­va­tion, de résis­tance à la frus­tra­tion ou de celle aux petits accrocs trop fréquents du quoti­diens…

    Le terme anglais est burn-out, et c’est bien plus une ques­tion de qualité et de bien-être que de temps de travail ou de pres­sion.

    C’est Nico­las qui le forma­lise le mieux :

    Ces petites erreurs aux grandes consé­quences font de plus en plus mal. Autant sur les personnes (le moral, l’es­time de soi, la frus­tra­tion) que sur le busi­ness (image, etc.). […] Je crois que ces galères de coûts de non-qualité et l’usure sur nos corps et nos esprits sont trop souvent sous-esti­mées.

    La ques­tion est : Où avez-vous envie de travailler ? Où vos colla­bo­ra­teurs ont-ils envie de travailler ? Combien de temps tien­dront-ils avant d’être usés et rési­gnés, sans moti­va­tion ni initia­tive ? Qui voulez-vous atti­rer ?

    Cet aspect est trop souvent oublié dans la logique produc­ti­viste du retour sur inves­tis­se­ment, pour­tant ce sont les ques­tions essen­tielles : À côté de l’im­por­tance du dyna­misme de l’équipe, tout gain de produc­ti­vité lié à une baisse des exigences revient à travailler à la bougie pour écono­mi­ser l’élec­tri­cité.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY par Intan­gi­bleArts

  • Malgré-moi

    Malgré-moi

    Je sais que j’ai parfois le regard qui plonge, malgré-moi. Je suis conscient que ça peut être gênant pour la personne en face, et du coup ça l’est proba­ble­ment au moins autant pour moi.

    En être conscient n’aide pas tant que ça. Essayer acti­ve­ment d’évi­ter quelque chose sous la vue, c’est comme essayer de ne pas penser à une idée. Plus on essaye, moins on y arrive. À force l’es­prit ou le regard finissent par faire des aller-retours et l’es­prit n’est plus occupé que par ça. Bref, quand je m’en rends compte, non seule­ment ça n’ar­range rien mais en plus ça rend diffi­cile de suivre quoi que ce soit d’autre.

    Ça ne veut pas dire que je n’es­saye pas de corri­ger, mais je sais mes résul­tats large­ment impar­faits. Ce d’au­tant que je ne m’en rends parfois simple­ment pas compte.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-SA par Madi2i

  • [Photo] D’autres photos de mon chemin

    Réel
    J’avais publié quelques photos de mes premiers pas. J’en ai supprimé quelques unes, j’en ai retra­vaillé une ou deux. Il manquait surtout la seconde série, que je vais donc publier au fur et à mesure, en atten­dant de travailler avec quelqu’un d’autre.

    En voici la première (les autres ne seront proba­ble­ment pas annon­cées ici, et encore moins sur Twit­ter, pensez à vous abon­ner direc­te­ment là-bas).

    Comme précé­dem­ment, tout feed­back franc et appro­fondi qui me permet d’avan­cer sera plus qu’ap­pré­cié, qu’il soit ici, sur place ou par email.

    Sur Flickr, pensez à désac­ti­ver le Safe Search dans vos para­mètres pour voir plus que la première photo.

  • Non Amazon n’est pas moins cher (sur le livre)

    Je suis toujours profon­dé­ment frus­tré quand on me dit ache­ter ses livres sur Amazon « parce que c’est moins cher ».

    En France les livres sont vendus partout au même prix, celui fixé par l’édi­teur. Ce prix unique est garanti par la loi. Même les promo­tions, prix cassés et autres livres gratuits sont déci­dés par l’édi­teur et appli­cable chez tous les commerçants au même moment, sans excep­tion. Tout au plus les librai­ries peuvent appliquer une réduc­tion de 5%, ce qu’elles font quasi­ment toutes au moins sous forme de carte de fidé­lité mais qui ne paiera même pas une place de cinéma à la fin de l’an­née.

    Mais c’est certain que ce type de présen­ta­tion avec un « prix Amazon » est très trom­peur :

    Donc non, Amazon n’est pas moins cher que la FNAC, que votre super­mar­ché, ou que le site de votre libraire. Pas sur le livre français, ni papier ni numé­rique.

  • Faut-il éteindre la CNIL ?

    Sérieu­se­ment, on envi­sage de faire aujourd’­hui exac­te­ment ce qu’on voulait empê­cher en créant la CNIL : Croi­ser tous les fichiers publics, spéci­fique­ment ceux qui tracent des ques­tions sociales (retraite, famille, mala­die, emploi, mini­mums sociaux).

    On avait déjà croisé toute une série de fichiers poli­ciers, accepté d’avoir eu pendant des années nombre de fichiers poli­ciers offi­ciels non décla­rés, avec des infor­ma­tions obso­lètes et souvent fausses (STIC, je pense à toi), parfois tota­le­ment illé­gales (traçage des rom et gens du voyage). Au mieux on a fait passé des lois quelques années après pour les légi­ti­mer. Au mieux on a eu droit à un entre­fi­let dans la presse.

    Côté État, la CNIL n’a de toutes façons qu’un rôle consul­ta­tif dans nombre de cas. Le pire c’est quand son président vote au Sénat pour des projets que la CNIL réprouve. Joie.

    Côté collec­ti­vi­tés, la vidéo surveillance exces­sive qui ne respecte ni la propor­tion­na­lité ni la légis­la­tion sur les règles d’ex­ploi­ta­tion est plutôt la norme que l’ex­cep­tion, quand elle est décla­rée. Au pire on corri­gera quand on se fera taper sur les doigts.

    Côté privé le nombre de fichiers non décla­rés ou hors la loi est juste phéno­mé­nal. Le trai­te­ment des données person­nelles est fait quasi­ment sans limi­ta­tion ni précau­tions. Négli­gence fautive ? Fuite de données person­nelles ? Usage délic­tueux ? au pire il y a un rappel à la loi. Les sanc­tions sont excep­tion­nelles et abso­lu­ment pas dissua­sives.

    Notre CNIL produit de très belles recom­man­da­tions mais au final, elle sert à quoi ? Je suis volon­tai­re­ment provo­ca­teur, mais elle est à la fois stricte à la fois échoue à proté­ger les données du citoyen de l’état, des collec­ti­vi­tés publiques, et des entre­prises privées.

  • Timings en confé­rences

    Quelques retours pour les orga­ni­sa­teurs de confé­rences à propos des timings :

    Annon­cez que vous respec­te­rez les heures stric­te­ment, faites le.

    Respec­ter les timings c’est juste essen­tiel. Quoi qu’il se passe (ou presque), vous commen­cez à l’heure dite, vous finis­sez à l’heure dite. Si ça veut dire écour­ter la session d’un inter­ve­nant, faites le. Si ça veut dire couper un inter­ve­nant qui ne s’ar­rête pas, faites le. Si ça veut dire commen­cer avec une salle qui n’est pas encore complète, faites le.

    Si jamais vous avez du prendre du retard. Soit vous annon­cez expli­ci­te­ment partout un nouveau plan­ning en le placar­dant en gros partout, soit vous rattra­pez le retard immé­dia­te­ment (oui, l’in­ter­ve­nant en cours aura une session plus courte, tant pis).

    20% du temps pour les ques­tions

    Pour les sessions de plus de 20 minutes, prévoyez 20% du temps pour les ques­tions (10% est un strict mini­mum et jamais en dessous de 5 minutes).

    Annon­cez-le à l’avance à l’in­ter­ve­nant, sur place sur les plan­ning, mais surtout : Faites le respec­ter, même si ça veut dire couper l’in­ter­ve­nant.

    Dans tous les cas, prévoyez et annon­cez un moyen pour le public de discu­ter avec l’in­ter­ve­nant s’il reste des ques­tions en fin de timing.

    Gardez les pauses

    Pas moins d’1h30 pour déjeu­ner (bien plus si chacun part déjeu­ner à l’ex­té­rieur) et au moins une pause de 20 minutes mini­mum par demie-jour­née. Souve­nez-vous que les gens sont souvent aussi là pour discu­ter et pas que pour écou­ter comme devant une vidéo (sinon ils écou­te­raient des vidéos).

    Si vous avez plusieurs salles en paral­lèle, gardez au moins 10 minutes pour chan­ger de salles. Vous ne serez pas les premiers à tenter de mettre juste 5 minutes, pour plein de raisons qui vous semblent excel­lentes. Plein de gens l’ont fait avant vous, ils se sont tous toujours plan­tés.

    Lais­ser du temps aux inter­ve­nants

    5 minutes suffisent pour faire germer une idée, 20 minutes pour faire passer une émotion. Si vous devez expliquer, appro­fon­dir, faire de la tech­nique, le format de 45–50 minutes est essen­tiel. En dessous vous reste­rez à la surface.

    Pour des ateliers c’est 1h30 mini­mum mais je vous encou­rage à envi­sa­ger 2h comme format type.

    Commen­cer tôt, finir tôt

    Vous pouvez géné­ra­le­ment commen­cer tôt. Annon­cez au moins un accueil tôt le premier jour pour gérer les entrées (ça prend du temps, la plupart des déra­pages de plan­ning commencent à cause de ça).

    Par contre ne finis­sez pas après 18h, sinon une partie du public partira avant la fin. Une partie signi­fi­ca­tive du public partira même à 17h30 le dernier jour pour prendre un train ou un avion. Prévoyez votre plan­ning en fonc­tion.

  • Le coût du travail est désor­mais moins élevé en France qu’en Alle­magne

    Le coût du travail est désormais moins élevé en France qu'en AllemagneMoi je dis « enfin ! ».

    D’au­tant que c’est une vue tronquée parce que la France est aussi plus produc­tive que l’Al­le­magne par heure travaillée, d’en­vi­ron 2% d’après les chiffres OCDE. Au final la même produc­tion coûte­rait alors entre 6 et 7% de moins en France qu’en Alle­magne. C’est énorme !

    Je dis « enfin ! » parce qu’on va pouvoir montrer que ce n’est pas le problème, que ça ne va rien résoudre. Si ça résol­vait quelque chose, la Grèce ou l’Es­pagne seraient en plein boom.

    Main­te­nant, si ça ne résout rien, ça me fait mal quand même, comme à chaque fois qu’on se tire une balle dans le pied :

    On vient juste d’an­non­cer qu’on joue le dumping sur le coût du travail, la concur­rence à ce niveau avec notre voisin euro­péen prin­ci­pal. Avec ce genre de commu­ni­ca­tion on va bien ramer pour expliquer aux entre­prises qu’elles feraient mieux de rester chez nous plutôt qu’al­ler au Bangla­desh, en Rouma­nie ou même plus proche mais moins cher qu’en France.

    Si le but pour­suivi est de jouer le moins disant social pour dimi­nuer le coût, non seule­ment on ne pourra pas gagner mais ça va être un désastre humain.

    À force de consi­dé­rer que 99% de la popu­la­tion ne sont qu’un coût pour les 1% qui détiennent le capi­tal, on va vrai­ment faire explo­ser le modèle social…

  • Le droit du travail est un frein à l’em­bauche pour 92 % des TPE

    L’étude montre par ailleurs que le Pacte de respon­sa­bi­lité et de soli­da­rité, mis en place pour relan­cer l’ac­ti­vité écono­mique, a pu avoir un effet réces­sif en 2014, du moins pour ce qui concerne les créa­tions d’em­plois. […]  « Sur une base de 1 million d’en­tre­prises ayant au moins 1 sala­rié, si 22 % ont reporté une déci­sion d’em­bauche, ce sont 220.000 emplois qui n’ont pas été créés en 2014 »

    Et bien oui. On embauche parce qu’on en a besoin. Un allè­ge­ment peut faci­li­ter une nouvelle embauche dans une TPE ou éven­tuel­le­ment ajou­ter une personne de plus dans une embauche multiple de PME, mais c’est à la marge.

    Par contre le jeu fiscal se calcule très bien pour déci­der d’à partir de quand on va faire l’em­bauche. Si ça permet de gagner un peu, on va tirer sur la corde plus que prévu et retar­der l’em­bau­che… et poten­tiel­le­ment l’in­ves­tis­se­ment qui va avec. Bref, impact néga­tif.

    Le pire c’est qu’à la mise en oeuvre le gouver­ne­ment et les chefs d’en­tre­prise vont faire une jolie opéra­tion de commu­ni­ca­tion pour montrer que les aides fonc­tionnent : « Ça créé de l’em­ploi, il suffit de regar­der combien de nouvelles embauches il y a eu début 2015 par rapport à fin 2014 ». Malheu­reu­se­ment ça sera juste l’ef­fet d’em­bauches retar­dées, donc qui ont baissé les chiffres 2014 pour rele­ver d’au­tant les chiffres 2015. Tota­le­ment arti­fi­ciel quoi…

    Un chiffre à prendre avec précau­tion, car tous les salaires compris entre 1 et 1,6 Smic seront exoné­rés de charges à partir de janvier 2015, et pas seule­ment les salaires des person­nels embau­chés à partir de cette date.

    Pas de petits profits. Si on promet que demain ça coûtera un peu moins cher, on va déca­ler l’in­ves­tis­se­ment, même si c’est juste pour gagner quelques centaines d’eu­ros pendant quelques mois. Oui, déca­ler l’in­ves­tis­se­ment, au niveau du pays, ça aura forcé­ment un impact néga­tif.

    Cita­tions des Échos, qu’on peut diffi­ci­le­ment accu­ser d’être commu­niste.

    Le plus magique en fait c’est le titre :

    Le droit du travail est un frein à l’em­bauche pour 92 % des TPE

    Bref, s’il n’y avait pas de règles, ça serait plus simple d’uti­li­ser des sala­riés. Pas très éton­nant, mais j’es­père qu’on ne va pas fonder une poli­tique sur ce prin­ci­pe…

  • Brea­king sécu

    Brea­king sécu

    Parler d’échap­per à la sécu au profit d’une assu­rance privée étran­gère moins chère, et aller se détendre le lende­main devant Brea­king Bad.

    Il faudrait prendre un peu de recul mes amis. Vu de haut tout ça n’a aucun sens.

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par Hans-Jörg Aleff

  • Alpi­nisme cultu­rel

    Alpi­nisme cultu­rel

    L’in­dus­trie cultu­relle s’est enga­gée dans une esca­lade légale et morale qui ferait pâlir n’im­porte quel alpi­niste chevronné. L’ou­tillage utilisé commence à être grave­ment risqué sur le long terme au niveau des liber­tés et de la vie de tous les jours. Même pour l’in­dus­trie elle-même, le durcis­se­ment de l’en­vi­ron­ne­ment légal de la propriété intel­lec­tuelle devient une balle qu’on se tire dans le pied. Chaque jour l’en­vi­ron­ne­ment juri­dique devient de plus complexe et plus incer­tain, la capa­cité d’in­no­va­tion et de créa­tion s’écrasent. Seuls les copy­right-bot et copy­right-troll sont floris­sants.

    On conti­nue à esca­la­der pour rien, en pensant que chaque nouvel ajout permet­tra de reve­nir magique­ment des années en arrière, ou du moins de frei­ner la chute inexo­rable. Bien entendu, en plus d’être dange­reux pour tout le monde, le pire c’est que ça ne fonc­tionne simple­ment pas. Personne n’a rien à y gagner.

    Cette guerre est perdue. Les batailles dure­ront peut être encore un, trois, cinq, dix, vingt ans, peut-être même plus, mais l’is­sue est inexo­rable : Si on conti­nue la fuite en avant jusqu’à ce que toute la cordée décroche, on va juste s’écra­ser en bas et on n’aura plus rien. Pas même une mauvaise alter­na­tive. Rien.

    Il est encore temps de s’ar­rê­ter, d’ima­gi­ner autre chose. Peu importe que cette autre chose soit insa­tis­fai­sant ou mora­le­ment injuste. La ques­tion n’est pas là. Elle n’est plus là. Il faut accep­ter d’ar­rê­ter de grim­per, accep­ter de redes­cendre pour aller ailleurs, même si ça nous coûte énor­mé­ment, parce que c’est la seule solu­tion pour conti­nuer de vivre.

    Justi­fier l’es­ca­lade par la volonté de faire survivre le modèle est un manque de recul flagrant, mais le faire au nom de la légi­ti­mité de sa cause c’est juste être hors sujet. Le poids écono­mique de l’in­dus­trie cultu­relle garan­tit de tenir encore quelques temps, surtout renforcé par le poids de l’État. Ça ne sera au final que du poids en plus lors du décro­chage. Il serait telle­ment plus rentable de profi­ter de ce refuge tempo­raire pour commen­cer à descendre et chan­ger de chemin…

    Photo d’en­tête sous licence CC BY-NC-SA par cris­tian ruberti