Catégorie : Politique et société

  • En COR un peu plus de retraites, dans le rétro­vi­seur

    Le débat sur la reforme des retraite revient alors qu’un rapport du Conseil d’orien­ta­tion des retraites dévoile que le passage à 64 ans ne suffi­rait pas à finan­cer le système.

    C’est facile pour les tenants de la majo­rité de dire « vous voyez, on avait raison, on n’est même pas assez loin » mais ce n’est pas ce qui a été dit.

    Ça dit unique­ment que la mesure choi­sie unila­té­ra­le­ment par le gouver­ne­ment ne semble pas atteindre l’objec­tif qu’ils s’étaient fixés. Ça ne dit rien de plus.

    Aller plus loin aurait peut-être pu être une solu­tion. Peut-être, parce qu’on touche à des systèmes complexes et que recu­ler des âges a aussi des consé­quences sur l’em­ploi, la santé, les mouve­ments sociaux et plein de choses. Ça n’est pas un simple curseur qu’on bouge.

    D’autres solu­tions tota­le­ment auraient peut-être aussi été viables et perti­nentes. Le COR ne dit pas laquelle est celle à adop­ter, c’est le rôle du poli­tique, il se contente de consta­ter que celle choi­sie ne fonc­tionne pas autant qu’i­ma­giné.


    « Ok Éric mais du coup c’est quoi ta solu­tion ?

    Je ne prétends pas avoir la solu­tion. Ça ne s’ima­gine pas dans un canapé.

    Je vois par contre de vrais débats sur le modèle de société qu’on souhaite ou pas. Ces débats n’ont pas vrai­ment eu lieu.

    • Les dépenses de retraite, avec le fonc­tion­ne­ment avant réforme, ne déra­paient pas en % du PIB. La plupart des hypo­thèses montraient même une réduc­tion des dépenses en propor­tion du PIB.
    • Les recettes, elles, dimi­nuaient forte­ment, au moins à court et moyen terme.

    Bref, on a un diffé­ren­tiel entre recette et dépense à court et moyen terme, et poten­tiel­le­ment à long terme en fonc­tion des hypo­thèses rete­nues. On peut faire plein de choses :

    • En rédui­sant le niveau des pensions, pour tous ou pour certaines caté­go­ries spéci­fiques
    • En recu­lant l’âge de départ, en augmen­tant le nombre de trimestres néces­saires, ou recu­lant l’âge de départ à taux plein, pour tous ou pour certaines caté­go­ries.
    • En augmen­tant la décote en cas de départ à la retraite anti­cipé avant d’avoir son nombre de trimestres, pour tous ou pour certaines caté­go­ries.
    • En augmen­tant les coti­sa­tions sala­riales, patro­nales, la CSG, ou un mix de tout ça pour tous ou pour certaines caté­go­ries.
    • En levant un impôt ou une taxe spéci­fique dédiée aux recettes des retraites
    • En prenant dans le budget de l’État, qui devra du coup faire d’autres choix budgé­taires à recettes équi­va­lentes.
    • En prenant dans le budget de l’État, qui devra reti­rer certaines baisses de fisca­lité prévues ou réali­sées.

    Bref, il y a plein de choses possibles et le « il n’y a pas le choix » était une vaste fumis­te­rie desti­née à cacher qu’ils avaient déjà fait le choix.

    Il y avait d’ailleurs même le choix de ne rien faire, c’est à dire ponc­tion­ner les réserves (consti­tuées dans les périodes favo­rables passées) et contrac­ter de la dette (à rembour­ser dans les périodes favo­rables futures)

    Un débat inté­res­sant aurait abordé ces ques­tions, qui sont des vrais choix de société qui peuvent être réel­le­ment discu­tés par tous sans forcé­ment d’ex­per­tise. L’ex­per­tise elle n’est néces­saire qu’en­suite, pour chif­frer ce que ça veut dire en fonc­tion des leviers qu’on a choisi d’uti­li­ser.

    De mon côté, l’idée qu’il ne s’agit pas vrai­ment d’aug­men­ter les dépenses mais d’ar­rê­ter de les bais­ser emporte majo­ri­tai­re­ment mon choix. Je ne vois pas pourquoi on voudrait bais­ser le niveau des retraites en % du PIB.

    Je me serais proba­ble­ment orienté vers un mix des cinq dernières, en commençant par arrê­ter cette folie du SNU.

    Je dis « proba­ble­ment » parce que je consi­dère que je n’ai pas été correc­te­ment éclairé sur ces diffé­rents choix, donc je pour­rai tout à fait m’orien­ter diffé­rem­ment le jour où je le serai.

  • Le gilet jaune fluo à vélo

    Ce n’est pas un problème de visi­bi­lité.

    https://twit­ter.com/camil­leMAILHE/status/1660333432533024771
    https://twit­ter.com/fiets­pro­fes­sor/status/1490073619980079113
    https://twit­ter.com/Jordi_Velo/status/1600230793187426304
    https://twit­ter.com/Maitre_Eolas/status/1599107111073767425

    « Oui mais ça aide quand même ! »

    Bien entendu que ça peut aider. Mettez des éléments réflé­chis­sants là où on vous voit mal. Ayez des lumières à vélo dès le crépus­cule, y compris en ville.

    La ques­tion n’est pas là. Ce que les illus­tra­tions disent c’est que le problème sur la route n’est prin­ci­pa­le­ment pas un problème de visi­bi­lité, que se foca­li­ser là dessus c’est préfé­rer culpa­bi­li­ser la victime plutôt que de résoudre le fond.

    Le gilet ne proté­gera pas le cycliste ou le piéton face à un conduc­teur qui fait n’im­porte quoi avec son véhi­cule.

  • Illi­bé­ra­lisme, démo­cra­tie, dicta­ture, tout ça

    La France est bel et bien en train de rejoindre le camp des démo­cra­ties « illi­bé­rales »

    Jean-François Bayart, Où va la France ? – Le Temps

    Je ne suis pas fana du terme d’« illi­bé­ra­lisme » qui semble être à la mode pour décrire nos démo­cra­ties en chute.

    On a un problème de voca­bu­laire parce qu’on s’in­ter­dit de dire qu’on est dans un régime auto­ri­taire ou dans une dicta­ture. C’est un extrême impen­sable. Parce qu’on voit tout en binaire, ça veut dire qu’on est dans une démo­cra­tie, et qu’il faut tenter de trou­ver un adjec­tif derrière pour modé­rer tout ça.

    À jouer avec les compro­mis de voca­bu­laire, on s’in­ter­dit de réflé­chir sur les termes et de prendre du recul.

    Les fron­tières entre démo­cra­tie et dicta­ture sont forcé­ment un peu floues et dépendent de ce sur quoi on est strict ou non.

    Je suis convaincu que la défi­ni­tion litté­rale de la dicta­ture inclut beau­coup plus de choses qu’on ne veut bien le croire, et que la défi­ni­tion de la démo­cra­tie en inclut beau­coup moins qu’on ce qu’on dit pour se rassu­rer.

    En réalité, peu importe.

    On peut aussi tracer un axe avec deux hori­zons, d’un côté une démo­cra­tie fantas­mée qu’on n’at­tein­dra jamais parfai­te­ment — si tant est que ce soit possible — et de l’autre une dicta­ture cauche­mar­desque qu’on n’at­tein­dra jamais non plus parce qu’on pourra toujours imagi­ner pire.

    Je ne mets pas de gradua­tions à cet axe, pas de milieu qui néces­si­te­rait de débattre pendant trois siècles.

    Je ne mets que trois ques­tions :

    1. Est-ce qu’on est bien placés dans l’ab­solu par rapport à nos aspi­ra­tions et nos belles paroles ?
    2. Est-ce qu’on est bien placés rela­ti­ve­ment à nos voisins et à d’autres pays simi­laires au notre ?
    3. Est-ce qu’on évolue dans le bon sens ?

    Je n’ai pas l’im­pres­sion qu’on soit correc­te­ment placés aujourd’­hui par rapport à nos aspi­ra­tions et nos discours. C’est évidem­ment subjec­tif. En tout cas on n’y est pour moi.

    J’ai l’im­pres­sion que l’es­sen­tiel de nos voisins directs font mieux que nous, et certains voisins plus distants font vrai­ment vrai­ment mieux.

    Surtout, et c’est bien plus grave, j’ai l’im­pres­sion qu’on évolue dans le mauvais sens, à une vitesse signi­fi­ca­tive. C’est ça dont nous devrions avoir le plus peur. C’est ça dont j’ai le plus peur.

  • On vous a volé votre vélo ?

    J’en suis désolé. Je compa­tis, ça m’est arrivé aussi et je l’ai toujours mauvaise. Je redif­fu­se­rai un message avec plai­sir s’il y a moyen de le retrou­ver. Ça arrive.


    Je suis par contre très curieux d’en savoir plus, pour comprendre la réalité des vols.

    1. Avec quel(s) anti­vol(s) était-il atta­ché ? idéa­le­ment les modèle exact parce qu’il existe des U, des chaînes et des bordo de résis­tance très diffé­rentes. À défaut, au moins le type (U, chaîne, pliable, fer à cheval, boa, câble simple) et l’épais­seur.

    2. Comment l’an­ti­vol a-t-il été cassé ? Si c’est avec un coupe boulons, une disqueuse, une scie, en croche­tant, en décou­pant le support, ou encore autre chose. Si vous ne savez pas, parfois ça peut se voir sur la photo de l’an­ti­vol ouvert. Sur les pliables c’est inté­res­sant de savoir s’il a cédé à la jonc­tion ou en décou­pant dans une lame. Sur les U c’est inté­res­sant de savoir s’il y a eu besoin de deux coupes, et si on a l’im­pres­sion que ça a été pincé (coupe boulons) ou scié. Si c’est le support qui a été cassé, quel était-il ?

    3. Où était-il ? Visible ou non ? dans une ruelle ou dans une avenue passante ? à quelle heure ? Est-ce que le vol a eu lieu à la vue de tous ou caché ? Est-ce qu’il y avait d’autres vélos ? plus chers ? moins bien ou mieux atta­chés ?

    4. Quel vélo était-ce ? En terme de prix esti­ma­tif, élec­trique ou pas, en bon état ou pas, etc.

    5. Votre assu­rance a-t-elle accepté la prise en charge ? Quelle est cette assu­rance ?


    Pas de honte. On a tous une fois mal atta­ché son vélo, voire pas atta­ché du tout. Parfois par fatigue ou par erreur, parfois en étant un peu trop opti­miste. Le respon­sable sera toujours le voleur, pas vous.

    L’idée c’est d’avoir une meilleure vision des risques réels en fonc­tion des anti­vols et des condi­tions.

  • Taux de prélè­ve­ment obli­ga­toire

    J’en ai marre de voir le taux de prélè­ve­ment obli­ga­toire comme un élément horrible, voire comme un objec­tif à réduire.

    Je n’y vois aucun sens.

    Je ne vois que trois sujets : la perti­nence de la dépense, le choix entre un prélè­ve­ment obli­ga­toire et une rede­vance à l’usage, et la répar­ti­tion du prélè­ve­ment.

    Je ne dis pas que privé et public sont équi­va­lents, que la ques­tion est inin­té­res­sante, mais le taux de prélè­ve­ment public n’est pas un élément perti­nent dans la discus­sion. Le jour où on passe la moitié du prélè­ve­ment obli­ga­toire en dépense privée, on aura fait bouger ce chiffre sans rien résoudre pour autant.

  • Réunion de concer­ta­tion

    J’étais ce soir à une réunion de concer­ta­tion pour la VL 12 de Lyon.

    Je n’ose penser au temps à l’argent qu’on met là dedans. Je ne parle pas des VL elles-mêmes mais de ces réunions de concer­ta­tion obli­ga­toires.

    Ça ne sert stric­te­ment à rien. Les pas-contents sont là pour dire qu’ils ne sont pas contents, ce qu’on savait et qu’ils expriment déjà autre­ment. Les respon­sables poli­tiques font les réponses qu’ils ont déjà donné vingt fois et que les pas-contents connaissent déjà. Les très-contents disent qu’ils sont très contents, sans vraie inno­va­tion, juste pour faire contre-poids et ne pas faus­ser la repré­sen­ta­tion.

    Les vrais argu­ments posés, les études, les discus­sions avec les repré­sen­tants de x ou de y, tout ça se fait ailleurs.

    On encou­rage juste les gens à râler, mais peut-être est-ce bien l’objet : donner un espace pour que chacun s’ex­prime, histoire que ça passe et qu’ils voient qu’ils sont écou­tés.


    La métro­pole de Lyon a un espace parti­ci­pa­tif dédié en ligne, et j’ai l’im­pres­sion que c’est le même topo, avec un contenu encore moins exploi­table et encore plus chro­no­phage à dépi­ler.

    C’est obli­ga­toire mais tota­le­ment vain. Et si on mettait notre argent, notre temps et nos efforts dans plus utile ?

  • Les igno­rants sont bénis

    « Ce n’est pas un signe de bonne santé mentale d’être bien adapté à une société malade »

    Amis joyeux, sachez que souvent je pense ça de vous (tout en vous enviant un peu quand même).

    La vérité c’est que ne pas voir à quel point le monde est pourri doit être un vrai bonheur et je n’ai pas forcé­ment envie de vous soule­ver le voile.

    « Les igno­rants sont bénis »

    Andy Wachowski, Matrix
  • Et si on arrê­tait l’as­sem­blée natio­nale et le sénat ?

    Non, je ne parle pas des parle­men­taires et de la repré­sen­ta­ti­vité (même si ça pour­rait être un bon sujet) mais des deux hémi­cycles et des « débats » publics qui s’y mènent.

    Tout est joué d’avance. Les parle­men­taires savent déjà quoi voter (quand ils votent). Heureu­se­ment d’ailleurs parce que je ne voudrais pas qu’un repré­sen­tant se fasse une idée en quelques secondes et vote immé­dia­te­ment tel ou tel texte parce qu’un orateur a bien tourné son inter­ven­tion sur le moment.

    Les vrais débats semblent être en commis­sion, et même là je suppose qu’en réalité le travail de fond ne se fait pas dans l’ins­tant.

    Qu’est-ce qui empêche de rempla­cer nos séances publiques par des allers-retours écrits et votes asyn­chrones ?

    On mettrait fin à l’obs­truc­tion parle­men­taire. Les repré­sen­tants aurait un espace quasi infini pour s’ex­pri­mer. Les votes se feront enfin avec poten­tiel­le­ment tout le monde (ou tous ceux qui veulent voter). Tout pour­rait être réel­le­ment public et archivé

    Ça n’em­pêche pas l’in­ter­ven­tion publique poli­tique. On peut même avoir des temps pour ça, renfor­cer l’obli­ga­tion de réponse du gouver­ne­ment aux ques­tions des dépu­tés (les délais sont aujourd’­hui large­ment dépas­sés).

    Et bon, nos élus savent déjà diffu­ser des textes et vidéos sur les réseaux, et toucher la presse. Quel béné­fice a-t-on à avoir ce spec­tacle dans l’hé­mi­cycle où chacun joue sa parti­tion comme dans un réci­tal ?


    Chaque fois que j’ai vu le sujet abordé par des assis­tants parle­men­taires je sais que la réponse a été « le fonc­tion­ne­ment actuel est néces­saire et perti­nent » mais je n’ai jamais compris pourquoi. Chaque fois, je comprends un peu moins.

  • « When you’re accus­to­med to privi­lege, equa­lity feels like oppres­sion »

    Ça cadre avec telle­ment de compor­te­ments… de la droite réac qui a l’im­pres­sion de se faire submer­ger par les étran­gers, les « woke » ou les écolos, les auto­mo­bi­listes par les cyclistes, les hommes par le fémi­nis­me…

    When you’re accus­to­med to privi­lege, equa­lity feels like oppres­sion

    via Tris­tan Nitot
  • Tu pour­rais contour­ner au lieu de râler là, non ?

    Certai­ne­ment. Parfois je pour­rais. Je le fais souvent même.

    Parfois je ne le fais pas.

    On ne peut pas déplo­rer le compor­te­ment des tiers vis a vis des cyclistes et des infra­struc­tures cyclables, le fait d’être régu­liè­re­ment mis en danger, et dire en même temps qu’il faut passer son chemin silen­cieu­se­ment.

    On ne chan­gera pas les choses en faisant avec. Pour chan­ger les choses il faut donner de la visi­bi­lité, il faut inter­pel­ler lors des problèmes. Il faut refu­ser le status quo.

    Oui, c’est bien du mili­tan­tisme. Ce n’est pas un gros mot.
    J’en suis même fier.

    La réalité c’est qu’on a un problème de culture vis-a-vis du vélo.

    À force d’ac­cep­ter que tout le monde occupe les infra­struc­tures cyclables à tout instant en disant que le vélo n’a qu’à s’adap­ter, on finit par trou­ver ça normal. Le test du bus n’en est qu’une illus­tra­tion.

    Le cycliste « fait avec », contourne encore un auto­mo­bi­liste arrêté sur la bande cyclable « pour deux minutes », puis un jour un malheu­reux concours de circons­tances fait qu’un camion passe juste­ment à ce moment là. La suite se termine à l’hô­pi­tal pour les chan­ceux, au cime­tière pour les autres.

    Des histoires comme celle-ci on en a aussi pour les portières ouvertes un peu vite, pour l’ab­sence de véri­fi­ca­tion des angles morts, pour les sas vélo pas libres, pour les prio­ri­tés des pistes lors des croi­se­ments, pour le respect de la distance laté­rale lors des dépas­se­ments et pour la plupart des faits de tous les jours consi­dé­rés comme « pas bien grave ».

    Ce qui diffé­ren­cie l’in­frac­tion banale de la rubrique nécro­lo­gique c’est souvent juste un mauvais concours de circons­tances que personne ne pouvait prédire.

    Or, juste­ment, je refuse de tout réduire à un mauvais concours de circons­tances. Le problème est plus haut, dans la culture et dans la bana­li­sa­tion. Tant qu’on ne résout pas ça, les mauvais concours de circons­tances conti­nue­ront.

    Pour chan­ger les choses il faut donner de la visi­bi­lité. Il faut inter­pel­ler lors des problèmes. Il faut refu­ser de lais­ser faire.

    Pourquoi est-ce que je ne laisse pas couler tout ce qui est banal ? Parce que c’est juste­ment contre cette bana­li­sa­tion que je lutte.