Catégorie : Politique et société

  • Le test du bus

    Le test du bus (ça fonc­tionne aussi avec un tram), c’est un test pour mettre en lumière les biais vis-a-vis des cyclistes et du vélo dans la percep­tion des conflits routiers.

    Le test en lui même est assez simple. Il suffit de rejouer la scène à l’iden­tique en remplaçant le vélo par un bus et les infra­struc­tures dédiées aux cycles par des infra­struc­tures dédiées aux bus. Le cycliste sur sa voie cyclable devient un bus sur sa voie réser­vée bus (ou un tram sur ses rails).

    Une fois la scène rejouée, les fautes qu’on repro­chait au cycliste sont-elles toujours repro­chées au conduc­teur du bus ?

    La diffé­rence de percep­tion est telle­ment majeure que, suite à une idée origi­nale d’un améri­cain, certains cyclistes français ce sont mis à faire des montages des vidéos de leur dash­cam en ajou­tant une image de tableau de bord de voiture ou de bus.

    Le résul­tat est géné­ra­le­ment frap­pant. La même vidéo qui déclen­chait une horde de reproches au cycliste génère des commen­taires tota­le­ment oppo­sés dès qu’on ajoute un tableau de bord en surim­pres­sion.

    Parfois on va jusqu’à avoir les mêmes commen­ta­teurs qui donnent des conclu­sions oppo­sées suivant la version de la vidéo.

    Ça ne fonc­tionne pas à tous les coups. Nombre de personnes ont tendance à cher­cher à défendre bec et ongles leur décla­ra­tion initiale, et faus­ser le résul­tat.

    Le coup du tableau de bord en surim­pres­sion commence lui aussi à être connu, et le montage basique saute faci­le­ment aux yeux pour qui fait un mini­mum atten­tion.

    Il reste qu’en géné­ral se deman­der « et si ça avait été un bus ? » (ou un tram) permet de montrer de vrais biais, et de démon­ter beau­coup d’in­ver­sions de respon­sa­bi­lité.

  • Contra­ven­tions routières et propor­tion­na­lité aux reve­nus

    « Il faut avoir des contra­ven­tions routières propor­tion­nelles aux reve­nus. »

    Je veux bien en discu­ter mais je ne trouve pas que ça aille de soi.

    J’ai trois contraintes pour les contra­ven­tions routières :

    • Que ce soit simple, auto­ma­tique
    • Que ce soit dissua­sif
    • Que la peine ne soit pas exces­sive par rapport à la faute

    Est-ce simple et auto­ma­ti­sable ?

    ✅ On peut imagi­ner une contra­ven­tion dépen­dante du quotient fami­lial. Ça complexi­fiera certai­ne­ment des choses mais ça ne me parait pas impos­sible.

    Est-ce dissua­sif ?

    Je pense que c’est là qu’on va commen­cer à diver­ger.

    Je croise beau­coup de personnes aisées, voire très aisées, dans les 20% les plus riches en revenu. Ça monte même proba­ble­ment dans les 1% pour quelques uns. Je n’en connais aucun qui se moque du risque de prendre une contra­ven­tion, ou qui consi­dère cette possi­bi­lité comme une commo­dité (comprendre « je suis prêt à payer l’amende pour avoir le droit de faire ça »).

    Aucun. Ce n’est qu’une expé­rience person­nelle forcé­ment biai­sée mais je ne crois avoir lu aucune étude concluant que l’éven­tuelle dispa­rité des infrac­tions routières en fonc­tion des classes sociales vien­drait d’une absence de dissua­sion du montant de l’amende.

    Note : Ça n’em­pêche pas une telle dispa­rité d’éven­tuel­le­ment exis­ter pour d’autres raisons — même si je préfé­re­rais avoir des chiffres avant de le consi­dé­rer comme acquis. Je crois d’ailleurs avoir lu des articles faisant des liens avec des ques­tions socio-cultu­relles plus larges.

    J’ima­gine que ça puisse être consi­déré comme une commo­dité pour la frange ultra-mino­ri­taire des ultra­riches, multi­mil­lion­naires et milliar­daires, mais je ne suis même pas certain que ce soit le cas. On ne voit d’ailleurs pas en circu­la­tion de « tout puis­sant » qui circule sans rien respec­ter ni peur du gendarme en disant « de toutes façons je paie » (autre­ment que par bravade quand ils sont vexés d’avoir été pris).

    Ceux qui se moquent tota­le­ment des règles semblent plutôt être ceux qui pensent pouvoir éviter de subir la répres­sion (les poli­tiques et personnes connues), et même eux ne semblent le faire qu’à la marge (ce qui semble plutôt impliquer un enjeu d’ac­cep­ta­bi­lité sociale que de montant d’amende).

    ❌ Bref, sauf à avoir des éléments concrets montrant l’ab­sence de dissua­sion, on est pour moi dans la solu­tion à un non-problème.

    Ou plutôt, pour être complet : Le problème existe proba­ble­ment mais dans la proba­bi­lité de subir la contra­ven­tion et pas dans le montant de celle-ci.

    Ça fait bien long­temps qu’on sait qu’en justice la préven­tion passe plus par la proba­bi­lité d’être pris que par la gravité de la peine. L’ef­fet des radars en quelques années va plutôt en ce sens. C’est d’ailleurs aussi tout l’in­té­rêt des contra­ven­tions : Des peines rapides et simples, qu’on peut donc émettre de façon plus fréquentes, quitte à ce qu’elles soient plus faibles.

    Ce prin­cipe vaut pour tous. On peut par contre imagi­ner sortir du mode contra­ven­tion­nel ceux qui dépassent un certain nombre de contra­ven­tions de la même caté­go­rie sur une période donnée, comme ça on couvre même les excep­tions pour qui la contra­ven­tion ne dissuade pas.

    La peine est-elle exces­sive ?

    Dans les discus­sions on me retourne parfois l’ar­gu­ment, en me disant, qu’é­vi­dem­ment, une peine de 135 € c’est majeur pour une personne au RSA.

    Ce serait diffi­cile à nier. Je n’ex­clus nulle­ment qu’il puisse, au contraire, être perti­nent de réduire les montants dans certains cas. Je ne crois cepen­dant pas que réduire les amendes dans certains cas implique forcé­ment de les augmen­ter aussi dans d’autres. Les deux méca­nismes n’ont pas à êtres liés.

    On retrouve d’ailleurs ça dans les crèches et autres services qui sont liés au quotient fami­lial. C’est une aide pour les plus pauvres, pas une propor­tion­na­lité aux reve­nus. Les deux ne se confondent pas — et ce qui légi­time les aides pour assu­rer les services perti­nents aux plus pauvres ne légi­time pas forcé­ment aussi des aides pour payer les peines d’in­frac­tions qu’on ne voudrait pas voir commises.


    Est-ce juste ?

    La justice au sens moral est une notion très person­nelle. Je ne peux que donner mon senti­ment.

    Pour exemple, si mon voisin fait l’ef­fort d’avoir une seconde acti­vité en paral­lèle que ce soit pour assu­rer un fauteuil élec­trique à sa fille handi­ca­pée ou pour se payer un home cinéma dernier cri, je ne vois pas pourquoi il devrait payer plus cher ses fautes que moi.

    Le truc c’est que je suis en train de créer un exemple ad-hoc. On me trou­vera évidem­ment des dizaines d’autres exemples qui illus­tre­ront l’op­posé.

    Je crois beau­coup à l’in­di­vi­dua­li­sa­tion des peines, parce que je crois que la peine doit à chaque fois est la plus petite possible tout en restant dissua­sive.

    L’idée c’est que c’est au juge de faire ce travail de tri. Le revenu compte proba­ble­ment mais l’in­di­vi­dua­li­sa­tion de la peine ne se résume vrai­ment pas à donner une amende forte aux riches et faible aux pauvres. C’est très dépen­dant du contexte des faits, de la person­na­lité des auteurs, et de comment les choses sont comprises, niées ou assu­mées. Autant de choses qui ne sont pas possibles sur une contra­ven­tion.

    En fait je ne suis même pas certain que pour deux personnes dans une situa­tion exac­te­ment iden­tique (personnes à charge, effort, travail) mais avec des reve­nus diffé­rents(2), il soit forcé­ment plus juste que les fautes impliquent des peines propor­tion­nelles aux reve­nus. L’in­ten­tion de collec­ti­vi­sa­tion de la maxime « chacun paye suivant ses moyens et reçoit selon ses besoins » ne me parait simple­ment pas s’ap­pliquer aux peines et délits qui sont par nature indi­vi­duels. Il est d’ailleurs inter­dit d’en faire des caisses communes.

    2 : Les idéa­listes diront que ça ne devrait jamais arri­ver mais notre monde n’est malheu­reu­se­ment pas idéal.

    Je conçois la justice d’of­frir les services à tous : santé, trans­port, justice, éduca­tion, etc. Je ne crois pas que s’as­su­rer que le voisin ait aussi mal que soi quand il brave la loi doive être dans le cahier des charges.


    « Ok mais tu proposes quoi Éric ? »

    • Auto­ma­ti­sa­tion des contra­ven­tions (radars, vidéos, etc.)
    • Systé­ma­ti­sa­tion de la verba­li­sa­tion par les forces de l’ordre (quitte à réduire au contraire le montant des amendes si néces­saire)
    • Verba­li­sa­tion pour tous les cas signa­lés par des tiers via photo ou vidéo quand c’est à la fois mani­feste et gênant ou dange­reux.
    • Créa­tion d’une « infrac­tion répé­tée » qui envoie au tribu­nal avec une peine réel­le­ment indi­vi­dua­li­sée pour ceux qui accu­mulent les contra­ven­tions
    • Arrêt de la récu­pé­ra­tion des points sur le permis en payant des stages bidons (quitte à bais­ser les pertes de points des infrac­tions pour lais­ser un réel droit à l’er­reur dans un contexte où la verba­li­sa­tion serait bien plus fréquente qu’aujourd’­hui à la moindre erreur)
  • La dette tech­nique

    J’en­tends trop souvent parler de dette tech­nique comme le gros monstre qui va tout manger et comme d’une faute impar­don­nable. Je ne le vois pas ainsi.

    D’abord, pour parler de la même chose, ce que j’ap­pelle une dette :

    La créa­tion d’une situa­tion qui permet un gain à court terme (plus vite, moins cher, etc.) mais qui va entraî­ner un coût à long terme.

    Et la dette, présen­tée ainsi, c’est juste un outil arri­ver à ses fins. J’ai au moins trois situa­tions qui peuvent arri­ver rela­ti­ve­ment fréquem­ment :

    1. « Chaque chose en son temps »
      Je n’ai pas les moyens(*) aujourd’­hui mais je pense les avoir demain.
    1. « Je fais un inves­tis­se­ment »
      J’au­rais les moyens de ne pas créer cette situa­tion mais le gain à court terme va entrai­ner des béné­fices qui surpassent le coût à long terme.
    1. « Pas le choix »
      Je sais que j’y perds mais c’est une arbi­trage par rapport à une autre situa­tion qui serait pire.

    Je comprends que c’est frus­trant pour les équipes tech­niques, l’im­pres­sion de ne pas faire ce qu’il faut, ainsi que celle de parfois perdre du temps à cause de dettes qu’on a créé dans le passé.

    C’est juste parfois quand même (souvent) le bon outil pour l’en­tre­prise, parce que la pureté n’est pas toujours (et même rare­ment) la bonne stra­té­gie.

    Plutôt que de combattre les choix de dette tech­nique et l’uti­li­ser comme grand épou­van­tail, deman­dez plutôt à expli­ci­ter le gain court terme, le coût long terme, et pourquoi on choi­sit de prendre cette dette. On arri­vera peut-être parfois à la conclu­sion que c’est une erreur. Le reste du temps ça vous permet­tra de comprendre la stra­té­gie et de vous y inscrire.

    Atten­tion toute­fois : Faites de la dette, pas de la merde. Les deux sont très diffé­rent.


    Tout ça est parti­cu­liè­re­ment vrai en star­tup.

    La dette c’est le modèle de base de la star­tup. On emprunte (via les levées de fonds) pour des gains futurs. La struc­ture elle-même est une énorme dette. Prétendre, à l’in­té­rieur, éviter toute dette, ça n’a pas de sens.

    C’est parti­cu­liè­re­ment vrai les premières années. On vit à crédit sur un poten­tiel. Il faut prou­ver les promesses pour toucher le crédit suivant, et ça jusqu’à avoir l’échelle suffi­sante pour ne plus en avoir besoin.

    Les premières années il faut trou­ver explo­rer la problé­ma­tique, trou­ver le bon produit avec la bonne cible utili­sa­teur, puis prou­ver qu’il y a une oppor­tu­nité de crois­sance et de béné­fice en adéqua­tion avec la mise de départ.

    C’est une course de vitesse avant la fin des crédits. Tout ce qui est « pour plus tard » est hors sujet. Si on peut créer de la dette pour plus tard de façon à avoir un meilleur produit, à toucher sa cible utili­sa­teur, ou à enclen­cher la montée de chiffre d’af­faire, on crée cette dette.

    Dans une de mes expé­riences on m’a dit « J’ai vu plein de jeunes star­tup échouer parce qu’elles ont pris trop de temps, je n’en ai vu aucune échouer à cause de la dette tech­nique ».

    En bon ingé­nieur ce n’est pas un discours qui me fait plai­sir intel­lec­tuel­le­ment mais je n’ai jamais pu le démen­tir. La dette est juste le bon outil à ce moment là, et la dette tech­nique n’est un problème qu’in­tel­lec­tuel­le­ment.

    La dette c’est un problème de riche. Ça arrive après, quand on a trouvé le bon produit, qu’on a trouvé sa cible, qu’on a prouvé qu’on était capable d’ac­qué­rir des clients. Là on aura aussi le finan­ce­ment qui va avec pour embau­cher des ingé­nieurs qui vont refaire ce qui doit l’être, et élimi­ner une bonne partie des travaux qu’on avait remis à plus tard.

    L’enjeu c’est d’ar­ri­ver jusque là.


    Je fais une note addi­tion­nelle suite à une discus­sion. Je renforce le « Faites de la dette, pas de la merde ». C’est vrai autant au niveau tech­nique qu’au niveau orga­ni­sa­tion­nel.

    • Ne mettez pas à risque les données de vos utili­sa­teurs
    • Four­nis­sez le service et la qualité que vous promet­tez à vos utili­sa­teurs
    • Ne faites pas payer la dette par les membres de vos équipes

    Ce dernier point est majeur. La dette n’a pas a être trans­for­mée en pres­sion ou charge supplé­men­taire pour les sala­riés en espé­rant avoir les gains sans en payer les coûts. C’est le meilleur moyen d’ar­ri­ver à l’épui­se­ment, la dépres­sion, le burn-out, et au mieux un turn-over impor­tant. Dans tous les cas, ça ne fonc­tion­nera pas et n’aura que des effets néga­tifs à la fois sur la santé des sala­riés et sur le fonc­tion­ne­ment de l’en­tre­prise.

    S’en­det­ter peut impliquer d’al­ler ensuite moins vite, de produire moins, et de réduire le péri­mètre ou les exigences. Faites avec : ça fait partie du choix.

    Plus loin : Les équipes ressen­ti­ront cette pres­sion et cette charge même si on ne leur donne pas. La volonté de bien faire et l’im­pres­sion de ne pas faire ce qu’il faut sont une charge psycho­lo­gique signi­fi­ca­tive à laquelle le mana­ge­ment doit être extrê­me­ment atten­tif.

    Le seul outil que j’ai vu fonc­tion­ner contre ça c’est expli­ci­ter la dette, la choi­sir ensemble en expliquant pourquoi, comment, et le plan ensuite. Quand la stra­té­gie est parta­gée ça devient un choix collec­tif et plus une mauvaise exécu­tion.

  • Ce que je veux à vélo

    Ça bouge, mais pas encore assez vite, ni partout.

    Des voies de circu­la­tion adap­tées

    Des voies de circu­la­tion adap­tées à la vitesse et la densité de circu­la­tion des moto­ri­sés, à la densité de circu­la­tion des non moto­ri­sés, ainsi qu’à la présence ou non de poids lourds. Le plus souvent c’est au moins des bandes cyclables, idéa­le­ment des pistes cyclables.

    Cela implique la fin des trot­toirs parta­gés avec les piétons, y compris ceux qui ont une sépa­ra­tion à base de pein­ture.

    Des inter­sec­tions sécu­ri­sées

    Des inter­sec­tions sécu­ri­sées avec au mini­mum des sas vélos et céder le passage cyclistes (avec tout le côté impar­fait de ces deux dispo­si­tifs) mais les grosses inter­sec­tions méritent ce qu’on appelle des carre­fours à la hollan­daise.

    Cela implique au mini­mum la fin des bandes cyclables sur le bord exté­rieur des ronds points.

    Une conti­nuité cyclable

    Une conti­nuité cyclable au niveau de ce qui existe pour les autres types de véhi­cules, c’est à dire pas de fin de bande ou fin de piste sans raison ou dès qu’il y a une inter­sec­tion.

    Au mini­mum, cela implique la fin des pistes qui commencent ou finissent en impo­sant au cycliste de mettre pied à terre pour avan­cer.

    Des prio­ri­tés expli­cites

    Un marquage expli­cite pour toutes les traver­sées cyclables, de façon a préci­ser qui est prio­ri­taire et éviter tous les conflits basés sur l’in­com­pré­hen­sion ou la mécon­nais­sance des règles, autant par les cyclistes que par les auto­mo­bi­listes, situa­tion souvent empi­rée par des marquages maladroits qui ajoutent à la confu­sion.

    Idéa­le­ment ça veut dire aussi ne pas ajou­ter un stop ou un céder le passage par prin­cipe aux cyclistes à chaque inter­sec­tion en consi­dé­rant que c’est forcé­ment à eux de s’adap­ter à tous les autres.

    Une verba­li­sa­tion des abus

    Une verba­li­sa­tion systé­ma­tique des occu­pa­tions de voies cyclables et des mises en danger lors des dépas­se­ments ou des inter­sec­tions. Au mini­mum ça implique une campagne de commu­ni­ca­tion pour chan­ger les compor­te­ment.

    Idéa­le­ment ça veut aussi dire accep­ter les plaintes ou signa­le­ments basées sur des photos ou vidéos où la situa­tion est mani­feste, et que ces signa­le­ments mènent à des actions réelles, comme ça se fait dans d’autres pays.

    Rouler au milieu de voie

    L’au­to­ri­sa­tion expli­cite aux cyclistes de rouler au milieu de leur voie de circu­la­tion, en toute occa­sion, et idéa­le­ment des picto­grammes vélo en milieu de voie sur les voies où le dépas­se­ment règle­men­taire par une voiture est impos­sible.

    Rendre obli­ga­toire le forfait mobi­lité durale

    On pour­rait rendre obli­ga­toire aux entre­prises de finan­cer la mobi­lité durable au même montant que ce qu’ils financent l’abon­ne­ment de trans­port en commun local.

    Aujourd’­hui les entre­prises doivent rembour­ser la moitié de l’abon­ne­ment de trans­port en commun aux sala­riés mais le forfait mobi­lité durable pour ceux qui choi­sissent le vélo reste encore facul­ta­tif.

    Rendre obli­ga­toire ce finan­ce­ment permet de lever la contrainte du finan­ce­ment du vélo (le vélo, son entre­tien, sa sécu­rité, et les tickets de trans­port en commun ponc­tuels) comme alter­na­tive au trans­port en commun quoti­dien.


    Certains points demandent des inves­tis­se­ments lourds, notam­ment quand on parle d’in­fra­struc­tures. D’autres demandent un chan­ge­ment poli­tique complexe, notam­ment quand je propose d’ac­cep­ter les signa­le­ments photo et vidéo.

    Une fois ça dit, l’amé­lio­ra­tion de la verba­li­sa­tion, les prio­ri­tés expli­cites lors des traver­sées cyclables, la possi­bi­lité de rouler en milieu de voie, ça ne coûte pas grand chose et c’est du registre du « simple ».

    Je ne vois aucune raison de ne pas avan­cer.

  • Respon­sa­bi­lité piéton

    Il y a un légende persis­tante qui voudrait que le piéton a toujours raison, qu’il est prio­ri­taire « dans tous les cas ». Je sais que c’est ainsi que c’est vulga­risé sur plein de pages, y compris sur des sites publics, mais quand je fouille ce n’est pas ce que dit la loi.


    L’ar­ticle le plus proche du code de la route est le R415–11 :

    « Tout conduc­teur est tenu de céder le passage, au besoin en s’ar­rê­tant, au piéton s’en­ga­geant régu­liè­re­ment dans la traver­sée d’une chaus­sée ou mani­fes­tant clai­re­ment l’in­ten­tion de le faire ou circu­lant dans une aire piétonne ou une zone de rencontre.

    Article R-415–11 du code de la route

    Le mot clef est « régu­liè­re­ment » qui veut ici dire « en respec­tant les règles » (l’obli­ga­tion d’uti­li­ser un passage protégé quand il y en a un proche, le respect des feux piétons quand ils sont rouges, l’obli­ga­tion de prudence, etc.).

    Quand il s’en­gage sans respec­ter les règles, le piéton n’est pas prio­ri­taire.


    La seconde confu­sion vient parfois de la loi Badin­ter.

    C’est la L211–8 du code des assu­rances. C’est d’ailleurs là le point prin­ci­pal : Il s’agit d’une règle des assu­rances et pas d’une règle du code de la route.

    La loi Badin­ter ne défi­nit aucune respon­sa­bi­lité ni aucune prio­rité. Elle dit juste que les victimes d’un acci­dent de circu­la­tion impliquant un véhi­cule terrestre à moteur sont indem­ni­sées par les assu­rances de ces véhi­cules.

    C’est l’as­su­rance de la voiture qui paiera les soins si le piéton finit à l’hô­pi­tal ou en chaise roulante, peu importe qui est respon­sable de l’ac­ci­dent. Ça ne rend pas le piéton prio­ri­taire. Ça ne met pas l’au­to­mo­bi­liste auto­ma­tique­ment en faute.

    Deux points annexes :

    • Les trot­ti­nettes élec­triques sont des véhi­cules terrestres à moteur et une assu­rance est donc obli­ga­toire, comme le précise l’ar­ticle L211–1.
    • Les vélos ne sont pas des véhi­cules à moteur et sont donc trai­tés exac­te­ment au même niveau qu’un piéton au niveau de la loi Badin­ter.
      • Lors d’un acci­dent entre un piéton et un vélo, l’in­dem­ni­sa­tion se fait donc selon les règles habi­tuelles (le respon­sable indem­nise l’autre).
      • Lors d’un acci­dent entre une voiture et un vélo, le cycliste peut toujours deman­der une indem­ni­sa­tion inté­grale à l’as­su­rance de la voiture, peu importe sa propre respon­sa­bi­lité.
  • Ralen­tir au feu vert

    Un feu trico­lore français a trois couleurs : Rouge, Orange, Vert.

    On ne peut pas deman­der aux véhi­cules de s’ar­rê­ter immé­dia­te­ment lorsqu’un feu passe au rouge (*). On a donc une zone de batte­ment où ceux qui sont trop proches peuvent conti­nuer à passer et ceux qui sont assez loin doivent commen­cer à s’ar­rê­ter. C’est le feu orange.

    Note : Passer un feu orange là où on pour­rait s’ar­rê­ter sans diffi­culté et sans danger revient à passer un feu rouge, et est passible des mêmes peines.


    La ques­tion :
    « Doit-on ralen­tir quand on approche d’un feu vert ? »

    À vrai dire, c’est ce qu’on a appris à l’auto-école et c’est encore ce qui y est appris aujourd’­hui si on en croit les sites web concer­nés. La réponse est donc évidem­ment « oui ».

    Main­te­nant à y regar­der de plus près… si celui à 50 km/h réduit sa vitesse à 30 km/h, est-ce perti­nent de deman­der à celui qui est déjà à 30 km/h de réduire la sienne à 15 km/h ? Ça me parait d’un coup moins évident, donc je fouille.


    Le code de la route impose-t-il de ralen­tir en toute situa­tion à l’ap­proche d’un feu vert ?

    Non, ou du moins pas que je sache et je ne vois rien de tel dans la section 5 dédiée aux feux de signa­li­sa­tion lumi­neux (R412–29 à R412–33).

    Il y a une longue liste de cas où la vitesse doit être réduite à l’ar­ticle R413–17 mais l’ap­proche de feux trico­lores n’en fait pas partie. Même dans cet article, « la vitesse doit être réduite » s’in­ter­prète proba­ble­ment comme « la vitesse doit être plus faible » et pas « la vitesse doit être dimi­nuée peu importe à laquelle vous roulez », parce que ça n’au­rait pas vrai­ment de sens.


    Mais à l’auto-école on demande de ralen­tir !

    C’était il y a plus de 20 ans mais je me souviens « ralen­tir » mais aussi « moins de 70 km/h ». Repen­ser aux deux donne un peu plus de sens.

    Règle­men­tai­re­ment, un feu orange dure 5 secondes hors agglo­mé­ra­tion. La distance d’ar­rêt à 70 km/h corres­pond à 2,5 secondes de temps de trajet sur sol sec et un peu moins de 4 secondes quand il pleut.

    En gardant une marge parce qu’on n’a pas envie de faire des arrêts d’ur­gence pour un feu trico­lore, la recom­man­da­tion géné­rale s’ex­plique parfai­te­ment, surtout si on retient qu’elle perdure poten­tiel­le­ment depuis un temps où les vitesses limites étaient supé­rieures :

    On ralen­tit pour arri­ver à 70 km/h, idéa­le­ment moins

    Si on roule à entre 70 ou 80 km/h, ralen­tir à l’ap­proche d’un feu vert ne fait proba­ble­ment pas descendre à moins de 50 km/h. Est-il vrai­ment perti­nent de ralen­tir si on est déjà à 50 km/h ?

    C’est toujours bien de ralen­tir tant que ça ne devient pas une gêne inutile pour les autres.

    À 50 km/h on passe à respec­ti­ve­ment 2,1 et 3,2 secondes d’équi­valent de temps de trajet. Pour un feu à 5 secondes hors agglo­mé­ra­tion, on peut consi­dé­rer avoir une marge suffi­sante pour ne pas avoir de problème d’ar­rêt pour peu que la visi­bi­lité soit bonne.


    Et en ville ?

    En ville, règle­men­tai­re­ment, le feu orange dure 3 secondes. Il suffit de refaire les mêmes calculs.

    À 50 km/h, on a le temps de s’ar­rê­ter mais sans marge de sécu­rité si la chaus­sée est humide. Personne ne souhaite voir des frei­nages d’ur­gence à chaque feu donc il est préfé­rable de ralen­tir. La recom­man­da­tion sera d’au­tant plus forte si la géné­ra­tion qui vous apprend à conduire a vécu les 60 km/h en ville ou s’ils repro­duisent ce que cette géné­ra­tion leur a appris.

    Et si on est à 30 km/h ou moins ?

    À 30 km/h on parle respec­ti­ve­ment de 1,6 et 2,2 secondes de temps de trajet. Comme rappelé plus haut, s’il est toujours bien de ralen­tir tant que ça ne devient pas une gêne inutile pour les autres, la marge est suffi­sante pour ne pas avoir de problème d’ar­rêt.

    Dans les villes comme Lyon et Paris, ceux qui sont en dessous de la limite de vitesse de 30 km/h et qui adaptent déjà leur allure à leur visi­bi­lité comme celle des autres usagers ne devraient pas avoir à signi­fi­ca­ti­ve­ment ralen­tir à l’ap­proche d’un feu vert (ceux d’au­tant plus que les autres moto­ri­sés derrière ne respectent déjà pas tous les 30 km/h ni les distances de sécu­rité, donc ralen­tir à des vitesses trop basses dans une situa­tion où les autres ne s’y attendent pas pour­rait géné­rer plus de problèmes qu’en résoudre).

    Et à vélo ?

    Je ne connais pas les distances de frei­nage à vélo, qui dépendent non seule­ment de la chaus­sée mais aussi du type de frein (frein sur jante ou sur disque), du type de tirage (canti­le­ver ou frein disque), de la garni­ture du patin, de si la jante est mouillée, de si vous équi­li­brez au mieux ou pas les freins avant et arrière, de si vous bloquez une roue… et même du poids du cycliste.

    Toute­fois : Si vous foncez à 45 km/h, il faut proba­ble­ment ralen­tir. Si vous avez une vitesse de ville entre 15 et 25 km/h, ça passe proba­ble­ment très bien sans ralen­tir signi­fi­ca­ti­ve­ment.

    À côté de ça, si vous n’êtes pas sur une bande ou piste proté­gée, alors que vous ne savez pas ce qui est derrière vous et à quelle distance, alors que proba­ble­ment l’au­to­mo­bi­liste ou le chauf­feur de bus ne prévoit pas de ralen­tir sur un feu vert (voire risque d’ac­cé­lé­rer pour ne pas prendre le rouge), ça peut être dange­reux de ralen­tir signi­fi­ca­ti­ve­ment.


    Ils viennent d’où tes chiffres ? Je ne suis pas d’ac­cord

    On trouve plein de données diffé­rentes sur les temps d’ar­rêt, distance de frei­nage sur sol sec et distance de frei­nage sur sol mouillé. J’ai écarté celles qui se basent sur des formules mnémo­tech­niques rapides et j’ai tenté de prendre un truc qui semblait cohé­rent. Si vous avez une source d’au­to­rité, je suis preneur.

    Voici mes données sources :

    VitesseRéac­tion (1s)Frei­nage à secFrei­nage mouillé
    20 km/h 6 m2,5 m 5 m
    30 km/h 8 m 5 m 10 m
    50 km/h14 m15 m30 m
    70 km/h19 m27 m54 m
    80 km/h22 m35 m70 m
    90 km/h25 m43 m86 m

    Et ce que ça veut dire en distance d’ar­rêt total et en équi­valent de temps de trajet à la vitesse cible :

    VitesseArrêt sol mouillé Arrêt sol mouillé
    20 km/h 8 m1,5 s10 m1,9 s
    30 km/h13 m1,6 s17 m2,2 s
    50 km/h29 m2,1 s41 m3,2 s
    70 km/h46 m2,4 s68 m3,8 s
    80 km/h57 m2,6 s85 m4,2 s
    90 km/h69 m2,7 s102 m4,4 s

    C’est quoi cette asté­risque sur « On ne peut pas deman­der aux véhi­cules de s’ar­rê­ter immé­dia­te­ment lorsqu’un feu passe au rouge (*) » ?

    Les feux piétons n’ont pas de feu orange. On consi­dère qu’un piéton s’ar­rête presque immé­dia­te­ment s’il en a besoin, et arrive à faire un demi pas en arrière s’il se fait surprendre au moment même où il amorce sa traver­sée.

    Ça implique toute­fois une chose que les auto­mo­bi­listes n’ont pas toujours en tête : Un piéton peut légi­ti­me­ment être sur le passage protégé lorsque son feu est rouge pour peu qu’il ait commencé sa traver­sée au feu vert.

    C’est une situa­tion normale et ça ne sert à rien de le klaxon­ner, de l’in­sul­ter ou de lui mettre la pres­sion. Il va juste conti­nuer sa traver­sée à son rythme. Soyez patients.

  • Dis tonton, c’est quoi le problème avec le jeu antifa ?

    Il y a proba­ble­ment eu trop de lignes écrites mais j’ajoute les miennes pour savoir les retrou­ver sur un espace pérenne.

    Résumé rapide du contexte : La FNAC a retiré des ventes le jeu Antifa en réponse à une demande d’ex­pli­ca­tions d’un syndi­cat de police réputé proche de l’ex­trême droite.

    « Ce jeu est-il un appel à la violence ?

    Oui, non, ou en tout cas pas plus que la plupart des autres jeux de société.

    La plupart des actions du jeu sont plus qu’ac­cep­tables, et la méca­nique est des plus clas­siques : actions, gestion, hasard. Dans les cartes de plani­fi­ca­tion on retrouve le collage d’af­fiche, le tour­noi spor­tif, la commé­mo­ra­tion, etc. Même dans la caté­go­rie « riposte » on trouve rassem­ble­ment, mani­fes­ta­tion et occu­pa­tion des lieux.

    Liste de cartes d'activités.
- 5 petites cartes "activité" format carte de crédit avec vidéo, article, podcast, table de presse, pétition.
- 3 grandes cartes activité avec collage d'affiches, distribution de tracts, fresque murale.
- 4 cartes initiative avec concert de soutien, tournoi sportif, rencontre débat, commémoration.
- 4 cartes riposte avec manifestation, action offensive, rassemblement, blocage/occupation.
    Liste des plani­fi­ca­tions d’ac­ti­vi­tés

    J’en­tends que les dessins donne­ront des boutons aux dépu­tés du RN mais on est loin de la méca­nique décrite par ces derniers, qui était en réalité tirée de leurs fantasmes et pas tirée du jeu.

    Pour autant, oui on parle blocage/occu­pa­tion, oui il y a une carte « action offen­sive » et un élément « caca­tov ».

    « Ok donc c’est quand même violent et au moins se mettre dans la peau de personnes qui ne respectent pas la loi alors

    Je suis très étonné que ce soit un sujet. Une grande majo­rité œuvres vendues font réfé­rence à des situa­tions qui feraient passer le jeu antifa pour un jeu de Bisou­nours. Les livres et films qui nous font incar­ner un crimi­nel sont légion dans les rayon­nages.

    Même dans les jeux, on parle très souvent d’éli­mi­ner les autres joueurs. On a eu des jeux vidéos sur la guerre mondiale qui permettent aux joueurs d’in­car­ner les deux camps. Dans Coun­ter Strike on incarne aussi des terro­ristes.

    La problé­ma­tique n’est pas nouvelle. Je me rappelle aussi les contro­verses du jeu vidéo Carma­ged­don en 1997 dont l’objet est d’écra­ser le plus de passants possibles avec une voiture faite pour. C’était il y a 25 ans et Antifa aurait plutôt fait rire en compa­rai­son.

    Côté jeux de société j’ai dans mes cartons le jeu Bang! où doit tuer les autres joueurs avant d’être tué. Dans Mono­poly il faut mener l’ad­ver­saire à la banque­route. Dans Loups Garous il faut tuer des villa­geois. Dans Colt Express il faut voler un train et tirer sur les autres sans se faire prendre par le shérif. Dans Magic Maze il faut voler un super­mar­ché. Dans Sabo­teur on parle de sabo­tage. Dans Risk et dans Diplo­macy il faut faire la guerre et élimi­ner tota­le­ment le voisin. Ce n’est qu’un court extrait parmi des jeux primés ou célèbres.

    Le jeu Antifa a d’ailleurs été mis à l’hon­neur dans une sélec­tion FNAC au début du mois avec 5 autres jeux mili­tants. L’un de ces jeux orga­nise une révo­lu­tion. Un autre permet de prendre la place d’un dicta­teur.

    Diffi­cile de croire que le problème soit dans les cartes du jeu Antifa qui lui n’in­vite pas expli­ci­te­ment à la violence. Soyons honnêtes, tout ceci n’est qu’un prétexte pour autre chose.

    « Ce serait quoi le problème alors ?

    Tout est poli­tique.

    Le message qui a provoqué le retrait du jeu par la FNAC ne parle d’ailleurs pas d’in­ci­ta­tion à la haine ou à la violence. Il parle de « mettre en avant les antifa ». C’est ça le problème pour ce syndi­cat de police.

    Le fait que ce soient des dépu­tés du Rassem­ble­ment Natio­nal et un syndi­cat poli­cier proche de l’ex­trême droite qui veuillent bannir un jeu sur l’an­ti­fas­cisme n’est pas une coïn­ci­dence, c’est l’objet même de l’af­fron­te­ment.

    Qu’on y fasse droit est un problème (et que ce soit via une enseigne fondée par un anti­fas­ciste mili­tant rend la chose encore plus déli­cate).

    « Ce jeu là est donc poli­tique, ça change tout !

    C’est effec­ti­ve­ment un jeu ouver­te­ment mili­tant, dans une mouvance acti­viste qui s’au­to­rise à aller plus loin que deman­der genti­ment aux tiers d’ar­rê­ter d’être des fascistes. C’est même à l’ori­gine d’abord un maté­riel de forma­tion mili­tante réalisé sous forme de jeu. Je recom­mande l’émis­sion de David Dufresne avec l’au­teur du jeu, qui explique bien le contexte (on commence à parler du jeu à partir de la minute 45).

    Oui c’est poli­tique.

    Pour autant… On a des films poli­tiques. On a des chan­sons poli­tiques. On a des livres poli­tiques. Tout ça est souvent à la fois plus violent et bien plus expli­cite que ce jeu Antifa. On aurait pour­tant tout le monde vent debout si on imagi­nait les censu­rer. Ça s’est d’ailleurs déjà produit.

    On vend même à la FNAC des livres d’Hit­ler, de Musso­lini, de Soral et d’autres, dont certains dans des éditions à objec­tif ouver­te­ment fasciste qui là méri­te­raient poten­tiel­le­ment d’être reti­rés des ventes.

    Avoir des œuvres poli­tiques et/ou mili­tantes n’est pas le problème, et ne devrait pas l’être.

    « Mais là c’est un jeu. Un jeu n’a pas à être poli­tique !

    Vrai­ment ?

    La vraie diffé­rence est peut-être effec­ti­ve­ment liée qu’ici il s’agit d’un jeu de société et pas d’un livre ou d’un film. Dans l’ima­gi­naire c’est peut-être un terrain apoli­tique, ou du moins non-radi­cal.

    Ce serait une erreur. Je ne refe­rai pas une liste à la Prévert comme plus haut mais même l’ul­tra clas­sique Mono­poly est à l’ori­gine un jeu mili­tant anti-capi­ta­liste. Pourquoi faudrait-il bannir le message poli­tique de ces œuvres plus que d’autres ? À quel titre ?

    Je recom­mande à ce propos la lecture de Roma­ric Briand, auteur de jeux de socié­tés :« Que l’on puisse affir­mer au XXIème siècle que quelque chose comme le sport, comme le jeu-vidéo, comme le jeu de société ne doive ou ne puisse pas être poli­tique est propre­ment fasciste. » […] « La polé­mique a été analy­sée comme étant un affron­te­ment entre des fascistes et des anti­fas­ciste. L’autre affron­te­ment se trou­vait une fois de plus dans la confis­ca­tion de la parole poli­tique à un domaine de la vie publique. Hier le sport, aujourd’­hui le jeu, demain, vous verrez c’est la poli­tique qui ne sera plus poli­tique. » […] « Le désastre, c’est cette apoli­­ti­­sa­­tion rampante qui n’est qu’un autre nom du fascisme. »

    Que l’ex­trême droite veuille bannir les messages poli­tiques dans les œuvres cultu­relles ou ludiques, c’est une mauvaise chose mais c’est attendu. Qu’ils s’en prennent d’abord aux œuvres anti­fas­cistes devrait aler­ter très fort. Qu’on y fasse droit devient un problème majeur qui mérite mieux que les brèves de presse publiées jusqu’à aujourd’­hui.

  • M12

    Désolé de la redite pour ceux qui savent mais j’ai encore croisé une vidéo d’un cycliste avec bien une centaine de « oui mais tu as grillé le feu ».

    Il y a parfois un petit panneau trian­gu­laire inversé au feu rouge avec dedans un vélo jaune et une flèche de direc­tion.

    Atten­tion, il est vrai­ment petit.

    Il auto­rise les vélos à passer au feu rouge et a le consi­dé­rer comme un céder le passage.

    Photo d'un carrefour. Sur le côté droit, un feu tricolore avec au-dessus un tout petit panneau triangulaire inversé avec dedans un vélo jaune et une flèche de direction.

    Le code de ce panneau est le M12, aussi appelé « céder le passage cycliste ».

    Si vous pensez qu’un cycliste a grillé le feu, regar­dez bien. Il est fort possible qu’en fait il soit passé tout a fait légi­ti­me­ment, grâce à ce petit panneau.

    Le passage du feu rouge est auto­risé dans la ou les direc­tions indiquées par les flèches jaunes du panneau.

    Le plus fréquent permet de tour­ner à droite mais toutes les variantes existent, y compris qui auto­risent toutes les direc­tions.

    Différents panneaux M12, tous triangulaires, pointe vers le bas, avec un vélo jaune sur fond blanc et le triangle entouré en rouge. Sous le vélo jaune, une flèche jaune qui peut être vers la gauche (M12g) vers la droite (M12d), vers l'avant (M12f), en face et à droite (M12fd), en face et à gauche (M12gf), dans les trois directions (M12gfd) ou à droite et à gauche (M12gd)

    C’est la mairie qui peut poser ces panneaux, en fonc­tion de la visi­bi­lité, de la circu­la­tion, et de la situa­tion eu carre­four.

    Ils faci­litent la circu­la­tion à vélo mis c’est aussi une ques­tion de sécu­rité. S’ar­rê­ter au feu rouge est parfois plus dange­reux que de passer.

  • Distance de dépas­se­ment d’un cycliste

    Il faut lais­ser au moins 1 mètre et demi (1 mètre en agglo­mé­ra­tion) entre le bout du rétro­vi­seur et le bout du guidon lorsqu’on dépasse un cycliste.

    R414–4

    Ce n’est pas une opinion soumise à débat. C’est le code de la route.

    Si l’es­pace n’est pas suffi­sant ou que la circu­la­tion ne permet pas de se dépor­ter sur la voie de gauche, alors on ne dépasse pas et on reste derrière.

    C’est vrai aussi si le cycliste est sur une bande cyclable dédiée ou au redé­mar­rage à un feu (surtout au redé­mar­rage à un feu).

    Il est toute­fois possible de chevau­cher une ligne conti­nue pour opérer le dépas­se­ment d’un cycliste (R412–19).

    « Pas besoin d’au­tant de place, je fais atten­tion »

    Le mètre ou mètre et demi pour le dépas­se­ment c’est vrai­ment le mini­mum.

    En ville, si une voiture passe à un mètre du vélo avec un diffé­ren­tiel de vitesse de 25 km/h, on ne rigole pas du tout. Si c’est un bus, un cycliste non habi­tué risque d’en tomber de vélo.

    Hors agglo­mé­ra­tion, avec un diffé­ren­tiel de plus de vitesse de 50 km/h, un mètre et demi semblera moins que le mini­mum vital. Si c’est un camion, rien que le souffle peut vous aspi­rer et vous faire tomber sous les roues du véhi­cule suivant.

    La réalité c’est que, hors des zones limi­tées à 30 km/h, ces distances mini­males sont déjà trop faibles. On en meurt.

    Si vous le pouvez, dépor­tez-vous entiè­re­ment sur la voie d’à côté pour dépas­ser, comme si vous dépas­siez une voiture, et ne vous rabat­tez pas trop rapi­de­ment derrière.


    « Ça passe, c’est assez large… »

    En géné­ral, non.

    Un vélo stan­dard fait 65 centi­mètres de large et se situe à au moins 40 centi­mètres du trot­toir, du cani­veau ou du bord de route. Une voiture stan­dard fait envi­ron 180 centi­mètres de large et circule géné­ra­le­ment à au moins 50 centi­mètres du bord.

    En ville, il faut donc dans les 4 mètres et 30 centi­mètres pour dépas­ser un cycliste dans les règles.

    Illus­tra­tion d’un calcul simi­laire

    Une voie de circu­la­tion y fait rare­ment plus de 3 mètres (le mini­mum règle­men­taire est de 1,2 mètres, une voie d’au­to­route faite pour rouler à 130 km/h fait 3,5 mètres de largeur).

    Il est donc impos­sible pour un auto­mo­bi­liste de dépas­ser un cycliste de façon régu­lière sans dépas­ser au moins de moitié sur la voie d’à côté. N’es­sayez pas.

    Si la voie fait moins que 3 mètres de large (ce qui est fréquent) ou que le cycliste s’écarte du bord droit à cause de voitures en station­ne­ment (R412–9), l’au­to­mo­bi­liste doit se dépor­ter entiè­re­ment sur la voie d’à côté s’il veut dépas­ser le cycliste.

    Encore une fois, ce n’est pas une opinion soumise à débat. C’est un calcul mathé­ma­tique à partir des règles du code de la route.

    « C’est un sens unique ! Comment je fais moi pour doubler ? Je n’ai pas le choix ! »

    Si la place n’est pas suffi­sante, on ne double pas. C’est simple comme ça.

    On conseille d’ailleurs parfois aux cyclistes de se placer au milieu de la voie dans ces cas là juste­ment pour ça : éviter que des auto­mo­bi­listes ne tentent quand même et se ne provoquent le pire.

    « Je ne vais quand même pas rester derrière un cycliste ! »

    Si c’est néces­saire, si.

    En ville la vitesse un auto­mo­bi­liste peut faire de meilleures vitesses de pointe mais la vitesse moyenne d’un cycliste est légè­re­ment supé­rieure à celle d’un véhi­cule moto­risé.

    Vous ne perdez quasi­ment aucun temps à rester derrière le cycliste en atten­dant de retrou­ver une double voie qui vous permet le dépas­se­ment.


    Hors agglo­mé­ra­tion, le même calcul s’ap­plique. La voie peut faire jusqu’à 50 centi­mètres de plus (mais peut aussi faire bien bien moins), le cycliste peut parfois serrer plus à droite en l’ab­sence d’obs­tacle, mais il faut lais­ser 50 centi­mètres de plus pour le dépas­se­ment.

    Au final les conclu­sions sont les mêmes : Il faut se dépor­ter au moins de moitié sur la voie d’à côté.

    Là non plus, ce n’est pas soumis à débat ou inter­pré­ta­tion.

    « La circu­la­tion est dense, je ne peux pas me dépor­ter sur la voie d’à côté pour doubler ! »

    Dans ce cas, restez derrière et faites preuve de patience. Ce serait pareil avec un trac­teur ou un convoi excep­tion­nel.

    Hors agglo­mé­ra­tion, s’il voit que vous patien­ter derrière, le cycliste pourra parfois se dépor­ter sur l’ac­co­te­ment de droite et vous lais­ser l’es­pace suffi­sant le temps de dépas­ser.

  • Les vélos ne sont pas canton­nés aux pistes cyclables

    Les vélos ne sont pas canton­nés aux pistes cyclables. Ils sont aussi à leur place sur la voie géné­rale et n’ont pas à s’en justi­fier ni à déga­ger le passage.

    Ce n’est pas une opinion soumise à débat. C’est le code de la route.

    Les seules pistes et bandes obli­ga­toires sont celles annon­cées avec panneau bleu et rond (B22a), et au moment où le cycliste croise ce panneau. Le plus souvent ce n’est pas le cas. Les pistes et bandes cyclables sans panneau ou annon­cées avec un panneau carré (C113) ne sont pas obli­ga­toires.

    Même dans le cas d’une piste obli­ga­toire, il peut être légi­time de rouler sur la voie géné­rale paral­lèle. C’est en parti­cu­lier le cas en ville si on vient d’une voie perpen­di­cu­laire sans avoir croisé l’en­trée ou le panneau d’obli­ga­tion de la piste.


    « Mais pourquoi les cyclistes ne prennent-ils pas la piste cyclable ? »

    Sauf excep­tion, un cycliste préfé­rera toujours prendre la piste ou la bande cyclable quand elle est prati­cable et sûre, qu’elle soit obli­ga­toire ou non. S’il ne la prend pas, c’est norma­le­ment qu’il y a une raison.

    Liste non-exhaus­tive des raisons possibles :

    • La piste est occu­pée par des voitures, camion, camion­nettes ou motos ;
    • La piste est fermée ou bloquée par des travaux ;
    • La piste n’est pas utili­sable à cause d’un arbre, un banc, un lampa­daire ou un autre obstacle qui se retrouve au milieu ;
    • La piste est couverte de neige, de feuilles, d’eau, de détri­tus, etc. ;
    • La piste est dans un état qui ne la rend pas prati­cable correc­te­ment ;
    • La piste est parta­gée avec des piétons, voire occu­pée par ceux-ci, rendant la circu­la­tion dange­reuse ;
    • La piste s’ar­rête plus loin bruta­le­ment en impasse ;
    • La circu­la­tion des véhi­cules présents sur la piste se fait à allure plus faible et le cycliste se sent plus proche de l’al­lure des véhi­cules de la voie géné­rale (cas d’au­tant plus fréquent dans les zones limi­tées à 30 km/h) ;
    • Le cycliste est en train d’opé­rer un dépas­se­ment d’un autre cycliste qui se trouve lui sur la bande cyclable, avant d’y reve­nir ;
    • Le cycliste se prépare à tour­ner à gauche, ou à ne pas suivre la même direc­tion que la piste cyclable ;
    • Le cycliste est arrivé par une autre rue et n’a pas croisé l’en­trée de la piste ;
    • La piste est satu­rée du fait d’un trop grand nombre de cyclistes.

    Si vous ne compre­nez pas pourquoi un cycliste prend la voie géné­rale au lieu de la voie qui lui est réser­vée, vous pouvez lui poser la ques­tion poli­ment. Il y a autant de réponses que de situa­tions diffé­rentes et vous pren­drez peut-être conscience de situa­tions hallu­ci­nantes qu’on n’au­rait jamais osé lais­ser passer pour des moto­ri­sés.

    « Ok il a le droit mais il n’est pas obligé de d’emm**** les autres simple­ment parce qu’il a le droit »

    La ques­tion n’est pas d’in­ci­ter le cycliste à emmer­der les autres parce qu’il est dans son droit. La ques­tion c’est d’ar­rê­ter d’em­mer­der le cycliste en croyant qu’il ne l’est pas.

    Même si vous n’êtes pas d’ac­cord avec une raison donnée, ou que vous ne connais­sez pas la raison, ou simple­ment que le cycliste fait un choix sans raison claire, le cycliste est autant à sa place qu’un auto­mo­bi­liste qui fait le choix de prendre cette route plutôt qu’une autre.