Catégorie : Droit d’auteur

  • Univer­sal invoque le DMCA pour deman­der le retrait d’une critique néga­tive

    Il y a peu de temps Google annonce qu’il péna­li­sera le réfé­ren­ce­ment des sites pour lesquels il a reçu des demandes de retrait pour contre­façon (mais pas pour ses propres services, bien entendu). Il est facile de clas­ser de para­noïaques les analyses qui parlent d’un risque impor­tant mais quand on croise ça avec Univer­sal qui invoque le DMCA pour deman­der le retrait d’une critique néga­tive, avec les abus volon­taires passés (vous note­rez que les deux abus viennent de la même société), avec les délires récents où la Nasa se fait suppri­mer ses propres vidéos sous prétextes de viola­tion du droit d’au­teur, ou avec une société qui prétends inter­dire les chants d’oi­seaux au nom du droit d’au­teur … on obtient un très bon moyen pour n’im­porte quelle méga­corp de descendre ses concur­rents dans le moteur de recherche. Ce n’est pas de la science fiction, ça fonc­tionne déjà ainsi. On vient juste d’en décu­pler les effets.

  • Et si on réfor­mait le droit d’au­teur ? (oui, encore)

    La licence globale n’est pas ma solu­tion

    Au fur et à mesure des discus­sions sur le « pira­tage », je me suis toujours posi­tionné contre la léga­li­sa­tion pure et simple des échanges non marchands (même si c’est loin de ne recou­per que ça, on pense tout de suite au P2P).

    Je suis tota­le­ment en phase avec les études qui montrent que cette contre­façon n’agit pas forcé­ment néga­ti­ve­ment, et peut être même posi­ti­ve­ment. Ces études se basent toute­fois sur la tota­lité du contexte actuel. Si ces échanges deviennent légaux, ils se struc­tu­re­ront et il est peu probable que les gens se tour­ne­ront encore vers des solu­tions payantes.

    Je ne pense pas le pallia­tif se trouve dans les pres­ta­tions et services annexes, comme les concerts par exemple. Le cas des concerts est spéci­fique à la musique et ne peut être porté sur tous les autres domaines, et je ne trouve pas souhai­table qu’un artiste souhai­tant travailler chez lui sur du studio ne puisse pas trou­ver sa juste rému­né­ra­tion si son œuvre est perti­nente. C’est la créa­tion elle-même qui doit être rému­né­rée, et pas unique­ment ce qu’il y a autour.

    Pour toutes ces raisons, à défaut de mieux, je souhaite conti­nuer à voir un système basé sur les actes d’achat, de loca­tion, et de repré­sen­ta­tion des œuvres.

    Mais on peut tout de même avan­cer à grands pas

    Par contre, je ne peux accep­ter cette esca­lade conti­nue de la force du copy­right et ces règles inadap­tées aux biens imma­té­riels et à leurs spéci­fi­ci­tés. Je dois pouvoir copier un film pour ma grand mère, casser les DRM d’une œuvre afin de l’ex­ploi­ter comme je le souhaite et d’as­su­rer sa péren­nité, réali­ser ou aller cher­cher des sous-titres pour tel ou tel film, récu­pé­rer les paroles des chan­sons de mes cds, etc.

    À défaut donc de vouloir cette « licence globale », nous pouvons toute­fois refondre le droit d’au­teur pour y appor­ter ou modi­fier des éléments essen­tiels :

    Un « fair use » plus large

    • Auto­ri­sa­tion de tous les usages réali­sés à titre privé sur une œuvre commu­niquée au public, copie, repré­sen­ta­tion, modi­fi­ca­tion, anno­ta­tion, mani­pu­la­tion, etc. acquise de bonne foi (comprendre : s’il ne s’agit pas d’une source mani­fes­te­ment illi­cite)
    • Auto­ri­sa­tion de diffu­sion et copie à titre non marchand (pas de commerce, de compen­sa­tion ou de troc), privé (par de diffu­sion publique ou collec­tive, ni de diffu­sion en aveugle), de façon non orga­ni­sée (pas de consti­tu­tion d’un collec­tif ou d’un groupe dans cet objec­tif, pas d’au­to­ma­ti­sa­tion) d’œuvres indi­vi­duelles (pas de diffu­sion en masse)
    • Auto­ri­sa­tion des usages et diffu­sions publiques et privées, à titre non marchand, des œuvres déri­vées ne remplaçant pas l’œuvre initiale (sous titres des vidéos, mashups, etc.)
    En gros vous n’avez pas plus le droit qu’a­vant de télé­char­ger le dernier Madonna sur les réseaux P2P, ou d’y diffu­ser le dernier Star Wars. Par contre vous avez le droit de faire ce que vous voulez avec vos fichiers, de le distri­buer à une connais­sance avec qui vous en parlez un soir, de diffu­ser vos sous-titres sur un site commu­nau­taire, et de mettre Madonna en fond sonore sur vos diapo­rama de vacances.

    La capa­cité de le mettre en oeuvre, sans taxa­tion

    • Affir­ma­tion que les usages des trois points précé­dents sont consi­dé­rés comme des usages « normaux » des œuvres, et donc compen­sés via les prix de vente ou droits d’au­teurs initiaux dès lors que l’au­teur choi­sit de commu­niquer l’œuvre au public, ce qui exclut donc tout autre taxa­tion indi­recte ou supplé­men­taire
    • Droit de mettre en œuvre ce qui est néces­saire pour permettre dans les faits la mise en œuvre des droits des trois premiers points, ce qui inclut le droit de contour­ner et casser les protec­tions ou limi­ta­tions tech­niques qui en empê­che­rait l’exer­cice ou en limi­te­rait les possi­bi­li­tés
    • Réaf­fir­ma­tion claire sur le fait que le droit d’au­teur ne s’ap­plique qu’aux œuvres indé­pen­dantes et origi­nales : fin de l’ap­pli­ca­tion du copy­right sur tout et n’im­porte quoi.

     Et des droits d’au­teurs limi­tés dans le temps

    • Modi­fi­ca­tion du droit d’au­teur pour passer de 70 ans après la mort de l’au­teur à 20 ans après la première commu­ni­ca­tion au public.
    • Une gestion du droit d’au­teur plus souple pour toutes les œuvres toujours sous droit d’au­teur mais qu’il ne serait pas possible d’ac­qué­rir léga­le­ment et raison­na­ble­ment (plus ou pas encore à la vente, ou aucun accès possible pour l’usage souhaité, etc.)
  • Tolkien, l’an­neau de la discorde

    On parle de droit d’au­teur, d’hé­ri­tiers qui exploitent les oeuvres des grands-parents et qui n’ont qu’un gros porte-monnaie, ou au contraire qui bloquent toute réuti­li­sa­tion et toute vie à l’oeuvre, mais il existe d’autres types de rela­tions des héri­tiers avec l’oeuvre des parents.

    Tolkien, l’an­neau de la discorde, c’est un article de Le Monde à lire abso­lu­ment, tant pour l’his­toire que pour appré­cier le travail d’un jour­na­liste quand il cherche à ne pas faire qu’un entre­fi­let.

    Et quand bien même on en sort avec un senti­ment mitigé, ne serait-ce pas là l’exemple d’un bon équi­libre entre l’au­teur, ses héri­tiers, l’oeuvre, les exploi­ta­tions de diver­tis­se­ment et le public ?

  • Revente de licences logi­cielles

    Il y a des choses qui n’ont l’air de rien, mais avec le dernier juge­ment de la cour de justice de l’union euro­péenne, je me demande si on ne se dirige pas vers une auto­ri­sa­tion d’un marché de l’oc­ca­sion pour le livre numé­rique, au même titre que le papier.

    Il s’agit ni plus ni moins que d’af­fir­mer le droit de revente au déten­teur d’une licence logi­ciel. Or fina­le­ment, au niveau numé­rique, le livre n’est qu’une copie asso­ciée à une licence ou un droit de lecture.

    Un créa­teur de logi­ciels ne peut s’op­po­ser à la revente de ses licences « d’oc­ca­sion » permet­tant l’uti­li­sa­tion de ses programmes télé­char­gés via Inter­net.

    Le droit exclu­sif de distri­bu­tion d’une copie d’un programme d’or­di­na­teur couverte par une telle licence, s’épuise à sa première vente.

    Qu’en pensent ceux qui ont de véri­tables compé­tences juri­diques ?

  • Licence crea­tive commons et attri­bu­tions

    J’ai voulu cher­cher une illus­tra­tion sous Crea­tive Commons pour certains billets, en l’at­tri­buant correc­te­ment via une note en bas de page. Sur le billet précé­dent je suis tombé sur une ancienne publi­cité vintage scan­née ou prise en photo puis publiée sur Flickr et… j’ai décidé de ne faire ni attri­bu­tion ni mention de licence.

    Je me refuse à encou­ra­ger ou parti­ci­per à cette appro­pria­tion du bien commun et cette dérive du « tout sous droit d’au­teur ». Désor­mais j’ap­plique­rai stric­te­ment ce qui est prévu par la loi : Le droit protège une œuvre origi­nale et intel­lec­tuelle. Quand il n’y a aucun de ces deux quali­fi­ca­tifs, il n’y aucun droit asso­cié. Je n’ac­cepte pas que certains re-priva­tisent l’es­pace public et s’at­tri­buent des exclu­si­vi­tés ou des droits d’au­teur sans légi­ti­mité.

    C’est vrai pour un simple scan, pour une photo­gra­phie d’un objet cadré et gérée sans inten­tion ou travail intel­lec­tuel, mais aussi pour des photos de monu­ment, de vacances, et plus géné­ra­le­ment tout ce qui ne présente ni travail de l’es­prit ni origi­na­lité.

    Je relayais déjà un peu la ques­tion dans un ancien billet, mais je suis certain que S.I.Lex ou d’autres ont des billets plus précis sur la ques­tion. Si quelqu’un les retrouve, qu’il n’hé­site pas à les parta­ger en commen­taire.

    J’au­rai bien mis une illus­tra­tion de Capi­tain Copy­right en illus­tra­tion, mais je ne suis pas certain d’en avoir le droit… (ironie, quand tu nous tiens)

  • Tous ces délits jugés moins graves que le partage de la culture

    La liste n’est pas neuve mais elle est éclai­rante. Nous saurons que nous aurons avancé dans la ques­tion des droits d’au­teurs quand la répres­sion ne sera plus dispro­por­tion­née.

    Tous ces délits jugés moins graves que le partage de la culture

    Côté échelle pénale, parta­ger le dernier tube à la mode c’est aussi grave que l’éva­sion d’un détenu, l’as­sis­tance à l’eu­gé­nisme, le vol, ou l’ex­pé­ri­men­ta­tion biomé­di­cale à l’insu d’au­trui. Plus marrant, vous risquez moins à expo­ser autrui à un risque immé­diat de mort par une viola­tion déli­béré d’une obli­ga­tion de sécu­rité, à harce­ler sexuel­le­ment, ou à faire des propo­si­tions sexuels à un mineur de moins de 15 ans par voie élec­tro­nique. Côté civil si vous avez partagé un bon giga-octet de chan­sons, l’ac­cu­sa­tion parle en millions dans certains pays.

    Bien entendu il s’agit de maxi­mums, proba­ble­ment pas perti­nents et non utili­sés. Ces maxi­mums sont utiles car on fait entrer la contre­façon indus­trielle dans la même caté­go­rie. Mais même dit comme ça, ce sont aussi des maxi­mums pour les autres délits. Le pire harcè­le­ment sexuel imagi­nable vous fait risquer trois fois moins que parta­ger des oeuvres sous droit d’au­teur.

    A quand la révi­sion de l’échelle pénale ?

     

  • Rame­ner le droit d’au­teur de 70 à 20 ans

    Pour le type de créa­tion qui est le plus proche de ta sensi­bi­lité, tu trouves raison­nable qu’il béné­fi­cie d’une protec­tion plus longue que tous les autres.

    […]

    Un projet doit s’au­to­fi­nan­cer et déga­ger des béné­fices dans l’an­née ou les suivantes, autre­ment c’est un échec. La faible proba­bi­lité que le projet que vous avez financé se révèle indé­mo­dable et conti­nue de géné­rer des profits pendant des décen­nies est une chance pour l’in­ves­tis­seur, mais ça n’a pas sa place dans dans un projet de déve­lop­pe­ment sérieux.

    […]

    L’im­por­tant c’est de se débar­ras­ser des durées de protec­tion actuelles d’une vie ou plus. Ces longues périodes sont clai­re­ment néfastes pour la société, puisqu’elles gardent la plupart de notre héri­tage cultu­rel commun bloqué même long­temps après que la majo­rité des produc­tions aient perdu toute valeur commer­ciale pour les ayants droits. C’est une perte sèche écono­mique­ment parlant, et un scan­dale cultu­rel­le­ment parlant.

    L’ar­gu­ment prin­ci­pal est qu’en cas de réus­site, la renta­bi­lité ne demande pas plus de quelques années. En cas d’échec ce n’est pas avoir un droit d’au­teur à vie qui chan­gera fonda­men­ta­le­ment la renta­bi­lité. Tous ceux qui tablent sur un inves­tis­se­ment finan­cier de la créa­tion tablent de toutes façons sur une renta­bi­lité très courte.

    Personne ne calcule cette renta­bi­lité sur 170 ans. Parfois c’est une bonne surprise mais ce n’est pas cela qui incite à l’in­ves­tis­se­ment, et la balance entre le béné­fice et les contraintes que ça apporte à la société sont large­ment favo­rables.

    Défi­nir une durée arbi­traire a peu de sens mais il faudrait comp­ter sur quelques années, pas sur quelques dizaines. Je remarque que leur réflexion est la même que la mienne il y a quelques temps : faire un compro­mis prag­ma­tique en prévoyant large.

    Rame­ner le droit d’au­teur de 70 à 20 ans ? pourquoi pas. Ça suffit à payer la créa­tion, et c’est un équi­libre qui pour­rait être une base accep­table, à défaut d’af­fir­mer que c’est la base idéale.

    Et vous ? quelle durée pour le droit d’au­teur ? (nous parlons bien entendu de la partie patri­mo­niale)

  • Feds Seized Hip-Hop Site for a Year, Waiting for Proof of Infrin­ge­ment

    S’il fallait encore des exemples des dangers des filtrages et autres inter­rup­tions admi­nis­tra­tives de sites Inter­net, malgré la débacle austra­lienne, en voici un nouveau : Feds Seized Hip-Hop Site for a Year, Waiting for Proof of Infrin­ge­ment

    Un site mis hors ligne par déci­sion admi­nis­tra­tive sans mise en accu­sa­tion ni procès, pendant plus d’un an, sur demande non moti­vée d’en­tre­prises privées, puis retourné à son proprié­taire sans expli­ca­tion autre que l’ab­sence de charges.

    Sur un tout autre plan, le désor­mais célèbre megau­pload ne sera fina­le­ment pas mis en accu­sa­tion. Le site a été mis hors ligne, la boite a été tuée, les données légales et payées proba­ble­ment perdues, tout ça sur ordre des auto­ri­tés US et au final des juges améri­cains avouent qu’il n’y aura certai­ne­ment pas de procès car rien dans toute cette histoire n’est soumis à la loi US. Quoi qu’on pense du site en ques­tion, la possi­bi­lité de tels actes unila­té­raux et sans moti­va­tion judi­ciaire fait froid dans le dos.

  • La protec­tion du droit d’au­teur, fossoyeur de la liberté d’ex­pres­sion ?

    Pour la deuxième année consé­cu­tive, la France est le seul pays d’Eu­rope, le seul pays occi­den­tal (avec l’Aus­tra­lie), où RSF consi­dère qu’il y a de graves problèmes de liberté sur Inter­net.

    La carte est éclai­rante. Si elle ne vous fait pas hurler, je ne peux plus rien faire.

    La protec­tion du droit d’au­teur, fossoyeur de la liberté d’ex­pres­sion ?

  • Du Bon usage de la pira­te­rie

    Je ne saurai résu­mer telle­ment c’est riche, mais si vous suivez mes peregri­na­tions au pays des droits d’au­teurs et de la propriété intel­lec­tuelle, je ne peux que vous inci­ter à prendre une soirée pour lire Du Bon usage de la pira­te­rie, de Florent Latrive. On y retrace de l’his­to­rique, des enjeux, des exem­ples…

    C’est long, et certains chapitres sont trop enga­gés, mais je vous recom­mande au moins la lecture des chapitres 1 et 6. Sérieu­se­ment. Je ne résu­me­rai pas ici.