Auteur/autrice : Éric

  • Trois prio­ri­tés

    Je parle souvent poli­tique. Il y a plein de choses à faire mais au fur et à mesure je dégage quand même trois grosses prio­ri­tés :

    1. Un inves­tis­se­ment (vrai­ment) gigan­tesque dans les écono­mies d’éner­gies, les tech­no­lo­gies de stockage, et la construc­tion aujourd’­hui de moyens de produc­tion à faible carbone.
    2. Revoir le rapport au travail et le partage des richesses asso­cié, dont proba­ble­ment un revenu incon­di­tion­nel, un temps de travail réduit, une fisca­lité qui ne favo­rise pas le proprié­taire des robots, etc.
    3. Une refonte démo­cra­tique de nos insti­tu­tions et des déci­sions qui y sont prises.

    Il n’y a évidem­ment pas que ça qui me tient à cœur, très loin de là, mais j’ai clai­re­ment en tête que ça prime sur quasi­ment tout le reste.


    Oui, je sais, la refonte démo­cra­tique c’est la tarte à la crème mais en réalité c’est de loin le plus simple des trois items. Il suffi­rait de trois mesures rapides pour enga­ger un effet long terme majeur.

    • L’élec­tion de toutes les assem­blées à la propor­tion­nelle inté­grale.
    • Un mode de scru­tin moins pourri que le scru­tin majo­ri­taire à deux tours(*).
    • Un bulle­tin unique lors des votes.

    (*) Je ne donne pas mon système de vote favori parce qu’il n’y en a aucun de parfait mais qu’ils sont quasi­ment tous extrê­me­ment meilleurs que notre actuel, faire « bien mieux qu’aujourd’­hui » me suffira.

  • Vous n’êtes pas couvert par votre mutuelle après une démis­sion

    J’ai posé une ques­tion pratique et les réponses me font dire qu’il y a une grande incom­pré­hen­sion sur les règles de porta­bi­lité mutuelle.

    Depuis quelques temps vous conti­nuez à béné­fi­cier de votre ancienne mutuelle profes­sion­nelle à certaines condi­tions après votre départ.

    C’est une vraie avan­cée sociale mais le diable se cache dans les condi­tions. Pour faire court vous avez droit à la porta­bi­lité quand vous avez droit à des indem­ni­tés Pôle Emploi. C’est le cas d’une fin de CDD, d’un licen­cie­ment ou d’une rupture conven­tion­nelle.

    Vous n’avez pas le droit à la porta­bi­lité de la mutuelle en cas de démis­sion.

    Rien. Nada. D’ailleurs vous n’y avez pas droit non plus si on met fin à votre période d’es­sai avant 65 jours et que vous aviez démis­sionné pour prendre ce nouveau boulot (puisque vous n’au­rez pas droit aux indem­ni­tés chômage dans ce cas là).

    Ça veut dire que si vous aviez prévu une ou deux semaines de vacances entre les deux boulots, vous et votre famille ne serez pas couverts pendant cette période. C’est ballot vu que c’est poten­tiel­le­ment une période un peu plus à risque que la normale, surtout si vous comp­tiez faire des travaux ou des excur­sions.

    Que faire ?

    Rupture conven­tion­nelle : Sérieu­se­ment, deman­dez une rupture conven­tion­nelle. Insis­tez. Vous serez couvert par la mutuelle mais vous serez surtout couvert par le Pole Emploi si jamais le futur boulot ne fonc­tionne pas, ou si vous avez un gros acci­dent dans les semaines qui suivent, ou si une pandé­mie se déclenche, ou peu importe ce qu’il se passe. Insis­tez.

    Démis­sion en début de mois : Certains enga­ge­ments de mutuelle sont mensuels et votre rési­lia­tion se fera à la fin du mois courant. Si c’est votre cas (à véri­fier avec votre mutuelle et votre dépar­te­ment des ressources humaines) et que vous démis­sion­nez les premiers jours du mois, ça vous laisse quelques semaines de vacances avec une mutuelle.

    Finir par des congés : Vous pouvez, s’ils sont d’ac­cord, deman­der à votre ancien employeur de diffé­rer la date admi­nis­tra­tive de votre départ et de couvrir la période par des congés payés (qu’ils vous aurait payé de toutes façons) ou des congés sans solde. Vous serez alors encore sous contrat, donc couvert par la mutuelle. Ça ne coûte rien à l’em­ployeur mais ça reste une faveur que vous lui deman­dez.

    Commen­cer par un congé sans soldes : Vous pouvez, à l’in­verse, expo­ser la situa­tion à votre ancien employeur et lui deman­der de commen­cer par une ou deux semaines de congés sans solde. Là aussi ça ne lui coûte rien mais ça peut être un peu plus déli­cat à deman­der.

    Payer une conti­nuité : Certaines mutuelles vous permet­tront de payer pour assu­rer la conti­nuité. Atten­tion toute­fois à ne pas vous enga­ger pour 12 mois.

    Prendre une mutuelle relai : Enfin, sinon, vous pouvez contrac­tua­li­ser une nouvelle mutuelle. Le problème c’est qu’elles sont quasi­ment toutes avec un enga­ge­ment de 12 mois. Si théo­rique­ment avoir un nouveau travail avec une mutuelle obli­ga­toire peut (à véri­fier) être un motif légi­time de rési­lia­tion, votre mutuelle pour­rait faci­le­ment vous oppo­ser que vous étiez au courant de ce nouveau travail au moment de la signa­ture, et que vous ne pouvez donc pas vous en sortir ainsi.

  • Poste de télé­tra­vail plus raison­nable

    Dans le billet précé­dent j’ai présenté les coûts d’un poste de télé­tra­vail, avec du maté­riel très haut de gamme.

    Mais Éric, personne n’achète cette gamme de maté­riel en réalité !

    En fait si. J’ai fait un petit sondage pour confir­mer et suivant les items il y a quand même 10 à 20% de gens qui répondent être finan­cés sur le haut de gamme. C’est abso­lu­ment non repré­sen­ta­tif mais ça suffit à dire que ça arrive.

    Main­te­nant, même pour ceux qui ont ce haut de gamme, ce n’est pas forcé­ment sur toute la liste pour autant.

    L’enjeu n’est pas tant de dire « c’est ça qu’il vous faut », même si ça pour­rait être légi­time, mais de pous­ser le curseur à fond pour montrer que même à ce niveau de gamme et en cumu­lant toute la liste, on arrive à une somme tout à fait raison­nable et accep­table (voire peu signi­fi­ca­tive).


    Ok, c’est dit, main­te­nant on fait quoi si on veut être plus modéré ?

    C’est là que je suis embêté parce que savoir sur quoi vous voulez appuyer est très person­nel.

    Les deux vrais coûts de ma grille person­nelle sont le fauteuil de bureau et l’écran. Le reste est acces­soire. Le problème c’est que c’est aussi ceux sur lesquels j’ai envie de faire le moins de conces­sions.

    Votre dos est le seul maté­riel qui ne se remplace pas

    Un vrai fauteuil ergo­no­mique coûte cher mais on parle de votre santé. Même finan­ciè­re­ment, si sur les 10 ans de la durée de vie garan­tie du siège vous avez cinq jours d’ar­rêt cumu­lés pour mauvaise posi­tion (mal de dos, migraines ou douleurs cervi­cales, tensions au poignet), vous venez de repayer votre siège. Oups.

    Les quatre réfé­rences que j’ai en tête sont toutes au-delà de 1000 €. On peut trou­ver moins cher en descen­dant en gamme mais je n’ai pas de réfé­rence à vous propo­ser. La solu­tion réel­le­ment recom­man­dée est souvent de partir sur de l’oc­ca­sion. On divise la facture par 2 ou 3 sans forcé­ment chan­ger la qualité.

    À défaut, cher­chez un fauteuil de bureau réglable mais évitez les baquets gaming qui semblent confor­tables, ils vous tuent souvent le dos à petit feu sans que vous vous en rendiez compte parce qu’ils confondent confort et bonne posi­tion ergo­no­mique.

    Inves­tir dans l’écran est vite rentable,
    même finan­ciè­re­ment

    J’ai pris un écran très cher. Juste en dessous il y a le Samsung 49G9 à 1150 € HT, qui corres­pond à 2x 27″ côte à côté. Pour faire bais­ser la facture vous pouvez aussi prendre effec­ti­ve­ment 2x 27″ qhd sépa­rés, ou même un seul 32″ 4k. Bref, on peut descendre entre 300 et 500 € HT sans être trop mauvais.

    Pour autant, si vous avez un enfant en primaire, obser­vez-le faire ses devoirs. Le gros du temps il le passe à alter­ner le regard entre son cahier et le livre, et reprendre la posi­tion dans la page à chaque fois.

    Vous c’est pareil chaque fois que vous bascu­lez entre des fenêtres qui ne sont pas visibles en même temps, ou que vous défi­lez verti­ca­le­ment sur une même fenêtre parce que tout ne s’af­fiche pas. On parle de milli­se­condes mais en perma­nence. Cumulé, en ajou­tant les quelques cas où vous mani­pu­le­rez effec­ti­ve­ment des tableurs ou des sche­mas extra­longs, ça finit assez faci­le­ment par justi­fier les 10 à 30 € de surcoût mensuel, c’est à dire un dixième de jour­née par mois.

    Au final tu es en train de justi­fier le haut de gamme et dire que c’est quand même ça qu’il faut ache­ter ?

    Un peu. Bon, pas sur tout.

    Le bureau j’ai pris un assis-debout élec­trique. On peut se passer de ce luxe. Je tiens juste à la hauteur réglable, toujours pour des ques­tions ergo­no­miques et de dos. Un bureau réglable à mani­velle on peut descendre à 250 €

    Le micro j’ai pris du très haut de gamme. On me dit que Tonor a une version sur bras arti­culé qui donnera quasi­ment aussi bien pour un quart du prix.

    On peut en dire autant sur la webcam liée à l’écran externe. N’éco­no­mi­sez pas trop, il est impor­tant qu’elle sache bien gérer la faible lumi­no­sité, mais on n’a pas besoin de 1080p pour la visio. On doit pouvoir trou­ver moitié moins cher.

    Je tiens cepen­dant sur le reste. Peut-être n’avez-vous pas besoin d’un casque audio à réduc­tion de bruit active, mais si c’est le cas alors il y a une telle diffé­rence d’ef­fi­ca­cité que le prix que j’ai donné se justi­fie. Peut-être rece­vez-vous déjà très bien le WiFi de votre box dans votre bureau, mais sinon il est indis­pen­sable d’amé­lio­rer ça.


    Ok, ça mène à combien tout ça ?

    Et bien ça dépend, juste­ment. Ça dépend de là où vous me faites confiance sur le « c’est justi­fié » et de là où vous avez déjà ce qu’il vous faut.

    Mettons qu’on ne touche pas à la chaise, qu’on passe à la gamme en dessous en écran, en bureau, micro, webcam, qu’on garde casque et réseau CPL et qu’on prend un éclai­rage moins cher, on vient de reti­rer 30 % à mon prix précé­dent et on tombe à envi­ron 60 € HT mensuels sur 5 ans pour quelqu’un qui a besoin de toute la liste.

    Mettons qu’on prenne un bon fauteuil Ikea simple, un écran unique, un casque correct mais sans anti-bruit, on peut tomber à ⅓ du prix et on tombe à envi­ron 30 € HT mensuels sur 5 ans pour quelqu’un qui a besoin de toute la liste.

    Si on se concentre sur le fait qu’une partie non négli­geable des dev seront déjà très équi­pés et n’au­ront pas envie d’avoir tout en double, on va tomber sur des prix moyens quasi­ment insi­gni­fiants.

    C’est même le message prin­ci­pal : J’ai fait une somme sur toute la liste pour l’exer­cice mais c’est peu repré­sen­ta­tif. En réalité il est probable que le coût moyen soit infé­rieur de moitié, et donc qu’il permette de conti­nuer à envi­sa­ger des choses de qualité sans avoir à affec­ter un budget mons­trueux.

    Bonus : Ce sera proba­ble­ment rentable pour l’en­tre­prise. Le vrai message est celui qui suit.

    Quelques milliers d’eu­ros amor­tis sur 5 ans ça n’est rien au regard d’une petite amélio­ra­tion d’ef­fi­ca­cité ou de moral d’in­gé­nieurs qui coûtent plus de 5 000 € par mois à l’en­tre­prise.

  • Poste de télé­tra­vail

    On avance dans beau­coup de boîtes sur le télé­tra­vail mais peu vont jusqu’au bout de la logique. On donne un ordi­na­teur portable, parfois un écran, et vogue la galère. En réalité j’ai besoin de bien plus et non je n’ai pas forcé­ment déjà le maté­riel de qualité dispo­nible pour ça.

    J’ai besoin d’un bureau à ma taille, d’un fauteuil de qualité pour rester huit heures par jour, d’être bien vu et bien entendu pour les visio, d’un wifi qui aille jusqu’à mon bureau, d’un clavier et d’une souris externes de qualité, ainsi que d’un casque pour bien entendre – à réduc­tion de bruit active si possible parce que je ne suis pas toujours seul dans l’ap­par­te­ment, et que je ne maitrise ni les travaux des voisins ni ceux dans la rue.

    Parfois j’ai des choses de la liste, parfois non, parfois pas d’une qualité suffi­sante, parfois j’ai simple­ment envie d’en avoir la pleine jouis­sance sans me dire que je suis contraint par l’usage profes­sion­nel, et je n’ai en tout cas aucune envie de prendre à mon compte le rempla­ce­ment ou la répa­ra­tion de maté­riels qui servent en réalité prin­ci­pa­le­ment pour mon acti­vité sala­riée.

    Bref, il est du rôle de l’en­tre­prise de four­nir un poste de travail de qualité pour le télé­tra­vail, de la même façon qu’elle le fait déjà pour ses propres locaux. Ça ne devrait pas être option­nel. Ça l’est d’au­tant moins quand l’ex­ten­sion du télé­tra­vail permet à l’en­tre­prise de payer moins de postes de travail dans ses locaux.


    Alors quoi ? J’ai fait l’exer­cice en cher­chant du très haut de gamme (voir ce second billet à ce sujet). Ça parait exagéré mais vous risquez d’être surpris dans la suite.

    € TTC€ HT
    Bureau assis-debout élec­trique
    Flexis­pot EC5 ou E6 (suivant la hauteur)
    + Plateau Ikea Linn­mon 150×75
    450375
    Fauteuil ergo­no­mique
    – Herman Miller Embody
    – RH New Logic 220
    – Kinnarps 9000
    – BMA Axia
    1 5001 250
    Webcam haute qualité
    Logi­tech StreamCam
    160135
    Micro HD + Bras arti­culé
    Blue Yeti­cas­ter
    230190
    Casque anti-bruit blue­tooth et filaire
    Bose 700
    320270
    Écran secon­daire très large haute déf.
    avec hub pour réduc­tion du câblage
    Dell U4021QW (40″ 21/9e)
    1 8001 500
    Clavier et track­pad ou souris blue­tooth275230
    Lampe de bureau150125
    Couple de boitiers CPL avec WIFI
    Devolo Magic 2 WiFi
    200170
    TOTAL5 100 € TTC4 240 € HT

    On peut faire tomber 25 % avec un envi­ron­ne­ment moins haut de gamme, ou reti­rer 60 % pour un envi­ron­ne­ment plus basique.

    La réalité c’est que si tout le monde n’aura pas besoin de toute la liste (ou même envie que toute la liste), on ne parle pas de quelques centaines d’eu­ros donnés pour accom­pa­gner le petit maté­riel.


    Et pour­tant, pour ce super haut de gamme qui va impac­ter confort et produc­ti­vité, même en affec­tant l’in­té­gra­lité du maté­riel même à ceux qui n’en ont pas besoin, en le renou­ve­lant à la fréquence ridi­cu­le­ment courte de 3 ans, on arrive à… 120 € hors taxes par mois.

    Sur un amor­tis­se­ment plus réaliste de 5 ans on tombe à 90 € hors taxes mensuels. À ce tarif c’est jouable même pour un indé­pen­dant.

    Mana­gers, entre­prises, direc­tions des ressources humaines, il est temps de vous réveiller et faire un pas raison­nable. Écono­mi­ser 100 € mensuels en ne four­nis­sant pas le maté­riel perti­nent à des sala­riés payés plus de 5 000 € coti­sa­tions sociales incluses. Les 100 à 300 € annuels pour du petit maté­riel qui sont souvent alloués à ce titre ne sont pas au niveau. C’est ridi­cule et mépri­sant.

    Même en ajou­tant une quote-part du chauf­fage, des charges et de la valeur loca­tive de l’es­pace utilisé (oui c’est légi­time), on arrive à moins de 250 € par mois.

    Un poste de travail dans les locaux de l’en­tre­prise, espace et services inclus, c’est beau­coup plus proche de 500 à 1 000 €. Autant vous dire qu’en réalité on ne parle pas de frais, on parle d’éco­no­mies.

    Même pour le télé­tra­vail partiel, pour peu que les présences moins impor­tantes permettent de reti­rer quelques postes ou qu’on vous demande de rembour­ser moins d’abon­ne­ment de trans­port, on s’y retrouve.


    Note : J’ado­re­rais monter un service clef en main pour les entre­prises qui gère l’équi­pe­ment des postes de télé­tra­vail. On n’est alors pas forcé­ment sur ces tarifs mais c’est dans tous les cas large­ment raison­nable pour une entre­prise qui inves­tit vrai­ment sur l’en­vi­ron­ne­ment de travail de ses sala­riés.

    Si ça vous inté­resse d’en parler (soit pour entre­prendre soit pour y sous­crire), faites moi signe. Si jamais il y a assez d’in­té­res­sés pour amor­cer l’idée d’un service de qualité, ça mérite atten­tion.

  • Gran­dir en tant que déve­lop­peur

    « Pourquoi est-ce que mon mana­ger ne me passe pas au niveau suivant ?

    « Pourquoi est-ce que je suis moins bien payé que Paul alors que je suis mani­fes­te­ment plus compé­tent et plus produc­tif ?

    « J’ai l’im­pres­sion qu’il faut passer mana­ger pour évoluer !

    Pour faire simple je classe souvent en junior, expé­ri­menté et senior.

    Le junior est un appre­nant. Il n’est géné­ra­le­ment pas auto­nome, découvre encore souvent certaines tech­nos ou certains concepts courants, mais surtout il n’a pas vu suffi­sam­ment de choses pour iden­ti­fier un problème ou un mauvais choix.

    Si on ne reste que rare­ment junior plus de deux ou trois ans. L’évo­lu­tion qui suit sera d’abord une ques­tion d’im­pact et pas d’ex­pé­rience ou de niveau tech­nique.

    Quel est l’im­pact que vous avez sur la société, sa mission, son busi­ness, les autres membres de votre équipe, de votre dépar­te­ment et de la société ?

    Ce que je demande en géné­ral aux seniors — ou ce que je leur demande pour être quali­fié comme tel — n’est en effet pas dans la connais­sance ou la compé­tence tech­nique.

    On parle de faire gran­dir les juniors et les expé­ri­men­tés dans leur travail, d’être un réfé­rent tech­nique ou humain, d’être un moteur de chan­ge­ment dans la société, de défi­nir le cadre de travail orga­ni­sa­tion­nel ou tech­nique pour les autres. Plus géné­ra­le­ment, il s’agit d’avoir un impact sur les autres, dans son équipe, dans son dépar­te­ment, dans la société.

    Je préfère quelqu’un qui améliore de 5 % l’im­pact de tous ceux autour de lui que quelqu’un qui améliore de moitié sa propre contri­bu­tion indi­vi­duelle.

    Il est aussi possible de juste bien faire son boulot, acqué­rir une très forte produc­ti­vité, deve­nir le seul à four­nir une exper­tise très poin­tue, ou être à l’ori­gine d’un élément majeur de la société. C’est une voie tout à fait légi­time. L’ef­fort à four­nir pour avoir le même impact sera simple­ment beau­coup plus impor­tant et, comme le surhomme n’existe pas, l’im­pact attei­gnable ainsi aura forcé­ment une limite.

    C’est encore plus vrai si on prend conscience que, pour augmen­ter forte­ment sa produc­ti­vité person­nelle, on a faci­le­ment tendance à s’iso­ler et donc à dimi­nuer en paral­lèle son impact exté­rieur.


    Je pense que le mythe du « en France il faut deve­nir mana­ger pour progres­ser » vient de là. Non il ne s’agit pas de deve­nir mana­ger, on peut tout à fait rester dans le pur tech­nique. Il s’agit juste de se rendre compte qu’on a un impact bien plus grand via les autres que via sa propre contri­bu­tion indi­vi­duelle isolée.

    On gagne tous si on se gran­dit tous.

    Ce déclic là fait que parfois un jeune à cinq ans d’ex­pé­rience a immen­sé­ment plus d’im­pact qu’un expert pointu et reconnu avec quinze ans de bagages derrière lui.

    C’est aussi pour ça que, dans les grilles de salaire, le niveau de compé­tences tech­niques ou le nombre d’an­nées d’ex­pé­rience ne sont pas toujours de bons indi­ca­teurs.

  • Gérer les abon­ne­ments

    J’ai vu des sites faire des news­let­ters à la main. C’est beau, c’est effi­cace et c’est un chemin bien maîtrisé pour le visi­teur.

    Je travaille pour un petit site perso et je ne voulais pas avoir à me rajou­ter une charge manuelle de concep­tion ou d’en­voi à chaque mise à jour. En fait je ne veux même pas avoir à gérer moi-même les inscrip­tions.

    On m’a orienté vers une auto­ma­ti­sa­tion inté­res­sante de Mail­chimp : La créa­tion d’une news­let­ter auto­ma­tique à partir du flux RSS.

    Désor­mais j’ai une petite icône @ en bas de page sur le site en ques­tion. D’un clic ils arrivent sur une page Mail­chimp où ils peuvent lais­ser leur email. Ceux qui le font rece­vront un cour­rier le matin à chaque mise à jour du site, avec les derniers conte­nus publiés.

    La mise en page est plus que rudi­men­taire (parce que celle de mon flux RSS l’est) mais le flot est simple à comprendre pour le visi­teur, y compris celui qui ne comprend rien à la tech­nique.


    Mais pourquoi pas RSS ?

    Parce qu’il faudrait que je commence par affi­cher une page de texte à qui veut s’abon­ner. Là j’ai déjà perdu quasi­ment tout le monde.

    Sur cette page de texte il faudrait que j’ex­plique le fonc­tion­ne­ment de RSS à des non tech­no­philes. Honnê­te­ment ils n’en ont rien à faire, ils ne veulent pas savoir (et ils ont raison). Une partie ne sait déjà pas ce qu’est une URL ou faire la diffé­rence entre Inter­net, Google et le navi­ga­teur web. Expliquer RSS en moins d’une heure est une vraie gageure.

    Mettons que j’y arrive et que le visi­teur soit convaincu. Il faut ensuite lui recom­man­der un logi­ciel pour sa plate­forme. Pour certains ça ne posera pas de problème. Pour d’autres choi­sir Mac ou Windows, Intel ou ARM, 32 bits ou 64 bits, iOS ou Android, puis télé­char­ger, lancer l’ins­tal­la­tion sans se poser mille ques­tions, trou­ver l’icône pour lancer le logi­ciel, et c’est diffi­cile à faire sans accom­pa­gne­ment person­na­lisé. Ensuite il faut poin­ter sur le flux, lui expliquer comment en copier l’URL, la faire ajou­ter dans le logi­ciel, avec plusieurs captures d’écran suivant le logi­ciel.

    Et enfin, et ce n’est pas le moindre, il faut que le visi­teur lance régu­liè­re­ment le logi­ciel, rien que pour mon site. Et là, pour les rares qui y sont arri­vés, ça coince. Il le fera une fois, deux fois, puis après trois semaines sans mise à jour il aura oublié et c’est perdu.

    Si tant est qu’il le fasse, vu que je serai proba­ble­ment le seul flux sur son agré­ga­teur, quel sera l’in­té­rêt par rapport à une page de mon site mise en favori et que je lui deman­de­rai de revi­si­ter régu­liè­re­ment ?

    On a essayé.

    Ça fait des années qu’on essaie. J’ai de multiples billets sur le sujet ici. J’en remets régu­liè­re­ment une couche sur les réseaux sociaux, y compris sur le compte asso­cié au site web en ques­tion.

    J’ai tenté de mettre des liens vers une page wiki­pe­dia, vers des tuto­riaux. Je conti­nue à mettre en avant le flux RSS dans les entêtes, dans le bas de page, avec l’icône orange et dans en plein texte. J’en remets même une couche jusque sur le formu­laire d’abon­ne­ment par email, au cas où.

    Je le fais mais c’est plus par mili­tan­tisme. Les tech­no­philes ont juste besoin d’une icône ou d’une décla­ra­tion dans les entêtes. Les autres ne savent de toutes façons pas ce que c’est.

    Même les tech­no­philes convain­cus se détournent de plus en plus de tout ça. Il reste les irré­duc­tibles. J’en fais partie.

    Bref, j’es­saie de pous­ser RSS — il est toujours là — mais il faut propo­ser un autre circuit en paral­lèle, plus simple, plus évident, plus maîtrisé. L’email en est un, ça peut être autre chose.

  • Négo­cier son contrat de travail

    Quand je discute avec mes employeurs j’ai parfois l’im­pres­sion d’être le seul emmer­deur à discu­ter du contenu du contrat de travail. J’y tiens pour­tant. Je ne veux pas m’en­ga­ger à n’im­porte quoi, ou garder en perma­nence une épée au dessus de la tête à cause d’une clause beau­coup trop déséqui­li­brée.

    Je suis agréa­ble­ment surpris parce que visi­ble­ment je ne suis pas le seul. Une un gros tiers d’entre vous semble en faire autant.

    https://twit­ter.com/edasfr/status/1384136682820161538

    Le point essen­tiel :

    Le contrat de travail est au béné­fice de l’em­ployeur.

    Votre salaire et votre poste sont déjà sur la promesse d’em­bauche. Vos moda­li­tés de temps de travail ou conven­tion collec­tive seront les mêmes que les autres, et faci­le­ment prou­vables, donc il vous est inutile d’en avoir une copie à vous.

    Sur le contrat de travail il y a surtout les clauses au béné­fice de l’em­ployeur : l’ex­clu­si­vité, la non-concur­rence, la confi­den­tia­lité, la mobi­lité, le non-débau­chage, la propriété intel­lec­tuelle et j’en passe.

    Tout ça fait partie du deal d’un travail sala­rié mais ça ne se signe que si c’est accep­table et suffi­sam­ment équi­li­bré.

    Comment ça se passe ?

    Les dépar­te­ments RH sont plus souvent récep­tifs à des chan­ge­ments moti­vés et raison­nables qu’on ne le croit.

    Si vous ne compre­nez pas quelque chose ou que vous n’êtes pas certain, posez la ques­tion par email. Si quelque chose vous gêne, propo­sez une modi­fi­ca­tion raison­nable et expliquez pourquoi, là aussi par email.

    Le bon moment

    La première étape c’est de faire ça au bon moment : Quand on discute de l’offre, juste avant de l’ac­cep­ter. Les condi­tions d’en­ga­ge­ment font partie de l’offre, c’est normal de les deman­der, et éven­tuel­le­ment de les discu­ter. Certains trou­ve­ront peut-être ça inha­bi­tuel mais ça ne choquera personne : Deman­dez le brouillon du contrat de travail type à ce moment là.

    C’est toujours faisable après coup à lors des premiers jours de travail quand on vous propo­sera le contrat déjà fina­lisé, mais ça arri­vera comme un cheveux sur la soupe et ça sera bien plus diffi­cile à négo­cier.

    La confiance et la bonne intel­li­gence

    La chose diffi­cile c’est de réfu­ter toute notion de confiance et de bonne intel­li­gence. Bien entendu que vous faites confiance à votre employeur et qu’en cas de problème vous trai­te­rez ça tous deux en bonne intel­li­gence.

    Le truc c’est que le contrat sert juste­ment dans les autres cas, quand il y aura un conflit ouvert que vous ne pour­rez pas le résoudre entre vous en confiance et/ou en bonne intel­li­gence (ou que vous aurez une opinion diffé­rente de la dite bonne intel­li­gence). C’est d’ailleurs pour ça que votre employeur vous en impose un. Là, ce sera le texte qui comp­tera. Si ce que dit le texte n’est pas bon dans ce contexte, alors il faut le chan­ger.

    Peut-être que vos inter­lo­cu­teurs chan­ge­ront et ne seront plus là pour tenir leurs inter­pré­ta­tions ou enga­ge­ments. Peut-être que la société elle-même chan­gera de contrôle et impo­sera une autre vision.

    C’est dans ce contexte qu’il faut discu­ter, et dès qu’on vous parle de confiance ou de bon intel­li­gence, c’est proba­ble­ment cette hypo­thèse qu’il faut rappe­ler.

    Dans tous les cas la confiance et la bonne intel­li­gence sont à double entrée. On ne peut pas vous mettre une clause large et puni­tive qui montre que eux n’ont pas confiance (et préparent le cas du conflit) tout en vous deman­dant à vous de faire confiance.

    L’écrit

    Faites un maxi­mum d’échanges par email, quitte à vous-même faire un résumé de la discus­sion que vous enver­rez par email. Les inter­pré­ta­tions et réas­su­rances qu’on vous donnera (et dans une bien moindre mesure celles que vous aurez résumé et qu’ils n’au­ront pas contesté) leur seront poten­tiel­le­ment oppo­sables si besoin était.

    Faute de faire chan­ger les textes, si les enga­ge­ments oraux vous semblent raison­nables, une possi­bi­lité peut aussi être de repo­ser les inter­pré­ta­tions, réas­su­rances et enga­ge­ments qu’on vous a fait dans le cour­rier qui indique que vous accep­tez leur offre.

    J’ai bien noté dans nos échanges à propos du contrat de travail que […]. Merci de ces éclair­cis­se­ments. Je suis donc heureux d’ac­cep­ter cette offre […]

    Vous pouvez d’ailleurs jouer aussi sur ce que vous ne compre­nez pas (si effec­ti­ve­ment vous ne le compre­nez pas, ne faites pas semblant). Dire « je ne comprends toujours pas […] » est enga­geant parce que ce qu’on vous fait signer tout en sachant que vous ne le compre­nez pas est poten­tiel­le­ment réfu­table plus tard. C’est une bonne réponse si le dépar­te­ment RH vous dit « ta gueule, c’est la version légale, ça ne compte pas et ça ne veut pas dire ce que tu crois » (en plus poli).

    L’is­sue

    Idéa­le­ment vous vous mettez d’ac­cord et vous amen­dez le contrat. Vous pouvez aussi faire un avenant spéci­fique au contrat. Ça permet à l’em­ployeur de ne pas toucher au contrat commun mais vous accor­der des exclu­sions ou modi­fi­ca­tions spéci­fiques.

    À défaut de modi­fi­ca­tions sur le texte lui-même, tout enga­ge­ment ou inter­pré­ta­tion expli­ci­tée par votre employeur a force de contrat, d’où les écrits propo­sés plus haut.

    Enfin, si l’em­ployeur ne lâche rien, à vous de voir quels compro­mis vous voulez faire. Leur refus est toute­fois une infor­ma­tion en soi : Voulez-vous vrai­ment travailler dans une entre­prise qui a des clauses déséqui­li­brées ou inac­cep­tables et un dépar­te­ment RH qui refuse de tran­si­ger intel­li­gem­ment ?

    À quoi faire atten­tion

    Choi­sis­sez vos combats. Vous pouvez négo­cier le contrat de travail mais pas tout le réécrire. Si vous en faites trop, vous aller simple­ment braquer votre inter­lo­cu­teur.

    Foca­li­sez-vous sur les points les plus impor­tants pour vous ainsi sur ceux qui à votre avis sont les plus faciles à entendre pour l’em­ployeur.

    Mon conseil : Si quelque chose est vrai­ment mani­fes­te­ment exces­sif ou illé­gal au point que ça ne pourra jamais être utilisé, n’en parlez pas. Une clause de non-concur­rence illé­gale est tout à votre avan­tage : Vous pouvez espé­rer la faire exécu­ter si elle vous est béné­fique, tout en la faisant sauter si elle se révèle contrai­gnante.

    Mieux vaut porter l’at­ten­tion sur ce qui peut réel­le­ment vous nuire, ainsi que ce qui est border­line ou dont l’in­ter­pré­ta­tion peut varier.

    Voici quelques points auxquels je fais atten­tion (la liste n’est malheu­reu­se­ment pas exhaus­tive) :

    Exclu­si­vité

    Est-ce que je peux écrire un livre en paral­lèle de mon acti­vité ? Est-ce que je peux prési­der une asso­cia­tion non lucra­tive ? Est-ce que je peux faire recom­man­der un ami pour un recru­te­ment ? Est-ce que je peux faire le mentor après d’un déve­lop­peur ou mana­ger plus junior ? Est-ce que je peux contri­buer à des projets open source ou commu­nau­taires ?

    C’est en partie parce que j’ai fait tout ça en paral­lèle de mes acti­vi­tés sala­riés que je suis qui je suis, là où je suis. M’in­ter­dire ces acti­vi­tés c’est en vouloir le résul­tat sans accep­ter de me lais­ser me déve­lop­per.

    Géné­ra­le­ment l’em­ployeur ne trouve rien à redire à ma liste, alors on retire la clause, ou on fait des excep­tions expli­cites à l’écrit. C’est honnê­te­ment une clause très simple à faire amen­der tant qu’on ne prétend pas faire un second boulot plein temps en paral­lèle du premier.

    Non débau­chage

    Cette clause là est en géné­ral bien plus diffi­cile à faire chan­ger parce que les employeurs qui en ont une sont assez soupçon­neux.

    Le problème c’est que toutes les clauses de ce type que j’ai croisé sont exces­si­ve­ment larges. Elles inter­disent en géné­ral toute solli­ci­ta­tion, directe ou indi­recte, de n’im­porte qui.

    Je ne cherche pas à débau­cher mais je ne veux pas de problème si jamais un ancien collègue me rejoint. Je ne veux pas que lui soit mis dans l’im­pos­si­bi­lité de le faire, puisque pour certains employeurs ces clauses sont autant là pour restreindre leurs possi­bi­li­tés des sala­riés actuels que pour éviter le non-débau­chage.

    Un argu­ment qui porte parfois et qui m’est parti­cu­liè­re­ment impor­tant : Est-ce qu’une telle clause aurait pu m’em­pê­cher de vous rejoindre si un ancien collègue travaillait déjà pour vous et que mon ancien employeur était devenu peu coopé­ra­tif entre temps ? Si oui alors c’est inco­hé­rent (si ce n’est pas assumé) ou immo­ral (si ça l’est).

    Secret ou confi­den­tia­lité

    Ces clauses sont géné­ra­le­ment exces­si­ve­ment larges. Elles ne pose­ront proba­ble­ment pas de problème à une grande partie des sala­riés mais permet­tront un arbi­traire total si votre rôle est de commu­niquer à l’ex­té­rieur (confé­rences, recru­te­ment, commu­nauté, etc.).

    De manière inté­res­sante, c’est la seule clause qu’il est plus facile de négo­cier après le début du travail, parce qu’il y a la menace de l’ap­pliquer de façon litté­rale avec « désolé, je ne peux pas, je suis inter­dit par contrat ».

    Quand l’em­ployeur accepte la discus­sion, une solu­tion est de lui faire expli­ci­ter les cas dont il veut se proté­ger. Souvent ces cas sont déjà couverts par défaut par le droit du travail et le secret des affaires, et il n’est pas la peine d’en rajou­ter à ce point.

    J’es­saie d’être assez strict là dessus mais c’est souvent assez diffi­cile à faire amen­der.

    J’es­saie par contre au moins de refu­ser la double contrainte. Je ne peux pas avoir pour rôle de commu­niquer à l’ex­té­rieur (ce qui est proba­ble­ment le cas sur un poste de direc­tion ou mana­ge­ment infor­ma­tique, où au mini­mum on vous deman­dera de parta­ger des infor­ma­tions lors de recru­te­ments) tout en ayant une inter­dic­tion totale et abso­lue de commu­niquer quoi que ce soit.

    À minima j’es­saie donc de faire préci­ser expli­ci­te­ment — idéa­le­ment dans la même clause, à défaut dans les missions — que j’ai un rôle de commu­ni­ca­tion exté­rieure qui demande un certain degré d’au­to­no­mie dans ce que je peux avoir à dire.

    Mobi­lité et réver­si­bi­lité du télé­tra­vail

    Là c’est assez simple : Étes-vous d’ac­cord pour vous dépla­cer là où l’in­dique le contrat de travail, pour les durées indiquées ou de façon perma­nente le cas échéant ?

    Si non, c’est à faire modi­fier. Si l’em­ployeur tient à vous impo­ser une zone large malgré votre oppo­si­tion, c’est peut-être un bon signe de sa façon de voir le sala­rié.

    Même chose pour la réver­si­bi­lité du télé­tra­vail. Si le télé­tra­vail est un élément essen­tiel, ce doit être indiqué comme tel et pas comme un élément sur lequel l’em­ployeur peut reve­nir. Et, s’il y a une réver­si­bi­lité, elle ne doit pas être à l’autre bout de la France.

    Si vous voulez éviter l’ar­bi­traire, vous pouvez aussi tenter de faire ajou­ter des condi­tions pour que les mobi­li­tés ne se fassent qu’à l’oc­ca­sion du dépla­ce­ment de toute l’équipe, ou de tout le bureau, et pas sur des critères indi­vi­duels.

    Temps de travail

    Les proba­bi­li­tés qu’on modi­fie les temps de travail unique­ment pour vous sont extrê­me­ment faibles mais ça mérite d’en parler quand même.

    Peut-être qu’ils ne proposent pas de RTT mais sont en réflexion pour le faire et que vous pour­riez être un premier contrat pour ça, ou que votre rôle / posi­tion pour­rait le justi­fier, ou qu’on peut vous assu­rer par contrat une auto­ri­sa­tion d’un certain nombre de jours de congés sans solde.

    Missions

    J’en parle en dernier parce que c’est ce à quoi on pense tout le temps et qui ne me semble pas forcé­ment le plus impor­tant.

    Toute­fois : Si une mission vous gêne, faites la enle­ver. Si vous voulez faire quelque chose (recru­te­ment, commu­ni­ca­tion exté­rieure, archi­tec­ture, que sais-je…), faites le ajou­ter.

    Autres ajouts

    Autant faire modi­fier des choses n’est pas toujours aisé, autant en faire ajou­ter l’est beau­coup plus qu’on ne le croit.

    On vous parle de congés sans soldes ? Faites-le écrire. On vous parle de forma­tions ou de confé­rences ? Faites-le écrire. On vous parle d’aug­men­ta­tion au bout d’un ou deux ans ? Faites-le écrire.

    Écrire ce qui est évident ou déjà acté ne coûte rien à personne et ça offre toujours un peu de garan­ties au cas où le contexte change dans la direc­tion de l’en­tre­prise.

  • On peut

    Je supporte de moins en moins le « on ne peut pas » en poli­tique.

    Honnê­te­ment, on peut.

    On peut vacci­ner toute la planète en moins de 6 mois. On est capables de monter des centaines ou milliers d’usines du jour au lende­main et de créer de toutes pièces la logis­tique adéquate.

    On peut garan­tir un loge­ment à tous dans le pays. On peut élimi­ner la faim dans le monde et assu­rer une vie décente à tous. On peut faire trans­for­mer notre société vis à vis du climat.

    Je ne dis pas que c’est simple, que c’est sans consé­quences, ou même que c’est souhai­table. Je dis juste qu’aujourd’­hui, au regard des capa­ci­tés tech­no­lo­gies, indus­trielles et humaines de nos civi­li­sa­tions actuelles, l’hu­ma­nité peut quasi­ment tout ce qu’elle veut. Elle n’a qu’à le vouloir.

    Cette diffé­rence entre pouvoir et vouloir est impor­tante en poli­tique.

    Dire qu’on ne peut pas c’est couper le débat en masquant le choix. C’est refu­ser de remettre en cause un exis­tant. Oser dire qu’on ne veut pas est un peu plus humble, c’est oser se regar­der dans les yeux avec ses choix et ses contra­dic­tions.

    Tout ça est parti­cu­liè­re­ment vrai avec l’ex­cuse du « pas les moyens ». En fait on a les moyens. On a la tech­no­lo­gie, les ressources, les compé­tences, la main d’œuvre. Ce qu’on n’a éven­tuel­le­ment pas ce sont des chiffres libel­lés en euros sur une base de données élec­tro­niques quel­conque. Ce qu’on ne veut pas c’est remettre en cause l’or­ga­ni­sa­tion finan­cière et sociale pour choi­sir d’autres prio­ri­tés collec­tives.

    Encore une fois, je ne dis pas que c’est simple et sans consé­quences, ou même souhai­table, mais ça fait réflé­chir.

    En géné­ral quand on aborde la ques­tion on fait surtout face à beau­coup de FUD, cari­ca­tures et fantasmes. Le chan­ge­ment radi­cal est diffi­cile à appré­hen­der, surtout quand ceux qui se posent la ques­tion sont fina­le­ment ceux dont la situa­tion est la plus favo­rable. C’est de bonne foi, pas volon­taire, souvent même pas conscient. C’est juste humain.

    Le savoir, le prendre en compte, cher­cher un peu de recul, permet­trait peut-être d’en­vi­sa­ger autre chose et de dire cette fois « en fait on peut si on le veut vrai­ment, et si on le faisait ? »

    Oui je suis un rêveur, un idéa­liste, un utopique même peut-être. Peut-être qu’on devrait tous l’être, parce que c’est comme ça qu’on avance aussi.

  • Un peu de respect et d’em­pa­thie

    Ce matin Jean-Pierre, ton collègue de bureau, a annoncé avoir débuté son nouveau régime. Tu as le droit de prendre deux fois du dessert mais évite de lancer « super le dessert ce midi, qui en a pris deux fois ? » dans l’open space ; juste pas ce jour là, ou pas formulé ainsi.

    C’est juste une marque de déli­ca­tesse et d’em­pa­thie.


    Tu as oublié le régime de Jean-Pierre ou tu n’avais pas réalisé ce que ça impliquait et tu as effec­ti­ve­ment lancé « super le dessert ce midi, qui en a pris deux fois ? » juste ce jour là dans l’open space ?

    Tu n’as rien fait de grave mais t’ex­cu­ser de cette maladresse montre­rait un peu d’em­pa­thie et de respect envers Jean-Pierre.

    Le vrai fond n’est pas dans la maladresse ou dans l’ex­cuse, même si on peut espé­rer que c’est une évidence pour toi.

    Le vrai fond c’est que, si tu choi­sis de t’ex­cu­ser, ça ne devrait pas géné­rer un torrent de haine contre ton choix de t’ex­cu­ser, ni contre Jean-Pierre ou tous ceux qui choi­sissent de faire des régimes, ni contre les régimes eux-même. Ça devrait encore moins géné­rer des cris au nom de la liberté d’ex­pres­sion et de la défense de notre consti­tu­tion.


    Tu penses que les régimes des maga­zines sont des attrape-nigauds ? Tu crois, tu sais ou tu as lu d’une auto­rité quel­conque qu’il est quand même possible de manger des desserts pendant les régimes, que des écarts ponc­tuels devraient être accep­tables, ou que ces desserts là apportent des éléments indis­pen­sables à la bonne santé ?

    Peu importe, ça n’est pas le sujet. Si tu connais bien Jean-Pierre et que tu sais que ton avis sur le sujet est bien­venu, alors tu pour­ras éven­tuel­le­ment lui dire en privé par ailleurs.

    Pour autant, dans tous les cas, tu évites quand même de lancer dans l’open space cette remarque maladroite vis à vis du dessert de ce midi, pas ce jour là du moins. Ça ne coûte rien et ça montre à Jean-Pierre qu’il compte à tes yeux quand bien même tu ne partages pas ses choix.


    Je dis ça je dis rien mais ça fonc­tionne aussi si tu vends de l’eau en bouteille et que tu exprimes « qui a bu son litre d’eau aujourd’­hui ? » en pleine jour­née sur Twit­ter le jour même du début du rama­dan où un nombre signi­fi­ca­tif de personnes tente de renon­cer un maxi­mum à boire en jour­née, et que tu choi­sis de t’ex­cu­ser de ta maladresse après en avoir pris conscience.

    Ça ne devrait lancer aucune polé­mique pour critiquer le choix de s’ex­cu­ser, aucune pancarte « on ne peut plus rien dire », aucune haine envers les musul­mans et leurs pratiques, aucun mouve­ment parlant de liberté d’ex­pres­sion bran­dis­sant la consti­tu­tion (surtout si c’est au final pour repro­cher à quelqu’un d’avoir exprimé des excuses, soyons un peu cohé­rents).

    On parle d’em­pa­thie et de respect. Vous avez le droit d’être inaptes sur ces émotions de base mais évitez de repro­cher aux autres d’avoir des compor­te­ments humains corrects, et évitez d’en profi­ter pour déver­ser votre haine.

  • CTO, VP engi­nee­ring, mana­ger, … C’est quoi tout ça ?

    Ma matrice est à deux colonnes et à cinq lignes.

    En colonne je place le péri­mètre d’ac­tion. Pour simpli­fier je parle d’hu­main et de tech­nique. Côté humain j’ai le mana­ge­ment et l’ani­ma­tion des équipes, le suivi des livrables en termes d’agenda et de qualité, l’or­ga­ni­sa­tion interne et le budget. Côté tech­nique j’ai les choix tech­no­lo­giques, l’abou­tis­se­ment de la R&D, et l’adé­qua­tion aux besoins.

    En lignes je place la portée des actions. Ça va de la portée indi­vi­duelle jusqu’à la direc­tion de l’en­tre­prise. Les étapes inter­mé­diaires sont assez arbi­traires, elles servent juste à illus­trer..

    HumainTech­nique
    Comité exécu­tif
    Ensemble de la tech
    (sous)-Dépar­te­ment
    Équipe(s)
    Indi­vi­duel

    On joue ?

    Clas­se­ment simple

    De manière géné­rale on a la hiérar­chie suivante :
    CxO > VP > Head > Direc­tor > Staff > Lead

    HumainTech­nique
    Comité exécu­tifVP of Engi­nee­ringCTO
    Ensemble de la techVP of Engi­nee­ring
    Head of Engi­nee­ring
    CTO
    Direc­tor of Archi­tec­ture
    Prin­ci­pal Engi­neer
    (sous)-Dépar­te­mentVP of …
    Direc­tor of …
    Tribe direc­tor
    Staff Engi­neer
    (Lead) Archi­tect
    Équipe(s)Engi­nee­ring Mana­gerLead deve­lo­per
    Indi­vi­duelSenior deve­lo­perSenior deve­lo­per

    Ok mais le CTO ?

    Quand il est seul, le CTO s’oc­cupe à la fois de la tech­nique et de l’hu­main. C’est proba­ble­ment le cas sur la plupart des struc­tures de moins de 25 ingé­nieurs.

    À l’in­verse, parfois sur des grandes struc­tures on a un CTO qui est essen­tiel­le­ment au niveau du comité exécu­tif et des action­naires (la première ligne) et l’opé­ra­tion­nel est laissé à un couple VP of Engi­nee­ring / Prin­ci­pal Engi­neer (la seconde ligne).

    Enfin, on a parfois un CTO co-fonda­teur qui passe la main au fur et à mesure que la struc­ture gran­dit. Il peut alors conti­nuer sur un rôle proche du prin­ci­pal engi­neer en gardant son titre de CTO. Celui qui a le vrai rôle de CTO est alors le vp of engi­nee­ring plus expé­ri­menté qu’on fait venir pour prendre la suite.

    Ok mais en français ?

    En français on a le direc­teur tech­nique qui corres­pond aux quatre cases du haut de la grille, parfois même aux six premières.

    On peut avoir un direc­teur tech­nique qui est au niveau d’un direc­teur de dépar­te­ment (direc­tor of …), sous la respon­sa­bi­lité du DSI. On peut à l’op­posé avoir un direc­teur tech­nique au niveau du comité exécu­tif et un DSI au niveau du dépar­te­ment support infor­ma­tique interne.

    Bref, en français direc­teur tech­nique et DSI ne disent pas grand chose. On sait juste que s’il n’y a pas « direc­teur » mais « respon­sable », alors on n’est pas sur la première ligne de la grille mais à priori sur la seconde (peut-être) ou sur la troi­sième (proba­ble­ment).

    Pire, en France on utilise le terme de CTO sans la conno­ta­tion CxO qu’il a chez les anglo-saxons. On alors un CTO qui n’est pas au comité exécu­tif mais juste un titre relui­sant qu’on donne au respon­sable d’une petite équipe R&D, ou au déve­lop­peur lead de la seule équipe présente.

    L’autre parti­cu­la­rité française par rapport à la grille plus haut, c’est que les rôles humains et tech­niques ont tendance à être fusion­nés, ou à ne pas porter de titres distincts.

    S’il fallait une hiérar­chie ça serait la suivante :
    Vice Président > Direc­teur > Respon­sable > Chef > Lead.

    Atten­tion donc, un direc­teur en France n’est pas un direc­tor anglo-saxon. Ce dernier corres­pond plus à respon­sable en France.

    Pourquoi tout ça ?

    Honnê­te­ment les titres on s’en fout un peu, ou on devrait.

    Pour autant, s’il est réflé­chi, le titre qu’on vous donnera est révé­la­teur du niveau de respon­sa­bi­lité et du niveau de déci­sion où on vous atten­dra. Ça permet d’évi­ter les incom­pré­hen­sions, ou de les résoudre.

    Le titre c’est aussi ce qui sera vu par les tiers à l’ex­té­rieur de l’en­tre­prise. Ça peut impliquer qui on vous mettra en face lors de discus­sions, ou sur quel péri­mètre on vous jugera perti­nent.

    Un ancien titre peut aussi crédi­bi­li­ser un futur poste (mais un titre ronflant pour un rôle qui ne corres­pond pas peut aussi décré­di­bi­li­ser votre posi­tion).