Auteur/autrice : Éric

  • Rente et capi­tal

    Je ne comprends pas la concep­tion du capi­tal en France. On a l’im­pres­sion qu’il ne doit que croitre, indé­fi­ni­ment, et qu’il ne faut vivre que de la rente.

    Du coup on imagine des personnes qui vivront pauvres mais lais­se­ront derrière elles un patri­moine de million­naire.

    Permet­tez-moi : Ça n’a aucun sens.


    Je n’ai jamais caché mon désa­mour pour l’hé­ri­tage de montants impor­tants. Ça joue forcé­ment.

    Cepen­dant, si je meurs à 85 ans, mon fils en aura plus 50. Quel sens cela aurait-il de lui léguer un gros patri­moine alors qu’il aura déjà consti­tué le sien, tout ça pour qu’il repro­duise le schéma à son tour ?

    Le patri­moine et l’épargne sont faits pour être utili­sés, pas pour accu­mu­ler et enter­rer dans le jardin. Il ne me parait pas anor­mal qu’on les consti­tue quand on a des reve­nus impor­tants et qu’on prenne dedans quand ces reve­nus baissent et deviennent insuf­fi­sants.

  • En défense des longs entre­tiens de recru­te­ment

    5h d’en­tre­tien mini­mum ? C’est pour la nasa ? Tu diriges une centrale nucléaire ? Un porte­feuille de plusieurs milliards ?

    Je vois ces excla­ma­tions de temps en temps, souvent dans le milieu tech.

    Je vais sortir du consen­sus : Ça ne me parait pas gigan­tesque.

    Dans le proces­sus on fait démis­sion­ner la personne d’en face et on s’en­gage idéa­le­ment pour des années de colla­bo­ra­tion. Du côté employeur c’est aussi un inves­tis­se­ment qui se compte en semaines ou en mois le temps d’être plei­ne­ment effi­cace et inté­gré, avec un coût majeur si fina­le­ment on doit se sépa­rer puis repar­tir en recherche.

    Même ensuite, en comp­tant le salaire, les coti­sa­tions, les frais divers, un ingé­nieur infor­ma­tique en ce moment c’est très faci­le­ment entre 60 000 et 120 000 euros annuels.

    Juger une personne qui arrive avec un discours préparé, pour un enga­ge­ment de cet ordre, ça prend un peu de temps.

    Je ne dis pas qu’il faut abso­lu­ment prendre 5 heures mais, au regard de ces enjeux, inves­tir 5 heures pour savoir chacun de son côté si c’est la bonne personne, le bon poste et la bonne entre­prise, ça ne me parait pas impen­sable.


    Mais tu fais quoi en 5 heures ?

    Alors mon process ne fait pas 5 heures mais ça ne me parait pas déli­rant.

    Mettons 20 minutes de discus­sion initiale avec le recru­teur pour véri­fier que le projet corres­pond, que l’ex­pé­rience est celle qu’on recherche, que la façon d’être fonc­tionne avec la boite.

    Mettons ensuite 1h30 d’en­tre­tien tech­nique pour vali­der les compé­tences, 10 minutes de debrief avec le recru­teur au télé­phone pour confir­mer qu’il y a un GO des deux côtés, puis 1 heure de vali­da­tion avec le direc­teur respon­sable ou les RH.

    Dis, ça fait 3 heures ton truc, pas 5 !

    Oui, 3 heures mais le scéna­rio décrit me semble la partie mini­mum.

    Il suffit d’avoir besoin d’en­tre­tiens avec des tiers, par exemple avec un respon­sable métier ou un respon­sable produit, et/ou de faire une séance de ques­tions/réponses inver­sées, et/ou de faire faire un test tech­nique, pour arri­ver à atteindre les 5 heures en ques­tion.

    Si le candi­dat passe par un recru­teur tiers, on peut ajou­ter une bonne heure à tout ça.

    Je ne peux pas prendre 5 heures avec tout le monde !

    Non, et juste­ment, l’objec­tif n’est pas de prendre 5 heures avec tout le monde. La plupart des proces­sus s’ar­rê­te­ront avant, à l’ini­tia­tive de l’une ou l’autre des parties.

    En fait si quelqu’un fait 5 heures avec plusieurs entre­prises c’est plutôt la preuve que c’est utile.

    Si ce sont plusieurs proces­sus de 5 heures qui sont allés jusqu’à la propo­si­tion, c’est que le candi­dat n’avait pas les éléments pour faire son choix et faire patien­ter un des deux proces­sus au bout de 3 heures. C’est donc le candi­dat qui avait besoin de ces 5 heures.

    Si au contraire certains proces­sus ont mené à un refus au bout des 5 heures, ça veut dire qu’ils étaient toujours posi­tifs au bout de 3 heures. S’ils s’étaient arrê­tés là, il y aurait eu embauche et rupture pendant la période d’es­sai. Je ne crois pas que ce soit mieux.



    J’ai dit que mon process ne faisait pas 5 heures mais il a bien varié suivant les périodes.

    Le premier process dont j’étais respon­sable, de mémoire c’était 15 minutes de mise en rela­tion avec moi + 1h à 1h30 de discus­sions tech­niques + 30 minutes de vali­da­tion avec le CEO. Total : 1h45 à 2h15.
    Au fur et à mesure j’ai délé­gué une partie tech­nique à l’équipe et réduit mon inter­ven­tion, mais ça a au final augmenté le temps de bien 30 minutes. On a ajouté aussi un test tech­nique, mettons 2 heures à ajou­ter encore. Total : 4h15 à 4h45.

    La boite d’après il y avait 15 minutes de mise en rela­tion avec le recru­teur + 30 à 45 minutes avec moi sur le CV, l’ex­pé­rience et la personne + 2 à 4 heures de pair program­ming ou échanges tech­niques libres avec un déve­lop­peur et le code source de la société + 30 minutes à 1 heure avec le CEO en vali­da­tion + 15 minutes pour présen­ter l’offre et répondre aux dernières ques­tions. Total : 3h30 à 6 heures pour qui va jusqu’au bout.

    La suivante était un peu parti­cu­lière parce qu’on travaillait en open source. Une des étapes était « tu peux explo­rer notre code et nos PRs pour nous dire toi-même si tu te sens d’in­ter­ve­nir dessus plutôt qu’on te fasse un test tech­nique ». Je ne sais pas esti­mer le temps mais une personne sérieuse (on recru­tait des personnes sérieuses) devait bien y passer 1h, peut-être plus. En plus de ça il devait y avoir 30 minutes à 1 heure avec moi + 1 bonne heure avec un déve­lop­peur + 30 minutes à 1 heure avec le CEO + 30 minutes entre les appels inter­mé­diaires, la présen­ta­tion initiale et la présen­ta­tion de l’offre. Total : 2h30 à 4 heures.

    Aujourd’­hui j’ai une première prise de connais­sance du recru­teur, mettons 30 minutes à 1 heure + un test tech­nique à faire chez soi de 2 à 4 heures suivant l’ex­pé­rience + une correc­tion par l’équipe + un debrief ensemble en mode « revue de code sur ton test » de 1 heure à 1h30 + un entre­tien inversé de 30 minutes + un entre­tien avec les fonda­teurs de 30 minutes. En comp­tant les appels du recru­teur entre les étapes et la présen­ta­tion de l’offre, on peut proba­ble­ment comp­ter 30 minutes. Total : 5 heures à 8 heures.

    Je ne prétends pas que mes proces­sus soient des exemples, surtout le dernier. Ce n’est pas tant la durée totale qui me gêne que le fait d’avoir un bloc de 2 à 4 heures conti­nues tôt dans le process (et donc que la durée mini­male soit très élevée sans décou­page possible). Ça évoluera.

  • [Lecture] Mana­ging Multiple Teams

    Extrait de The Mana­ger’s Path

    You proba­bly have tech leads repor­ting to you now, though, and juggling the work of directly mana­ging more than three or four people with the process of unders­tan­ding details about what’s happe­ning across a couple of teams proba­bly means one impor­tant thing: you’re not writing (much, any, produc­tion) code.

    Je suis toujours impres­sionné par les CTO qui disent être encore hands on de façon signi­fi­ca­tive. Parfois je me demande si nous faisons le même métier.

    J’ai alterné entre les postes de lead tech et de mana­ger, parfois dans la même boite avec le même titre. En pratique je ne sais pas à la fois me concen­trer sur un projet précis en contri­bu­tion signi­fi­ca­tive, et à la fois avoir le recul pour gérer les inter­ac­tions entre plusieurs équipes plus la vision opéra­tion­nelle du futur.

    I took pains to make sure that we called out the fact that engi­nee­ring direc­tors would not neces­sa­rily be writing code every day, because I believe that it is very diffi­cult for a person respon­sible for hands-on mana­ge­ment of multiple teams to write code.

    Sur une seule équipe qui travaille sur le même projet, oui. Sur plusieurs équipes qui ont leur propre feuille de route, je ne sais pas faire. Je ne suis même pas certain de le conseiller.

    Je mets la limite proba­ble­ment au même niveau que l’au­teure : quand on commence à mana­ger des mana­gers, et ne plus être impliqué person­nel­le­ment dans la réali­sa­tion des diffé­rents projets et des diffé­rentes déci­sions.

    The risk of going hands-off is greatly ampli­fied if you don’t spend enough time coding before moving into this role to get your­self deeply, fluently comfor­table with at least one program­ming language.

    I advo­cate stron­gly that you spend the time to gain mastery of program­ming before moving into mana­ge­ment.

    Ça peut fonc­tion­ner, mais je l’ai plus souvent vu échouer que réus­sir. Ceux qui s’orientent trop rapi­de­ment sont souvent ceux qui ont monté leur propre entre­prise. Il est diffi­cile de reve­nir en arrière ensuite pour reprendre la partie tech­nique dont l’ex­pé­rience manque.

    Là aussi, tant qu’on est au niveau d’une équipe ça fonc­tionne. C’est le palier de direc­tion (mana­ger de mana­ger) qui trace la fron­tière.

    Finally, even if you don’t intend to write much code, I stron­gly advise you to keep at least a solid half-day once a week comple­tely free from meetings or other obli­ga­tions, and try to use this time at least partially on some crea­tive pursuit.

    Et c’est là dessus que je rédige ce billet. Pour moi c’est très diffé­rent de ce qui précède. Il faut rester tech­nique, parler archi­tec­ture, revue de code, faire soi-même parfois des fix ou des outils, lire et rédi­ger, que ce soit pro ou perso (et c’est de mon expé­rience plus facile de le faire côté perso) mais on ne peut plus aussi faci­le­ment s’im­pliquer dans l’opé­ra­tion­nel des projets.

    J’irai même jusqu’à dire que plus on avance en mana­ge­ment et en direc­tion, plus on doit éviter d’in­ter­ve­nir dans ce qui est néces­saire et plus on doit agir sur l’au­tour (hors des road­map, hors de la produc­tion). Les scripts d’in­té­gra­tion conti­nue, les explo­ra­tions de perfor­mance, les preuves de concept, l’ex­plo­ra­tion d’API ou de langages, sont proba­ble­ment des meilleurs candi­dats.

  • [Lecture] Advan­ced Project Mana­ge­ment

    Extrait de The Mana­ger’s Path

    if you fill the sche­dule to 100% with feature deve­lop­ment, expect that the feature deve­lop­ment will quickly slow down as a result of this over­sche­du­ling »

    Juste avant, l’au­teure parle de ne comp­ter que 10 semaines et non 13 par trimestre, pour prendre en compte les congés, l’on­boar­ding des nouveaux employés, les indis­po­ni­bi­li­tés de produc­tion, etc. C’est proba­ble­ment plus en France vu le nombre de congés.

    Entre les deux elle parle de 20 % de temps pour les travaux de soutien tech­nique comme les tests, le nettoyage des codes histo­riques et les migra­tions.

    Ce n’est pas précisé ici mais je me rappelle aussi ce que montre Shape-Up avec 2 semaines de cool-down pour 6 semaines de produc­tion.

    De mon côté j’at­tends un focus sur la road­map de l’ordre de 70 à 80 % et c’est déjà beau­coup. Je me rappelle mes années à Yahoo! où la plani­fi­ca­tion se faisaient avec une réfé­rence de 4 heures de pleine effi­ca­cité par jour. C’était aussi ma première boite où il était accep­table de dire « je n’ai pas réussi à avan­cer hier, j’en suis au même point » sans que ça ne soit honteux.

    Ce n’est pas tant que le reste n’est pas travaillé, c’est qu’il compte pour les la construc­tion des outils, les inves­tis­se­ments tech­niques, les échanges, les forma­tions, les périodes où on est moins voire peu produc­tif. C’est souvent de ces temps là que viennent tous les travaux annexes qui peuvent chan­ger le fonc­tion­ne­ment de l’équipe ou de l’en­tre­prise, et qui réduisent les frus­tra­tions au jour le jour.

    Ce n’est pas tant qu’il faille doubler les esti­ma­tions des déve­lop­peurs (qui est plus loin une pratique consi­dé­rée comme posi­tive par l’au­teure), c’est qu’il faut arrê­ter de jouer au tétris avec les road­map et les esti­ma­tions. Prévoir une road­map qui occupe 50 % du temps de travail est plutôt une bonne cible.

    You will almost certainly have occa­sio­nal dead­lines, either goal dates that you’ve set or goal dates that came down from on high. The only way to achieve these goals is to cut scope at the end of the project.

    J’ai un malaise en lisant et je classe ça dans les compor­te­ment toxiques. Je crois que c’est la première fois dans ma lecture.

    Je suis déjà gêné par le mélange entre la dead­line et le goad date. Il y a parfois des dates limites. J’ai travaillé sur un site d’ac­tua­li­tés spor­tives et on n’y a pas le loisir de déca­ler l’évé­ne­ment des Jeux Olym­piques. La date limite peut-être n’im­porte quoi d’ex­té­rieur et d’im­pos­sible ou très coûteux à déca­ler mais pas un objec­tif venu d’en haut. Si l’es­poir d’en haut n’est pas tenable alors c’est en haut qu’il faut chan­ger quelque chose.

    La pratique qui consiste à passer en mode urgence quand la date approche c’est le pire possible pour la qualité, autant tech­nique que vis à vis de l’uti­li­sa­teur

    Si on coupe le péri­mètre projet, c’est pour livrer rapi­de­ment, itéra­ti­ve­ment, simple­ment, et on devrait le faire tout le temps, pas pour tenir une date arti­fi­cielle qui n’est qu’un objec­tif de plan.

    Si on prend des raccour­cis tech­niques c’est pour livrer plus rapi­de­ment, itéra­ti­ve­ment, et on devrait le faire souvent, pas pour tenir une date arti­fi­cielle qui n’est qu’un objec­tif de plan.

    Pour les deux cas, ça veut dire aller enri­chir avec d’autres itéra­tions ou nettoyages derrière.

    Je tiens beau­coup au mani­feste agile et à son « Respon­ding to change over follo­wing a plan ».


    J’ai trop souvent de malaises quand je lis les chapitres de gestion de projet ailleurs que dans des livres qui parlent d’agi­lité. Je sens vrai­ment deux mondes diffé­rents qui s’af­frontent.

  • [Lecture] Chal­len­ging Situa­tions: Team Cohe­sion Destroyers

    Extraits de The Mana­ger’s Path

    The real goal here is psycho­lo­gi­cal safety

    On met beau­coup de choses derrière ce terme mais c’est un des ensei­gne­ments majeurs de ceux qui ont mené de vraies études pour trou­ver des corré­la­tions dans les équipes qui fonc­tionnent bien.

    La corré­la­tion ne se situe pas sur le niveau d’étude, l’ex­pé­rience, le salaire ou même la compé­tence. La corré­la­tion première c’est le senti­ment de sécu­rité.

    On débloque l’ini­tia­tive mais aussi la commu­ni­ca­tion, la capa­cité à s’im­pliquer, à propo­ser, à faire au mieux sans perdre de temps inutile et sans se rete­nir.

    Mon mot d’ordre chéri reste la commu­ni­ca­tion et l’ex­pli­cite mais c’est pour moi très lié : On ne peut pas être en sécu­rité psycho­lo­gique s’il existe des non-dits, des inter­pré­ta­tions ou des zones de flou. Inver­se­ment, tout ce qui est dit clai­re­ment sécu­rise.

    Teams that are friendly are happier, gel faster, and tend to produce better results. I mean, do you really want to go to work every day with a bunch of people you hate?

    Il ne s’agit pas d’être amis, même si ça faci­lite évidem­ment, mais d’être dans un envi­ron­ne­ment amical.

    La légende qu’on peut faire juste son boulot sans s’im­pliquer émotion­nel­le­ment, sans frivo­lité ni discus­sions de machine à café, qu’on ne demande pas aux sala­riés de se faire des amis mais d’ef­fec­tuer correc­te­ment leur travail, ne s’est jamais confir­mée devant moi.

    Le moindre grain de sable qui vient réduire le côté sympa ou l’en­vie de se retrou­ver ensemble pour travailler ensemble se voit immé­dia­te­ment sur le travail, autant la qualité que la produc­ti­vité, mais aussi sur l’en­vie de rester, sur l’ini­tia­tive, sur l’ef­fort qu’on doit mettre dans tout chan­ge­ment.

    Certains parlent d’ADN et de valeurs pour s’as­su­rer que les sala­riés s’en­ten­dront. Je ne sais pas si ça se réduit à ça, mais il suffit d’un membre d’équipe qui refuse d’en­trer dans le fonc­tion­ne­ment collec­tif amical pour tuer toute une équipe.

    Il y a certai­ne­ment des emplois qu’on peut faire froi­de­ment mais proba­ble­ment pas la parti­ci­pa­tion à une équipe R&D.

    Si ça ne colle pas, mieux vaut chan­ger la personne d’équipe, voire l’iso­ler en élec­tron libre hors des équipes, ou en dernier recours envi­sa­ger ensemble une sépa­ra­tion.

    One variant of the toxic employee is the brilliant jerk, who, as we discus­sed earlier, produces indi­vi­dually outsi­zed results, but is so ego-driven that she creates a mixture of fear and dislike in almost everyone around her.

    J’ai vu ce profil dans la plupart des équipes que j’ai croisé et j’ai tendance à croire qu’il est fréquent dans le milieu tech­nique. Il y a une légende qu’on n’est pas là pour perdre son temps et que l’ef­fi­ca­cité ou la compé­tence est la pièce maitresse qui va rendre tout le monde perti­nent.

    On parlait de sécu­rité psycho­lo­gique et d’équipe amicale, on est en plein dans le contre-exemple.

    Je n’ai pas de solu­tion géné­rique au problème si ce n’est la même que les deux plus haut :

    • Inter­ve­nir en public à tout dérap­page qui pour­rait faire peur aux autres
    • Sortir ces personnes des équipes pour les canton­ner ailleurs

    Ça ne résout pas le problème en soi mais ça permet au moins de l’iso­ler pour le trai­ter sans qu’il ne se propage entre temps.

    When a person is beha­ving badly in a way that is having a visible impact on the team, and a way you don’t want your culture to mimic, you need to say some­thing in the moment to make the stan­dard clear.

    « in the moment » est à prendre à mon avis au sens litté­ral et ça veut dire en public, en présence. Si ce n’est pas vous ça doit être un autre mana­ger, ou en réalité peu importe qui qui assume la chose et qui sait avoir le soutien du mana­ge­ment pour dire « stop » (et en théo­rie tout le monde devrait sentir avoir le soutien du mana­ge­ment pour ça).

    Il faut montrer que les mauvaises atti­tudes n’ont pas de soutien, qu’il y a une volonté de proté­ger ceux qui en ont besoin et d’ins­tau­rer une autre culture.

    Pas de faux semblant : L’équi­libre n’est pas toujours simple à trou­ver parce qu’in­ter­ve­nir pour dire « stop » va frois­ser, d’au­tant plus si on refuse d’en­trer dans l’ar­gu­men­ta­tion sur qui a raison et si l’in­ter­ven­tion est perti­nente (ça ça doit se faire après, à froid, en face à face). L’in­ter­ven­tion en protec­tion sera parfois vue comme une agres­sion en sens inverse par celui qui est visé. Ça peut encou­ra­ger un compor­te­ment de combat, ou un renfer­me­ment.

    Je suis preneur de savoir comment vous trai­tez ça.

    Your first goal is to protect your team as a whole, the second is to protect each indi­vi­dual on the team, and your last prio­rity is protec­ting your­self.

    Je suis de plus en plus mitigé là dessus, au point de peut-être être même en désac­cord.

    J’ai un profil sacri­fi­ciel. C’est comme ça que je vis au jour le jour, comme ça que je suis, person­nel­le­ment et profes­sion­nel­le­ment. Je le demande aux mana­gers dans une certaine mesure. Leur rôle est de prendre sur eux pour que l’équipe fonc­tionne. Mon rôle est de prendre sur moi pour que les équipes fonc­tionnent.

    Pour autant, me proté­ger moi-même ou un mana­ger est dans une certaine mesure plus prio­ri­taire que proté­ger un autre. Si je ne défend pas ce qui me minore, je peux montrer le mauvais exemple et surtout je peux mino­rer ma propre posi­tion. Sur la durée mino­rer mon rôle et ma posi­tion c’est m’em­pê­cher d’in­ter­ve­nir pour chan­ger les choses et proté­ger les autres.

    La cita­tion me va bien dans l’idéal, surtout si les équipes fonc­tionnent déjà bien. Elle m’ap­pa­rait plus problé­ma­tique dans un contexte où il faut faire chan­ger les fonc­tion­ne­ments. Là, le mana­ge­ment et la direc­tion doivent être proté­gés avec une bonne prio­rité.

    Whate­ver the cause, this person disrupts team cohe­sion because he isn’t being colla­bo­ra­tive with the rest of his team­mates; he doesn’t feel safe sharing his work in progress, and his fear often sets an example for the rest of the team.

    C’est aussi pour ça que je parle d’iso­ler ceux qui ne s’in­tègrent pas, faute d’ar­ri­ver à provoquer le chan­ge­ment (essayons d’abord ça). La peur, la défiance, l’agres­si­vité, se diffusent plus faci­le­ment que leurs oppo­sés et ça fait son chemin incons­ciem­ment même chez ceux qui pensent avoir le recul suffi­sant.

    the person who hides infor­ma­tion from you, from his team­mates, from his product mana­ger. […] The person who doesn’t want to go through code review and who doesn’t ask for design review on big projects. […] Whate­ver the cause, this person disrupts team cohe­sion because he isn’t being colla­bo­ra­tive with the rest of his team­mates; he doesn’t feel safe sharing his work in progress, and his fear often sets an example for the rest of the team. 

    La conclu­sion de tout ça pour moi c’est de ne pas lais­ser pourir la situa­tion quand une personne n’est plus impliquée de la même façon, que ça appa­raisse en agres­si­vité, en manque de colla­bo­ra­tion, en defiance, en manque de trans­pa­rence, en manque d’ini­tia­tives, ou simple­ment en se mettant en retrait du groupe.

    Si ça peut sembler mineur pour peu que le travail soit fait correc­te­ment, ça ne l’est pas : Il y a une influence, qui peut mettre long­temps à être renver­sée.

  • [Lecture] Good Mana­­ger, Bad Mana­­ger: Conflict Avoi­­der, Conflict Tamer

    Je reprends mes notes de lectures de The Mana­ger’s Path.

    It’s hard to know what’s going to happen next on Jason’s team because instead of guiding the team, he’s having the team guide itself.

    Ce chapitre fait un peu mal. Je sais que je me suis pris beau­coup de murs dans mes premières années de mana­ge­ment à cause de ça, et que j’ai toujours une tendance à partir un peu là dedans quand je ne me surveille pas.

    L’équi­libre entre le lais­ser faire et le trop direc­tif n’est pas une évidence, et on peut arri­ver à être à la fois dans le lais­ser faire et dans le trop direc­tif pour peu qu’on se foca­lise sur les mauvais sujets.

    Le problème fonc­tionne aussi pour les non mana­gers. Si vous voulez avoir l’au­to­no­mie, ça néces­site de prendre en compte les enjeux trans­ver­saux et de s’im­pliquer même là où vous n’êtes pas à l’aise.

    It’s no surprise to anyone that they vote to drop Char­les’s pet project — no surprise, that is, to anyone except Charles, who has never heard anything about this from Jason and who figu­red he was doing the right thing

    La leçon apprise de l’époque :

    • Dire ce qui ne va pas, quand bien même c’est diffi­cile à dire ou diffi­cile à entendre, surtout si c’est diffi­cile à dire ou diffi­cile à entendre.
    • Deman­der même quand ça ne plait pas, quitte à impo­ser quand c’est néces­saire.

    En ména­geant les suscep­ti­bi­li­tés on crée de la dette humaine qui s’ac­cu­mule. Assez vite, les petits problèmes qu’on a cher­ché à éviter deviennent un problème d’or­ga­ni­sa­tion et de culture qui lui est incon­tour­nable, bien plus complexe que la somme des petites suscep­ti­bi­li­tés.

    Don’t rely exclu­si­vely on consen­sus or voting. Consen­sus can appear morally autho­ri­ta­tive, but that assumes that everyone invol­ved in the voting process is impar­tial, has an equal stake in the various outcomes, and has equal know­ledge of the context.

    Aujourd’­hui je me base sur le « faire confiance » pour ce point.

    Je l’ai fréquem­ment entre les déve­lop­peurs et les respon­sables produit, avec les premiers qui aime­raient être impliqués sur toutes les déci­sions mais sans pour autant faire le travail amont d’in­ter­view utili­sa­teur, de compa­rai­son avec la concur­rence, de réflexion stra­té­gique, de coor­di­na­tion marke­ting, etc.

    Je l’ai aussi entre les déve­lop­peurs et le mana­ge­ment, sur les ques­tions d’évo­lu­tion, d’éva­lua­tion, sur les règles de travail de tous les jours.

    Le fond c’est d’im­pliquer, collec­ter les retours, comprendre et prendre en compte les argu­ments ou infor­ma­tions qui manquaient au déci­deur, mais lais­ser pour autant la déci­sion au déci­deur. C’est lui qui a tout le contexte, qui passe du temps à soupe­ser et équi­li­brer les enjeux. La personne externe qui a un avis sans avoir fait ce travail n’a qu’un avis partiel et mal informé, et n’a pas de raison de peser dans la déci­sion elle-même.

    Faites juste confiance à vos collègues pour vous avoir écouté et prendre une bonne déci­sion, même si ce n’est pas la votre.

  • Distance de dépas­se­ment d’un cycliste

    Il faut lais­ser au moins 1 mètre et demi (1 mètre en agglo­mé­ra­tion) entre le bout du rétro­vi­seur et le bout du guidon lorsqu’on dépasse un cycliste.

    R414–4

    Ce n’est pas une opinion soumise à débat. C’est le code de la route.

    Si l’es­pace n’est pas suffi­sant ou que la circu­la­tion ne permet pas de se dépor­ter sur la voie de gauche, alors on ne dépasse pas et on reste derrière.

    C’est vrai aussi si le cycliste est sur une bande cyclable dédiée ou au redé­mar­rage à un feu (surtout au redé­mar­rage à un feu).

    Il est toute­fois possible de chevau­cher une ligne conti­nue pour opérer le dépas­se­ment d’un cycliste (R412–19).

    « Pas besoin d’au­tant de place, je fais atten­tion »

    Le mètre ou mètre et demi pour le dépas­se­ment c’est vrai­ment le mini­mum.

    En ville, si une voiture passe à un mètre du vélo avec un diffé­ren­tiel de vitesse de 25 km/h, on ne rigole pas du tout. Si c’est un bus, un cycliste non habi­tué risque d’en tomber de vélo.

    Hors agglo­mé­ra­tion, avec un diffé­ren­tiel de plus de vitesse de 50 km/h, un mètre et demi semblera moins que le mini­mum vital. Si c’est un camion, rien que le souffle peut vous aspi­rer et vous faire tomber sous les roues du véhi­cule suivant.

    La réalité c’est que, hors des zones limi­tées à 30 km/h, ces distances mini­males sont déjà trop faibles. On en meurt.

    Si vous le pouvez, dépor­tez-vous entiè­re­ment sur la voie d’à côté pour dépas­ser, comme si vous dépas­siez une voiture, et ne vous rabat­tez pas trop rapi­de­ment derrière.


    « Ça passe, c’est assez large… »

    En géné­ral, non.

    Un vélo stan­dard fait 65 centi­mètres de large et se situe à au moins 40 centi­mètres du trot­toir, du cani­veau ou du bord de route. Une voiture stan­dard fait envi­ron 180 centi­mètres de large et circule géné­ra­le­ment à au moins 50 centi­mètres du bord.

    En ville, il faut donc dans les 4 mètres et 30 centi­mètres pour dépas­ser un cycliste dans les règles.

    Illus­tra­tion d’un calcul simi­laire

    Une voie de circu­la­tion y fait rare­ment plus de 3 mètres (le mini­mum règle­men­taire est de 1,2 mètres, une voie d’au­to­route faite pour rouler à 130 km/h fait 3,5 mètres de largeur).

    Il est donc impos­sible pour un auto­mo­bi­liste de dépas­ser un cycliste de façon régu­lière sans dépas­ser au moins de moitié sur la voie d’à côté. N’es­sayez pas.

    Si la voie fait moins que 3 mètres de large (ce qui est fréquent) ou que le cycliste s’écarte du bord droit à cause de voitures en station­ne­ment (R412–9), l’au­to­mo­bi­liste doit se dépor­ter entiè­re­ment sur la voie d’à côté s’il veut dépas­ser le cycliste.

    Encore une fois, ce n’est pas une opinion soumise à débat. C’est un calcul mathé­ma­tique à partir des règles du code de la route.

    « C’est un sens unique ! Comment je fais moi pour doubler ? Je n’ai pas le choix ! »

    Si la place n’est pas suffi­sante, on ne double pas. C’est simple comme ça.

    On conseille d’ailleurs parfois aux cyclistes de se placer au milieu de la voie dans ces cas là juste­ment pour ça : éviter que des auto­mo­bi­listes ne tentent quand même et se ne provoquent le pire.

    « Je ne vais quand même pas rester derrière un cycliste ! »

    Si c’est néces­saire, si.

    En ville la vitesse un auto­mo­bi­liste peut faire de meilleures vitesses de pointe mais la vitesse moyenne d’un cycliste est légè­re­ment supé­rieure à celle d’un véhi­cule moto­risé.

    Vous ne perdez quasi­ment aucun temps à rester derrière le cycliste en atten­dant de retrou­ver une double voie qui vous permet le dépas­se­ment.


    Hors agglo­mé­ra­tion, le même calcul s’ap­plique. La voie peut faire jusqu’à 50 centi­mètres de plus (mais peut aussi faire bien bien moins), le cycliste peut parfois serrer plus à droite en l’ab­sence d’obs­tacle, mais il faut lais­ser 50 centi­mètres de plus pour le dépas­se­ment.

    Au final les conclu­sions sont les mêmes : Il faut se dépor­ter au moins de moitié sur la voie d’à côté.

    Là non plus, ce n’est pas soumis à débat ou inter­pré­ta­tion.

    « La circu­la­tion est dense, je ne peux pas me dépor­ter sur la voie d’à côté pour doubler ! »

    Dans ce cas, restez derrière et faites preuve de patience. Ce serait pareil avec un trac­teur ou un convoi excep­tion­nel.

    Hors agglo­mé­ra­tion, s’il voit que vous patien­ter derrière, le cycliste pourra parfois se dépor­ter sur l’ac­co­te­ment de droite et vous lais­ser l’es­pace suffi­sant le temps de dépas­ser.

  • Les vélos ne sont pas canton­nés aux pistes cyclables

    Les vélos ne sont pas canton­nés aux pistes cyclables. Ils sont aussi à leur place sur la voie géné­rale et n’ont pas à s’en justi­fier ni à déga­ger le passage.

    Ce n’est pas une opinion soumise à débat. C’est le code de la route.

    Les seules pistes et bandes obli­ga­toires sont celles annon­cées avec panneau bleu et rond (B22a), et au moment où le cycliste croise ce panneau. Le plus souvent ce n’est pas le cas. Les pistes et bandes cyclables sans panneau ou annon­cées avec un panneau carré (C113) ne sont pas obli­ga­toires.

    Même dans le cas d’une piste obli­ga­toire, il peut être légi­time de rouler sur la voie géné­rale paral­lèle. C’est en parti­cu­lier le cas en ville si on vient d’une voie perpen­di­cu­laire sans avoir croisé l’en­trée ou le panneau d’obli­ga­tion de la piste.


    « Mais pourquoi les cyclistes ne prennent-ils pas la piste cyclable ? »

    Sauf excep­tion, un cycliste préfé­rera toujours prendre la piste ou la bande cyclable quand elle est prati­cable et sûre, qu’elle soit obli­ga­toire ou non. S’il ne la prend pas, c’est norma­le­ment qu’il y a une raison.

    Liste non-exhaus­tive des raisons possibles :

    • La piste est occu­pée par des voitures, camion, camion­nettes ou motos ;
    • La piste est fermée ou bloquée par des travaux ;
    • La piste n’est pas utili­sable à cause d’un arbre, un banc, un lampa­daire ou un autre obstacle qui se retrouve au milieu ;
    • La piste est couverte de neige, de feuilles, d’eau, de détri­tus, etc. ;
    • La piste est dans un état qui ne la rend pas prati­cable correc­te­ment ;
    • La piste est parta­gée avec des piétons, voire occu­pée par ceux-ci, rendant la circu­la­tion dange­reuse ;
    • La piste s’ar­rête plus loin bruta­le­ment en impasse ;
    • La circu­la­tion des véhi­cules présents sur la piste se fait à allure plus faible et le cycliste se sent plus proche de l’al­lure des véhi­cules de la voie géné­rale (cas d’au­tant plus fréquent dans les zones limi­tées à 30 km/h) ;
    • Le cycliste est en train d’opé­rer un dépas­se­ment d’un autre cycliste qui se trouve lui sur la bande cyclable, avant d’y reve­nir ;
    • Le cycliste se prépare à tour­ner à gauche, ou à ne pas suivre la même direc­tion que la piste cyclable ;
    • Le cycliste est arrivé par une autre rue et n’a pas croisé l’en­trée de la piste ;
    • La piste est satu­rée du fait d’un trop grand nombre de cyclistes.

    Si vous ne compre­nez pas pourquoi un cycliste prend la voie géné­rale au lieu de la voie qui lui est réser­vée, vous pouvez lui poser la ques­tion poli­ment. Il y a autant de réponses que de situa­tions diffé­rentes et vous pren­drez peut-être conscience de situa­tions hallu­ci­nantes qu’on n’au­rait jamais osé lais­ser passer pour des moto­ri­sés.

    « Ok il a le droit mais il n’est pas obligé de d’emm**** les autres simple­ment parce qu’il a le droit »

    La ques­tion n’est pas d’in­ci­ter le cycliste à emmer­der les autres parce qu’il est dans son droit. La ques­tion c’est d’ar­rê­ter d’em­mer­der le cycliste en croyant qu’il ne l’est pas.

    Même si vous n’êtes pas d’ac­cord avec une raison donnée, ou que vous ne connais­sez pas la raison, ou simple­ment que le cycliste fait un choix sans raison claire, le cycliste est autant à sa place qu’un auto­mo­bi­liste qui fait le choix de prendre cette route plutôt qu’une autre.

  • RGPD à Norauto via Valiuz

    Les deux trai­te­ments pour lesquels Norauto est respon­sable de trai­te­ment sont […] tout comme chaque enseigne membre de l’Al­liance, partage auprès de Valiuz les données clients collec­tées dans le cadre de la rela­tion client. Ce fichier pseu­do­ny­misé est conso­lidé par Valiuz afin d’être croisé et enri­chi avec les données des autres enseignes pour défi­nir des segments communs aux enseignes.

    Réponse de Norauto

    La graisse est de moi. Vous vous doutez que la leur n’est pas au même endroit.

    J’ai enfin la réponse claire que j’at­ten­dais :

    • Norauto est respon­sable de trai­te­ment. Peu importe ce qui est fait par Valiuz, c’est fait en leur nom, à leur demande, pour leur usage, sous leur respon­sa­bi­lité.
    • Norauto (en tant que respon­sable de trai­te­ment) partage mes données pour qu’elles soient croi­sées avec celles des autres enseignes et enri­chissent les données des autres enseignes.
    • Norauto (en tant que respon­sable de trai­te­ment) récu­père les données parta­gées par les autres enseignes pour les croi­ser avec les siennes et enri­chir ses propres données.

    Et les points éclai­rés plus haut sont très impor­tants parce que :

    • Le discours de Norauto et des diffé­rentes enseignes a toujours été qu’il n’y a pas partage de données entre les enseignes. Certes ça passe tech­nique­ment par Valiuz mais pour que Norauto (en tant que respon­sable de trai­te­ment) puisse croi­ser (et donc trai­ter) les données des autres enseignes, il faut bien qu’on ait pu lui parta­ger. Ca fonc­tionne aussi dans l’autre sens : Pour que les autres enseignes puissent faire ce même trai­te­ment, il faut que Norauto leur ait partagé. Bref, « on vous ment on vous spolie » (réfé­rence que seuls les plus vieux compren­dront)
    • Norauto se base sur l’in­té­rêt légi­time, ce qui pouvait être accep­table si les trai­te­ments se faisaient sans partage, mais l’in­té­rêt légi­time peut diffi­ci­le­ment justi­fier une mise en commun et croi­se­ment des histo­riques et données d’achat entre plusieurs enseignes distinctes.

    Une partie de la défense c’est que c’est fait via Valiuz et sous forme pseu­do­ny­mi­sée, sauf que :

    • Valiuz n’est qu’un sous-trai­tant. Il agit pour et au nom de Norauto (et des autres enseignes). Ça ne change rien pour moi qui ne les ai pas comme respon­sable de trai­te­ment.
    • La pseu­do­ny­mi­sa­tion propo­sée ne retire en rien le statut de données person­nelles, et que cette pseu­do­ny­mi­sa­tion est faite pour être commune à tous les acteurs et réver­sible. C’est l’objet même du trai­te­ment : pouvoir réiden­ti­fier les données obte­nues suite au trai­te­ment. Bref, ça fait joli sur le papier mais ça ne change rien.

    L’épi­sode précé­dent Valiuz et données person­­nelles


    J’ar­rive au bout puisque leur dernière réponse est « Nous sommes déso­lés si nos éléments de réponses ne vous conviennent pas. » sans répondre aux deux dernières ques­tions qui disent grosso modo ce qui est dans ce billet.

    Reste à faire la plainte à la CNIL d’une façon à ce que l’au­to­rité regarde vrai­ment le fond sans s’ar­rê­ter aux néga­tions de surface des enseignes et de Valiuz. Ça va me prendre un peu de temps.

  • Valiuz et données person­nelles

    Tout commence par Décath­lon

    Dans les paramètres de mon compte, "Utilisation des données", je découvre "Valiuz", pour "Enrichir mon compte Decathlon par mes interactions avec les autres enseigne de l'alliance Valiuz (et réciproquement)"

Mauvaise surprise, le partage de données est pré-coché (quid du RGPD ?). Decathlon se permet donc de mettre en commun vos données personnelles avec d'autres enseignes dont Auchan, Boulanger, Kiabi, LeroyMerlin ou Norauto

    Je découvre en août un message Twit­ter qui parle de partage de données par Décath­lon à un hub de données nommé Valiuz, et tout ça n’a pas l’air neuf.

    Suite à ma requête, Décath­lon m’in­forme que mes données n’ont jamais été parta­gées et que c’est une anoma­lie d’af­fi­chage.

    Note : Je pars de là mais Décath­lon a été propre du début à la fin des échanges et, pour peu qu’on croit effec­ti­ve­ment à la réponse de l’er­reur d’af­fi­chage, je n’ai stric­te­ment rien à leur repro­cher.


    Valiuz

    Par contre j’ai poussé avec Valiuz.

    Valiuz regroupe quasi­ment toutes les enseignes du groupe Muliez (Decath­lon, Auchan, Kiabi, Boulan­ger, Leroy Merlin, Boulan­ger, Norauto, etc.). Le but est (je cite) « de mettre en commun avec un groupe d’en­seignes les infor­ma­tions vous concer­nant ».

    La page « comment ça fonc­tionne » laisse peu de doutes : Ils analysent les données person­nelles de plusieurs enseignes et en tirent de nouvelles infor­ma­tions person­nelles, qu’ils repar­tagent aux diffé­rentes enseignes dont je suis client.

    À partir de mon compte Kiabi ils peuvent savoir que j’ai un fils, et le parta­ger à Décath­lon. À partir de mes achats Auchan ils peuvent savoir que j’aime les produits frais et le parta­ger à Boulan­ger qui voudra me vendre des produits de cuisine.

    À partir de mes achats chez LeroyMer­lin ils peuvent infor­mer Norauto que je suis quelqu’un qui fait ses achats le samedi en passant dans les maga­sins plutôt que par le web.

    À partir des adresses de mes livrai­sons, de mon compte utili­sa­teur ou de mes maga­sins Jules, ils peuvent dire à Elec­tro Dépôt que j’ai démé­nagé.


    Données person­nelles

    Bref, Valiuz, à son compte ou en tant que sous-trai­tant (on y revien­dra), traite des données person­nelles détaillées de prove­nance multiple, les recoupe, déter­mine des infor­ma­tions person­nelles nouvelles qu’il va repar­ta­ger à diffé­rentes enseignes.

    Valiuz joue ici le rôle du hub centra­li­sa­teur pour les données.

    Leur page « données person­nelles » indique qu’ils croisent ainsi les données person­nelles des diffé­rents acteurs dont sexe, âge et loca­li­sa­tion, les histo­riques d’achat, des éven­tuels pistages publi­ci­taires obte­nus via le web ou le mobile si vous accep­tez les cookies, mais aussi des données tierces acces­sibles en ligne et des bases de données de tiers.

    Ce n’est pas rien, et éton­nam­ment, la grande majo­rité se fait sans consen­te­ment préa­lable.


    Absence de consen­te­ment préa­lable

    Si Décath­lon me répond que l’ac­ti­va­tion par défaut de Valiuz dans mon profil utili­sa­teur est une anoma­lie d’af­fi­chage, Norauto informe eux que l’uti­li­sa­tion de Valiuz relève de leur inté­rêt légi­time, et n’est donc soumis à aucun consen­te­ment préa­lable. De fait, ils ont en effet trans­mis à Valiuz tout mon histo­rique d’achat.

    De manière très éton­nante, autant Valiuz que Norauto invoquent l’in­té­rêt légi­time des tiers comme raison du partage des données vers les autres membres de l’al­liance.

    Pour infor­ma­tion, ce partage basé sur l’in­té­rêt légi­time des membres de l’Al­liance, ne concerne que les membres qui vous connaissent déjà et pour lesquels vous ne vous êtes pas oppo­sés.

    Décla­ra­tion Norauto

    S’agis­sant de la base légale des trai­te­ments de données mis en oeuvre par Valiuz pour le compte des entre­prises parte­naires, celle-ci repose:
    – sur l’in­té­rêt légi­time de chaque entre­prise de comprendre les attentes de ses clients, de mettre à jour leurs données, et d’amé­lio­rer la perti­nence des commu­ni­ca­tions qu’elle peut leur adres­ser.

    Décla­ra­tion de Valiuz

    Le paravent de la pseu­do­ny­mi­sa­tion

    La première ligne de défense est d’es­sayer de dire que les données sont parta­gées sous forme de pseu­do­nyme [et que donc ça n’est pas bien grave].

    Votre adresse email, adresse postale ou encore votre numéro de télé­phone sont trans­for­més pour ne pas être compré­hen­sibles (prenom.nom@­mail.com deviennent 1a2b3c4d5e6f7…) et servent unique­ment à regrou­per les infor­ma­tions corres­pon­dant à un même client, de façon auto­ma­tique.

    Ces infor­ma­tions ne sont jamais trans­mises à nos parte­naires, qui vous contac­te­ront donc unique­ment si vous leur avez fourni vos coor­don­nées et donné votre accord pour être contacté(e).

    Valiuz, page « mes droits »

    NORAUTO partage à VALIUZ des données pseu­do­ny­mi­sées
    […]
    Les données trai­tées par VALIUZ sont chif­frées de sorte que VALIUZ n’est pas en mesure de vous iden­ti­fier direc­te­ment avec ces données (données “pseu­do­ny­mi­sées”).

    Norauto, charte sur les cookies et les données Person­nelles

    Malheu­reu­se­ment ça ne protège de rien du tout.

    Déjà parce que les données sont assez complètes (loca­li­sa­tion, âge, enfants, histo­rique d’achat complet, et ça croisé entre plus de 20 enseignes en ligne et en physique) mais aussi parce que l’iden­ti­fiant est un iden­ti­fiant unique partagé juste­ment fait pour lier les données des diffé­rentes enseignes entre elles.

    servent unique­ment à regrou­per les infor­ma­tions corres­pon­dant à un même client

    Valiuz, page « mes droits »

    afin que ces dernières soient analy­sées par VALIUZ après mise en commun de ces données avec celles four­nies par les membres de l’al­liance

    Norauto, charte sur les cookies et les données Person­nelles

    On a un joli paravent mais mais cette pseu­do­ny­mi­sa­tion n’em­pêche ni le croi­se­ment des données ni l’iden­ti­fi­ca­tion (on passera sur la confu­sion entre chif­fre­ment et pseu­do­ny­mi­sa­tion dans les infor­ma­tions de Norauto).

    Pire ! Vu qu’il s’agit ensuite de récu­pé­rer des infor­ma­tions person­nelles (adresse obso­lète, habi­tudes d’achat), cet iden­ti­fiant est expli­ci­te­ment fait pour permettre une ré-iden­ti­fi­ca­tion par les desti­na­taires, et ne rien masquer.

    Bref, données person­nelles en entrée, données person­nelles en trai­te­ment, données person­nelles en sortie, fait pour être des données iden­ti­fiantes par tous les acteurs qui les utilisent réel­le­ment.


    Paravent de la sous-trai­tance

    J’ai envoyé une demande d’in­for­ma­tion à Valiuz. Pour eux, sauf pour ce qui concerne le cookie publi­ci­taire, ils ne sont que sous-trai­tant des diffé­rentes enseignes. Ils ne réalisent aucun trai­te­ment à leur propre compte.

    Valiuz agit en qualité de sous-trai­tant de ses diffé­rents clients (entre­prises parte­naires)

    Décla­ra­tion Valiuz

    Valiuz agit en qualité de sous-trai­tant de Norauto

    Décla­ra­tion de Norauto

    Tous insistent que les données sources ne sont pas parta­gées à d’autres acteurs, ni même entre membres de l’al­liance

    Nous atti­rons votre atten­tion sur le fait que ces données ne sont pas trans­mises ou rendues acces­sibles aux entre­prises parte­naires de Valiuz, ni à d’autres tiers.
    […]
    Seule Valiuz a accès à l’en­semble des données trans­mises par ses entre­prises parte­naires. Concrè­te­ment, cela signi­fie par exemple que l’en­seigne X n’a pas connais­sance de vos données d’achat ou navi­ga­tion inter­net au sein de l’en­seigne Y et vice versa.

    Décla­ra­tion de Valiuz

    Seul Valiuz a accès à l’en­semble des données trans­mises par Norauto.

    Décla­ra­tion de Norauto

    Moi je veux bien mais du coup, comment les trai­te­ments mention­nés plus haut sont-ils possibles ?

    Soit c’est Valiuz qui est respon­sable de trai­te­ment. Dans ce cas il y a de leur part des fausses décla­ra­tions de sous-trai­tance, un trai­te­ment non déclaré sans consen­te­ment, et un partage d’in­for­ma­tion person­nelles ensuite aux diffé­rentes enseignes. Du point de vue des enseignes il y a aussi de fausses décla­ra­tions de sous-trai­tance, un partage de données person­nelles à un tiers sans consen­te­ment, et une collecte de données person­nelles sans consen­te­ment en retour.

    Soit c’est bien chaque enseigne qui est respon­sable de trai­te­ment, Valiuz n’est qu’un sous-trai­tant. Comme il y a expli­ci­te­ment croi­se­ment entre les données des diffé­rentes enseignes, chaque enseigne est respon­sable de son trai­te­ment, pour lequel elle accède à son compte à l’en­semble des données des autres enseignes. Il y a alors fausses décla­ra­tions sur le fait que les données ne sont pas parta­gées aux autres enseignes, et partage sans consen­te­ment de données détaillées.

    Valiuz et l’al­liance cherchent à noyer le pois­son en jouant sur les deux tableaux avec un saupou­drage de pseu­do­ny­mi­sa­tion au milieu mais en réalité ça ne tient pas, dans aucun des cas.


    La suite, la plainte

    Je vais poser mon dossier à la CNIL, avec l’en­semble des pièces. Outre les délais, ça va deman­der que la CNIL cherche réel­le­ment à comprendre et ne s’ar­rête pas sur les décla­ra­tions de surface de Valiuz et des diffé­rentes enseignes.

    Mon histo­rique avec la CNIL ne me rend pas super opti­miste si je suis seul à poser un dossier. Pour avoir toutes les chances que ça bouge, il faudrait un effet de masse.


    Et vous ?

    Vous pouvez signa­ler votre oppo­si­tion au trai­te­ment auprès de Valiuz et des diffé­rentes enseignes.

    Si vous voulez que ça bouge, je vous recom­mande cepen­dant d’abord de faire des requêtes d’in­for­ma­tion au titre du RGPD puis de porter plainte auprès de la CNIL (ça se fait faci­le­ment en ligne).

    Pour ça je vous recom­mande de NE PAS faire oppo­si­tion auprès de Valiuz ou auprès des diffé­rentes enseignes avant obten­tion par écrit de toutes les infor­ma­tions que vous souhai­tez et qui vous permet­tront de porter plainte, pour éviter qu’ils ne puissent vous dire « je n’ai plus rien sur vous ».

    Ça veut dire :

    1. Deman­der à chaque enseigne si elle a trans­mis des données vous concer­nant à Valiuz
    2. … le cas échéant la liste exhaus­tive de ce qui a pu être échangé à desti­na­tion de Valiuz ou des autres enseignes parte­naires et en prove­nance de Valiuz ou des autres enseignes parte­naires
    3. … sous quel régime cette trans­mis­sion a pu être faite (inté­rêt légi­time, consen­te­ment préa­lable, etc.) et le cas échéant la preuve de votre consen­te­ment
    4. … si pour les diffé­rents trai­te­ments décrits sur https://valiuz.com/comment-ca-fonc­tionne/ , l’en­seigne est seule respon­sable de trai­te­ment avec Valiuz en sous-trai­tant, ou si Valiuz et l’en­seigne sont co-respon­sables de trai­te­ment, ou si Valiuz est le respon­sable de trai­te­ment au sens du RGPD
    5. … dans le cas où Valiuz n’est que sous-trai­tant, les croi­se­ments néces­saires aux trai­te­ments décrits et pour lesquels l’en­seigne est seule respon­sable néces­si­tant l’ac­cès aux données des autres parte­naires, c’est l’en­seigne qui doit donc avoir léga­le­ment accès à ces données et pas unique­ment Valiuz, deman­der sous quel régime ces données ont-elles été obte­nues
    6. … de faire suivre à Valiuz une demande d’ac­cès pour l’en­semble des données déte­nues vous concer­nant

    Puis

    1. Deman­der à Valiuz les mêmes infor­ma­tions 1 à 6, en refor­mu­lant pour inver­ser la situa­tion.

    Je ne fais pas de brouillon a reco­pier, ça aura surtout du sens si ça vient de vous. Je peux aider (et proba­ble­ment d’autres en commen­taires) si vous avez des ques­tions.

    Si d’aven­ture vous n’ob­te­nez pas les mêmes réponses que moi, faites-moi signe. Ça sera inté­res­sant.

    La liste des contacts est la suivante (à contac­ter sépa­ré­ment mais si vous formu­lez bien votre demande vous pouvez faire un copier/coller pour toutes les enseignes et n’avoir une version spéci­fique que pour VALIUZ eux-même) :

    VALIUZ mesdroits@­va­liuz.com
    AUCHAN dpo@au­chan.fr
    LEROY MERLIN dpo@­le­roy­mer­lin.fr
    BOULANGER cil@­bou­lan­ger.com
    ELECTRO DEPOT dpo@e­lec­tro­de­pot.fr
    JULES dpo@­hap­py­chic­group.com
    BIZZBEE dpo@­hap­py­chic­group.com
    ROUGE GORGE rela­tion.client@­rou­ge­gorge.com
    GRAIN DE MALICE contact@­grain­de­ma­lice.fr
    ONEY donnees-person­nel­les@o­ney.fr
    NORAUTO vosdon­nees­per­son­nel­les@­no­rauto.fr
    KIABI data­pro­tec­tio­nof­fi­cer@­kiabi.com
    SAINT MACLOU contact-dpo@­saint-maclou.com
    TAPE A L’OEIL mesdon­nees­per­son­nel­les@t-a-o.com
    TOP OFFICE dpo@­top-office.com
    FLUNCH contact.cnil@­flunch.fr
    3BRASSEURS contact.cnil@­les3­bras­seurs.com
    NHOOD (Aushop­ping) dpo@n­hood.com
    DECATHLON https://www.decath­lon.fr/help/app/ask/cat_id/920
    PIMKIE dpo@­pim­kie.com
    CHRONODRIVE clients@­chro­no­drive.com
    ALINEA donnees-person­nel­les@a­li­nea.com