Auteur/autrice : Éric

  • Une FNAC sans musique

    La FNAC arrête les MP3 et redi­rige vers iTunes.

    C’est en premier lieu une déci­sion qu’on aurait pu prévoir. Elle découle de la vision « super­mar­ché » des produits cultu­rels : Il y a déjà trop d’ac­teurs majeurs. Pour survivre il faut un critère diffé­ren­ciant. Ce peut être la forte liai­son avec le maté­riel (Apple), avoir un poids énorme (Amazon, Google), ou viser un marché de niche, une « couleur » parti­cu­lière, une valeur ajou­tée quel­conque. La FNAC était géné­rique, sans valeur ajou­tée, mais sans le poids des 3 gros acteurs, et en restant plus complexe que ces derniers.

    C’est vrai pour la musique, mais aussi pour le livre, pour la vidéo et pour à peu près tous les conte­nus déma­té­ria­li­sés : Seul un ou deux super­mar­chés peuvent survivre. Pour les autres déve­lop­per une spéci­fi­cité forte est indis­pen­sable si on ne veut pas mettre la clef sous la porte. Arri­ver avec un simple « je suis la FNAC » ne suffit pas, tout simple­ment.

    Là où ça fait plus peur c’est sur la stra­té­gie : En aban­don­nant les conte­nus numé­rique à Apple et Kobo, la FNAC est en train d’af­fir­mer qu’à long terme elle est un simple maga­sin d’élec­tro­nique (hi-fi, vidéo, micro-infor­ma­tique). Impos­sible d’ima­gi­ner que la stra­té­gie long terme soit sur le CD et le DVD physique. Il reste les jeux vidéos et les livres papier mais pour combien de temps ces acti­vi­tés tien­dront-elles face au déma­té­ria­lisé ?

    Le pire c’est que même l’élec­tro­nique, la FNAC n’est pas connu pour ses prix spécia­le­ment bas. La concur­rence du web va être rude, le coût fixe des maga­sins en centre ville va se faire de plus en plus sentir au fur et à mesure que les conte­nus seront ache­tés ailleurs.

    À tous ceux qui pensent que leur acti­vité est unique­ment d’of­frir un cata­logue pour une vente en masse, ce doit être un signal d’alarme, surtout si vous n’avez même pas une marque et un trafic comme la FNAC pour capi­ta­li­ser dessus.

  • Poli­tique de métier, ENA facteur de déclin

    S’il fallait encore un argu­ment pour montrer que la poli­tique ne doit *pas* être un métier, et qu’il faut abso­lu­ment restreindre le nombre de mandats et le cumul de ces mandats : L’ENA, facteur de déclin français.

    Le poli­tique de métier doit penser à sa carrière, doit ména­ger les suscep­ti­bi­li­tés de tous et en parti­cu­lier des pairs et des gens au pouvoir, et doit s’abs­te­nir de tout idée disrup­tive. Il prend comme néces­saire d’ac­cep­ter les conven­tions et le système, aussi mauvais puisse-t-il être.

    En France la poli­tique et l’ad­mi­nis­tra­tion sont non seule­ment un métier, mais on en fait aussi une forma­tion dédié. Tout faux.

  • Choc de compé­ti­ti­vité, ou pas

    Il est bon de le savoir et de le rappe­ler, même si ça ne dégage pas de solu­tion pour autant: La baisse du coût du travail en compa­rant avec le voisin n’amé­lio­rera pas la compé­ti­ti­vité, mais mènera forcé­ment à des désastres sociaux.

    En Europe, nombre de pays s’en­gagent dans des poli­tiques simi­laires, de telle sorte que leurs efforts s’an­nu­le­ront mutuel­le­ment, la guerre des coûts sala­riaux ne béné­fi­ciant à personne en l’ab­sence de hausse des ventes. C’est, d’ailleurs, là, la grande diffé­rence avec les gains de compé­ti­ti­vité obte­nus par une entre­prise face à ses concur­rentes, car ces gains n’af­fectent pas la demande globale. Seule l’ex­por­ta­tion hors d’Eu­rope devrait béné­fi­cier de la mesure, et relan­cer l’ac­ti­vité.

    Malheu­reu­se­ment

    Mais – et c’est là que le bât blesse – la grande indus­trie expor­ta­trice, censée être la béné­fi­ciaire prin­ci­pale de ces mesures, a une struc­ture de coûts dans laquelle la main-d’oeuvre pèse rela­ti­ve­ment peu par rapport aux inves­tis­se­ments ; elle emploie une main-d’oeuvre quali­fiée, pour laquelle le chômage est d’ores et déjà faible et ses usines les plus gour­mandes en main-d’oeuvre sont délo­ca­li­sées depuis long­temps…

    La fausse promesse du choc de compé­ti­ti­vité.

  • De la condam­na­tion des lanceurs d’alerte

    Ce n’est pas la première fois que ça arrive. J’ai souve­nir des fuites dans la magis­tra­ture ou dans l’ad­mi­nis­tra­tion française qui avaient mené aux mêmes problèmes : L’of­fi­cier de CIA qui avait révélé le nom du respon­sable en charge des tortures a été empri­sonné. Le respon­sable dont le nom a été révélé et qui lui a fait quelque chose de bien plus grave n’est lui pas inquiété. En paral­lèle le jour­na­liste qui publie la liste des probables frau­deurs fiscaux que la Grèce aurait été « égarée » est arrêté, les frau­deurs toujours pas pour­sui­vis.

    Les admi­nis­tra­tions, entre­prises, collec­ti­vi­tés se défendent elles-mêmes contre les possibles fuites. L’ap­par­te­nance et la survie du groupe devient plus impor­tante que tout, au risque d’ar­ri­ver à proté­ger les plus graves dérives. Je ne parle même pas de l’his­toire de Wiki­pe­dia.

    Nous *devons* avoir un protec­tion parti­cu­lière pour qui dénonce un fait illé­gal. Ce n’est pas bien complexe, on peut même y inscrire une néces­sité de propor­tion entre le besoin de l’alerte et le délit ou le crime révélé. Le problème c’est que pour ça il faut que nos poli­tiques et en parti­cu­lier l’État acceptent que ça s’ap­pliquent à eux aussi.

  • Blanc sur orange, c’est noir sur noir

    Parce que ça m’a servi récem­ment, ça peut servir à d’autres.

    Du vert clair sur du blanc c’est illi­sible. Du marron sur du noir, c’est illi­sible. Quelle est la limite, le blanc sur orange est-il lisible ? Se fier à sa propre vision c’est oublier que tous n’ont pas les mêmes diffi­cul­tés, et oublier le contexte diffé­rent entre le visi­teur et le créa­teur de l’illus­tra­tion.

    Donc pour avoir une mesure objec­tive, je vous recom­mande la lecture du billet Open­web (une ressource excel­lente qui n’est jamais assez recom­man­dée), et l’ou­til Contrast-A. Par la même occa­sion faites atten­tion aux diffé­rents dalto­niens : Ça repré­sente tout de même presque 10% de la popu­la­tion mascu­line.

    J’en profite : même si c’est proba­ble­ment ce que je fais ici, vous avez en géné­ral inté­rêt à ne pas faire du noir sur blanc et encore moins du blanc sur noir. Atté­nuer le noir, voire le blanc, est souvent une bonne idée même si c’est moins épatant lors des présen­ta­tions à la direc­tion.

  • Bluffé par Capi­taine Train

    Capi­taine Train c’est un service en ligne d’achat de billet de train. Rien de sexy à priori mis à part que c’est juste très bien foutu, surtout vis à vis de ce qu’é­tait Voyages SNCF à l’époque. Peu de clics, trace simple de mes achats, équipe tech­nique réac­tive, je n’en demande pas plus. C’est au point où je préfère passer par là en note de frais que de passer par le voya­giste de l’en­tre­prise qui devrait pour­tant faire tout à ma place y compris la factu­ra­tion.

    Voilà qu’aujourd’­hui ils me répondent sur twit­ter pour me dire qu’une sugges­tion faite sur le même média en juillet 2011 vient d’être implé­men­tée. Plus d’un an après, juste pour me dire ça.

    Je suis buffé, impres­sionné. C’est peut être rien mais je n’ai jamais vu une rela­tion client comme celle là, *jamais*. C’est juste magique. J’ai fait, conseillé, accom­pa­gné pas mal de boîtes sur le commerce élec­tro­nique et là j’ai juste pris une claque.

    Conti­nuez les gars, vous avez tout compris.

  • Une loi pour le domaine public

    Tout le monde ne prend pas la même direc­tion alors pour faire contraste avec la posi­tion de l’UPP, voici un mouve­ment pour une loi sur le domaine public. Ça vient encore une fois d’un rêve de l’ex­cellent S.I.Lex.

    Il faut dire que de plus en plus le droit d’au­teur absolu en vient à grigno­ter le domaine public. Il suffit de scan­ner un docu­ment de plusieurs siècles pour récla­mer un droit d’au­teur et en inter­dire la copie. Il suffit de mettre le domaine public dans un musée pour y ajou­ter des condi­tions contrac­tuelles assu­rant une exclu­si­vité. Il suffit de mettre un coup de pein­ture ou d’éclai­rage sur un monu­ment du moyen âge pour en inter­dire les repro­duc­tion. On pour­rait conti­nuer long­temps comme ça mais ce grigno­tage est telle­ment insti­tu­tion­na­lisé qu’il sert de base aux parte­na­riats publics-privés.

    IV) Empê­cher les atteintes à l’in­té­grité du domaine public
    13. Les repro­duc­tion fidèles d’oeuvres en deux dimen­sions appar­te­nant au domaine public doivent aussi être dans le domaine public
    14. Empê­cher la neutra­li­sa­tion du domaine public par le droit des bases de données
    15. Empê­cher que la réuti­li­sa­tion d’oeuvres du domaine public soit entra­vée sur le fonde­ment de la loi du 17 juillet 1978 rela­tive aux infor­ma­tions publiques
    16. Empê­cher les inter­fé­rences entre le domaine public au sens de la propriété intel­lec­tuelle et le domaine public au sens de la doma­nia­lité publique
    17. Empê­cher que la réuti­li­sa­tion d’oeuvres du domaine public soit entra­vée par des clauses contrac­tuelles
    18. Empê­cher que la réuti­li­sa­tion d’oeuvres du domaine public soit entra­vée par des DRM
    19. Empê­cher que les repro­duc­tions d’oeuvres du domaine public soient inter­dites dans les emprises des insti­tu­tions cultu­relles

    Il est indis­pen­sable d’agir si on souhaite garder un espace public dans notre monde numé­rique, sinon tous les conte­nus vont deve­nir sous exclu­si­vité à l’oc­ca­sion de leur passage sous forme de 0 et de 1. Et ça permet­tra de renfor­cer, défendre et aider d’au­tant plus faci­le­ment les usages perti­nents du droit d’au­teur, dans le sens où il ne sera plus perçu comme un para­site.

  • Protec­tion des chan­delles photo­gra­phiques

    Je commence par la cita­tion telle­ment c’est énorme :

    L’émer­gence d’une concur­rence déloyale par les sites commu­nau­taires. Ces sites, comme wiki­me­dia, orga­nisent par exemple des concours de photo­gra­phie en plaçant les contri­bu­tions sous « Crea­tive Commons ». Néan­moins, ces contrats auto­risent une utili­sa­tion commer­ciale par des tiers des photos. In fine, cela abou­tit à l’émer­gence d’une concur­rence déloyale. L’UPP est donc favo­rable à une modi­fi­ca­tion de Code de la propriété intel­lec­tuelle prévoyant que l’usage profes­sion­nel d’oeuvres photo­gra­phiques est présumé avoir un carac­tère onéreux.

    C’est la notion même d’échange non marchand et de contenu gratuit qui est attaquée ici par l’UPP. C’est très révé­la­teur de certains cercles autour du droit d’au­teur. Non seule­ment ce dernier doit être absolu mais le gratuit, le libre et le domaine public doivent être pour­chas­sés. L’objec­tif qui n’est même plus caché est de créer des syndi­cats ou des guildes et que, ici, tout usage d’une photo néces­site un paie­ment à la guilde des photo­graphes. Peu importe qui a photo­gra­phié, peu importe l’in­ten­tion de l’au­teur.

    Le droit d’au­teur n’est plus une volonté ou une rému­né­ra­tion de l’au­teur mais un droit à pour­cen­tage de la part du corps de métier corres­pon­dant. Il est temps d’ar­rê­ter la machine, elle est deve­nue folle.

    Pour le plai­sir je vous copie le début du para­graphe précé­dent :

    La notion « libre de droit » ; une remise en cause du droit d’au­teur. De fait, cette notion, sans fonde­ment juri­dique […]

    Je ne ferai pas d’ex­pli­ca­tion de texte mais grosso modo la réac­tion de l’UPP c’est « il y a des choses qu’on peut utili­ser gratui­te­ment ou peu cher, et ça nous empêche de faire autant de brou­zoufs qu’on aime­rait ». (oui, j’aime bien les expli­ca­tions en brou­zoufs en ce moment)

  • « Nous, diri­geants des plus grandes entre­pri­ses… »

    Sérieu­se­ment, autant le mouve­ment des pigeons pouvait en convaincre certains, autant j’ai l’im­pres­sion que certains font tout pour se prendre des claques.

    « Nous, diri­geants des plus grandes entre­pri­ses… », expli­ca­tion de texte

    « Nous, diri­geants des plus grandes entre­prises privées françaises, propo­sons au gouver­ne­ment un pacte pour relan­cer la crois­sance et l’em­ploi. Il traduit notre ambi­tion pour la France et est conçu dans un esprit de dialogue. La France affiche un défi­cit sans précé­dent de son commerce exté­rieur, de ses paie­ments courants, de ses finances publiques et de ses comptes sociaux. Les marges de nos entre­prises sont histo­rique­ment basses. Le chômage sape la cohé­sion sociale et exclut notre jeunesse. La France doit se trans­for­mer en profon­deur. Il est urgent d’agir main­te­nant et collec­ti­ve­ment. Nous préco­ni­sons une réponse globale ados­sée à des mesures simples et concrètes.

    Traduc­tion : La marge c’est des brou­zoufs. On veut plus de brou­zoufs, donc plus de marge.

    On le verra par la suite, il n’est même pas fait semblant de béné­fi­cier à la collec­ti­vité. On parle bien de marge, de coût, de béné­fice, rien d’autre.

    1) Avec une dépense publique record de 56% du PIB, nous sommes arri­vés au bout de ce qui est suppor­table. L’État doit réali­ser 60 milliards d’eu­ros d’éco­no­mies (3 points de PIB) au cours des cinq prochaines années.
    2) Pour les entre­prises, il faut bais­ser le coût du travail d’au moins 30 milliards d’eu­ros sur deux ans, en rédui­sant les coti­sa­tions sociales qui pèsent sur les salaires moyens (2 smic et plus). Un trans­fert financé pour moitié par un relè­ve­ment de la TVA de 19,6% à 21% (la moyenne euro­péenne) et l’autre moitié par une baisse des dépenses publiques.
    3) Il faut garan­tir aux entre­prises un envi­ron­ne­ment fiscal favo­rable et stable en bais­sant notam­ment l’im­pôt sur les socié­tés pour le rame­ner au niveau de nos voisins euro­péens.

    Traduc­tion : Faudrait bais­ser nos impôts et nos coûts, ça ferait plus de brou­zoufs.

    Pour infor­ma­tion le budget de l’état après rever­sion aux collec­ti­vi­tés et à la Commu­nauté Euro­péenne est d’en­vi­ron 200 milliards. On demande « juste » de faire bais­ser ce budget d’un petit 30%, en cinq ans. C’est un peu comme si on reti­rait l’im­pôt sur le revenu (qui fait juste­ment 60 milliards d’eu­ros). Le « en 5 ans » est ambi­guë sur le fait qu’il faut arri­ver à faire cette écono­mie au bout des cinq ans ou lissée sur cinq ans. Même divi­sée par 5, ça reste une somme énorme.

    On veut aussi reti­rer 30 milliards sur les coti­sa­tions sociales pour moitié sur la baisse des dépenses. En français la baisse des dépenses liées aux coti­sa­tions sociales c’est la baisse des pres­ta­tions sociales. Donc aujourd’­hui avec tous ces gens dans le besoin suite à la situa­tion écono­mique, on veut bais­ser les pres­ta­tions sociales et réus­sir à bais­ser de 30% le budget de l’état en même temps  (et comme le coût de fonc­tion­ne­ment ne risque pas de bais­ser de beau­coup, c’est sur les pres­ta­tions qu’on va tout reti­rer). N’ou­bliez pas non plus que les pres­ta­tions béné­fi­cient surtout aux plus bas salaires alors que comme le dit très bien l’ar­ticle de base, la baisse profi­tera unique­ment à ceux qui sont au dessus du salaire moyen. Riche plus riches, pauvres plus pauvres, rien de neuf.

    Le must c’est ce troi­sième point. En France l’im­pôt sur les socié­tés est de 35% envi­ron, – excep­tion­nel­le­ment pour 2012, 5 points de plus pour les entre­prises avec un CA de plus de 250 millions (sachant que ce sont aussi celles qui savent très bien béné­fi­cier des dispo­si­tifs et qu’elles sont rare­ment au niveau d’im­pôt théo­rique). Donc, dans ce pays fonciè­re­ment commu­niste qu’est les États Unis d’Amé­rique, l’im­pôt sur les socié­tés est entre 15% et 40% (vu qu’on parle des 12 plus grands patrons, on parle du 40%). Le problème n’est pas le montant, c’est que ce sera toujours trop et qu’on veut toujours s’ali­gner sur le moins disant.

    1) À côté des contrats de géné­ra­tion que nous soute­nons, nous voulons promou­voir une « plate-forme pour l’em­ploi des jeunes ». Elle favo­ri­sera les emplois d’in­ser­tion, des actions d’em­bauche inter-entre­prises, la mise en réseau de nos centres de forma­tion et le déve­lop­pe­ment de l’ap­pren­tis­sage.
    2) Il est vital d’ins­tau­rer un dialogue social ouvert très en amont pour permettre aux entre­prises de s’adap­ter aux aléas de la conjonc­ture. C’est l’objet de la négo­cia­tion sur la sécu­ri­sa­tion de l’em­ploi que nous soute­nons.

    Traduc­tion : On aime­rait bien en plus que l’état subven­tionne en partie nos travailleurs et nous permette de les licen­cier plus faci­le­ment en fin de subven­tion, ça lais­se­rait plus de brou­zoufs pour nous.

    Fran­che­ment il faudrait être de mauvaise foi pour affir­mer qu’en France le problème de l’em­ploi c’est le manque de forma­tion des jeunes. On pour­rait même arguer du contraire en fait. Si les jeunes ne sont pas embau­chés, c’est à ces grands patrons que revient le problème, pas à l’État. Ici ce qu’on cherche ce sont des emplois aidés, des alter­nants pas chers, des stagiaires.

    Le must est encore le dernier point. Négo­cier la sécu­ri­sa­tion de l’em­ploi c’est surtout négo­cier sa non-sécu­ri­sa­tion. Il est évident qu’au­cun de ces patron n’ima­gine renfor­cer encore plus la sécu­ri­sa­tion des CDI. Il s’agit bien de l’in­verse et de pouvoir licen­cier faci­le­ment en mauvaise conjonc­ture (après avoir vidé les caisses des filets sociaux si vous avez bien lu au dessus). Ce n’est pas forcé­ment idiot isolé­ment, mais au milieu du reste du mani­feste ça devient juste une façon de se concen­trer sur sa marge. L’in­tro était très claire, c’est de la marge des patrons qu’on va parler.

     

    1) Pour donner à notre pays toutes ses chances, il faut préser­ver le crédit d’im­pôt recherche.
    2) Garan­tir une offre de capi­taux large et dense pour finan­cer les projets à travers des leviers comme la Banque publique d’in­ves­tis­se­ment (BPI), les inves­tis­seurs privés et les ressources du fonds d’amorçage du commis­sa­riat géné­ral à l’in­ves­tis­se­ment.
    3) Conti­nuer à nous rappro­cher du monde de la recherche publique dans le cadre des pôles de compé­ti­ti­vité.
    4) Concen­trer les moyens sur une quin­zaine de secteurs d’ave­nir comme la santé, les sciences du vivant ou les tech­no­lo­gies de l’ef­fi­ca­cité éner­gé­tique.

    Traduc­tion : Conti­nuez à nous subven­tion­ner en brou­zoufs.

    Ben oui, il faut réduire de 60 milliards le budget de l’État, mais surtout il faut conti­nuer à faire des exoné­ra­tions d’im­pôts (surtout ne pas tenter d’ex­pliquer que les niveaux de subven­tion et d’im­po­si­tion sont liés, et que l’un ne va pas sans l’autre, que les états avec moins de pres­sion fiscales font aussi moins d’aides). Mieux, il faut finan­cer ces entre­prises privées et conti­nuer de créer des struc­tures propres à récu­pé­rer les fonds publics.

    1) Il faut se donner les moyens d’ex­plo­rer et d’ex­ploi­ter nos ressources natio­nales comme les gaz de schiste.
    2) Rester prag­ma­tique dans la mise en œuvre de la tran­si­tion éner­gé­tique, qu’il s’agisse de réduire nos émis­sions de CO2 ou notre expo­si­tion à la produc­tion d’élec­tri­cité d’ori­gine nucléaire.
    3) Déve­lop­per des réponses tech­no­lo­giques à tous ces défis où nos entre­prises ont acquis un vrai savoir-faire.

    Traduc­tion : Lais­sez nous faire des brou­zoufs sans règle et règle­men­ta­tion.

    Non, pas besoin d’ex­pli­ca­tion, si ce n’est suppri­mer les règles béné­fi­ciaires à la collec­ti­vité pour permettre aux grandes entre­prises privées de mieux faire fortune.

    Notre code de gouver­nance Afep-Medef est déjà l’un des plus stricts au monde mais nous sommes prêts à le modi­fier en :
    1) soumet­tant les rému­né­ra­tions des diri­geants à un vote consul­ta­tif des action­naires lors de l’as­sem­blée géné­rale annuelle ;
    2) créant un haut comité du gouver­ne­ment d’en­tre­prise habi­lité à inter­ve­nir auprès des conseils d’ad­mi­nis­tra­tion ;
    3) limi­tant à deux le nombre de mandats d’ad­mi­nis­tra­teurs pour les diri­geants manda­taires sociaux.

    Traduc­tion : On fait semblant d’être soumis pour faire plai­sir à la foule, vous pour­riez nous lais­ser faire des brou­zoufs en échange.

    Lève la main celui qui croit que ces « initia­tives les plus strictes du monde » permettent de régler quoi que ce soit ou même de limi­ter les dérives.

    Bref, on a 98 très grands patrons qui font ce qu’il faut pour avoir plus de marges. Pour augmen­ter cette marge ils préco­nisent de réduire les pres­ta­tions sociales, réduire d’un tiers le budget de l’État et donc les infra­struc­tures collec­tives, réduire la sécu­ri­sa­tion des parcours. En échange ils ont des votes consul­ta­tifs pour leurs augmen­ta­tions, dont on sait que depuis elles sont plus que raison­nables, et un haut comité (chouette).

    Poli­tis y voit une lutte des classes et sans parta­ger leurs vues, pour la première fois, je me demande si nous n’en sommes pas là.

    En fait même si on partage leurs idées, je n’ima­gine pas une seconde qu’une commu­ni­ca­tion de ce type là revienne à autre chose que de se tirer une balle dans le pieds du point de vue de leur image grand public. Alors ça peut vouloir dire deux choses : 1– ils sont idiots et mal conseillés 2– ça fonc­tionne et nos poli­tiques tombent dans le panneau suffi­sam­ment large­ment pour que ça compense le fait de se mettre à dos toute la popu­la­tion. Le 1 est pure­ment acadé­mique, pour arri­ver où ils sont, ces patrons ne peuvent pas être tota­le­ment idiots. Le coro­laire du 2 fait assez peur parce qu’il implique que la voix du peuple et ce que pense le peuple n’a quasi­ment aucune influence sur nos poli­tique et encore moins sur la poli­tique que mènent ces derniers. #joie.

  • Copy­right Madness

    Si vous n’avez pas peur de dépri­mer devant les excès du droit d’au­teur, vous *devez* lire les histoires hebdo­ma­daires du Copy­right Madness.

    Je n’en dis pas beau­coup plus car chaque entre­fi­let m’in­ci­te­rait à faire trois longs billets. Si ça ne vous incite pas à vouloir réfor­mer le droit d’au­teur, je ne peux plus rien pour vous.