Pour ceux qui suivent mon cheminement à propos du revenu de base, il y a une récolte de signatures en cours au niveau européen. Ce n’est pas une énième pétition mais une étape de procédure pour avoir audience formelle auprès de l’assemblée européenne. Bref, si vous vous sentez concernés, n’hésitez pas. Il ne s’agit pas de promouvoir, juste de dire que ça mérite une étude.
Catégorie : Fiscalité
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Je crois que le constat est clair
Encore une fois, je vois un comparatif de charges, taxes et impôts. Le sous titre « Je crois que le constat est clair » laisse à penser que nous sommes écrasés sous les prélèvements là où les autres en sont loin.
Si on regarde les chiffres de plus près
Moi je crois que le constat est loin d’être clair au contraire. Bon, déjà c’est bourré d’erreurs. La plus flagrante est l’IR Suisse qui est indiqué de 0 à 13%. Ça interpelle. En fait je ne sais pas à quoi correspondent ces chiffres. Il faut compter les impôts fédéraux, ceux du canton, ceux de la commune, qui sont tous les trois dépendants du revenu. Leur répartition est différente de la France. Le taux d’imposition moyen est de 40%, rien d’exceptionnel en fait. La France est de 41%. Autant dire que le tableau est trompeur.
Maintenant la comparaison telle quelle n’a aucun sens en soi. Il faut parler d’assiette, de déductions et de franchises diverses. Qui paye l’impôt ? En France c’est de l’ordre de la moitié de la population qui ne paye pas d’IR, on ne peut pas dire que la question soit négligeable. Même chose pour les tranches : À partir de quel niveau de revenu monte-t-on dans les tranches ?
Tel quel ça peut vouloir dire tout et son contraire. Pour une comparaison honnête, il faudrait comparer des taux moyens, ou des % du PIB. On l’a vu pour la Suisse.
Oh, mais les prestations sont-elles les mêmes ?
Même une fois qu’on étudie en % du PIB, la plus grande arnaque est que nous comparons des prélèvements sans comparer ce que nous obtenons avec ces prélèvements. Il suffit de séparer dans les prélèvements ce qui a trait à l’administration et ce qui a trait à la sécurité sociale. Contrairement aux attentes, nos prélèvements liés à l’administration sont largement en dessous de la moyenne. Nous prélevons finalement moins que la plupart des pays.
Au temps pour les pré-jugés : Nous avons peu d’impôt (hors sécurité sociale).
Bien entendu, ça veut dire qu’à l’inverse nous avons un prélèvement record pour la partie sécurité sociale, et c’est confirmé par les mêmes chiffres. Là aussi attention aux comparaisons hâtives : Il faut aussi comparer ce que nous obtenons en échange.
Il est facile de moins prélever par l’État et les collectivités si c’est pour reporter les paiements au niveau individuel. La première question est donc de savoir si globalement nous payons plus pour notre santé que nos voisins.
Résultat : En comptant les dépenses publiques et privées, nous dépensons pas mal, mais à peu près autant que l’Allemagne ou la Suisse, et 50% de moins que les États Unis (en % du PIB).
Serait-ce plus pertinent de ne pas imposer mais de laisser payer plus en privé ? Sans compter la vraie question sociale de la répartition et de l’assistance aux plus faibles revenus, dont on sait qu’elle finit par coûter cher à l’État quand on l’oublie (en ne se faisant soigner qu’en dernier recours, on finit par payer bien plus cher, et je ne parle même pas de l’espérance de vie pour certaines catégories sociales en Allemagne qui baisse au lieu d’augmenter). Plus qu’une question de niveau de prélèvement, il y a une question de choix de société et de répartition.
Nous avons pris la sécurité sociale (au sens large, avec les indemnités maladie, allocations familiales, la retraite,…) mais on peut aussi parler de l’éducation qui coûte finalement peu cher en France parce que gérée collectivement, des subventions diverses, du niveau d’infrastructure publique…
Sur le sujet (source des graphes) : Les crises – Prélèvements obligatoires.
Au final, qu’en est-il ?
- Oui nous payons beaucoup d’impôts, taxes et cotisations
- Mais comparer n’a de sens qu’en explorant ce qu’on obtient en retour et ce que couvrent ces impôts, taxes et cotisations
- À prestations égales nous sommes très loin d’être mal lotis par rapport aux autres (qui eux aussi trouvent qu’ils payent trop d’impôts, bien entendu)
- La vraie question est celle du modèle de société : qui paye ? collectif ou individuel ? Mais dans les deux cas on finit toujours par payer la même chose au niveau du pays.
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Quand EDF fait de l’optimisation fiscale aux Pays-Bas
Des effets de la gestion par objectif des différentes entités, sans vue et coordination globale : Des sociétés françaises appartenant majoritairement à l’État crééent des filiales à l’étranger pour investir afin de payer moins d’impôt en France.
Je ne sais pas si vous notez mais quand EDF paye des impôts, dans les faits ce sont des sous déjà détenus indirectement à l’État qui sont transférés dans une autre caisse. Faire une filiale à l’étranger pour payer moins d’impôt c’est transferer des sous détenus indirectement par l’État français, pour les donner à un état étranger. On en transfère peut être moins, ça remplit mieux les objectifs de tel ou tel comité de direction, mais c’est une perte sèche au final.
On peut m’expliquer comment l’État gère ses actifs ? Parce que là on marche sur la tête.
On en parle aussi à propos de la BNF. L’intéressement des directeurs à leur structure sans tenir compte de l’intérêt global mène forcément à ce type de comportement à tous les échelons
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Les sociétés écrans les plus opaques se trouvent aux Etats-Unis et au Royaume-Uni
Où devez-vous créer votre société écran ? Où est l’opacité ?
Lorsque les faux clients ont proposé de payer une prime pour contourner les règles, le taux de demandes de documents a chuté rapidement. « Le motif que vous invoquez pour incorporer une société pourrait bien être une façade pour financer le terrorisme », a répondu un fournisseur américain. Pour indiquer ensuite qu’il envisagerait d’établir et d’administrer la coquille pour 5000 dollars par mois.
Contre l’intuition, les paradis fiscaux ne sont pas les meilleurs candidats : Les sociétés écrans les plus opaques se trouvent aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.
À rapprocher peut être de la résistance à la corruption dans nos pays, qui est moins institutionnalisée que dans les films, mais bien moins haute qu’on ne le croit.
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Taux marginal d’impôt sur le revenu à 75%
Dis papa, une imposition marginale à 75% pour les très hauts revenus, c’est un scandale communo-socialo-égalitariste ou pas ? Un peu d’histoire et de statistiques :
Le taux très bas actuel est finalement bien plus exceptionnel que l’idée des 75%
Le taux marginal d’imposition sur le revenu a été historiquement plusieurs fois supérieur à 75%, en France comme à l’étranger, sans que cela n’ait jamais été considéré comme confiscatoire.
Aux États Unis (pays socialo-communiste s’il en est), ce taux a dépassé par deux fois les 90%, pour au total 14 ans sur le dernier siècle, et est resté au delà des 70% la moitié du temps. En France notre taux marginal n’a pas eu les mêmes extrêmes qu’aux États Unis (comme quoi les idées reçues…) mais il est resté supérieur à 60% la majorité du temps, ne descendant en dessous de 50% qu’épisodiquement (dont la période récente).
Taux marginal d’imposition aux États Unis d’Amérique Taux marginal d’imposition en France Il est aussi intéressant de noter que le seuil pour bénéficier de ce taux marginal, même ramené à un revenu équivalent récent, était finalement très faible en regard de ce que le gouvernement tente d’instaurer aujourd’hui (comptez un facteur de 6 à 20 quand même).
À la décharge des libéraux américains, le revenu nécessaire pour atteindre les taux marginaux maximum ont été parfois réellement élevés (quasi théoriques), mais ils existaient. En soi ça veut dire qu’imaginer taxer à 75% est concevable, même là bas, et que la mesure est dans le positionnement du palier.
La première conclusion qu’on peut en tirer : Que l’idée d’un taux marginal à 75% au delà du million d’euros pose problème ne découle pas d’un principe général objectif mais bien d’une évolution très récente de nos mentalités.
Et si on parlait du taux moyen ?
Bien évidemment ici nous ne parlons que du taux marginal de l’impôt sur le revenu. Pour être réalistes il faudrait parler du taux d’imposition moyen, et pas que de l’impôt sur le revenu. Ce taux d’imposition moyen est finalement assez stable entre 40 et 50% pour l’ensemble de la population si on omet les 1 ou 2% les plus riches et les 1 ou 2% les moins riches. La progressivité est assez aplatie par les parties forfaitaires ou plafonnées, ainsi que par les niches ou optimisations qui profitent essentiellement aux revenus aisés.
Je vais laisser les 1 à 2% les moins riches, qui ne sont de toutes façons pas capables d’apporter un revenu significatif à la société, n’en ayant pas un eux-mêmes. On remarque par contre que sur les 1% les plus riches le taux d’imposition moyen régresse fortement au lieu de progresser. Les revenus venant plus souvent de plus-values ou dividendes que de salaires, on saute les cotisations sociales. Le revenu du capital est lui en plus significativement moins taxé. Au final les quelques 1% les plus riches ont une contribution plus faible que tous les autres en proportion de leur revenus, et quand je dis « tous les autres » ça comprend même le premier décile le moins riche.
Il faudrait probablement revoir tout le système plutôt que de monter les taux marginaux, mais en soi il est presque scandaleux de parler de parler de trop hauts impôts sur les plus riches quand on voit un tel graphique (attention à l’échelle non proportionnelle) :
Tout ça ne dit en fait pas si ce taux marginal est légitime ou excessif. Mais finalement cette question est uniquement un choix de société, de savoir comment nous souhaitons redistribuer les mises.
Et c’est bien cette conclusion qui est importante : Ne laissons pas confisquer le débat par des arguments qui se disent objectifs ou définitifs sur le caractère confiscatoire ou illégitime d’un prélèvement à 75% : Ils ne sont vrais ni vis à vis de l’histoire, ni vis à vis de la réalité de l’impôt dans son ensemble.
Lectures :
- http://dfcg-blog.org/2012/01/06/taxer-les-1-oui-le-taux-marginal-d-impot-peut-depasser-les-80/
- http://jeanneemard.wordpress.com/2012/04/10/le-taux-marginal-dimposition-maximal/
- http://blogs.rue89.com/graphique/2011/08/25/etats-unis-en-un-siecle-moins-dimpots-plus-dinegalites-218376
- http://www.les-crises.fr/l-impot-sur-le-revenu-en-france-1/
- http://www.les-crises.fr/l-impot-sur-le-revenu-en-france-2/
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Transparence de l’IRFM
Toujours politique, s’il fallait un argument pour prouver qu’il faut vite mettre un coup de pied dans la fourmilière des rémunérations du parlements, ce sont les parlementaires qui le donnent eux-mêmes :
Actuellement, les députés reçoivent chaque mois une indemnité parlementaire de 7 100 euros, soumise à l’impôt, et une Indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) de 6 400 euros, totalement exonérée. Le problème est que cette IRFM ne fait en pratique l’objet d’aucun contrôle, et s’apparente à un complément de revenu : en gros, les députés doublent leur salaire, sans le dire, et sans payer les impôts correspondants.
[…]
Or le nouveau président de l’Assemblée, Claude Bartolone, vient de réaffirmer qu’il était hors de question de changer ce régime, car il faudrait compenser les députés français du fait qu’ils seraient relativement peu rémunérés en Europe.
Dans le genre « je me tire une balle dans le pied pour expliquer que je ne sais pas viser » c’est un argument assez intéressant. En gros on vient de nous dire que le détournement des de l’indemnité pour frais de mandat est tellement institutionnalisé que si on commençait à vérifier ce qui en est fait, il faudrait compenser la perte (?!?) en augmentant les salaires.
Je vais être grossier mais bordel, on parle des représentants du peuples ! qui font les lois ! et ça ne les gêne pas une seconde de décider unilatéralement qu’ils ne sont pas assez payés et donc qu’il ont le droit de détourner des sommes à leur propre usage, nettes d’impôts, sans justification. Et c’est une réponse qui veut justifier le non-contrôle des indemnités de frais et des rémunérations annexes ? Je crois qu’il y a un décalage avec la vie réelle qui n’est même plus mesurable là.
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Choc de compétitivité, ou pas
Il est bon de le savoir et de le rappeler, même si ça ne dégage pas de solution pour autant: La baisse du coût du travail en comparant avec le voisin n’améliorera pas la compétitivité, mais mènera forcément à des désastres sociaux.
En Europe, nombre de pays s’engagent dans des politiques similaires, de telle sorte que leurs efforts s’annuleront mutuellement, la guerre des coûts salariaux ne bénéficiant à personne en l’absence de hausse des ventes. C’est, d’ailleurs, là, la grande différence avec les gains de compétitivité obtenus par une entreprise face à ses concurrentes, car ces gains n’affectent pas la demande globale. Seule l’exportation hors d’Europe devrait bénéficier de la mesure, et relancer l’activité.
Malheureusement
Mais – et c’est là que le bât blesse – la grande industrie exportatrice, censée être la bénéficiaire principale de ces mesures, a une structure de coûts dans laquelle la main-d’oeuvre pèse relativement peu par rapport aux investissements ; elle emploie une main-d’oeuvre qualifiée, pour laquelle le chômage est d’ores et déjà faible et ses usines les plus gourmandes en main-d’oeuvre sont délocalisées depuis longtemps…
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« Nous, dirigeants des plus grandes entreprises… »
Sérieusement, autant le mouvement des pigeons pouvait en convaincre certains, autant j’ai l’impression que certains font tout pour se prendre des claques.
« Nous, dirigeants des plus grandes entreprises… », explication de texte
« Nous, dirigeants des plus grandes entreprises privées françaises, proposons au gouvernement un pacte pour relancer la croissance et l’emploi. Il traduit notre ambition pour la France et est conçu dans un esprit de dialogue. La France affiche un déficit sans précédent de son commerce extérieur, de ses paiements courants, de ses finances publiques et de ses comptes sociaux. Les marges de nos entreprises sont historiquement basses. Le chômage sape la cohésion sociale et exclut notre jeunesse. La France doit se transformer en profondeur. Il est urgent d’agir maintenant et collectivement. Nous préconisons une réponse globale adossée à des mesures simples et concrètes.
Traduction : La marge c’est des brouzoufs. On veut plus de brouzoufs, donc plus de marge.
On le verra par la suite, il n’est même pas fait semblant de bénéficier à la collectivité. On parle bien de marge, de coût, de bénéfice, rien d’autre.
1) Avec une dépense publique record de 56% du PIB, nous sommes arrivés au bout de ce qui est supportable. L’État doit réaliser 60 milliards d’euros d’économies (3 points de PIB) au cours des cinq prochaines années.
2) Pour les entreprises, il faut baisser le coût du travail d’au moins 30 milliards d’euros sur deux ans, en réduisant les cotisations sociales qui pèsent sur les salaires moyens (2 smic et plus). Un transfert financé pour moitié par un relèvement de la TVA de 19,6% à 21% (la moyenne européenne) et l’autre moitié par une baisse des dépenses publiques.
3) Il faut garantir aux entreprises un environnement fiscal favorable et stable en baissant notamment l’impôt sur les sociétés pour le ramener au niveau de nos voisins européens.Traduction : Faudrait baisser nos impôts et nos coûts, ça ferait plus de brouzoufs.
Pour information le budget de l’état après reversion aux collectivités et à la Communauté Européenne est d’environ 200 milliards. On demande « juste » de faire baisser ce budget d’un petit 30%, en cinq ans. C’est un peu comme si on retirait l’impôt sur le revenu (qui fait justement 60 milliards d’euros). Le « en 5 ans » est ambiguë sur le fait qu’il faut arriver à faire cette économie au bout des cinq ans ou lissée sur cinq ans. Même divisée par 5, ça reste une somme énorme.
On veut aussi retirer 30 milliards sur les cotisations sociales pour moitié sur la baisse des dépenses. En français la baisse des dépenses liées aux cotisations sociales c’est la baisse des prestations sociales. Donc aujourd’hui avec tous ces gens dans le besoin suite à la situation économique, on veut baisser les prestations sociales et réussir à baisser de 30% le budget de l’état en même temps (et comme le coût de fonctionnement ne risque pas de baisser de beaucoup, c’est sur les prestations qu’on va tout retirer). N’oubliez pas non plus que les prestations bénéficient surtout aux plus bas salaires alors que comme le dit très bien l’article de base, la baisse profitera uniquement à ceux qui sont au dessus du salaire moyen. Riche plus riches, pauvres plus pauvres, rien de neuf.
Le must c’est ce troisième point. En France l’impôt sur les sociétés est de 35% environ, – exceptionnellement pour 2012, 5 points de plus pour les entreprises avec un CA de plus de 250 millions (sachant que ce sont aussi celles qui savent très bien bénéficier des dispositifs et qu’elles sont rarement au niveau d’impôt théorique). Donc, dans ce pays foncièrement communiste qu’est les États Unis d’Amérique, l’impôt sur les sociétés est entre 15% et 40% (vu qu’on parle des 12 plus grands patrons, on parle du 40%). Le problème n’est pas le montant, c’est que ce sera toujours trop et qu’on veut toujours s’aligner sur le moins disant.
1) À côté des contrats de génération que nous soutenons, nous voulons promouvoir une « plate-forme pour l’emploi des jeunes ». Elle favorisera les emplois d’insertion, des actions d’embauche inter-entreprises, la mise en réseau de nos centres de formation et le développement de l’apprentissage.
2) Il est vital d’instaurer un dialogue social ouvert très en amont pour permettre aux entreprises de s’adapter aux aléas de la conjoncture. C’est l’objet de la négociation sur la sécurisation de l’emploi que nous soutenons.Traduction : On aimerait bien en plus que l’état subventionne en partie nos travailleurs et nous permette de les licencier plus facilement en fin de subvention, ça laisserait plus de brouzoufs pour nous.
Franchement il faudrait être de mauvaise foi pour affirmer qu’en France le problème de l’emploi c’est le manque de formation des jeunes. On pourrait même arguer du contraire en fait. Si les jeunes ne sont pas embauchés, c’est à ces grands patrons que revient le problème, pas à l’État. Ici ce qu’on cherche ce sont des emplois aidés, des alternants pas chers, des stagiaires.
Le must est encore le dernier point. Négocier la sécurisation de l’emploi c’est surtout négocier sa non-sécurisation. Il est évident qu’aucun de ces patron n’imagine renforcer encore plus la sécurisation des CDI. Il s’agit bien de l’inverse et de pouvoir licencier facilement en mauvaise conjoncture (après avoir vidé les caisses des filets sociaux si vous avez bien lu au dessus). Ce n’est pas forcément idiot isolément, mais au milieu du reste du manifeste ça devient juste une façon de se concentrer sur sa marge. L’intro était très claire, c’est de la marge des patrons qu’on va parler.
1) Pour donner à notre pays toutes ses chances, il faut préserver le crédit d’impôt recherche.
2) Garantir une offre de capitaux large et dense pour financer les projets à travers des leviers comme la Banque publique d’investissement (BPI), les investisseurs privés et les ressources du fonds d’amorçage du commissariat général à l’investissement.
3) Continuer à nous rapprocher du monde de la recherche publique dans le cadre des pôles de compétitivité.
4) Concentrer les moyens sur une quinzaine de secteurs d’avenir comme la santé, les sciences du vivant ou les technologies de l’efficacité énergétique.Traduction : Continuez à nous subventionner en brouzoufs.
Ben oui, il faut réduire de 60 milliards le budget de l’État, mais surtout il faut continuer à faire des exonérations d’impôts (surtout ne pas tenter d’expliquer que les niveaux de subvention et d’imposition sont liés, et que l’un ne va pas sans l’autre, que les états avec moins de pression fiscales font aussi moins d’aides). Mieux, il faut financer ces entreprises privées et continuer de créer des structures propres à récupérer les fonds publics.
1) Il faut se donner les moyens d’explorer et d’exploiter nos ressources nationales comme les gaz de schiste.
2) Rester pragmatique dans la mise en œuvre de la transition énergétique, qu’il s’agisse de réduire nos émissions de CO2 ou notre exposition à la production d’électricité d’origine nucléaire.
3) Développer des réponses technologiques à tous ces défis où nos entreprises ont acquis un vrai savoir-faire.Traduction : Laissez nous faire des brouzoufs sans règle et règlementation.
Non, pas besoin d’explication, si ce n’est supprimer les règles bénéficiaires à la collectivité pour permettre aux grandes entreprises privées de mieux faire fortune.
Notre code de gouvernance Afep-Medef est déjà l’un des plus stricts au monde mais nous sommes prêts à le modifier en :
1) soumettant les rémunérations des dirigeants à un vote consultatif des actionnaires lors de l’assemblée générale annuelle ;
2) créant un haut comité du gouvernement d’entreprise habilité à intervenir auprès des conseils d’administration ;
3) limitant à deux le nombre de mandats d’administrateurs pour les dirigeants mandataires sociaux.Traduction : On fait semblant d’être soumis pour faire plaisir à la foule, vous pourriez nous laisser faire des brouzoufs en échange.
Lève la main celui qui croit que ces « initiatives les plus strictes du monde » permettent de régler quoi que ce soit ou même de limiter les dérives.
Bref, on a 98 très grands patrons qui font ce qu’il faut pour avoir plus de marges. Pour augmenter cette marge ils préconisent de réduire les prestations sociales, réduire d’un tiers le budget de l’État et donc les infrastructures collectives, réduire la sécurisation des parcours. En échange ils ont des votes consultatifs pour leurs augmentations, dont on sait que depuis elles sont plus que raisonnables, et un haut comité (chouette).
Politis y voit une lutte des classes et sans partager leurs vues, pour la première fois, je me demande si nous n’en sommes pas là.
En fait même si on partage leurs idées, je n’imagine pas une seconde qu’une communication de ce type là revienne à autre chose que de se tirer une balle dans le pieds du point de vue de leur image grand public. Alors ça peut vouloir dire deux choses : 1– ils sont idiots et mal conseillés 2– ça fonctionne et nos politiques tombent dans le panneau suffisamment largement pour que ça compense le fait de se mettre à dos toute la population. Le 1 est purement académique, pour arriver où ils sont, ces patrons ne peuvent pas être totalement idiots. Le corolaire du 2 fait assez peur parce qu’il implique que la voix du peuple et ce que pense le peuple n’a quasiment aucune influence sur nos politique et encore moins sur la politique que mènent ces derniers. #joie.
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Pourquoi les pigeons ont raison de protester
Si vous voulez un exemple de pourquoi je n’adhère pas à ce mouvement des pigeons entrepreneurs, voici un autre exemple. « Pourquoi les pigeons ont raison de protester » est un article nettement au-dessus des autres. C’est un des rares qui se veut factuel et chiffré au lieu de ne jouer qu’avec de vagues estimations et avec l’émotion.
Avant de commencer on voit tout de suite qu’on parle des petits entrepreneurs, les courbes sont logarithmiques : On multiplie par 10 à chaque graduation en abscisse pour arriver jusqu’à 100 millions de plus values (oui, vous avez bien lu). Forcément, avec une telle échelle les courbes semblent monter très vite et plafonner assez haut.
Alors le 60% c’était bien du flan ?
On commence par un joli graphique éclairant avec une courbe qui touche les 60 %. Pas loin on nous dit qu’en fait non, la CSG est déductible et on fait une nouvelle courbe qui elle ne s’approche pas du tout des 60 %. Mais alors, c’était bien du flan ?
Oui, mais ça ne choque personne de continuer à appuyer l’idée des 60 %. Même l’auteur commence par là, et continuera à donner la courbe des 60 % dans tous les graphiques, parce que c’est bien plus scandaleux et que ça fait un joli chiffre rond à communiquer dans la presse (même s’il est faux).
Ah, mais en fait il y a les lissages
Mais bien sûr ensuite on nous parle des lissages et des abattements. On se demande bien pourquoi il a fallu que le début de l’article nous parle des 60 % au début, et continue à insister dessus. Donc voilà, il y a plein de courbes, suivant le nombre d’années de garde.
Vous noterez la bonne fois d’avoir laissé la courbe des 60 % tout en haut, quand bien même on sait désormais qu’elle ne s’applique à personne, pas même en théorie.
Donc voilà, si on garde ses actions au moins 6 ans, la courbe commence à être relativement plate à 42 % quand on atteint 10 millions de plus values en une fois. C’est à comparer aux 35,5 % avant la réforme et aux 60 % qui sont avancés comme fer de lance de mouvement de contestation. Et oui, je n’ai pas fait d’erreur, je parle bien de 10 millions : Jusqu’à environ 800 000 euros la nouvelle imposition est plus faible que la précédente et il faut dépasser les 1 million pour que l’augmentation d’imposition dépasse les 3 ou 4 points (scandaleux dans notre contexte de remboursement de la dette, n’est-ce pas ?).
Ah mais il faut garder ses actions quelques années
L’auteur parle de complexité française. On peut le voir ainsi mais je n’ai pas l’impression qu’il soit vraiment scandaleux d’avoir une incitation uniquement si on ne revend pas à très court terme. Les entrepreneurs et investisseurs le font eux-même : Les BSPCE et autres actions gratuites sont généralement débloquées progressivement après X années (délai de carence et vesting). Étonnant que ce que les investisseurs imposent aux salariés et dirigeants, soit d’un coup considéré comme exagérément complexe quand l’État leur en applique une version moins contrainte.
Garder 6 ans ses actions d’une société qu’on créé (en tant qu’entrepreneur ou investisseur) semble hors de portée de l’auteur de l’article. 12 ans lui semble totalement irréaliste. Je ne sais pas dans quel monde il vit mais dans le mien ça ne semble pas incohérent.
Tiens, il manque des éléments
Aller, comme je suis bon prince, je vais ajouter des abattements supplémentaires : Ces courbes sont calculées pour un célibataire sans enfants. Le foyer français moyen est plus proche de deux adultes avec un ou deux enfants, les courbes vont bien baisser (ce qu’elles ne faisaient pas avec la fiscalité précédente). Au minimum ça va permettre d’augmenter le montant à partir duquel la plus-value devient significativement plus imposée que la fiscalité précédente.
Oh, et ça ne concerne ni les plus-values réinvesties ni celles dégagées lors du départ à la retraite.
Pour ça il faut que la société survive
L’argument qui tue est sur la courbe de gauche : C’est idiot de tabler sur une rétention de 12 ans alors qu’une majorité de sociétés ne vivent pas jusque là. Tentez d’oublier que la moitié des articles justifiaient l’imposition forfaitaire au nom de la création d’emploi, là nous allons nous occuper de sauvegarder la plus-value de sociétés non pérennes (les autres des durées de rétention de 6 à 12 ans ne posent pas problème).
Si c’est revendre la société rapidement quelques millions après 1 à 4 ans juste avant qu’elle ne meure, le pigeon là ce n’est pas l’entrepreneur mais celui qui achète la société. Grand bien vous fasse si vous réalisez une telle opération mais je ne vois aucune justification pour prétendre à un taux d’imposition réduit et à des abattements.
Même économiquement, un taux réduit pour une société qui n’était qu’un vent marketing destiné à la revente avant de mourir, ça ne tient pas. Quitte à choisir je préfère que l’État utilise ses finances pour aider à faire vivre les entreprises plutôt qu’à favoriser les gains de revente de ceux qui s’échappent au bon moment.
Alors oui, il y a un risque, mais c’est bien aussi ce qui justifie de telles rémunérations et de tels abattements. On peut gagner beaucoup, mais avec de grands risques de perdre. S’il s’agit de gagner beaucoup et vite avant que le risque d’échec ne se réalise, il va falloir qu’on reparle.
Oublions la comparaison entre états
J’ai unilatéralement sauté la première comparaison avec les taxes des autres pays. Je suis tout à fait incapable de savoir si ce qui y est dit est vrai, ou si l’auteur oublie quelque chose de fondamental (genre oublie que la plus-value n’est pas taxée en soi mais intégrée à l’impôt sur le revenu standard). Je n’ai aussi aucune envie de vérifier voir si les pays choisis le sont en écartant les exemples gênants pour la démonstration.
Enfin, l’auteur a peut être raison ou pas sur le statut social des autres pays, cela ne change rien à ce que nous estimons juste de faire en France. Nos modèles sociaux sont différents, et si nous pouvions nous permettre l’endettement des États Unis (100% du PIB au niveau fédéral, additionné à une faillite des États au point que la Californie a une notation plus faible que la Grèce et fait ses paiements avec des reconnaissances de dette, additionné encore à des grandes villes qui font faillite dans certains états) nous n’aurions même pas imaginé remettre en cause le taux d’imposition réduit sur les plus-values. Même pour les pays avec un modèle social similaire, nous sommes parfois beaucoup plus elevés sur certains points, parfois beaucoup plus bas. Dans tous les cas pour comparer l’imposition il faudrait comparer l’ensemble des prestations et des infrastructures, autant dire mission impossible.
Nous trouverons toujours des pays où l’imposition est moins forte, sauf à s’aligner sur le moins disant dans tous les domaines – environnement social, aides, prestations et infrastructures comprises, – nous n’y changerons rien.
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Entrepreneurs, changez de combat
J’ai fait deux billets sur des chiffres parce que les réactions me semblaient à côté de la plaque, mais j’ai l’impression que ce sont mes propres écrits qui se sont trompés d’argument.
Dites, entrepreneurs, êtes-vous certains de ne pas vous tromper de combat quand vous attaquez le projet fiscal ?
Il y a la réalité des chiffres. Quelques uns l’ont discuté, on a trouvé une petite différence qui a été mise à jour. Il y a visiblement encore une question à régler dans la gestion des parts fiscales. Dans l’ensemble mes billets étaient là dessus.
Mais justement, en discutant les gens sont rapidement partis sur des positions en dehors des chiffres sur les risques, sur les difficultés, sur le manque d’incitation, et sur le manque de soutien voir l’acharnement.
La vie de l’entreprise
Ces points là je les entends. Luttez pour que l’État retire les emmerdements, arrête de mettre des bâtons dans les roues, soutienne voir finance au besoin. Il y a eu un soutien au CIR et au JEI récemment, c’est certainement dans ces esprits qu’il faut travailler. On peut aussi inciter à l’innovation et à l’entreprenariat dans les universités. On peut aussi parler du chômage ou du filet de sécurité des entrepreneurs quand ils échouent (vu qu’on parle de risques). On peut parler des charges fixes des TPE et PME. On peut même parler du moyen de rémunérer par anticipation l’entrepreneur qui créé sa société quand elle n’est pas encore bénéficiaire.
Là dessus je pense que vous aurez le soutien de la plupart des gens à condition de ne pas abuser et de ne pas réclamer la survie sous injection publique de sociétés qui n’ont aucun espoir de fonctionner seules.
Bref, si vous parlez de faire en sorte que l’entreprise vive et se développe, c’est dans l’intérêt collectif plus que certain et la légitimité ne sera pas contestée.
La rémunération des investisseurs
Par contre, si vous parlez de la taxation de la revente des quelques très rares créations qui réussissent au point de générer des millions de plus-values, non seulement ça concerne très peu de monde mais en plus il s’agit d’intérêts particuliers. Il va être très difficile de justifier que ces revenus ne soient pas taxés au même barème que les autres.
D’après moi c’est à juste titre parce que le risque et la difficulté sont compensés par l’importance du gain potentiel. Cet équilibre n’a pas à être compensé par l’ensemble du pays. Ceux qui gagnent leur pari d’investissement n’ont pas de raison d’être plus exonérés d’impôts qu’un autre.
C’est d’autant plus vrai si l’entreprise a bénéficié au cours de sa vie des dispositifs d’aide, d’exonération, de soutien, de plafonnement ou de franchise de l’État (et même si ces dispositifs peuvent être mauvais ou insuffisants, ils existent et nous en profitons).
C’est sans compter aussi que vous êtes une petite minorité. La très grande majorité se lance pour vivre eux même ou faire vivre l’entreprise, pas dans l’objectif de plus-values à la revente. Considérer limiter les impôts comme solution à l’entreprenariat c’est oublier la très grande majorité qui galère aussi et qui elle ne gagne pas assez pour s’offusquer d’un barème d’imposition des plus-values.
Le pire c’est quand, en ce moment, certains entrepreneurs justifient le fait d’être moins imposés par le risque de se retrouver à la rue sans chômage. C’est oublier que quand l’entrepreneur échoue les salariés aussi sont à la rue, quand il réussit eux ne touchent pas des millions et ne sont pas concernés par les taux maximum d’imposition sur le revenu. Certes, rien n’est comparable, mais au moment où on parle de milliers de vies dans la galère avec des fermetures d’usine et où il est évident que le chômage n’est pas une garantie contre la galère, mettre ça en avant pour justifier des faibles taux d’impositions sur de fortes sommes, c’est juste indécent.
Changer de combat
Et si vous changiez de combat ? si vous reconnaissiez qu’il n’est pas illégitime que chacun participe à hauteur de ses capacités qu’il soit salarié, investisseur ou entrepreneur ?
Si plutôt que vous battre sur l’imposition des plus-values vous vous battiez pour tout ce qui gêne la création, le développement et le maintient de vos entreprises ? Si vous réduisiez le risque et la difficulté au lieu de chercher à augmenter les profits de quelques rares exceptions ?
Ce combat ne vous semblerait-il pas plus efficace finalement ? Ne serait-il pas aussi meilleur pour l’innovation, pour l’économie, pour vous-même et pour la société dans son ensemble ?
Et parce que certains parlent mieux que moi
Je vous invite à lire Henri Verdier qui, s’il s’agit de ranger les gens dans des cases, est clairement « du côté des entrepreneurs » (je le suis aussi mais j’ai du mal à ce que ce soit compris).
Lui montre clairement que plutôt que de lutter en bloc et ainsi, il vaut mieux s’attacher aux points anormaux dans le texte et proposer/soutenir des amendements, que la forme actuelle est plus que contre-productive.
Et il exprime très bien pourquoi j’ai eu un ras le bol qui m’a incité à écrire aujourd’hui :
Le discours sur l’entrepreneur généreux, seul créateur de valeur, qui devrait obtenir tous les privilèges dus à son rang est un discours lassant. Et je ne parle même pas des relents libertariens et des accents dignes du Tea Party. Il agace à gauche mais aussi l’ensemble des anciennes industries qui font face à une crise ultra-violente. Ne vous y trompez pas, mes amis, c’est sans doute dans cette ancienne économie que vous trouverez vos pires détracteurs. Ceux qui vous accuseront d’être une économie de la spéculation et de surfer sur une bulle…
Il y a des gens qui souffrent plus que nous, dans ce pays comme ailleurs et je crois qu’il fait meilleur être entrepreneur en France que salarié d’Arcelor.