Catégorie : Presse et médias

  • Taubira, migrants, homo­sexuels : tous coupables !

    « On préfé­re­rait qu’elle ait cette hargne pour faire une poli­tique pénale un peu plus répres­sive, qu’elle arrête de donner des signals forts (re-re-sic) pour les délinquants, qu’elle fasse en sorte qu’il y ait moins de laxisme. » Les présen­ta­teurs laissent dire, quand bien même tous les indi­ca­teurs (sévé­rité des juge­ments, popu­la­tion carcé­rale, etc.) montrent que la justice a mené ces dernières années une poli­tique de plus en plus répres­sive, comme le notait Antoine Gara­pon sur France Culture.

    Sans crainte d’être contre­dit, le syndi­ca­liste peut conclu­re…

    La télé­vi­sion est un média mort pour ce qui est de la capa­cité à infor­mer. Pas tant qu’il va dispa­raitre mais simple­ment qu’on ne peut en attendre de l’in­for­ma­tion.

    Les présen­ta­teurs ne méritent jamais autant leur nom. La rédac­tion se contente de surfer sur les sujets à la mode et à donner poids à ce qui semble l’opinion ambiante – souvent en réalité celle que les services de presse veulent pous­ser comme opinion ambiante.

    Le jour­nal télé­visé présente, des plats géné­ra­le­ment réchauf­fés ou tout prêts. Il n’in­forme plus. Quand est-ce la dernière fois qu’une infor­ma­tion déran­geante, impor­tante, a trouvé sa place à la télé­vi­sion avant d’être tota­le­ment connue par tous ?

    Trop peu d’es­pace pour appor­ter des nuances entre deux diver­tis­se­ments, pas ou peu de profon­deur mais surtout aucun correc­tif, aucun chiffre débattu, aucune possi­bi­lité d’in­ter­ve­nir et créer un débat autour de la présen­ta­tion. Tout se fait ailleurs, créant une asymé­trie drama­tique.

    On a beau dire ce qu’on veut d’In­ter­net, du fait qu’on y trouve à boire et à manger, au moins ce débat existe et celui qui veut s’in­for­mer y trouve plein de sources mais aussi plein de critiques de chaque sources et de chaque fait.

    Si je devais donner des cari­ca­tures au terme de beauf de droite et au terme de patron libé­ral, les deux pour­raient s’ex­pliquer par ils se sont simple­ment infor­més via la télé­vi­sion. Le problème d’ex­pliquer ainsi c’est que ça risque­rait de justi­fier un peu… (ça se voit que je provoque ?)

    Tele­rama n’est pas non plus le media le plus avant-gardiste ni celui qui a le moins de couleur, mais l’ar­ticle Taubira, migrants, homo­sexuels : tous coupables dépeint quand même un tableau assez fati­guant.

    Regar­dez-vous encore les jour­naux télé­vi­sés ? Où vous infor­mez-vous ?

    France 2 montre les images d’une « alter­ca­tion entre des rive­rains et certains mani­fes­tants. L’un des habi­tants bran­dit même un fusil ». « Attaqué par des mili­tants acti­vistes, des No Borders, cet homme avait même sorti un fusil à billes, excédé », précise TF1. Depuis, on a appris que c’était les « habi­tants » qui avaient déli­bé­ré­ment provoqué les « migrants », comme l’a raconté au site Arrêt sur images l’au­teur de la vidéo (qui déplore aussi sa récu­pé­ra­tion par la facho­sphère). « La mani­fes­ta­tion ne passait pas par cette rue, mais au croi­se­ment ce monsieur leur a fait des doigts d’hon­neur, il les a trai­tés de bougnoules en leur disant de retour­ner dans la jungle. Il était devant chez lui pour les provoquer. »

    On a su aussi que l’homme qui bran­dit un fusil est un néo-nazi reven­diqué… sauf devant les télés. Sur France 2 comme sur TF1, les Rouge­mont se présentent comme de pauvres victimes. Une semaine après, je n’ar­rive toujours pas à digé­rer que les repor­ters aient pu leur tendre le micro aussi complai­sam­ment sans cher­cher à savoir qui parlait dedans. « Cet homme, nous l’avons retrouvé, pavoise le repor­ter de France 2. Hier, il dit s’être senti menacé. » « Ils ont lancé des pneus, des pierres, des briques rouges. » L’idée ne vient pas au repor­ter de le véri­fier, il préfère s’in­di­gner : « Bran­dir un fusil, est-ce que ce n’est pas irres­pon­sable ? » « Non, ma femme était en danger », prétend le père. Sur la vidéo, on la voit surtout essayer de calmer son mari.

    Que France 2 joue le même jeu n’est guère nouveau. À force de vouloir renta­bi­li­ser la télé­vi­sion publique, de trou­ver que l’au­dience est l’in­di­ca­teur le plus perti­nent, de conti­nuer à finan­cer par la publi­ci­té… la perti­nence d’une télé­vi­sion publique et ce qui fait son inté­rêt dimi­nue jour à jour.

    À côté de ça, sans en faire non plus un media d’avant-garde, la radio publique fait force d’une incroyable perti­nence. Ceci explique aussi pourquoi dans la première cita­tion en haut de ce billet, c’est France Culture qui est cité en exemple pour corri­ger l’in­for­ma­tion de la chaîne d’in­for­ma­tion conti­nue iTélé. Ce n’est malheu­reu­se­ment pas une excep­tion. On marche sur la tête.

  • Marine Le Pen quitte le plateau de France Inter après une véri­fi­ca­tion de ses propos en direct

    Un climat tendu régnait jeudi matin sur le plateau de France Inter. Marine Le Pen a quitté le plateau après une séance de fact checking en direct.

    […]

    Accu­sant l’émis­sion de France Inter d’être « un tribu­nal », Marine Le Pen, a ensuite quitté le plateau de la mati­nale pendant la coupure pub

    — via BFM TV

    Ce devrait être systé­ma­tique, et pas unique­ment vis à vis du FN, excep­tion­nel­le­ment. Nos jour­na­listes n’osent pas ou le font timi­de­ment du bout des lèvres, puis laissent l’en­fu­mage conti­nuer.

    Nous n’aban­don­ne­rons pas la poli­tique spec­tacle tant que les jour­na­listes ne pren­dront pas aussi leur rôle à contes­ter et corri­ger, en direct. Leur rôle ne doit pas se limi­ter à ça, mais ça en fait partie, sauf à rendre les cartes de presse et les consi­dé­rer comme des hôtes et hôtesses d’ac­com­pa­gne­ment.

    Bref, c’est encore trop rare mais merci France Inter, ainsi qu’aux organes de déco­dage comme ceux de Libé et Le Monde (même si je regrette que ce soit vu comme une acti­vité annexe disso­ciée de la vraie rédac­tion).

  • May ESPN please use this video with cour­tesy to your account? Please let us know. Thanks!

    Une simple vidéo sur twit­ter, sans cadrage ou inten­tion d’au­teur parti­cu­lière,

    Et des contacts de grands média

    Je ne sais pas forcé­ment quoi en penser, mais je note une énorme diffé­rence de fonc­tion­ne­ment entre la presse française et la presse améri­caine de ce côté là. Eux demandent expli­ci­te­ment l’au­to­ri­sa­tion pour une simple vidéo sans réelle créa­tion, là où chez nous même les créa­tions origi­nales sont reprises sans même lien ou cita­tion.

  • Police use terror powers to seize BBC News­night jour­na­list’s laptop

    Police have used powers under the Terro­rism Act to seize the laptop of a young News­night jour­na­list in a case that has shocked BBC colleagues and alar­med free­dom of speech campai­gners, The Inde­pendent can disclose.

    Offi­cers obtai­ned an order from a judge that was served on the BBC and Secun­der Kermani, who joined the flag­ship BBC2 news show early last year and has produ­ced a series of reports on British-born jiha­dis.

    the Inde­pendent

    Le pouvoir tout puis­sant des États ne semble vouloir s’ar­rê­ter de progres­ser. Tous les gardes-fous mis en place année après année par les géné­ra­tions précé­dentes sautent sans diffi­culté notable, comme s’ils étaient super­flus.

    Je crains le pire pour l’ave­nir, le jour où un gouver­ne­ment glis­sera douce­ment vers le tota­li­taire, nous n’au­rons plus de base légale pour réagir, nous n’au­rons plus qu’une révo­lu­tion dans le sang comme seule option.

    Le terro­risme est une telle­ment belle oppor­tu­nité pour faire tout ce qui était impos­sible hier… comment croire qu’ils y résis­te­raient ?

  • Anti­cor dément tout complot et porte plainte contre Le Figaro

    Les proprié­taires des plus grosses entre­prises achètent des média peu rentables. Devi­nez ce qu’il se passe ?

    Après Canal+ qui dépro­gramme très offi­ciel­le­ment un docu­men­taire d’in­ves­ti­ga­tion « parce qu’on ne tape pas sur les copains du même groupe » (fina­le­ment diffusé par France 3), voici Le Figaro :

    Le Figaro vient de publier un article à charge contre Anti­cor. Le fait que cette asso­cia­tion se soit récem­ment consti­tuée partie civile contre Serge Dassault, proprié­taire de ce jour­nal, est sans doute une coïn­ci­den­ce…

    […]

    Le Figaro conclut son propos ainsi : « Aujourd’­hui, un membre d’An­ti­cor explique que “la plainte de l’as­so­cia­tion contre Buis­son a peut-être été un peu orien­tée par le cabi­net Taubira et peut-être par la ministre elle-même”. CQFD. » On notera que, malgré la source anonyme […] la jour­na­liste n’ex­plique pas comment « le cabi­net Taubira » ou « la ministre elle-même », qui a été nommée Garde des Sceaux le 16 mai 2012, a pu « orien­ter » la plainte d’An­ti­cor contre Patrick Buis­son dépo­sée le… 10 février 2010 !

    Commu­niqué du président Anti­cor

    CQFD

    L’au­dio­vi­suel public a plein de travers, et a aussi ses propres dérives, mais j’es­père qu’il appa­rait désor­mais clai­re­ment combien payer une rede­vance pour France Télé­vi­sion et Radio France est essen­tiel, même si on n’en est pas public. C’est juste un guide qui permet d’évi­ter des dérives encore plus grandes.

    Si je n’étais pas fati­gué, je trou­ve­rais presque ironique que ce soit juste­ment Anti­cor qui soit pris pour cible.

    Il faut dire que Le Figaro en ce moment a une drôle de concep­tion de l’in­for­ma­tion libre et indé­pen­dan­te… à la limite du publi­ré­dac­tion­nel (aussi relayé par Le Monde)

  • Did a robot repor­ter screw up the AP’s Netflix earnings story?

    Well, for star­ters, the reason behind the discre­pancy is likely due to the fact that Netflix recently split its stock 7-for-1. That means that the company issued six new shares for each share of exis­ting stock, making each indi­vi­dual share worth only one-seventh as much. So if analysts had expec­ted Netflix to earn 32 cents a share before the stock split, divi­ding those esti­mates by 7 would mean that the analysts were expec­ting about 4 cents of earnings per share of the new Netflix stock.

    Maybe a repor­ter for the AP messed up the math on Netflix, using the old, pre-split esti­mates instead of the correct, post-split ones.

    But there’s another possi­bi­lity: maybe a robot is to blame.

    Last year, the AP struck a deal with a company called Auto­ma­ted Insights, which makes auto­ma­ted repor­ting soft­ware that can write certain types of stories without human assis­tance. Among the things Auto­ma­ted Insights’ soft­ware can do is write simple corpo­rate earnings stories, using numbers it pulls in from an auto­ma­ted feed. The AP now publishes more than 3,000 earnings stories per quar­ter with Auto­ma­ted Insights’ help.

    — Sur Fusion

    La diffu­sion brute des dépêches AFP et des commu­niqués de presse c’était déjà se tirer une balle dans le pied, mais le jour­na­lisme auto­ma­tique par des robots, ça devient vrai­ment déses­pé­rant. Même sans parler des erreurs : Quelle est la valeur ajou­tée ? Où est la mise en contexte et l’ana­lyse ?

  • Mais que va faire Char­lie Hebdo de tout son argent ?

    Avant, Char­lie Hebdo était un “fanzine” (dixit Luz), défi­ci­taire, qui se vendait à près de 30.000 exem­plaires, et comp­tait près de 10.000 abon­nés.

    Mais, ça c’était avant. Depuis les atten­tats, le nombre d’abon­nés a grimpé à 220.000. Le numéro du 14 janvier a été tiré à 8 millions d’exem­plaires, un record histo­rique pour la presse française. Le tirage du numéro suivant, qui paraît ce mercredi 25 février, reste à un niveau sans équi­valent en France, à 2,5 millions d’exem­plaires.

    Je n’ai déjà pas bien compris pourquoi d’un coup les gens ont donné ou se sont abon­nés à Char­lie Hebdo en réponse aux atten­tats. Que l’État donne 1 million était déjà juste déme­suré – malheu­reu­se­ment on commence à s’ha­bi­tuer à la poli­tique spec­tacle, donc il fallait un gros chiffre – mais ce qu’est devenu l’ap­pel à dons (qui date d’avant l’at­ten­tat) me laisse perplexe.

    Le numéro du 14 janvier a rapporté 10 à 12 millions d’eu­ros (7 à 8 millions après impôts), a indiqué Me Richard Malka, l’avo­cat de l’heb­do­ma­daire, au Monde. Et les abon­ne­ments devraient géné­rer 3 millions d’eu­ros de marge. A cela s’ajoute le million d’eu­ros d’aide d’ur­gence accordé par le minis­tère de la Culture.

    […] Mais ce n’est pas tout. Le “jour­nal irres­pon­sable” a aussi reçu 4,2 millions d’eu­ros de dons versés par des parti­cu­liers via deux canaux: l’as­so­cia­tion Presse et plura­lisme (2,65 millions d’eu­ros), et l’As­so­cia­tion des amis de Char­lie Hebdo (1,5 million d’eu­ros). A noter que Google a aussi versé 250.000 euros.

    Au total on parle de 20 à 25 millions d’eu­ros. Juste incom­pré­hen­sible dans le montant.

    Qu’il faille défendre le droit de dire des conne­ries ne rend pas d’un coup le contenu édito­ria­le­ment magni­fique, et ne trans­forme pas l’heb­do­ma­daire en orga­nisme cari­ta­tif. Si on veut donner pour faire un geste dans la bonne direc­tion, Repor­ters sans fron­tières me semble telle­ment plus perti­nent et plus utile…

    Bref, le présent n’est pas ration­nel, ce qui n’éton­nera personne. Aujourd’­hui j’ap­prends le passé, et là je ris jaune :

    en 2006 après la publi­ca­tion des cari­ca­tures de Maho­met, un numéro qui s’écoula à 500.000 exem­plaires. En effet, quand Char­lie se portait bien, les béné­fices n’ont pas été gardés en réserve, mais rever­sés en quasi-inté­gra­lité aux action­naires qui, en six ans, se sont ainsi octroyés collec­ti­ve­ment 3,8 millions d’eu­ros de divi­dendes.

    […] En 2009, le résul­tat a plongé dans le rouge, et depuis lors, plus aucun divi­dende n’a été distri­bué. En 2010,  l’heb­do­ma­daire a dû augmen­ter son prix de vente de 2 à 2,5 euros, et licen­cier 12 sala­riés sur 50. Et à peine deux mois avant les atten­tats, un appel aux dons était lancé face à une situa­tion finan­cière critique…

    Donc voilà, on lance un licen­cie­ment écono­mique tout juste quelques années après avoir sorti près de 4 millions de divi­dendes, et on finit en appel aux dons publics quelques années après. … Et c’est ce jour­nal qui désor­mais patauge dans plus de 20 millions d’eu­ros, essen­tiel­le­ment de géné­ro­sité publique.

    — via Les crises

  • « Aujourd’­hui, le pire a atteint son paroxysme »

    En 2015, Inter­net offre le visage d’un espace sans foi ni loi, permet­tant la diffu­sion du pire de ce que l’hu­ma­nité a pu produire. Inter­net favo­rise l’ex­pres­sion de tous peu importe leur opinion et leur croyance. Aujourd’­hui, le pire a atteint son paroxysme

    […]

    En France, des mesures pour bloquer des sites inter­net faisant l’apo­lo­gie du terro­risme ont été adop­tées, et je m’en réjouis. C’est un signe fort envoyé à nos conci­toyens mais aussi aux terro­ristes. (…) Il n’est pas envi­sa­geable qu’une publi­ca­tion de l’État Isla­mique traduite en langue française puisse être à la portée de tous

    Il s’agit d’un discours de Pierre Charon (video), séna­teur de Paris et ancien conseiller à l’Ély­sée du président précé­dent, au sein d’un débat sur Inter­net et les liber­tés de la presse (ça ne s’in­vente pas).

    Suis-je le seul à avoir peur ?

    Pour nos élus, au plus haut niveau, que tous puissent s’ex­pri­mer peu importe leur opinion et leur croyance est quelque chose de grave qu’il faut combattre.

    Pour nos élus, au plus haut niveau, que n’im­porte quel citoyen puisse accé­der aux éléments d’in­for­ma­tion (on parle de liber­tés de la presse, et indi­rec­te­ment de censure d’un site de presse) et à leur source, dans une langue qu’il comprend, est grave et inen­vi­sa­geable.

    Nous ne pouvons nous abri­ter derrière la liberté de la presse pour justi­fier notre passi­vité. (…) Donner aux terro­ristes l’ac­cès à cette liberté, ce n’est plus défendre la liberté. C’est la confier à des fossoyeurs.

    J’ai mon avis sur qui est le fossoyeur de la liberté dans ce discours. Pour eux la notion de liberté n’est qu’un paravent dont on ne doit plus s’en­com­brer.

    La classe poli­tique (via l’exé­cu­tif) doit être capable de déci­der à qui elle accepte de donner des liber­tés et dans quelles condi­tions. Au moins c’est clair.

    Quand je lis ça, je suis à deux doigts de soute­nir une révo­lu­tion. J’ai conscience de la violence du terme et de ce qu’il implique, mais qu’un tel discours ne provoque pas un tsunami d’op­po­si­tion en dit long sur le partage de telles opinions chez nos élus.

    Il y a urgence. Vrai­ment.

  • Moi, censuré par la France pour mes opinions poli­tiques

    Quelle réponse donner au blocage admi­nis­tra­tif décidé par le gouver­ne­ment français ? […]

    Le site isla­mic-news.info a été fondé en mai 2013. Je l’ai créé quelques mois après ma sortie de l’uni­ver­sité, mon diplôme de droit inter­na­tio­nal public, diplo­ma­tique et consu­laire en poche.

    Et là déjà on peut moti­ver et discu­ter de l’ur­gence, pour un site qui a déjà deux ans et pour lequel rien n’a été fait jusqu’à fin mars 2015. Vrai­sem­bla­ble­ment passer par une procé­dure judi­ciaire n’au­rait pas été déli­rant. On ne parle pas d’un site obscur et caché :

    Le site était dirigé par un seul homme, qui vit en Europe et qui est inscrit léga­le­ment sur les registres d’OVH et qui paie avec son propre compte en banque le serveur qu’il loue auprès du numéro 1 français. Aucun cryp­tage de données n’est utilisé.

    Bref, passer par le judi­ciaire ne présen­tait aucun obstacle. Mais surtout, la ques­tion se pose sur le fond. Est-ce que juge­ment un juge aurait accepté une telle mise hors ligne avec si peu de moti­va­tion ?

    L’in­ci­ta­tion ou la provo­ca­tion au terro­risme n’a aucun sens pour moi, aucun inté­rêt. Je suis convaincu que mille mots sont plus effi­caces que tout acte de violence. C’est ma convic­tion person­nelle.

    […] La meilleure manière de prou­ver cela est de citer un article que j’ai écrit début 2014. J’avais vive­ment dénoncé les propos d’un combat­tant en Syrie qui encou­ra­geait à commettre des atten­tats en Europe. J’avais souli­gné le danger de ce genre de message et ses consé­quences néfastes sur la popu­la­tion musul­mane en Europe, qui n’a vrai­ment pas besoin de ça en ces moments.

    […] J’ai­me­rai égale­ment atti­rer votre atten­tion sur l’un des articles les plus influents que j’ai écrit. J’avais abordé la ques­tion des jeunes euro­péens qui s’en­ga­geaient en Syrie pour mener le djihad. J’avais fait un appel public pour qu’ils n’aillent pas se faire tuer pour rien en Syrie dans une guerre qu’ils ne comprennent pas.

    Apolo­gie alors ?

    En résumé, c’est défendre les actes de terro­risme commis et se féli­ci­ter de leur surve­nance. Rien, abso­lu­ment rien, dans ce que j’ai écrit ne fait passer les actes terro­ristes sous un jour favo­rable ni ne les légi­time. Et puis de quels actes de terro­risme parle-t-on ? Je n’ai pas écrit un mot sur la tuerie de Char­lie Hebdo, pas un mot sur les déca­pi­ta­tions de l’Etat isla­mique, pas un mot sur le jorda­nien brûlé vivant, pas un mot sur les soldats alaouites et chiites massa­crés. Bref, j’ai sciem­ment évité les sujets polé­miques qui pour­raient être mal inter­pré­tés.

    En outre, et contrai­re­ment à ce qu’a­vance le ministre de l’in­té­rieur, je n’ai jamais diffusé la moindre vidéo de l’Etat isla­mique sur mon site.

    C’est bien évidem­ment un seul point de vue, mais qui a le mérite d’être argu­menté. Je n’ai aucun juge­ment sur le fond, car pas assez d’élé­ment pour cela, mais ça mérite forcé­ment mieux qu’une censure admi­nis­tra­tive sans débat contra­dic­toire, sans inter­ven­tion d’un juge indé­pen­dant. Dans un État de droit, ce serait le mini­mum.

    Mais alors sur quoi le gouver­ne­ment français a-t-il fondé son blocage ? Je pense que la raison est poli­tique. Ma posi­tion peut choquer à partir du moment où je vise davan­tage les oppo­sants de l’Etat isla­mique plutôt que lui-même. […]

    Je pense donc que j’ai payé mon enga­ge­ment poli­tique à la fois contre l’in­ter­ven­tion­nisme mili­taire arabo-occi­den­tal et chiite dans la région et contre les groupes armés soute­nus par les acteurs préci­tés. Ce qui a fait dire au Monde que je suis contre la « propa­gande chiito-occi­den­tale ». Abso­lu­ment, je me décris comme un oppo­sant de la propa­gande chiito-occi­den­tale et il me semble que cela est mon droit de l’être, quitte à ulcé­rer certains. Être contre cette propa­gande n’est pas illé­gal. C’est même la règle du jeu. Cela ne signi­fie pas non plus un anti-occi­den­ta­lisme primaire. Les va-t’en guerre aux commandes des Etats occi­den­taux ne repré­sentent pas l’oc­ci­dent dans sa globa­lité.

    Combien est loin le soit-disant esprit du 11 janvier où on glori­fiait le droit à avoir des propos qui dérangent, à provoquer…

    À lire la lettre complète de l’au­teur du site Isla­mic News, récente victime de la censure admi­nis­tra­tive en France. Ne connais­sant pas le site préa­la­ble­ment, je suis bien à mal de juger du fond. Sur la forme, par contre, il parait évident qu’il y a maldonne et que nous avons pris un chemin très dange­reux.

    Mise à jour : Il semble que ce qui a été repro­ché est la cita­tion, avec fichier verba­tim audio, d’un discours du leader de l’État Isla­mique. On ne reproche visi­ble­ment pas au site d’avoir soutenu ce discours ou de l’avoir mis dans une lumière favo­rable, juste d’y avoir donné accès. Je reste très dubi­ta­tif sur le contexte, qui est celui d’un site de presse, si on se doit de cacher l’in­for­ma­tion source et de ne pas y donner accès. Les consé­quences peuvent être dange­reuses. – Mais là aussi, c’est à un juge de déci­der, après un débat public et contra­dic­toire, parce que c’est ce qui diffé­ren­cie une dicta­ture d’un État de droit.

  • HSBC joue l’arme de la publi­cité face aux « articles hostiles »

    [Le direc­teur géné­ral de HSBC] a docte­ment expliqué que sa banque avait « recours à la publi­cité pour vendre plus de produits bancaires », et qu’en consé­quence, « ça ne fait aucun sens de placer une publi­cité à côté d’une couver­ture jour­na­lis­tique hostile ».

    […]

    Ces décla­ra­tions font suite à la démis­sion spec­ta­cu­laire de Peter Oborne, édito­ria­liste au Daily Tele­graph. Mardi 17 février, celui-ci a accusé le quoti­dien d’avoir sous-couvert les révé­la­tions « SwissLeaks » pour proté­ger son chiffre d’af­faires publi­ci­taire. La banque avait déjà privé le quoti­dien britan­nique de budgets publi­ci­taires en 2012–2013 après une enquête sur la filiale HSBC de Jersey, avait révélé M. Oborne.

    […]

    Ces pratiques ne sont pas rares dans les rela­tions entre médias et annon­ceurs.

    — Le Monde

    La banque a beau se parer d’un prag­ma­tisme et d’une logique à tout épreuve, et affir­mer – proba­ble­ment avec raison – que l’objec­tif n’est pas d’in­fluen­cer la couver­ture édito­ria­le… Vous avez une bonne raison pour payer les conte­nus que vous utili­sez, et parti­cu­liè­re­ment la presse.

    Les modèles basés sur la publi­cité, même partiel­le­ment, ne seront jamais suffi­sam­ment libres pour servir de base à la culture, à la poli­tique, à l’in­for­ma­tion ou à la liberté d’ex­pres­sion.

    Il y a très peu de jour­naux qui ne sont pas signi­fi­ca­ti­ve­ment basé sur la publi­cité. Abon­nez-vous à l’un deux. Je vous recom­mande Media­part, mais choi­sis­sez celui qui vous convient.