Avant, Charlie Hebdo était un “fanzine” (dixit Luz), déficitaire, qui se vendait à près de 30.000 exemplaires, et comptait près de 10.000 abonnés.
Mais, ça c’était avant. Depuis les attentats, le nombre d’abonnés a grimpé à 220.000. Le numéro du 14 janvier a été tiré à 8 millions d’exemplaires, un record historique pour la presse française. Le tirage du numéro suivant, qui paraît ce mercredi 25 février, reste à un niveau sans équivalent en France, à 2,5 millions d’exemplaires.
Je n’ai déjà pas bien compris pourquoi d’un coup les gens ont donné ou se sont abonnés à Charlie Hebdo en réponse aux attentats. Que l’État donne 1 million était déjà juste démesuré – malheureusement on commence à s’habituer à la politique spectacle, donc il fallait un gros chiffre – mais ce qu’est devenu l’appel à dons (qui date d’avant l’attentat) me laisse perplexe.
Le numéro du 14 janvier a rapporté 10 à 12 millions d’euros (7 à 8 millions après impôts), a indiqué Me Richard Malka, l’avocat de l’hebdomadaire, au Monde. Et les abonnements devraient générer 3 millions d’euros de marge. A cela s’ajoute le million d’euros d’aide d’urgence accordé par le ministère de la Culture.
[…] Mais ce n’est pas tout. Le “journal irresponsable” a aussi reçu 4,2 millions d’euros de dons versés par des particuliers via deux canaux: l’association Presse et pluralisme (2,65 millions d’euros), et l’Association des amis de Charlie Hebdo (1,5 million d’euros). A noter que Google a aussi versé 250.000 euros.
Au total on parle de 20 à 25 millions d’euros. Juste incompréhensible dans le montant.
Qu’il faille défendre le droit de dire des conneries ne rend pas d’un coup le contenu éditorialement magnifique, et ne transforme pas l’hebdomadaire en organisme caritatif. Si on veut donner pour faire un geste dans la bonne direction, Reporters sans frontières me semble tellement plus pertinent et plus utile…
Bref, le présent n’est pas rationnel, ce qui n’étonnera personne. Aujourd’hui j’apprends le passé, et là je ris jaune :
en 2006 après la publication des caricatures de Mahomet, un numéro qui s’écoula à 500.000 exemplaires. En effet, quand Charlie se portait bien, les bénéfices n’ont pas été gardés en réserve, mais reversés en quasi-intégralité aux actionnaires qui, en six ans, se sont ainsi octroyés collectivement 3,8 millions d’euros de dividendes.
[…] En 2009, le résultat a plongé dans le rouge, et depuis lors, plus aucun dividende n’a été distribué. En 2010, l’hebdomadaire a dû augmenter son prix de vente de 2 à 2,5 euros, et licencier 12 salariés sur 50. Et à peine deux mois avant les attentats, un appel aux dons était lancé face à une situation financière critique…
Donc voilà, on lance un licenciement économique tout juste quelques années après avoir sorti près de 4 millions de dividendes, et on finit en appel aux dons publics quelques années après. … Et c’est ce journal qui désormais patauge dans plus de 20 millions d’euros, essentiellement de générosité publique.
— via Les crises
Laisser un commentaire