Catégorie : Religion

  • Fonda­men­ta­lisme et laïcité

    On a joué avec le feu à monter les uns contre les autres. Aujourd’­hui, quand on parle de reli­gion et de laïcité, j’ai peur des fonda­men­ta­listes.

    J’ai peur de ces fonda­men­ta­listes qui cherchent à impo­ser leur croyance reli­gieuse et à faire dispa­raitre les autres de l’es­pace public.

    J’ai peur de ces fonda­men­ta­listes qui croient que toute croyance diffé­rente est forcé­ment un danger critique pour le pays, la popu­la­tion, pour l’ordre public.

    J’ai peur de ces fonda­men­ta­listes qui vont jusqu’à vouloir inter­dire les croyances qui ne sont pas les leurs, inter­dire d’en parler en public, inter­dire d’en porter tout symbole.

    J’ai très peur d’eux, et de leur vision extré­miste de la laïcité. Ils prônent un « don’t show, don’t tell » qui rappelle un peu trop un ancien « don’t ask, don’t tell ». Ils ne sont fina­le­ment pas diffé­rents des autres fonda­men­ta­listes qu’ils disent combattre.


    Parce qu’il semble qu’il faille le rappe­ler : Inter­dire l’ex­pres­sion de sa reli­gion en public n’est pas plus légi­time ou accep­table qu’in­ter­dire l’ex­pres­sion de ses croyances poli­tiques, de ses croyances écolo­giques, de ses croyances musi­cales, ou d’une quel­conque autre croyance. Si vous pensez que la reli­gion est dange­reuse et diffé­rente en elle-même, c’est en soi une croyance, votre croyance.

    Pensez aussi que prétendre assu­rer la libre croyance tout en impo­sant un code vesti­men­taire en public – car inter­dire certains symboles ou vête­ments, ce n’est pas autre chose – c’est juste­ment ce qui se faisait en Iran et dans quelques autres pays.

    À ceux qui veulent s’en­ga­ger tout de même sur ce terrain, pensez que cela viole­rait très clai­re­ment la Conven­tion euro­péenne des droits de l’Homme. Je vous invite donc à soupe­ser très longue­ment l’op­por­tu­nité d’al­ler remettre en cause ce texte si fonda­men­tal, où chaque modi­fi­ca­tion devra être pensée avec mille précau­tions et discu­tée avec 1500 groupes aux avis diver­gents, pas tous avec les mêmes croyances que vous. Le moins amusant c’est qu’on risque même d’en sortir avec une version plus reli­gieuse qu’a­vant, si on en croit la volonté de rappe­ler des racines reli­gieuses dans les textes fonda­men­taux euro­péens.

    Entre temps, à titre de rappel, la laïcité, telle qu’elle est défi­nie dans nos textes en France, est un concept qui s’im­pose à l’État – et par exten­sion éven­tuel­le­ment aux repré­sen­tants de celui-ci, pas le citoyen. En fait, ce qui concerne le citoyen c’est juste­ment l’obli­ga­tion pour l’État de lui garan­tir la libre expres­sion et le libre exer­cice de sa reli­gion – et pas unique­ment en privé. Bref, exac­te­ment l’op­posé de ce que ce nouveau fonda­men­ta­lisme qui se réclame de la laïcité essaye d’im­po­ser.

  • La circon­ci­sion, la reli­gion, et les droits de l’en­fant

    J’avais déjà relayé ici un article sur le sujet, avec un avis un peu plus tran­ché. Voilà un autre billet, qui aborde la problé­ma­tique sans prendre vrai­ment parti person­nel : La circon­ci­sion, la reli­gion, et les droits de l’en­fant

    Ouvrir la porte aux inter­ro­ga­tions sur les atteintes physiques impo­sées à de très jeunes enfants pour des motifs reli­gieux ce n’est certai­ne­ment pas s’en prendre aux reli­gions. Le risque majeur, en refu­sant tout débat, est de légi­ti­mer par avance et par prin­cipe des pratiques « reli­gieuses » autre­ment plus agres­sives et dange­reuses que la circon­ci­sion.

    Dans les pays démo­cra­tiques, il existe donc bien des limites aux pratiques reli­gieuses.

    A chacun de se faire sa propre opinion sur l’en­droit où se situent ces limites.

    Mais il ne saurait être ques­tion d’in­ter­dire le débat.

  • Pour en finir avec la laïcité

    J’at­ten­dais que quelqu’un parle mieux que moi de la laïcité. C’est chose faite avec Maitre Eolas, pour en finir avec la laïcité :

    Il y a eu des abbés dépu­tés dans l’as­sem­blée qui a voté la loi de 1905. Ils sont citoyens à part entière, comme vous et moi.

    […]

    Reli­sez la loi de 1905. Elle n’in­ter­dit nulle­ment à quelque culte que ce soit de se mêler de poli­tique. La liberté d’ex­pres­sion s’y oppose même fron­ta­le­ment.

    Mais aussi

    La loi commence par procla­mer la liberté de conscience, et s’oblige à garan­tir le libre exer­cice des cultes. C’est à dire que la Répu­blique est tenue de mettre en œuvre les moyens proté­geant ce libre exer­cice.

    […]

    Dans un avis du 27 novembre 1989, le Conseil d’État rappelle l’évi­dence : l’obli­ga­tion de neutra­lité ne s’ap­plique qu’aux agents, et en aucun cas aux usagers du service public, proté­gés par l’ar­ticle 1er de la loi de 1905.

    […]

    La laïcité de la répu­blique n’est pas la prohi­bi­tion du fait reli­gieux dans l’es­pace public.

    Et surtout (la graisse est mienne)

    Une loi [restrei­gnant l’exer­cice de la reli­gion dans les lieux publics] viole­rait la laïcité, en restrei­gnant arbi­trai­re­ment l’exer­cice d’un culte pour des raisons n’ayant aucun lien avec l’ordre public (la vue d’une kippa ou d’un hidjab ne trouble pas l’ordre public, même si elle vous trouble vous ; dans ce cas ce n’est pas la reli­gion le problème mais votre into­lé­rance).

  • Pierre Damien

    Pour mettre un peu de sel dans le débat de la réac­tion de l’église catho­lique à la ques­tion du mariage homo­sexuel, lire la fiche wiki­pe­dia de Pierre Damien :

    En 1051, il rédige le Livre de Gomorrhe, où il dénonce les vices du clergé — et en parti­cu­lier les prêtres homo­sexuels, dont il exige le renvoi de l’Église. Léon IX refuse toute­fois d’ac­cé­der à sa requête, ce qui pousse Pierre Damien à écrire une lettre de protes­ta­tion.

    Ça donne un autre point de vue non ?

    Sans arri­ver à retrou­ver la réfé­rence source, je crois bien aussi me rappe­ler que dans ou à côté des quelques prêtes catho­liques mariés (et oui, ça existe, ils ont été ordon­nés hors de la papauté et réin­té­grés plus tard quand ils ont quitté leur obédience d’ori­gine suite à des désac­cord – mariés ils étaient, mariés ils sont restés), il y en avait quelques uns d’ex­pli­ci­te­ment homo­sexuels à qui on a simple­ment demandé de ne plus faire de pêchés de chair (mais pas de rompre leurs affi­ni­tés). Là par contre je compte sur vous pour m’ai­der à trou­ver des liens fiables, j’ai fait choux blanc quand j’ai tenté de les retrou­ver.

    Sur un sujet simi­laire, histoire de remettre les pendules à l’heure concer­nant la ques­tion de la tradi­tion du mariage hété­ro­sexuel : Mariage pour certains, mariage pour tous ? Réflexions actuelles à partir de l’An­tiquité romaine et du Moyen Âge occi­den­tal

  • Derrière les muti­la­tions sexuelles sur l’en­fant, les rapports du laïc et du reli­gieux

    J’ai pour habi­tude de reprendre in extenso les titres des articles que je lie. Celui là risque de faire fuir certains, mais je vous recom­mande sérieu­se­ment la lecture. Il s’agit de droit, de reli­gion et de poli­tique, unique­ment de cela.

    Derrière les muti­la­tions sexuelles sur l’en­fant, les rapports du laïc et du reli­gieux

    Scari­fier, marquer ou entailler un enfant doit et est inter­dit dans notre société, quand bien même cela serait fait sur des convic­tions reli­gieuses. La convic­tion profonde des parents ne doit simple­ment pas l’em­por­ter sur le droit et l’in­té­grité physique des enfants. De toutes façons, toute muti­la­tion physique est de fait inter­dite, sauf néces­sité médi­cale.

    Oui, j’en­fonce des portes ouvertes. Tout le monde s’y accor­dera si on parle d’ex­ci­sion ou de scari­fi­ca­tion du visage. La grande ques­tion est, dans notre répu­blique laïque auquel tout le monde tient tant, pourquoi tolère-t-on encore la circon­ci­sion reli­gieuse ?

    C’est fou qu’on consi­dère comme un scan­dale qu’un lycéen porte un foulard mais normal que des parents mutilent le sexe de leur enfant. Visi­ble­ment ça commence à bouger en Alle­magne, et c’est tant mieux. Le droit étant ce qu’il est, déjà là, il faudrait que quelqu’un se bouge en France aussi pour enfin arrê­ter ces pratiques.