La légalisation des échanges non marchands sans autres limitation continue à me sembler un jeu dangereux. Les fans ont montré plusieurs fois combien il était à leur portée de créer des sites web qui indexent, présentent, enrichissent et distribuent des contenus. Dès légalisation, ces sites vont fleurir et s’étoffer.
En soi c’est très positif, et ça montre même le désert que représentent les sites web commerciaux sur ces sujets, mais j’ai du mal à voir comment une filière commerciale va pouvoir survivre en parallèle. Si j’ai un site bénévole qui fonctionne très bien, qui n’est pas contraint par les négociations de catalogue, sur lequel tout est gratuit et légal, je ne vois aucune raison d’aller chercher mon contenu ailleurs. À très court terme autoriser le partage non marchand c’est tuer totalement la filière commerciale à destination des particuliers.
Parmi les militants de la légalisation des échanges non marchands j’entends les voix qui militent pour un nouveau modèle, où les créateurs et producteurs se rémunèrent autrement. Ce peut être des dons, des services annexes, une licence globale ou une contribution quelconque. J’acquiesce, mais nous sommes totalement dans la spéculation quand nous imaginons ce que ça peut donner ou non. Un big bang sans avoir expérimenté à une échelle moins radicale me semble juste inimaginable : Il n’y aurait pas de retour en arrière possible.
En parallèle si je vois une raison sociale à autoriser les échanges avec quelqu’un que je connais, je perçois beaucoup moins de pertinence à autoriser les échanges aveugles en masse. Vous imaginez dire que je n’ai pas le droit de partager ma musique, mon livre ou ma vidéo avec mon conjoint, mes enfants, mon meilleur ami, mon voisin ? pourtant c’est l’état du droit actuel ou pas loin.
Alors autoriser les échanges non marchands, mais à quelques conditions :
- Échange non collectif : Je m’adresse à une ou plusieurs personnes spécifiques, pas au public ou à un collectif. On exclut ici les réseaux pair à pair publics, les sites de partage, les groupes ou associations qui ont pour objectif de mutualiser les acquisitions.
- Échange intentionnel : C’est à moi d’avoir l’intention de procéder à chaque échange individuel. On exclut ici toute notion de mise à disposition où un tiers va faire son marché.
- Échange individuel : Je partage un contenu ou un groupe de contenus spécifiques, choisi. On exclut ici les échanges systématiques ainsi que les échanges aveugles d’une collection de contenu complète. Les critères du droit sur les collections et bases de données me semblent assez représentatifs de ce qui peut être applicable.
Avec des critères similaires, légaliser les échanges non marchands me semble plus qu’une bonne idée, et de plus tout à fait envisageable comme compromis, sans même imaginer de compensation (ou en considérant que c’est déjà couvert par la redevance sur la copie privée).
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