Arrê­tons de surtaxer le numé­rique

Nous avons d’un côté l’État qui taxe « là il y a de l’argent » et « là où ça se déve­loppe » pour compen­ser et subven­tion­ner « là où il n’y a ni argent ni déve­lop­pe­ment possible », et parfois un peu « là où les indus­triels savent s’y prendre pour quéman­der ». On y trouve la fameuse « taxe Google » sur la publi­cité en ligne.

D’un autre côté nous avons les éditeurs de conte­nus et de services qui cherchent simple­ment à taxer les nouveaux usages et nouveaux types de concur­rences pour assu­rer la péren­nité de leur ancien modèle en perte de vitesse. On y trouve les histo­riques « taxe rede­vance pour la copie privée » et  « finan­ce­ment du cinéma par les télé­vi­sions et les opéra­teurs Inter­net ». Plus récem­ment on voit l’idée de taxer les liens voire les clics au béné­fice de la presse ou des photo­graphes.

C’est agaçant. Pire, c’est contre-produc­tif pour les objec­tifs visés. En frei­nant les relais de crois­sances et nouveaux usages afin d’évi­ter quelques années de plus de faire évoluer les modèles ou envi­ron­ne­ments qui le néces­sitent, c’est forcé­ment perdant sur le long terme.

Là où je suis surpris c’est quand ceux qui réflé­chissent à de nouveaux modèles se laissent embarquer dans la même faci­lité. À réflé­chir sur de nouveaux équi­libres au niveau de la créa­tion, des droits d’au­teur, des rému­né­ra­tions et des usages, on me parle de contri­bu­tion créa­tive et de finan­ce­ment par une taxe sur la publi­cité en ligne.

Fran­che­ment, permet­tez-moi d’être un peu fami­lier mais : lâchez la grappe au numé­rique, aux réseaux et globa­le­ment aux NTIC !

Ces domaines doivent parti­ci­per à la société au même titre que les autres : pas moins, mais pas plus non plus. S’il est néces­saire d’em­pê­cher les contour­ne­ments fiscaux divers et variés, il est inac­cep­table de voir arri­ver de multiples taxes ou compen­sa­tions qui financent des acti­vi­tés tierces.

Si nous choi­sis­sons d’avoir des poli­tiques de société, si nous pensons que la société doit finan­cer le cinéma, la créa­tion, la presse ou je ne sais quoi d’autre, assu­mons un choix de société et finançons le sur le budget de la société, via l’im­pôt où une taxe géné­rale. Ne cher­chons pas le coupable idéal, celui qui semble avoir de l’argent, pour tout lui coller sur le dos.


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Commentaires

4 réponses à “Arrê­tons de surtaxer le numé­rique”

  1. Avatar de Calimaq

    Très amusant, comme titre de billet, quand on voit cette infographie, par exemple : http://graphism.fr/infographie-google-apple-amazon-les-matres-de-lvasion-fiscale

    Je précise immédiatement que je suis absolument contre cette taxe Google, telle que la propose les éditeurs de presse. Créer un nouveau droit voisin serait une très mauvaise chose. Ce projet risque de provoquer des dommages collatéraux énormes sur des éléments de base du net et de la liberté d’expression : la possibilité de faire des liens hypertexte, la liberté de référencement, le droit de citation, etc.

    Néanmoins, comme je l’ai déjà écrit, je pense très important d’agir sur des acteurs comme Google (ou Facebook). Ce genre d’acteurs ont une façon de détourner les mécanismes de l’économie de l’attention, qui provoque l’apparition d’enclosures redoutables sur l’espace ouvert que devrait rester Internet.

    Notamment, le modèle publicitaire d’acteurs comme Google ou Facebook les poussent à capter des utilisateurs, notamment pour (sur)exploiter les données personnelles des Internautes et les graphes sociaux.

    Voilà pourquoi je pense que les éditeurs de presse font une grave erreur en se servant de la propriété intellectuelle comme d’un levier pour taxer Google. C’est en plus stupide, Google les déréférencera, comme il l’a déjà fait dans d’autres pays.

    Une taxe sur la publicité aurait pour effet d’agir là où un acteur comme Google exerce une influence négative sur l’équilibre global d’Internet. La prise en compte de ces rouages de l’économie de l’attention est à peu près aussi importante que la préservation de la neutralité du net.

    C’est l’une des dimensions du « capitalisme cognitif » décrit par d’autres et pour dire vrai, je vous trouve assez léger dans votre façon d’aborder la chose.

    Ignorez-vous ce qu’est ceci ? http://www.generation-nt.com/google-abus-position-dominante-europe-actualite-1628622.html

    De la même façon, le fait d’éviter qu’un acteur comme Google pratique l’évasion fiscale me paraît absolument légitime (L’Etat américain y parvient d’ailleurs bien mieux que nous).

    Je ne vais pas plus loin, notamment sur la contribution créative, mais j’ai essayé de montrer ailleurs qu’elle constituerait une solution beaucoup plus équilibrée pour la presse en ligne : https://scinfolex.wordpress.com/2012/09/07/pourquoi-la-presse-devrait-soutenir-la-legalisation-du-partage-non-marchand/

    1. Avatar de Éric D.
      Éric D.

      Mais mais mais …

      Je suis d’accord avec vous sur l’évasion fiscale. Mais dans ce cas là il faut agir au niveau des règles fiscales. Éventuellement aller jusqu’à pousser un impôt sur le CA groupe quel que soit le lieu de réalisation des activités. Je suis ouvert à ça. Par contre taxer une activité en tant que telle, c’est ce tromper d’objectif à mon avis.

      Je suis d’accord avec vous sur l’abus de position dominante. Là par contre nous avons déjà des règles relativement efficaces. Nous pouvons les améliorer mais l’enjeu est plus de les appliquer, et le lien que vous donnez indique bien que justement ça bouge de ce côté là.

      Je suis d’accord sur les enclosures, il y a toute une réflexion à mener là dedans. Là aussi on peut très bien imaginer des règlementations qui imposent de pouvoir sortir l’intégralité des données utilisateurs à sa requête. Il y a certainement d’autres solutions à imaginer mais en quoi une taxe sur la publicité apporterait quoi que ce soit aux utilisateurs ou aux contenus enfermés ?

      Je peux être d’accord sur la contribution créative, je suis toujours en réflexion à ce sujet mais j’écoute avec une oreille bienveillante, mais le concept n’impose absolument pas de la gérer sous forme d’une taxe sur une activité économique particulière, et surtout pas sur une activité qui ne correspond pas totalement à ce qu’elle finance (il y a de la publicité sur autre chose que de la propriété intellectuelle, et de la propriété intellectuelle non concernée par la publicité)

      Ce qui me gêne c’est que tout ça n’a pour moi rien à voir avec une taxe pour sur la publicité en ligne. Oui il y a des problèmes à régler, mais mis à part le premier ils sont orthogonaux à la publicité et même pour le premier le problème est bien autre. Bref, pour moi on est dans le registre du prétexte à la taxe.

      Pour que la publicité en ligne finance la contribution créative pour moi il faudrait avoir une part très importante des critères suivants :
      * La publicité en ligne est la principale bénéficiaire des effets positifs de la contribution créative
      * La publicité hors ligne n’est elle pas concernée par ces mêmes effets
      * Taxer la publicité en ligne ne risque pas de pénaliser certains usages ou certains modèles au bénéfice d’autres

      Pour l’instant on échoue sur ces trois critères

      À noter que je ne remets pas en cause le concept de contribution créative, la question pour moi est de savoir qui contribue et sur quels critères. Je ne comprends pas et ne vois pas la légitimité à considérer que ce soit « la publicité en ligne » qui porte cette contribution créative

  2. […] Arrêtons de surtaxer le numérique […]

  3. Avatar de JeanD

    D’accord avec le 1er commentaire : je suis tombé sur cet article en googlant après avoir vu l’infographie sur graphism.fr, et le parallèle avec la taxe google est frappant. Même si l’idée de faire payer l’indexation est ridicule, il faudra que google paye à un moment ou à un autre.
    Il est aussi question en ce moent d’augmenter la taxe sur la copie privée, et donc de taxer plus les Ipod…

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