Démo­cra­tie — Quelques pensées

Je place là quelques notes de discus­sions récentes et moins récentes.


Démo­cra­tie : Régime poli­tique, système de gouver­ne­ment dans lequel le pouvoir est exercé par le peuple, par l’en­semble des citoyens

Défi­ni­tion via le CNRTL

Choix arbi­traire de défi­ni­tion, expli­cité ailleurs, mais je n’ai pas vu de source d’au­to­rité avec un sens vrai­ment diffé­rent.

Reprendre le sens des mots est essen­tiel si on veut avoir le moindre recul.


Si on réduit la démo­cra­tie à la volonté du peuple, on n’au­rait pas mis fin à la peine de mort

On l’a fait. C’était une bonne chose. Ça n’en fait pas pour autant une déci­sion démo­cra­tique (à l’époque) pour autant si une part majo­ri­taire de la popu­la­tion était contre.

Une bonne déci­sion n’est pas forcé­ment démo­cra­tique. Une déci­sion démo­cra­tique n’est pas forcé­ment bonne.

Il faut juste accep­ter de faire descendre le concept de démo­cra­tie de son piédes­tal. Oui dans une pure démo­cra­tie on aurait proba­ble­ment mis plus de temps à arrê­ter la peine de mort en France.

Peut-être que la réponse est que nous ne voulons pas d’une démo­cra­tie parfaite, tout simple­ment.


Si on réduit la démo­cra­tie à la volonté du peuple, ça peut donner l’Al­le­magne Nazie, l’an­ti­sé­mi­sitme, [etc].

Je n’ai pas l’ex­per­tise sur cette époque pour prétendre savoir quelle est la part de volonté du peuple et quelle est la part de prise de pouvoir.

Pour autant oui. Le concept de démo­cra­tie n’est aucu­ne­ment lié à un quel­conque sujet éthique ou moral. Que le peuple ait le pouvoir implique qu’il puisse tout à fait déci­der des pires horreurs, de répres­sions et régres­sions sans précé­dent. Il peut aussi toute­fois déci­der de bien­veillance, de respect des liber­tés, de progres­sion sociale et de bonheur collec­tif.

C’est d’ailleurs proba­ble­ment vrai quel que soit le régime, démo­cra­tie ou pas. La poli­tique c’est déci­der ce qu’on fait du pouvoir qu’on a.


Atten­tion à ne pas confondre démo­cra­tie et dicta­ture de la majo­rité

Dans toutes les défi­ni­tions que j’ai trouvé, on parle de pouvoir au peuple sans défi­nir comment on déter­mine cette volonté dans un peuple qui n’a pas qu’une seule opinion.

Dans notre vision élec­tive, on traduit ça par une majo­rité de 50% + 1 mais ce n’est pas limi­ta­tif. On pour­rait très bien imagi­ner une majo­rité aux 2/3, ou même un consen­sus qui n’im­plique pas d’ac­cord mais juste une absence de rejet.

Non la démo­cra­tie n’est pas la dicta­ture de la majo­rité dans sa défi­ni­tion. Savoir comment mettre en place un système démo­cra­tique concret qui ne puisse pas tour­ner en dicta­ture de la majo­rité est une vraie ques­tion inté­res­sante et je n’ai pas la réponse.

Je note toute­fois deux points :

1– Notre système actuel, bien qu’ayant fait des compro­mis, ne nous garan­tit rien non plus contre la dicta­ture de la majo­rité. Pire, notre système permet la dicta­ture de la plus grande mino­rité, ce qui est encore moins glorieux.

2– S’il est diffi­cile de savoir où s’ar­rête la démo­cra­tie et où commence la dicta­ture de la majo­rité, il est toute­fois simple de dire que s’il n’y a pas d’as­sen­ti­ment d’au moins la majo­rité, les déci­sions prises ne peuvent être quali­fiées de démo­cra­tique. Dit autre­ment : L’as­sen­ti­ment de la majo­rité n’est pas forcé­ment suffi­sant mais il est clai­re­ment néces­saire.


Il y a eu vote démo­cra­tique

Le vote est un outil, la démo­cra­tie est un régime poli­tique. Le vote peut nous aider à créer un système de gouver­nance qui nous mènera à un régime démo­cra­tique (ou à un régime qui cherche à l’être), mais il n’y est ni néces­saire ni suffi­sant.

Démons­tra­tion par l’ab­surde : Il est tout à fait possible d’ima­gi­ner une monar­chie élec­tive, avec un roi ayant les pleins pouvoirs jusqu’à sa mort, et une élec­tion à sa mort pour dési­gner un nouveau roi. Ce ne serait pas une démo­cra­tie (le peuple n’au­rait pas le pouvoir) mais il y aurait bien élec­tion.

La démons­tra­tion n’est d’ailleurs pas si absurde que ça parce que si nos systèmes de gouver­nance se limi­taient à élire des repré­sen­tants, nous serions effec­ti­ve­ment dans une suite de petites dicta­tures élec­tives le temps d’un mandat. Ce qui nous fait avan­cer un peu vers la notion de démo­cra­tie c’est la sépa­ra­tion des pouvoirs, les contre-pouvoirs, la consti­tu­tion et tout ce qui permet au peuple de garder le contrôle d’une façon ou d’une autre sur les gens qu’il a élu.

Malheu­reu­se­ment consti­tu­tion et contre-pouvoirs ne sont là aussi que des outils, pas suffi­sants en eux-mêmes (surtout si la consti­tu­tion peut-être chan­gée par une assem­blée sans en réfé­rer au peuple et si les contre-pouvoirs sont eux-mêmes action­nables unique­ment par les repré­sen­tants).


Nous avons une consti­tu­tion, des élec­tions, les droits de l’Homme, des insti­tu­tions, n’est-ce pas ce qui fait de nous une démo­cra­tie ?

Outre les réponses sur la consti­tu­tion et les élec­tions qui ne sont que des outils et pas consti­tu­tifs d’un régime parti­cu­lier, et la ques­tion des droits de l’Homme qui repré­sentent plus une ques­tion de morale qu’une ques­tion de régime poli­tique, l’en­semble décrit une orga­ni­sa­tion où le pouvoir est partagé, règle­menté.

La défi­ni­tion d’un telle orga­ni­sa­tion c’est la répu­blique. Répu­blique et démo­cra­tie tendent à se rejoindre dans nos esprits mais ils n’ont pas à l’être. La répu­blique quali­fie sa struc­ture, la démo­cra­tie quali­fie sa fina­lité et qui a le contrôle dans la struc­ture.


Ne confon­dons pas démo­cra­tie et déma­go­gie

Cette phrase me gêne parce qu’elle est trop souvent employée pour dire « ne suivons pas la volonté du peuple ».

Déma­go­gie :

A. Exer­cice du pouvoir par des factions popu­laires ou par leurs meneurs, avec les abus qui en résultent; système de gouver­ne­ment corres­pon­dant.

B. Recherche de la faveur du peuple pour obte­nir ses suffrages et le domi­ner.

Défi­ni­tion via le CNRTL

Dans le A, la déma­go­gie est typique­ment une prise de pouvoir par un groupe restreint. C’est le contraire de « suivre la volonté du peuple » et ça corres­pond bien plus à la capa­cité d’une personne ou d’un groupe à se faire élire pour exer­cer le pouvoir à son profit.

Dans le B il y a effec­ti­ve­ment une recherche de popu­la­rité et donc d’ac­cé­der aux volonté du peuple mais elle est de façade ou tempo­raire pour y appliquer ensuite une domi­na­tion.

Dans aucun des cas le fait de lais­ser le peuple déci­der n’est de la déma­go­gie. Ça c’est de la démo­cra­tie.

Par contre, se faire élire par des promesses pour ensuite exer­cer le pouvoir à son profit, ça c’est bien la défi­ni­tion en B, quand bien même ça sera via une élec­tion à la base.


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