Petite discussion récemment avec Ludovic qui reproche au gouvernement d’avoir attenté au droit de grève en faisant intervenir la force publique en remplacement des agents de sécurité privés aux aéroports de Paris.
Pour moi on a deux intérêts contradictoires : 1– Le respect du droit de grève, ce qui implique le non remplacement des grévistes par du personnel tiers, 2– et l’obligation pour l’État d’assurer la sécurité publique.
Je laisse l’aspect purement juridique de côté. D’autres s’y connaissent bien mieux que moi et je ne doute pas que de toutes façons les syndicats porteront la question en référé pour qu’elle soit tranchée sous au plus quelques jours. S’il y a la moindre ambiguïté sur des droits si fondamentaux, il est légitime qu’ils le fassent. Reste donc la question morale et le « qu’est-il le mieux pour notre pays » :
Il est toujours difficile de mettre un droit ou un devoir par dessus l’autre. Pourtant, en l’espèce, la sécurité publique impliquant des risques de dommages permanents aux personnes, elle doit selon moi être assurée prioritairement. L’alternative serait d’accepter des risques de blessés, ou pire, afin de respecter le droit de grève. C’est d’ailleurs suivant ce même principe que les forces de l’ordre ou les services d’urgence peuvent être forcés de travailler en dépit du droit de grève.
La question est de savoir quelle est la tâche réelle affectée aux forces de l’ordre. Les agents privés assuraient la sécurité mais ils étaient aussi là faire respecter les files, s’assurer que personne ne passe derrière le guichet, et globalement assurer le règlement et le fonctionnement de l’aéroport. Si les forces de polices dépêchées s’occupent des mêmes missions annexes, alors on peut facilement considérer qu’ils dépassent l’obligation d’assurer la sécurité publique pour assurer le rôle de salariés grévistes. Là, il y aurait problème, et problème grave (du moins tant que l’accès au transport aérien n’est pas vu comme un besoin primaire ou un droit fondamental, ce que je ne crois pas qu’il soit).
En nous battant contre la présence même des policiers nous simplifions à l’extrême, et nous nous battons avec de mauvais arguments. Il sera simple pour beaucoup de juger la présence de la police justifiée, d’autant que si la grève dure jusqu’au nouvel an, il est certain qu’on risque des débordements. Ce sera plus complexe à expliquer, moins porteur comme slogan, mais si nous voulons être honnêtes, regardons plutôt à quoi sont employés sur place les policiers.
Il y a un critère assez simple finalement : S’ils prennent en quelconque occasion des ordres ou des instructions de la part du personnel ou de la direction des Aéroports de Paris, ou qu’ils ont pour mission de « faire fonctionner » l’aéroport voire d’en faire appliquer le règlement, alors ils auront une mission privée, attentatoire au droit de grève. Si à l’inverse ils ne prennent d’instruction que de leur hiérarchie et du préfet de police, à objectif unique d’assurer la sécurité et du public et du personnel, alors leur présence est plus que légitime : elle est nécessaire.
Malheureusement je ne crois pas une seconde à cette seconde hypothèse.
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