Catégorie : Sexisme et féminisme

  • Diffé­rence géné­tique

    On parle encore d’un problème avec une cham­pione qui aurait trop d’hor­mones de Testos­te­rone.

    Secret de poli­chi­nelle : Nous ne sommes pas tous égaux au départ. Nous n’avons pas la même consti­tu­tion, et ça ne tient pas qu’à nos efforts et notre entraî­ne­ment. Un petit fera plus faci­le­ment un bon jockey qu’un bon basket­teur, et inver­se­ment.

    Certains ont aussi des prédis­po­si­tions, voire des situa­tions physio­lo­giques excep­tion­nelles. Le nageur Phelps est par exemple connu pour avoir une gestion de l’acide lactique excep­tion­nelle. Il a aussi des bras et torse dispro­por­tion­nel­le­ment longs et des jambes courtes, ce qui lui donne un avan­tage notable.

    Est-ce juste ? Proba­ble­ment pas plus ni moins que le fait qu’un joueur de basket qui fait plus de 2 mètres.

    Le fait notable c’est que ce qu’on célèbre des carac­té­ris­tiques excep­tion­nelles chez les hommes alors qu’on critique et blâme les femmes pour des anoma­lies physio­lo­giques.

    La femme n’a pas le droit d’être excep­tion­nelle ou diffé­rente. Si elle l’est, parti­cu­liè­re­ment pour des épreuves de force ou de puis­sance, on va cher­cher à lui dispu­ter son statut de femme.

  • La fille et le taureau

     

    J’adore cette histoire parce qu’elle démontre merveilleu­se­ment qu’on peut voir tout et son contraire suivant le niveau d’in­for­ma­tion dont on dispose.

    Il faut dire que la statue est superbe.

    Elle s’ap­pelle « Fille sans peur » et est sous-titrée d’une plaque qui dit « Know the power of women in leader­ship. SHE makes a diffe­rence. »

    Clai­re­ment, quand un artiste ajoute une statue d’un petit chien en train d’uri­ner dessus, on y voit faci­le­ment un problème de sexisme. C’est encore plus vrai quand on sait qu’elle est placée devant une statue de taureau en charge, faci­le­ment symbole de force et de mascu­lin.

    Anti-fémi­nisme.
    C’est le premier niveau de lecture.

    Ajou­tez que l’au­teur du chien qui urine est aussi celui du taureau initial. La fillette y fait face. On y voit donc plutôt une vengeance ou une jalou­sie, et peut-être plutôt une histoire d’égo qu’une histoire de sexisme, même si l’un n’em­pêche pas l’autre.

    Bataille d’égo.
    Deuxième niveau de lecture.

    Le taureau est une statue pirate. Elle été reti­rée avant d’être auto­ri­sée par la mairie devant la pres­sion popu­laire, d’abord tempo­rai­re­ment avant de deve­nir un vrai symbole de la ville.

    La fillette vient d’un concours privé très offi­ciel… porté juste­ment par les multi­na­tio­nales à l’ori­gine du retrait initial du taureau.

    On entre là réel­le­ment dans l’op­po­si­tion de deux mondes, dans la guérilla urbaine. D’un coup on entre dans l’acte poli­tique plutôt que dans les réac­tions person­nelles néga­tives.

    Guérilla urbaine et acte poli­tique.
    Troi­sième niveau de lecture

     

    En réalité le taureau a été mis en place suite à un crash bour­sier. Il repré­sente la force du peuple face au finan­cier, et a été posi­tion­née dans le quar­tier des finances pour cela. C’est d’ailleurs le New York Stock Exchange qui l’a fait reti­rer à l’époque.

    La statue de la fillette a été comman­dée… par une corpo­ra­tion dans le cadre d’une opéra­tion de commu­ni­ca­tion autour de l’an­ni­ver­saire d’un index bour­sier.

    D’un coup la provo­ca­tion a changé de camp et le chien qui urine ressemble plus à un acte de résis­tance, voire de sauve­garde de l’es­prit initial.

    Le peuple contre les marchés finan­ciers.
    Quatrième niveau de lecture

     

    Vous vous souve­nez du « Know the power of women in leader­ship. SHE makes a diffé­rence » ? Le « SHE » en majus­cules n’est pas anodin. C’est le trigramme qui repré­sente l’in­dex bour­sier en ques­tion dans les cota­tions NASDAQ.

    La statue de départ qui repré­sente la force du peuple améri­cain est un pied de nez au milieu bour­sier suite à un crash des marchés. Désor­mais la fillette c’est la bourse qui se met avec une atti­tude de défi face au peuple améri­cain.

    Là ça frise l’in­sulte face à un symbole de la ville. Le chien est presque potache à côté.

    Détour­ne­ment de l’œuvre commune au profit des milieux bour­siers.
    Cinquième niveau de lecture

     

    L’in­dex bour­sier est lié à la diver­sité des genres. Le fait qu’on peut y lire un soutien du fémi­nisme ou la prise de contrôle d’un index bour­sier est certai­ne­ment voulu. L’en­tre­prise publi­ci­taire joue avec les codes, c’est son busi­ness. C’est l’objet même de la statue de la fillette.

    Les plus mauvaises langues pour­ront même dire qu’il y a volonté de mélan­ger les deux dans la statue pour que la bourse prenne sa revanche en se drapant de blanc. On peut même penser que ça consti­tue une insulte encore plus grande à ce dernier niveau de lecture.

    On peut inver­se­ment dire qu’un index bour­sier qui défend la diver­sité des genres est un symbole double­ment fémi­niste et que c’est ça qu’on attaque, que la reprise des anciens symboles mascu­lins fait partie du combat, ou qu’un sujet non lié au fémi­nisme aurait peut être été attaqué autre­ment.

    Tout ça n’est pas disso­ciable, et c’est bien pour ça que c’est complexe. Choi­sis­sez votre camp. Ou pas. Les deux versions ne sont d’ailleurs pas exclu­sives les unes des autres.

    Ce que je trouve inté­res­sant c’est comment la plupart des gens réagissent suite à un seul niveau d’in­for­ma­tion, comme si la ques­tion était simple et méri­tait une indi­gna­tion sans nuances. J’ai peur qu’il en soit autre­ment.

    (discours honteu­se­ment inspiré de l’ana­lyse de greg­fal­lis.com)

  • Vous m’em­mer­dez (et pas que moi)

    Vous m’em­mer­dez à écar­ter les jambes comme si les sièges à gauche et à droite n’étaient que des repose-genoux.

    Vous emmer­dez tout le monde en fait.

    Vous emmer­dez tout le monde et vous me faites honte à prétex­ter que c’est justi­fié par votre sexe et votre anato­mie. Vous croyez que les autres hommes font comment ? oui, celui à votre gauche par exemple. Il est fait comme vous, comme moi. Non seule­ment il n’em­piète pas sur votre fauteuil mais en plus, à cause de vos excès, il ne tient que sur une partie du sien. S’il y arrive, vous le pouvez aussi.

    La seule diffé­rence entre vous et les autres c’est votre sans-gêne, la croyance que vous avez un droit plus fort que les autres. Vous, vous vous servez juste de votre sexe comme un prétexte pour emmer­der les autres, comme si avoir un sexe mascu­lin vous donnait ce droit. Bref rappel : ce n’est pas le cas.

    Écar­tez les jambes si ça vous amuse, mais respec­tez l’es­pace des gens à côté. Et si la femme à côté de vous serre ou croise ses jambes ce n’est nulle­ment une accep­ta­tion à vous voir poser votre genoux en face de son siège… quand ce n’est pas vous même qui lui impo­sez cette posture.

  • Évidem­ment, ce n’est pas la voiture qui s’est vengée

    Lot : après une dispute, une femme meurt écra­sée par la voiture de son mari
    Le Pari­sien

    Forcé­ment ça ironise. On se moque du titre avec la voiture possé­dée qui écrase seule la femme, par pure coïn­ci­dence après une dispute de couple.

    En réalité je trouve cette ironie assez moche.

    Évidem­ment, intui­ti­ve­ment on y lit qu’il y a eu une dispute et que la femme a ensuite été volon­tai­re­ment écra­sée par son mari.

    C’est intui­tif, probable, mais on n’en sait rien, pas à la simple lecture de l’ar­ticle.

    La police enquête et véri­fie. C’est son boulot de juste­ment ne pas se conten­ter de dire « c’est évident » sans savoir. Pas de fausse naïveté non plus puisqu’il est clai­re­ment dit que le mari est en garde à vue depuis hier. On peut se douter que la police a les mêmes présomp­tions intui­tives que chacun de nous.

    Entre temps, nous on ne sait rien, mais alors rien du tout. On n’a aucun témoi­gnage, aucun récit de l’évé­ne­ment. On ne sait pas comment la femme a été écra­sée. On ne sait même pas si le mari était au volant. En fait on ne sait même pas si quelqu’un était au volant ou si la voiture a été lâchée en roue libre sur une côte. C’est quand même peu pour prétendre l’évi­dence.

    Sauter aux conclu­sions c’est faire justice sur des stéréo­types ou les proba­bi­li­tés, et ça n’est à l’hon­neur de personne.

    * * *

    Pour une fois l’ar­ticle est au contraire très bien fait. On ne sait pas grand chose mais le jour­na­liste expose les faits sans détour. C’est à peu près tout ce qu’il peut faire en l’état.

    Aurait-il fallu qu’il titre « Il tue sa femme en l’écra­sant à cause d’une dispute » alors qu’il n’a aucun élément pour ça à part l’évi­dente suspi­cion que tout le monde verra de toutes façons ?

    Personne ne prétend que la voiture, possé­dée par je ne sais quel esprit, a sauté seule sur la victime. Le jour­na­liste pousse l’idée d’une culpa­bi­lité de l’homme dès la première phrase de l’ar­ticle, en hauteur double :

    Un homme d’une soixan­taine d’an­nées est en garde à vue depuis jeudi et la mort de sa femme à Prays­sac (Lot).

     

    Diffi­cile d’être plus expli­cite sur les faits sans confondre les proba­bi­li­tés avec la réalité. Pour une fois qu’un jour­na­liste présente un article comme il faut sans biais ni sur-inter­pré­ta­tion, n’al­lons pas lui repro­cher.

    * * *

    Il y a un vrai problème où la presse écarte trop souvent la respon­sa­bi­lité des atteintes aux femmes ou aux mino­ri­tés. Je fais toute­fois la diffé­rence entre celui qui excuse et celui qui ne sait pas.

    Je n’ai – malheu­reu­se­ment – pas la solu­tion au problème géné­ral mais je ne crois pas qu’ajou­ter des injus­tices en compense d’autres. Ce n’est que mon opinion, mais j’ai plutôt tendance à croire que les maux s’ajoutent entre eux.

  • Pourquoi être un « cis het blanc » semble être une insulte ?

    Alors: être un (mec) « cis(genre) hétéro et blanc », ce n’est pas une insulte. C’est une liste de privi­lèges

    […]

    Ce n’est pas toujours facile/agréable de s’en­tendre dire (ou de lire) qu’on est privi­lé­gié(e) et notre premier réflexe est bien souvent de dire/penser « hey mais moi aussi j’ai des problèmes ». Personne ne le nie, mais je te renvoie aux para­graphes ci-dessus. c’est impor­tant d’y réflé­chir.

    — Sexy SouciS

    Encore une fois, et pas spécia­le­ment sur le fémi­nisme, combattre ceux qui prennent comme une insulte le reflet de leur statut de privi­lé­gié est assez usant. Il n’y a rien de coupable et aucun reproche à faire partie des privi­lé­giés (nous sommes tous privi­lé­giés sur un critère ou un autre, tout du moins ceux qui me lisent). La ques­tion est celle de la prise de conscience et de nos actions ensuite.

  • De la diffi­culté d’évoquer le fémi­nisme

    Je ne comprends la logique à l’œuvre quand on affirme (ou qu’on sous-entend) que certaines causes ne peuvent pas être défen­dues par une personne à cause de son sexe, de son appa­rence ou d‘un quel­conque attri­but qui la classe ipso facto dans le clan des oppres­seurs.

    — De la diffi­culté d’évoquer le fémi­nis­me…

    Sujet récur­rent auquel je n’ai toujours pas trouvé de réponse correcte.

    Je comprends que la parole sur le sujet ne puisse être portée majo­ri­tai­re­ment par les hommes, sauf à juste­ment repro­duire le problème. Je comprends que certains événe­ments qui discutent le sujet puissent être entre femmes, pour plein de raisons.

    Je comprends aussi que, non victime, je ne compren­drais pas forcé­ment tout, et que de toutes façons je n’ai pas, moi, à tout comprendre pour le recon­naître comme légi­time. C’est même en partie la base du sujet.
    Accep­ter de ne pas tout comprendre ou tout maîtri­ser n’est – parti­cu­liè­re­ment pour moi – pas une mince affaire, quel que soit le sujet.

    Par contre je n’adhère pas à la vue du « seule les victimes peuvent en parler et ont un avis légi­time », pas plus là que sur d’autres sujets. En fait c’est même tout le contraire. Par prin­cipe tous les impliqués dans une ques­tion ont une vue biai­sée, la victime autant que l’op­pres­seur. C’est bien pour ça qu’en justice on impose un juge neutre au milieu.

    Le problème c’est qu’ici il n’y a personne de neutre.

    Tout le monde est biaisé à des degrés divers, conscient à des degrés divers. Tout le monde est concerné, ou est légi­time à se sentir concerné par le problème, avec son propre biais : les femmes comme les hommes.
    Oui, les hommes aussi, sauf à nier que l’homme joue un rôle dans la société patriar­cale et à penser qu’ils sont hors du problème.

    Je sais que je ne dois pas prendre le débat. Je sais que je ne dois pas impo­ser mes vues. Je sais que je dois juste­ment lais­ser de la place et lais­ser l’es­pace mili­tant se construire sans moi. Je sais que j’ai beau­coup à apprendre et toujours à écou­ter.

    Pour autant je crois aussi que mon avis est aussi légi­time qu’un autre, ni plus ni moins, et que c’est ensemble que nous pour­rons agir. Je respecte que d’autres n’aient pas cet avis, qu’ils me le disent. J’es­père juste qu’ils pour­ront respec­ter le mien et que nous pour­ront conti­nuer à agir en désac­cord.


     

    Oui, mon texte n’est pas clair mais je le publie tout de même. Il ne le sera peut-être jamais. Les débats sont souvent violents sur ce sujets et j’ai l’im­pres­sion de devoir mettre 50 précau­tions oratoires avant de dire quoi que ce soit, que ce soit à l’at­ten­tion des uns ou des autres.

    Je crains autant les critiques violentes de mili­tant·e·s que les partages de personnes qui en profi­te­ront pour cracher sur le mouve­ment. Je doute que cela ne faci­lite grand chose. Le message final s’en trouve brouillé.

    L’échange sera proba­ble­ment plus simple en privé. Vous y êtes les bien­ve­nus, y compris – et surtout – si c’est pour m’ex­pliquer quelque chose que je n’ai pas compris.

  • On a décon­seillé à Emma Watson d’em­ployer le mot « fémi­nisme » dans son discours sur l’éga­lité

    Je ne sais que faire comme commen­taire. Indé­pen­dam­ment des opinions sur le meilleur terme à utili­ser dans tel ou tel contexte, qu’on puisse avoir peur d’uti­li­ser le terme de fémi­nisme ne peut certai­ne­ment pas être un signe posi­tif.

    Parce que c’est lié et inté­res­sant :

    Chaque mois, « Libé­ra­tion » fait le point sur les histoires qui ont fait l’ac­tua­lité des femmes, de leur santé, leurs liber­tés et leurs droits. Troi­sième épisode : novembre 2015.

    TL;DR: il y a encore du boulot