J’ai longuement reproché à ceux qui soutenaient l’initiative copieprivee.org que contrairement à leur communication, ils ne se battaient pas pour la copie privée mais pour la rémunération liée à la copie privée. Si dans notre loi l’un ne va pas sans l’autre, le soutien n’est pas transitif. Mieux : Il existe d’autres modèles.
La différence se voit en ce que toute la communication et toutes les actions sont bien liées à la justification et à la pérennité de la rémunération pour copie privée. Rien n’est fait pour la copie privée elle-même. Pourtant il y a matière : La profusion des systèmes de streaming, les verrous numériques et autres DRM viennent tous les jours restreindre l’exercice de ce droit qu’est la copie privée. Les réactions des autorités sont molles, voient dans le mauvais sens.
Licité de la source
Alors voilà, La Quadrature se bat contre un cavalier, l’insertion de l’origine licite de la source (en gras dans la citation) dans l’exception pour copie privée :
Lorsque l’œuvre a été divulguée, l’auteur ne peut interdire (…) les copies ou reproductions strictement réalisées à partir d’une source licite et réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective
Entendons-nous bien. Il est légitime d’imposer que la source soit licite. On ne peut pas envisager une sorte de blanchissement des contrefaçons à coup de copie privée. La cour de cassation avait d’ailleurs déjà éclairci ce point en imposant exactement cela. (Mise à jour: visiblement c’est même moins clair que cela)
Comment la prouver ?
Je ne vois pas comme La Quadrature, le danger dans le fait que l’utilisateur ait ou pas à prouver la licité de la source, même si ça reste effectivement un problème sérieux.
Mon problème c’est que c’est au copiste de se réclamer de l’exception pour copie privée et de prouver qu’il y répond.
Plus que de prouver l’origine de la source, une telle démarche m’imposerait surtout de tenir un cahier de toutes les copies pour en expliciter la source, et m’assurer de trouver à chaque fois des éléments pour plus tard pour au moins prouver ma bonne foi au cas où la source disparaît à l’avenir (ce qui arrive très régulièrement). C’est à ce prix que je pourrai apporter au moins un élément sur la licité de la source.
Je ne veux pas tout noter
Or, sérieusement, je ne veux pas avoir à ajouter un commentaire en face de chaque conversion en mp3 pour noter le numéro de série de chaque CD voire une photo pour prouver que je l’ai bien eu en main, au cas où on m’accuserait de contrefaçon quelques années plus tard. Je ne veux pas noter dans un cahier la date et heure de chaque émission que j’enregistre pour être certain de pouvoir dire « sisi, ce dessin animé je l’ai bien copié à partir d’une source licite vu que je l’ai enregistré à partir de la télévision il y a cinq ans ».
Ce n’est pas sur cet équilibre que la société s’est engagée, et tenter de l’imposer ferait courir un vrai risque à long terme à la copie privée.
De la différence entre ceux qui défendent la copie et ceux qui défendent la rémunération
Le projet de loi d’un côté sécurise les rémunérations passées jugées illégales par le Conseil d’État (c’est à dire évite d’avoir à les rembourser bien qu’elles soient illégitimes), de l’autre fait porter un gros risque sur l’exercice de la copie privée à l’avenir tout en restant muet sur toutes les dérives tendant à rendre impossible la mise en œuvre de cette exception.
Devinez ce que soutient copieprivee.org, le site qui se réclame défenseur de la copie privée… Indice : il est majoritairement soutenu par des sociétés d’ayant droits.
Devinez ce que soutient La Quadrature, qui se réclame aussi défenseur de l’exception à la copie privée mais qui n’a pas pour objectif réel de défendre la rémunération… Pas d’indice, vous n’en avez pas besoin.
Et vous ?
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