En préalable à ce billet :
- Ne plus compter les livres non lus
- Découvrir, cet enrichissement culturel
- Le livre cet objet rare
Ce qui différencie les points de vue du second billet est plus fondamental qu’il n’y paraît. N’ayons pas peur des mots, ce sont deux modèles de société qui s’opposent (l’écoute de la vidéo est indispensable, croyez moi, et je ne me risquerai pas à la paraphraser ici) : celui d’une économie de la rareté et celui d’une économie de l’abondance.
Nous vivons cette mutation depuis des années dans la musique, la vidéo et la presse. Le livre n’est finalement qu’un nouveau venu dans cette bataille mais c’est aussi celui avec l’histoire la plus stable et la plus ancrée dans la rareté. La réaction de rejet est donc encore plus forte, au point de feindre de ne pas connaitre l’issue. Là où musique vidéo et presse cherchent un modèle, le livre agit explicitement pour pérenniser sont modèle de rareté.
Vous n’y croyez pas ?
Au Salon du livre il y a un mois, un représentant des éditeurs affichait explicitement son intention de maintenir la rareté du livre dans les offres numériques aux bibliothèques publiques, pour éviter de concurrencer le modèle de vente d’aujourd’hui. La loi récente qui va gérer le cas des œuvres indisponibles du XXème siècle et permettre leur numérisation semble en partie avoir été conçue pour éviter d’autres alternatives à diffusion plus large, comme entre autres la loi européenne sur les œuvres orphelines. Et le président de la BNF dont la mission est de donner accès au plus grand nombre, de déclarer qu’il faut éviter de donner accès gratuitement au domaine public afin de sauvegarder les librairies. On pourrait aussi parler de DRM ou d’absence d’offre d’abonnement.
Il semble que dans le livre numérique seuls Amazon et quelques startups considèrent qu’il faut planifier l’inéluctable plutôt que de tenter l’arrêter. Ce n’est pas pour rien qu’Amazon propose via son offre premium un noyau de ce que peut être une offre d’abonnement. Le jour où ce sera pertinent, ils seront prêts. Entre temps ils « achètent » des auteurs pour constituer un catalogue le plus large possible dont ils contrôlent l’offre et les conditions, pour dépendre le moins possible d’éditeurs tiers qui pourraient les empêcher de suivre un nouveau modèle.
Si vous contrôlez les contenus, vous contrôlez l’offre. Si vous contrôlez l’offre, vous pouvez choisir votre modèle économique.
Dans la même série :
- Ne plus compter les livres non lus
- Découvrir, cet enrichissement culturel
- Le livre cet objet rare
- D’une économie de la rareté à une économie de l’abondance (ce billet)
- Inéluctable économie de l’abondance
- Penser l’économie de l’abondance
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