Vélo à cour­roie

Je n’ai pas de chaîne à mon vélo. Ça déclenche toujours des discus­sions pour ceux qui le remarquent. À la place j’ai une cour­roie.

Petit retour d’ex­pé­rience après 3 ans sur un vélo à cour­roie, à partir des ques­tions qu’on me pose habi­tuel­le­ment.

C’est bien ?

Oui. Je voulais quelque chose sans main­te­nance et qui ne me salisse pas quand je porte le vélo dans l’es­ca­lier. En pratique il y a aussi zéro bruit lorsque je roule, aucune usure ou presque pour 10 ans, et jamais de chaîne qui déraille.

C’est telle­ment posi­tif que je vivrais comme une nette régres­sion de retour­ner sur un vélo avec une chaîne.

Zéro main­te­nance ?

Zéro. Chan­ger la cour­roie à la fin de sa durée de vie sera plus ou moins la seule opéra­tion de main­te­nance. Une cour­roie dure 30 000 à 100 000 km, même dans les condi­tions extrêmes qu’une chaîne n’ai­me­rait pas du tout. J’ima­gine qu’il me reste person­nel­le­ment une dizaine d’an­née avant d’y penser.

En compa­rai­son, la chaîne, en théo­rie, se nettoie régu­liè­re­ment. C’est long, c’est (très) sale. Certains parlent de chaque sortie, d’autres de tous les deux mois. Beau­coup (moi inclus) ne le font jamais mais ça abîme le maté­riel qui s’use plus vite et perd en effi­ca­cité. Il faut aussi lubri­fier régu­liè­re­ment.

On m’a parlé de tension

En théo­rie il faudrait surveiller la tension de la cour­roie. Il y a même une appli­ca­tion mobile pour esti­mer ça à partir du son qu’elle fait. En pratique il est peu probable qu’elle soit trop forte, en tout cas certai­ne­ment pas au point de fragi­li­ser la cour­roie.

On n’a toute­fois aucun inté­rêt à tendre inuti­le­ment la cour­roie et ajou­ter de la fric­tion. Le seule impact d’une cour­roie trop peu tendue est le risque qu’elle saute, comme une chaîne qui déraille. Il faut vrai­ment une tension très basse pour ça.

En réalité il faut en théo­rie regrais­ser le péda­lier tous les 1 à 2 ans. C’est là qu’on règle la tension sur mon vélo, donc celui qui graisse le péda­lier devra de toutes façons gérer la tension à ce moment là. Pas trop besoin d’y penser.

Si ça vous préoc­cupe, il existe des systèmes avec des poulies qui ajoutent la tension qu’il faut sur la cour­roie, un peu comme un dérailleur mais en plus simple.

Et comment tu fais quand ça casse ?

En cas de casse, il faut chan­ger la cour­roie. Il n’y a pas de répa­ra­tion. L’as­tuce c’est que ça ne casse pas, ou de façon excep­tion­nelle après une mauvaise mani­pu­la­tion humaine.

Il faudra que je retire la roue comme pour une crevai­son, que je retire quelques vis pour ouvrir le cadre au niveau du triangle, puis que je retire l’an­cienne cour­roie pour mettre la nouvelle. Pas de graisse, pas d’huile, ça pren­dra moins de temps qu’une crevai­son.

C’est pénible en voyage si ça arrive mais empor­ter une cour­roie de rechange pèse à peu près aussi lourd que le dérive-chaîne destiné à ouvrir une chaîne vélo pour la répa­rer.

Attends, ouvrir le triangle ?

La trans­mis­sion doit passer à l’in­té­rieur du triangle arrière du vélo. Pour une chaîne on ouvre un maillon, on passe la chaîne et on referme le maillon. Pour faci­li­ter, les chaînes ont souvent un maillon dit « maillon rapide » qui permet l’opé­ra­tion simple­ment.

La plupart des cour­roies ne s’ouvrent pas. Pour les faire passer à l’in­té­rieur du triangle arrière du vélo il faut donc… ouvrir le triangle arrière. Les vélos à cour­roie sont prévus pour, et s’ouvrent puis se referment juste au-dessus de l’axe de roue arrière.

Ce sont deux vis, et à faire une fois tous les 30 à 100 000 km. Autant dire que ça ne me stresse pas trop. Le cas échéant, c’est le vélo­ciste qui s’en occu­pera.

Pourquoi tous les vélos n’uti­lisent pas une cour­roie alors ?

La cour­roie relie un plateau à l’avant à un pignon à l’ar­rière. Comme une chaîne, sauf qu’il n’y a pas de dérailleur. Celui qui veut plusieurs vitesses doit les inté­grer dans un boîtier vitesse péda­lier (le plus connu est Pinion) ou dans un moyeu vitesse à l’ar­rière (les plus connus sont les Nexus/Alfine et le Rohloff).

Ces boîtiers vitesses demandent eux aussi zéro main­te­nance ou presque, avec des durées de vie gigan­tesques, mais sont nette­ment plus chers à l’achat, plus lourds et avec une effi­ca­cité légè­re­ment moindre qu’un système de dérailleur. Il y a juste un chan­ge­ment d’huile à faire une fois par an. Ça se fait faci­le­ment par un non brico­leur avec une seringue, sans s’en mettre partout.

Au final on utilise encore chaîne et dérailleurs à la fois pour les vélos pas trop cher (prix) et pour les vélos de course (effi­ca­cité maxi­male). Ça laisse un marché réduit pour les systèmes à cour­roie, mais on en trouve pas mal sur les vélos élec­triques haut de gamme (plus chers, et dont le moteur fait qu’on ne recherche plus du confort qu’une effi­ca­cité opti­male de chaque compo­sant).

Ah, ça coûte cher ?

La cour­roie coûte cher, on parle de 90 € envi­ron. C’est 4x le prix d’une chaîne. On la change aussi 5 à 20x moins souvent, avec zéro produit d’en­tre­tien en cours de route. Les non brico­leurs chan­ge­ront aussi leur cour­roie tout seuls. Ils feront sûre­ment appels à une pres­ta­tion de profes­sion­nel pour une chaîne. Sur la durée de vie du vélo, on s’y retrouve faci­le­ment.

Les pinions et plateaux sont eux aussi très signi­fi­ca­ti­ve­ment plus chers, mais là aussi on les change beau­coup plus rare­ment.

Le truc qui coûte vrai­ment cher c’est le moyeu vitesse. Un Nexus 8 vitesses fait dans les 175 €, un Alfine 11 vitesses fait plus de 300 € et un Rohloff 14 vitesses est entre 1000 € et 1250 €. C’est bien bien plus cher qu’un couple dérailleur+­cas­sette équi­valent. Si, là encore, la diffé­rence de durée de vie fait qu’on s’y retrouve au final pour qui fait vrai­ment des kilo­mètres, l’in­ves­tis­se­ment initial est quand même large­ment dissua­sif.

Ah, c’est moins effi­cace ?

Une cour­roie est 0.5% moins effi­cace qu’une trans­mis­sion à chaîne neuve et lubri­fiée. Elle doit toute­fois être couplée à un boîtier de vitesse qui lui ne peut pas battre un dérailleur externe. Les tests en labo­ra­toire disent qu’un système à cour­roie est 2 à 6% moins effi­cace qu’un système à dérailleur externe neuf et bien entre­tenu.

On parle de quelques points de pour­cen­tage d’ef­fi­ca­cité. C’est au maxi­mum de 2 à 3 minutes sur un trajet d’une heure. Hors situa­tion de compé­ti­tion ou de recherche de perfor­mance, c’est proba­ble­ment peu signi­fi­ca­tif.

L’ef­fi­ca­cité de la chaîne dimi­nue toute­fois très rapi­de­ment avec l’usage (usure de la chaîne, usure des pignons, sale­tés, lubri­fi­ca­tion, boue, mauvais réglage de dérailleur), là où la cour­roie garde à peu près la même effi­ca­cité quelles que soient les condi­tions. En condi­tions réelles la diffé­rence est donc plus faible, voire inver­sée.

Si vous cher­chez la perfor­mance en course ou que vous aimez bidouiller votre vélo, restez sur dérailleur. Dans le cas contraire, la cour­roie est proba­ble­ment un bon compro­mis.

Je peux ajou­ter une cour­roie sur mon vélo ?

Proba­ble­ment pas, ou pas simple­ment.

Plus haut j’ai parlé de cadre qui s’ouvre au niveau du triangle arrière. Ça doit être prévu d’ori­gine. Il parait que certains découpent des cadres stan­dards mais je me méfie­rais sur la soli­dité résul­tante.

La marque Veer proposent aussi des cour­roies qui s’ouvrent et qui ne néces­sitent pas de cadre spéci­fique. Elles sont très peu répan­dues et je n’ai pas vu passer de retours, qu’ils soient posi­tifs ou néga­tifs. Je serais étonné que la soli­dité soit la même. Je vois au moins qu’il n’y a pas de guide central pour empê­cher la cour­roie de sortir du pignon.

Dans tous les cas, il faut un cadre très rigide. Les cour­roies sont faites pour travailler en aligne­ment parfait et n’aiment pas les torsions. Si le cadre est trop souple, la cour­roie risque de travailler de mauvaise façon, et soit dérailler soit risquer usure et casse préma­tu­rées.

Si vous avez le bon cadre et que l’ex­pé­rience vous tente, il faudra toute­fois ajou­ter un boîtier de vitesse avec son sélec­teur de vitesse dédié, ainsi que chan­ger le pignon arrière et le plateau de péda­lier. Le prix des compo­sants n’est pas anec­do­tique. Ça peut être inté­res­sant de regar­der un vélo neuf déjà équipé.

Est-ce que c’est pour moi ?

Du fait du coût initial d’achat, mis à part quelques rares excep­tions, ça ne se trouve que sur le haut de gamme. C’est donc à priori exclu si votre budget est restreint ou si les risques de vol sont élevés.

Si vous êtes prêts à mettre le prix au départ, que vous préfé­rez la prati­cité et l’ab­sence de main­te­nance à la bidouilla­bi­lité et aux pouillèmes de perfor­mance, alors foncez.

Là où les cour­roies sont les plus fréquentes c’est sur les vélos à assis­tance élec­trique, sur du moyen à haut de gamme. On cherche d’abord le pratique et le confort. Un léger surcoût en poids et en résis­tance au roule­ment ne sont pas des critères signi­fi­ca­tifs quand le moteur tourne. La présence du moteur rend souvent suffi­sant aussi un moyeu à 8 vitesses donc pas besoin d’ima­gi­ner un Rohloff à 1 000 €. Enfin, le prix d’achat est déjà élevé donc le surcoût est moins visible en propor­tion.

On trouve aussi des cour­roies sur les vélos urbains haut de gamme. Vous aurez une absence totale de main­te­nance et de salis­sure. Avec un moyeu vitesse Nexus 8 ou Alfine 11, il faut comp­ter 500 à 1 000 € de plus à l’achat.

Sur les vélos de voyage c’est plutôt le très haut de gamme parce qu’il faut payer le moyeu Rohloff ou le boitier de péda­lier Pinion, qui coûtent tous deux plus de 1 000 €. Pour ce prix là vous avez cepen­dant une trans­mis­sion incre­vable et à l’abri des problèmes méca­niques quelles que soient les condi­tions. Alee Denham (Cyclin­ga­bout) est connu pour être un promo­teur très actif.

Là dernière caté­go­rie où j’ai vu des cour­roies ce sont les VTT très haut de gamme, asso­cié en géné­ral avec un boitier Pinon sur le péda­lier. Ça coûte cher, très cher.


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