Nous avons encore du temps, trop de temps

Entre ceux qui hurlent au fascisme à chaque contrainte d’ur­gence sani­taire et ceux qui ne veulent pas libé­ra­li­ser le télé­tra­vail là où c’est possible pour ne pas casser le lien social mais qui sont prêts à couper toute rela­tion sociale hors du travail… je ne me retrouve nulle part.

Ok mais si tu es contre les mesures du gouver­ne­ment, tu proposes quoi ?

Honnê­te­ment ce n’est pas que je sois contre, juste que je n’ai vu aucun chiffre ni aucune argu­men­ta­tion qui laisse penser que ça aura un effet à la hauteur du néces­saire.

Je sais qu’il faut viser un temps long. Notre président a parlé d’été 2021 mais même ce scéna­rio est assez opti­miste. Arrê­ter de nouveau le pays c’est une solu­tion d’ul­time recours.

Cela dit c’est facile d’in­ter­dire des trucs au fur et à mesure de la propa­ga­tion de l’épi­dé­mie mais, si on ne veut toucher ni au travail ni aux études, ça finit par bras­ser beau­coup de vent.

Nous avions un trimestre pour prépa­rer.


On aurait pu se dire que subven­tion­ner le maté­riel et les infra­struc­tures qui permettent de télé­tra­vailler aux sala­riés qui le peuvent. Ça aurait été cher, mais proba­ble­ment pas plus que du chômage partiel, et ça aurait été un inves­tis­se­ment durable pour les entre­prises, donc pas perdu pour l’éco­no­mie.

On aurait pu en faire de même pour les étudiants et les ensei­gnants, avec des équi­pe­ments infor­ma­tiques utili­sables (pas ceux d’Ile de France), et des solu­tions 4G pour la connec­ti­vité. On a roya­le­ment prévu 5 000 postes (non, il ne manque pas de 0), autant dire rien.

On aurait pu établir un proto­cole pour faire un maxi­mum de cours à distance aux lycéens et étudiants, tout en permet­tant à ceux qui ne le peuvent pas (isole­ment très fort, manque de place à la maison, manque de maté­riel, manque de compé­tences, suivi abso­lu­ment néces­saire) de venir suivre ces cours distan­ciels dans les locaux (bien plus vides et donc moins risqués, y compris côté trans­ports pour y aller) avec quelques recru­te­ments ad-hocs supplé­men­taires pour cet accom­pa­gne­ment.

On aurait pu faire que le télé­tra­vail soit un droit pour les sala­riés dont le travail et les condi­tions person­nelles le permettent, et les auto­ri­ser – éven­tuel­le­ment après confir­ma­tion des instances repré­sen­ta­tives – à passer outre les réti­cences des mana­gers ou de la direc­tion, voire à forcer l’en­tre­prise à inves­tir dans un VPN et des outils pour ça. Ça ne concer­ne­rait pas tout le monde mais ça sera ça de moins, y compris dans les trans­ports.

On aurait pu renfor­cer les offres de forma­tion et de recon­ver­sion, quitte à les subven­tion­ner de façon massive. Si le travail ne tourne pas à plein régime, autant utili­ser ce temps pour inves­tir sur l’ave­nir.

C’est vrai aussi pour toutes les indus­tries qu’on sait en déclin ou problé­ma­tiques pour le climat. Plutôt que de subven­tion­ner leur acti­vité pour la faire redé­mar­rer à l’iden­tique sur fonds publics, c’était l’oc­ca­sion de jeter les premières pierres de trans­for­ma­tion.


On aurait proba­ble­ment pu et on peut encore proba­ble­ment plein de choses, mais non. Peut-être pas ce que je propose (je n’ai peut-être pas vu tel ou tel problème majeur dans mes para­graphes précé­dents) mais imagi­ner des solu­tions de trans­for­ma­tion.

Les trans­for­ma­tions les plus profondes que j’ai vu passer, ce sont des pein­tures pour des pistes cyclables tempo­raires dans certaines agglo­mé­ra­tions. Je ne critique pas, j’ap­plau­dis au contraire d’avoir trans­formé plutôt que juste inter­dit ou règle­menté, mais c’est bien peu.

Nous avions un trimestre. J’ai envie de hurler parce qu’on n’a rien préparé à part de jolis discours pour dire qu’on était prêts.

J’ai envie de hurler mais je préfère me concen­trer sur l’ave­nir. Nous avons encore du temps, plein de temps, trop de temps en fait parce que la situa­tion risque de durer. Ce temps il serait bien de l’uti­li­ser à autre chose que déli­mi­ter ce qu’on inter­dit au fur et à mesure de la propa­ga­tion.

Je n’ai pas l’im­pres­sion que nos réponses soient aujourd’­hui à la hauteur des enjeux.

Sans entrer dans le poncif stupide de « trans­for­mons le désastre en oppor­tu­nité », il y avait et il y a toujours une oppor­tu­nité d’in­ves­tis­se­ment et pas juste de « dépen­sons plus ».


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