Le web a un historique avec beaucoup de mises en page fixes. On allait jusqu’à indiquer en bas de page avec quel taille et quelle résolution d’écran il fallait pour consulter le site dans les meilleures conditions.
C’était déjà difficilement tenable avant, mais l’arrivée des tablettes et smartphones a totalement changé la donne. Depuis, c’est le terme « responsive web design » qui représente l’état de l’art : des mises en page dynamiques qui s’adaptent à toutes les tailles d’écran et une majorité des tailles de caractères.
La littérature est en train de vivre une bascule similaire avec le numérique : Les livres, au moins la littérature classique, s’adapte à l’écran et à la taille de caractères choisies. Dans le format EPUB on parle de reflow.
Là où je suis perplexe, c’est devant l’arrivée des EPUB à mise en page fixe. D’une part parce qu’ils ont tendance à bêtement remplacer le PDF, sans réelle valeur ajoutée. Même contraintes, moins de compatibilité avec les lecteurs actuels, pas vraiment plus standard vue le nombre de directives propriétaires.
Je reste heureux de savoir que c’est du zip + html + css, parce que ça s’embarquera plus facilement sur le web dans le futur, mais je ne peux m’empêcher d’être dubitatif sur les raisons pragmatiques qui peuvent pousser à remplacer du PDF par de l’EPUB à mise en page fixe.
Mais surtout j’ai l’impression que l’édition va encore une fois à rebours de l’histoire du web. Pourquoi vouloir faire de la mise en page fixe ?
Des contenus graphiques, parfois extrêmement complexes, le web en a plus d’un, et les solutions pour les vues adaptatives existent. Parfois ce n’est pas simple, souvent ça demande un véritable travail de création, mais on y arrive.
On me cite Apollinaire, et l’adaptation est ici extrêmement limitée car l’objectif est de respecter une oeuvre ancienne qui ne bougera pas. C’est un exemple qui reste toutefois exceptionnel.
Des livres photo, des livres techniques, des livres pour enfants, des livres illustrés, des guides de voyage… tout ça existe sur le web, en adaptatif. Les deux seules raisons que je vois pour faire de la mise en page fixe sont le coût et la compatibilité.
Sauf que si on ne veut pas investir dans la création numérique – ce qui me semble être un problème non seulement pour l’avenir mais aussi pour le présent proche vu que le numérique représente déjà plus de 30% du livre aux États Unis – et qu’on souhaite une compatibilité maximale… le PDF convient très bien. En fait il convient bien mieux.
Et même là, une majorité de ce que je vois en mise en page fixe serait assez « simple » – toutes proportions gardées – à faire en adaptatif. Il n’y a qu’à… C’est d’autant plus vrai qu’on s’oriente vers un avenir où les lecteurs EPUB sont basés sur des navigateurs web tout ce qu’il y a de plus modernes, en fait la même base que Chrome ou Safari.
Il y a même probablement parfois moyen de faire de l’adaptatif qui dégrade très bien sur les lecteurs qui ne savent relire que du bête texte. Tout reste encore à inventer.
En fait il y a une troisième raison que je vois très bien : Les éditeurs ont toujours pensé des mises en page fixes jusqu’à présent, des graphismes qui ne souffrent d’aucune adaptation après impression, que tout le monde voit exactement pareil.
C’est un vrai changement de paradigme qu’il faut pour accepter des adaptations, des compromis, que ce ne sera pas exactement pareil partout. Ce changement d’état d’esprit a mis longtemps à s’imposer sur le web. C’est juste dommage qu’on recommence à zéro sur le livre, voire un peu en dessous de zéro.
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