Emmanuel Macron a annoncé samedi qu’il comptait instaurer, s’il est élu président, un « service national » obligatoire d’une durée d’un mois pour tous les jeunes.
Sérieusement ? Un mois. Déjà qu’un service national d’un an n’est pas forcément pertinent, un mois ça n’a juste plus aucun sens…
Et ça parle d’y faire une remise à niveau scolaire, notamment pour l’illettrisme. Et ça parle d’aider à la mixité sociale. Et ça parle de renforcer l’adhésion à la nation et à la collectivité. On peut arrêter le tir s’il vous plait ?
L’école étant obligatoire de 6 à 16 ans. 60 000 établissements, 850 000 enseignants. Que vont donc bien pouvoir enseigner les militaires qui permette la remise à niveau en un mois après 10 ans d’enseignements par des professionnels expérimentés ?
L’ancien service national avait au mieux su brasser différents milieux sociaux, bien qu’avec pas mal de reproduction. Avec un an de service, l’impact sur la mixité sociale de la nation hors des murs militaire a été quasi nul. A-t-on vraiment là aussi trouvé une formule magique pour prétendre avoir un meilleur effet en un mois alors qu’on prévoit déjà de séparer les 10% les moins lettrés pour une remise à niveau scolaire ?
J’ai aussi mal à voir en quoi imposer la présence et l’obéissance par la force pendant un mois va vraiment générer une adhésion à l’État et à la nation. Mon expérience me fait croire qu’on va surtout radicaliser les positions. Ceux qui étaient un peu lâchés vont principalement générer du rejet et un sentiment d’oppression. Les autres peuvent se sentir mieux intégrés, mais avec d’une vision très négative sur ceux qui ne sont pas entrés dans le rang. Un an permet d’atténuer cet effet négatif mais c’est impossible en un seul mois…
Cette mesure ne figurait pas jusqu’à présent dans son programme.
On peut croire que l’enjeu est là : Flatter les conservateurs et les autoritaires en considérant qu’il y a des voix à récupérer à droite vue la situation de leur candidat. Ce ne serait pas très glorieux pour celui qui prétend ne pas faire de promesses de campagne et apporter un renouveau dans la parole politique.
Le risque c’est que l’intention tienne en partie dans le troisième point de l’image : « disposer d’une réserve mobilisable en plus de la garde nationale. »
L’Europe s’arme. Le monde se radicalise et le nationalisme monte rapidement partout, l’Europe la première. Certains technocrates croient peut-être que l’escalade à l’armement est une bonne idée, voire qu’il faudrait une bonne guerre.
On l’a déjà vu, et il y a tant de choses qui font repenser à l’avant guerre mondiale qu’il ne serait pas étonnant que ces politiques nous rejouent le même scénario en pensant agir pour le bien de la nation, seuls dans leur microcosme.
Cette idée du service militaire est une connerie vis-a-vis des objectifs présentés, mais que peut-on faire ?
Vous voulez travailler contre l’illettrisme ?
Arrêtez de réduire le nombre d’éducateurs spécialisés. Embauchez des enseignants. Permettez aux familles non privilégiées d’être là le soir et le week-end autour des enfants pour les accompagner dans les devoirs. Réduisez les effectifs par classe ou mieux, ajoutez un second enseignant par classe.
On peut aussi favoriser la diffusion gratuite des livres du domaine public ou mettre un enseignement continu gratuit. On peut créer des classes spécifiques pour ceux qui en ont besoin plutôt que de les porter avec leur tranche d’âge ou de les stigmatiser avec des années de retard dans une classe plus jeune.
Vous voulez favoriser la mixité ?
Commencez par imposer le respect des quotas de logements sociaux, et principalement dans les villes riches. Imposez que les quotas se fassent quartiers par quartiers plutôt que de reléguer les plus pauvres dans des ghettos en bordure de périphérique ou d’autoroute. On peut même imaginer que chaque construction neuve de plus de 4 logements inclue une proportion de logement sociaux sur place.
Redorez l’école publique pour que les plus aisés ne cherchent plus à la fuir. Non ce n’est pas un hasard s’il y a corrélation avec mes propos plus haut.
Arrêtez l’explosion des frais sur l’université. Évitez que les moins aisés aient à travailler en parallèle de leurs études. Redorez aussi l’université et ses programmes de recherche pour que les aisés ne fuient pas tous en grandes écoles.
Vous voulez une cohésion nationale ?
Pour rapprocher le citoyen de l’État, on pourrait déjà arrêter de culpabiliser ceux qui sont dans le besoin, financièrement, humainement ou pour leur santé. Arrêtez de les traiter de fraudeurs, d’assistés, de fainéants, ou de rejeter leurs cris. Permettez aux structures qui ont pour pour but d’aider ceux en difficulté d’être plus là pour épauler et accompagner que pour culpabiliser et contrôler.
Lutte contre la discrimination, arrêtez de désigner l’ennemi, de monter les uns contre les autres, de segmenter et diviser en groupes. Redonnez une vision de progrès social. Quittez tous les privilèges de fait, redonnez ses lettres de noblesses à la démocratie, faites de la politique plutôt du marketing.
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