Je ne comprends pas la panique sur le droit d’au­teur et l’in­tel­li­gence arti­fi­cielle

Vrai­ment. J’ai l’im­pres­sion (*) que notre droit est déjà très géné­rique et que les problé­ma­tiques soule­vées, quand bien même elles vont être exacer­bées, sont toutes sauf nouvelles.

À qui appar­tient le contenu généré par une IA ?

Ça dépend (comme toujours) mais la ques­tion n’est pas nouvelle. On a depuis très long­temps des machines et des logi­ciels pour créer du contenu, y compris du contenu graphique.

Je me rappelle de Pico­gen qui géné­rait des paysages, et dont la dernière version date de 2010. Le fait que le programme exécuté soit désor­mais une IA ne change pas grand chose. Les tribu­naux ont même eu à tran­cher le cas de photos prises par un singe.

Si le résul­tat peut démon­trer une origi­na­lité par le reflet de la person­na­lité de l’au­teur de l’IA ou de l’au­teur du prompt, c’est proba­ble­ment couvert par le droit d’au­teur de ces personnes.

S’il n’y a aucune origi­na­lité qui peut être démon­trée, ce n’est proba­ble­ment pas couvert par le droit d’au­teur, peu importe la quan­tité de travail réali­sée dans l’IA.

Ils utilisent mon contenu pour l’ap­pren­tis­sage de leur IA !

Outre que cette ques­tion a été abor­dée dans la loi quand on a parlé de data mining, c’est aussi quelque chose de vieux comme le monde.

La créa­tion intel­lec­tuelle ne se fait pas de zéro. Tous les auteurs créent à partir de ce qu’ils ont étudié, vu, appris. Là dessus l’hu­main ne fonc­tionne par diffé­rem­ment de l’IA.

Oui mais là on voit parfois la ressem­blance avec mon contenu sous droit d’au­teur !

Repro­che­rait-on à un auteur de roman d’avoir beau­coup lu les autres auteurs contem­po­rains pour créer son style à partir de ce qu’il aime bien, et de reprendre telle façon de faire de X et telle autre de Y ?

On a aussi plein d’ar­tistes qui font des œuvres « dans le style de […] », d’autres qui réuti­lisent des mélo­dies, et tout un univers de fan fiction qui s’in­sèrent dans les œuvres exis­tantes.

Il y a des limites à tout cela, des choses possibles ou pas. Les limites demandent parfois des juges pour être arbi­trées mais que ce soit crée via une IA ou direc­te­ment par un humain n’y change proba­ble­ment rien.


Mais alors il n’y a pas d’enjeux ?

Il y en a plein, parce que les limites ne sont pas binaires et que ça va proba­ble­ment géné­rer d’in­ter­mi­nables débats juri­diques, mais ça va plus être à cause du volume que d’une situa­tion vrai­ment nouvelle.

On a aussi certai­ne­ment les ayants-tous-les-droits qui vont encore récla­mer des droits voisins et une façon de faire payer les autres.

Si je vois un enjeu il sera beau­coup plus sur l’éthique, sur ce qu’il est accep­table de faire faire par une IA ou non, de s’il faut l’em­pê­cher d’avoir des réponses poten­tiel­le­ment violentes, ou critiques, ou sexuelles, ou poli­tiques, ou affir­ma­tives, et de s’il faut bannir quelques types de réponses. La posi­tion italienne sur la vie privée me parait très inté­res­sante à ce niveau.

Il y a, enfin, une énorme révo­lu­tion à venir sur qui contrôle les IA, ainsi que sur la répar­ti­tion du travail et des richesses qui en découlent. Si on entre dans le monde cyber­punk avec juste quelques multi­na­tio­nales qui détiennent les moyens de former ou faire tour­ner de grosses IA, que seules ces multi­na­tio­nales en récoltent les fruits, on va avoir de gros problèmes.

Bref, le droit d’au­teur m’im­porte peu à côté des problé­ma­tiques d’éthique, de contrôle des outils et de partage des richesses.


(*) : IANAL « I am not a lawyer », je ne suis pas juriste.


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