Oh comme c’est facile, après coup, dans notre canapé, à manipuler de simples cause à conséquence binaires à un seul paramètre.
Il aurait aurait fallu tout fermer plus vite ? Peut-être. Ou pas. À fermer trop vite on risque de le faire trop bien et de juste reporter le problème à quand on sortira des mesures de confinement. C’est typiquement ce qu’on craint pour la Chine. On risque aussi de le faire trop longtemps, ou juste par précaution, et ça aussi ça tue même si c’est moins immédiatement visible comme effet.
On a déjà atteint la saturation ? Il semble que oui dans certaines zones. Est-ce que c’était évitable ? Peut-être, mais je n’en sais honnêtement rien. Ça ne me parait pas évident au point que l’intuition soit bonne conseillère et je préfère laisser les autorités travailler avec ceux qui savent. Il est tout à fait possible que l’enjeu soit de choisir le « bon » niveau de saturation parce que de toutes façons on en aura un. Il est aussi possible que les confinements nationaux soient préférables à des confinements par région et que du coup il soit nécessaire de faire une balance entre ce qu’il se passe entre diverses régions quitte à ce que une commence à saturer.
Tel ou tel ponte dit qu’il aurait fallu faire autrement ? Possible. D’autres ont pu dire le contraire par le passé. Notez que certains ne se font vocaux publiquement que maintenant. Pour eux aussi c’est plus facile de revenir sur le passé que de connaître l’avenir. Même eux ne connaissent en général que leur discipline. On ne gère pas qu’une courbe de contagion avec un nombre de lits. On gère tout un écosystème avec des dizaines ou des centaines de variables avec des impacts et enchevêtrements complexes, dont des dynamiques humaines. Le responsable de réanimation dépassé devant la saturation n’a pas à gérer les équilibres entre activité, soins, approvisionnements, régions, etc. Faites-lui confiance sur son métier, mais sur le reste il en sait potentiellement autant que tous les autres.
Peut-être que je raconte plein de conneries. Probablement au moins en partie. C’est d’ailleurs bien le sujet. Toi, moi, et quasiment tout le monde, y compris les experts sur tel ou tel sujet, n’avons pas tout sur la table, n’avons pas réfléchi avec tout un comité interdisciplinaire dédié au sujet, ne savons pas ce qui est faisable et quels sont les risques à part « la saturation des hôpitaux » et « c’est la merde ».
Ça ne veut pas dire qu’il faut s’arrêter de réfléchir, de discuter, d’échanger, de critiquer même — je ne suis pas le dernier pour ça. — Par contre si on pouvait se focaliser sur le présent et le futur plutôt que de reprocher le passé, ça serait pas mal.
Parlons de ce qu’on fait ou ne fait pas plutôt de ce qu’on a fait ou n’a pas fait. Il sera temps de revenir sur le passé quand tout ça sera fini.
On réagit dans l’émotion, mais ayons un peu d’humilité vis à vis de ceux qui ont du prendre ces décisions. Prendre ces décisions n’a certainement pas du être facile, et ne l’est certainement toujours pas. Je n’aimerais pour rien au moindre avoir à les prendre à leur place. Je ne peux leur reprocher d’avoir réfléchi plusieurs fois avant de prendre des mesures lourdes inédites dans notre histoire moderne. Je trouve tellement facile de dire ce qu’il aurait fallu faire, après coup, depuis notre canapé…
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