Firefox ce n’est pas juste un navigateur. Sans Mozilla et Firefox, nous n’aurions pas le web libre d’aujourd’hui. Sans Mozilla et Firefox nous n’en auront peut-être plus demain, ou plus sous cette forme. Rien que ça.
La situation pré-1998
Pour ceux qui n’ont pas vécu la période pré-2005, Internet c’était essentiellement Netscape, AOL et Microsoft.
Oui, je remonte loin mais c’est important.
Si les standards du web existaient déjà, il y avait beaucoup de choses non spécifiées, beaucoup d’anomalies propres à chaque navigateur, et beaucoup d’extensions propriétaires. Faire un site compatible avec plusieurs navigateurs demandait un effort particulier, voire un double développement.
Netscape c’était le navigateur dont est issu Mozilla puis Firefox. Jusqu’en 1995–98, tout le monde utilisait Netscape, ou presque.
Microsoft a pris le pas entre 1996 et 1998 avec l’arrivée de Windows 95 Plus et de Windows 98. Ils ont fourni Internet Explorer par défaut comme navigateur, intégré à l’OS. À l’époque on parlait même d’avoir une page web à la place de l’image de fond d’écran, et des widgets web pour avoir des actus, la bourse, la météo, etc. Tout lançait Internet Explorer sans alternative, possible, y compris la mise à jour de Windows lui-même.
La guerre des navigateurs
Netscape a lancé la suite de navigation Mozilla en open-source. AOL a ensuite racheté Netscape pour avoir son propre navigateur basé sur Mozilla.
Malheureusement Microsoft a profité de sa position dominante sur Windows pour non seulement pré-installer Internet Explorer partout mais aussi en faire une pièce incontournable.
À l’époque la mise à jour de Windows se faisait par Internet Explorer. Microsoft incitait même à remplacer le fond d’écran par une page web (gérée par Internet Explorer) et des widgets web pour les actualités, la météo, la bourse, etc. Même Apple est passé à Internet Explorer sur les Mac quand Microsoft est entré dans le capital.
La majorité des sites, petits et gros, étaient conçus pour Internet Explorer et compatibles uniquement avec ce dernier. Netscape, seule vraie alternative, n’a pas tenu.
La bataille du web ouvert
Des anciens de Netscape sont restés autour de la partie open-source de Mozilla. Avec le temps est sorti Firefox : ultra-léger (par rapport à Netscape) et ultra-rapide (idem).
On est déjà en 2003–2005. C’est le début de Mozilla (l’association) telle qu’on la connait aujourd’hui.
L’ancien Internet Explorer est mort, le web ouvert a gagné. Firefox a fini par devenir le navigateur majoritaire en Europe.
Il était infiniment meilleur que Microsoft Internet Explorer mais il n’y a pas que ça : On a aussi eu une bataille massive pour le web ouvert, à faire changer de pratique les sites web pour qu’ils respectent les normes et qu’ils assurent la compatibilité. Je me rappelle le web-compat de Mozilla qui interpelait et proposait des correctifs aux sites web un à un.
C’était du militantisme partout. C’est d’ailleurs là que — self-promo — est né Paris-Web.
Les deux se sont nourris. Sans Firefox et Mozilla, le web ouvert n’aurait peut-être jamais vu le jour malgré tous nos efforts. Sans les efforts sur le web ouvert Firefox et Mozilla auraient probablement été des impasses.
Garder le web ouvert
Firefox et web ouvert sont historiquement intrinsèquement liés. C’est pour ça que je dis que Firefox ce n’est pas juste un navigateur.
Aujourd’hui c’est Google Chrome qui a la main et on voit apparaitre le même schéma que par le passé : diffusion par pré-installation, sites qui ne sont parfois conçus ou testés que pour un seul moteur de navigation, abus de position dominante, etc.
La situation n’est pas exactement la même que celle des années 2000 mais elle n’est pas si éloignées que ça.
Il y a plein de navigateurs mais en réalité Brave, Opera, Vivaldi, Internet Explorer et les autres sont des dérivés de Chromium. Chromium c’est la base open source de Chrome, contrôlée par Google.
Le web est définitivement plus ouvert mais du fait de la main mise sur Chromium, Google est quand même en position forte pour faire avancer ce qu’il veut et refuser ce qu’il ne veut pas. Pas mal de sites se basent sur des APIs et extensions présentes dans Chromium mais pas encore ailleurs, ou qui n’ont pas vocation à être présentes ailleurs.
Seule alternative
Pour ne pas laisser l’histoire se répéter, on a besoin d’alternatives.
Une fois qu’on a retiré tout ce qui se base sur Chromium, il reste Safari et Firefox. Les intérêts d’Apple ne sont pas toujours extrêmement différents de ceux de Google. On a besoin d’un acteur qui sort de ces acteurs privés monopolistiques et dominants.
Firefox est seul dans cette situation. Sa survie est juste essentielle pour garder un web ouvert.
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