Abon­ne­ment, et le solde ?

La vente de livre neuf ne se fait pas à prix libre en France. La règle géné­rale est la suivante : « le prix de vente public du livre est fixé par l’édi­teur ». Ce prix peut varier dans le temps, peut varier pour des offres diffé­rentes (vente au chapitre, loca­tion, édition diffé­rente) mais pour un même produit vendu, le prix public sera le même partout, ni moins cher ni plus cher, fixé par l’édi­teur.

Ça posait problème pour ceux qui voulaient inno­ver et propo­ser de l’abon­ne­ment. Par prin­cipe, le prix n’est plus fixé puisqu’il s’agit de répar­tir une somme parmi tous les éditeurs des livres lus. Certains lecteurs lisent beau­coup, d’autres moins, le résul­tat c’est que le prix pour un même contenu n’est plus fixé. Pire : Il dépend de l’usage du lecteur et de la poli­tique commer­ciale du reven­deur, plus de l’édi­teur. On renverse tota­le­ment l’es­prit de la loi.

Il y a eu étude, proces­sus de média­tion. Il semble que les acteurs soient arri­vés à une solu­tion en accord avec le média­teur du gouver­ne­ment. Je suis plus qu’heu­reux : Ça va permettre d’in­no­ver, tester d’autres modèles. Ces acteurs qui ont tenté autre chose méritent de vivre l’aven­ture jusqu’au bout.

Une solu­tion ?

De ce que j’en lis un peu partout, la solu­tion a du sens : L’édi­teur fixe un prix spéci­fique à cet usage. Ici ce sera un prix à la page, poten­tiel­le­ment diffé­rent livre à livre (mais proba­ble­ment fixé de manière assez simple en fonc­tion de la date de première publi­ca­tion). Logique­ment, le reven­deur est donc obligé d’af­fi­cher ce prix à la page, et de mettre fin à l’illi­mité : Impos­sible de vous permettre de lire plus que ce que vous payez en abon­ne­ment sinon ça veut dire qu’on vous vend moins cher que le prix public fixé par l’édi­teur, ce qui est illé­gal.

Natu­rel­le­ment cette limite sera très haute, donc ne devrait pas chan­ger réel­le­ment l’usage de ceux qui choi­sissent l’abon­ne­ment. Vis à vis du lecteur tout ça est virtuel (et c’est tant mieux).

Bref, pourquoi pas. L’avan­tage très clai­re­ment visé par tout le monde est que ça va gêner Amazon, qui ne pourra pas chan­ger son offre spéci­fique­ment pour la France aussi faci­le­ment ou rapi­de­ment que ça. Ne nous leur­rons pas, c’était à priori l’in­ten­tion de toute la procé­dure dès le départ (la suite de la média­tion et la solu­tion d’aujourd’­hui ne sont là que pour intel­li­gem­ment éviter de faire couler deux ou trois jeunes acteurs français en victimes colla­té­rales). Au pire ça remet­tra le pouvoir un peu aux mains des éditeurs.

Quid du solde inuti­lisé ?

Il me reste deux inter­ro­ga­tions quand même :

  1. Si je ne lis que 500 pages à 1 centime la page (le prix est arbi­traire pour l’exemple), que mon abon­ne­ment est à 9,99€. Que me facture-t-on sur les 4,99€ restant ? À priori pas du livre (le prix est fixé, donc inter­dit de factu­rer la page plus cher que ce qu’a décidé l’édi­teur). Si on me facture un service géné­rique ça veut dire que chaque mois j’au­rais une part de service avec une TVA à 20% et une part de livre avec une TVA à 5.5%, diffé­rente à chaque fois. Oups. Je ne sais même pas s’il est possible de réali­ser un enga­ge­ment de ce type en abon­ne­ment.
  2. Si je ne lis que mes 500 pages à 1 centime la page, que mon abon­ne­ment est à 9,99€, serais-je auto­risé à lire 1500 pages le mois suivant ? Cela revien­drait à faire une moyenne sur la durée de l’abon­ne­ment, une sorte de « report des minutes » comme sur les télé­phones portables. Ce serait intel­li­gent mais si on m’a facturé le solde du mois précé­dent avec une TVA à 20%, ça va poser problème.

À mes ques­tions un reven­deur me répond que le prix à la page est là pour les éditeurs au cata­logue, que pour le lecteur il s’agit d’illi­mité. Là je tique, car ce serait exac­te­ment l’op­posé de l’es­prit de la loi : prix fixe entre l’édi­teur et le reven­deur mais libre entre le reven­deur et le public.

L’obli­ga­tion d’af­fi­chage du prix à la page impo­sée par le média­teur tend à me confir­mer que ma première inter­pré­ta­tion est la bonne : Il s’agit d’un prix public. Même si c’est masqué via un abon­ne­ment, c’est bien le prix que le lecteur paye réel­le­ment pour ce qu’il lit/achète.

Quelqu’un a-t-il plus de détail, soit sur l’in­ten­tion du média­teur soit sur l’in­ter­pré­ta­tion des reven­deurs d’abon­ne­ment ?

Ce que gagne l’édi­teur

Je crains que ça ne règle fina­le­ment qu’un diffé­rent avec les éditeurs, que l’ac­cord soit très poli­tique, mais que fina­le­ment le texte de la loi ne soit toujours pas respecté (mais j’ai peut être manqué quelque chose).

Le plus étrange dans tout ça c’est que j’ai l’im­pres­sion que ce sont les éditeurs qui vont y perdre alors que ce sont eux qui sont à l’ori­gine de la fronde : Si le lecteur consomme peu (ou en tout cas moins que le maxi­mum lié au prix public à la page), le reven­deur ne rever­sera que la partie du montant lié à ce qui a été utilisé (vu que prix fixe à la page), gardant le solde.

Dans l’an­cien modèle c’était l’in­té­gra­lité de l’abon­ne­ment qui était reversé aux éditeurs (une fois retiré la marge du reven­deur), quelle que soit la consom­ma­tion. Dans le meilleur des cas ça revient au même, dans 99% de la réalité, ça sera moins.

Amazon est mis hors course quelques mois car ne pouvant pas chan­ger son offre immé­dia­te­ment pour la France, mais dans l’his­toire j’ai l’im­pres­sion que ça ne va être inté­res­sant que pour le reven­deur d’abon­ne­ment.


Publié

dans

par

Étiquettes :

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *