Catégorie : Polémiques politiques

  • Dis tonton, c’est quoi le problème avec le jeu antifa ?

    Il y a proba­ble­ment eu trop de lignes écrites mais j’ajoute les miennes pour savoir les retrou­ver sur un espace pérenne.

    Résumé rapide du contexte : La FNAC a retiré des ventes le jeu Antifa en réponse à une demande d’ex­pli­ca­tions d’un syndi­cat de police réputé proche de l’ex­trême droite.

    « Ce jeu est-il un appel à la violence ?

    Oui, non, ou en tout cas pas plus que la plupart des autres jeux de société.

    La plupart des actions du jeu sont plus qu’ac­cep­tables, et la méca­nique est des plus clas­siques : actions, gestion, hasard. Dans les cartes de plani­fi­ca­tion on retrouve le collage d’af­fiche, le tour­noi spor­tif, la commé­mo­ra­tion, etc. Même dans la caté­go­rie « riposte » on trouve rassem­ble­ment, mani­fes­ta­tion et occu­pa­tion des lieux.

    Liste de cartes d'activités.
- 5 petites cartes "activité" format carte de crédit avec vidéo, article, podcast, table de presse, pétition.
- 3 grandes cartes activité avec collage d'affiches, distribution de tracts, fresque murale.
- 4 cartes initiative avec concert de soutien, tournoi sportif, rencontre débat, commémoration.
- 4 cartes riposte avec manifestation, action offensive, rassemblement, blocage/occupation.
    Liste des plani­fi­ca­tions d’ac­ti­vi­tés

    J’en­tends que les dessins donne­ront des boutons aux dépu­tés du RN mais on est loin de la méca­nique décrite par ces derniers, qui était en réalité tirée de leurs fantasmes et pas tirée du jeu.

    Pour autant, oui on parle blocage/occu­pa­tion, oui il y a une carte « action offen­sive » et un élément « caca­tov ».

    « Ok donc c’est quand même violent et au moins se mettre dans la peau de personnes qui ne respectent pas la loi alors

    Je suis très étonné que ce soit un sujet. Une grande majo­rité œuvres vendues font réfé­rence à des situa­tions qui feraient passer le jeu antifa pour un jeu de Bisou­nours. Les livres et films qui nous font incar­ner un crimi­nel sont légion dans les rayon­nages.

    Même dans les jeux, on parle très souvent d’éli­mi­ner les autres joueurs. On a eu des jeux vidéos sur la guerre mondiale qui permettent aux joueurs d’in­car­ner les deux camps. Dans Coun­ter Strike on incarne aussi des terro­ristes.

    La problé­ma­tique n’est pas nouvelle. Je me rappelle aussi les contro­verses du jeu vidéo Carma­ged­don en 1997 dont l’objet est d’écra­ser le plus de passants possibles avec une voiture faite pour. C’était il y a 25 ans et Antifa aurait plutôt fait rire en compa­rai­son.

    Côté jeux de société j’ai dans mes cartons le jeu Bang! où doit tuer les autres joueurs avant d’être tué. Dans Mono­poly il faut mener l’ad­ver­saire à la banque­route. Dans Loups Garous il faut tuer des villa­geois. Dans Colt Express il faut voler un train et tirer sur les autres sans se faire prendre par le shérif. Dans Magic Maze il faut voler un super­mar­ché. Dans Sabo­teur on parle de sabo­tage. Dans Risk et dans Diplo­macy il faut faire la guerre et élimi­ner tota­le­ment le voisin. Ce n’est qu’un court extrait parmi des jeux primés ou célèbres.

    Le jeu Antifa a d’ailleurs été mis à l’hon­neur dans une sélec­tion FNAC au début du mois avec 5 autres jeux mili­tants. L’un de ces jeux orga­nise une révo­lu­tion. Un autre permet de prendre la place d’un dicta­teur.

    Diffi­cile de croire que le problème soit dans les cartes du jeu Antifa qui lui n’in­vite pas expli­ci­te­ment à la violence. Soyons honnêtes, tout ceci n’est qu’un prétexte pour autre chose.

    « Ce serait quoi le problème alors ?

    Tout est poli­tique.

    Le message qui a provoqué le retrait du jeu par la FNAC ne parle d’ailleurs pas d’in­ci­ta­tion à la haine ou à la violence. Il parle de « mettre en avant les antifa ». C’est ça le problème pour ce syndi­cat de police.

    Le fait que ce soient des dépu­tés du Rassem­ble­ment Natio­nal et un syndi­cat poli­cier proche de l’ex­trême droite qui veuillent bannir un jeu sur l’an­ti­fas­cisme n’est pas une coïn­ci­dence, c’est l’objet même de l’af­fron­te­ment.

    Qu’on y fasse droit est un problème (et que ce soit via une enseigne fondée par un anti­fas­ciste mili­tant rend la chose encore plus déli­cate).

    « Ce jeu là est donc poli­tique, ça change tout !

    C’est effec­ti­ve­ment un jeu ouver­te­ment mili­tant, dans une mouvance acti­viste qui s’au­to­rise à aller plus loin que deman­der genti­ment aux tiers d’ar­rê­ter d’être des fascistes. C’est même à l’ori­gine d’abord un maté­riel de forma­tion mili­tante réalisé sous forme de jeu. Je recom­mande l’émis­sion de David Dufresne avec l’au­teur du jeu, qui explique bien le contexte (on commence à parler du jeu à partir de la minute 45).

    Oui c’est poli­tique.

    Pour autant… On a des films poli­tiques. On a des chan­sons poli­tiques. On a des livres poli­tiques. Tout ça est souvent à la fois plus violent et bien plus expli­cite que ce jeu Antifa. On aurait pour­tant tout le monde vent debout si on imagi­nait les censu­rer. Ça s’est d’ailleurs déjà produit.

    On vend même à la FNAC des livres d’Hit­ler, de Musso­lini, de Soral et d’autres, dont certains dans des éditions à objec­tif ouver­te­ment fasciste qui là méri­te­raient poten­tiel­le­ment d’être reti­rés des ventes.

    Avoir des œuvres poli­tiques et/ou mili­tantes n’est pas le problème, et ne devrait pas l’être.

    « Mais là c’est un jeu. Un jeu n’a pas à être poli­tique !

    Vrai­ment ?

    La vraie diffé­rence est peut-être effec­ti­ve­ment liée qu’ici il s’agit d’un jeu de société et pas d’un livre ou d’un film. Dans l’ima­gi­naire c’est peut-être un terrain apoli­tique, ou du moins non-radi­cal.

    Ce serait une erreur. Je ne refe­rai pas une liste à la Prévert comme plus haut mais même l’ul­tra clas­sique Mono­poly est à l’ori­gine un jeu mili­tant anti-capi­ta­liste. Pourquoi faudrait-il bannir le message poli­tique de ces œuvres plus que d’autres ? À quel titre ?

    Je recom­mande à ce propos la lecture de Roma­ric Briand, auteur de jeux de socié­tés :« Que l’on puisse affir­mer au XXIème siècle que quelque chose comme le sport, comme le jeu-vidéo, comme le jeu de société ne doive ou ne puisse pas être poli­tique est propre­ment fasciste. » […] « La polé­mique a été analy­sée comme étant un affron­te­ment entre des fascistes et des anti­fas­ciste. L’autre affron­te­ment se trou­vait une fois de plus dans la confis­ca­tion de la parole poli­tique à un domaine de la vie publique. Hier le sport, aujourd’­hui le jeu, demain, vous verrez c’est la poli­tique qui ne sera plus poli­tique. » […] « Le désastre, c’est cette apoli­­ti­­sa­­tion rampante qui n’est qu’un autre nom du fascisme. »

    Que l’ex­trême droite veuille bannir les messages poli­tiques dans les œuvres cultu­relles ou ludiques, c’est une mauvaise chose mais c’est attendu. Qu’ils s’en prennent d’abord aux œuvres anti­fas­cistes devrait aler­ter très fort. Qu’on y fasse droit devient un problème majeur qui mérite mieux que les brèves de presse publiées jusqu’à aujourd’­hui.

  • [poli­tique] Ils préfèrent foutre le bordel (que de faire 7h de train par jour pour aller travailler)

    Il y a tout un monde entre la théo­rie sur le papier et la réalité sur le terrain. Le problème c’est quand celui en charge se permet d’être hautain avec les gens sur le terrain.

    Il suffit de quelques mots d’un concerné pour se rendre compte combien les mots d’hu­meur à l’ori­gine de la polé­mique sont ceux de quelqu’un décon­necté du terrain.

    Mention spéciale à notre ministre Gérard Collomb dont les propos sont rappor­tés par Marianne. Lui n’a même plus de limites dans son statut de privi­lé­gié, ou alors il a conscience de ce qu’il dit et c’est encore pire :

    « C’est pas le problème de 180 kilo­mètres », assure Gérard Collomb, qui estime que les deux points se relient en trois coups d’ac­cé­lé­ra­teur : « Si vous êtes relié par une auto­route ou une voie ferrée qui peut y aller… Je viens de Lyon, j’ai pas de problème pour venir chez vous. »

    Ça permet d’ailleurs à Marianne de rappe­ler que ces 180 km prennent plus de temps qu’un Paris-Lyon, que ce soit en voiture ou en train – entre 5 et 7 heures aller-retour, rien que ça, pour du quoti­dien c’est un peu diffi­cile –, et de rappe­ler l’état de la poli­tique d’in­fra­struc­tures hors des liai­sons pour cadres qui vont sur Paris :

    Comme semble l’igno­rer Gérard Collomb, la desserte des terri­toires ruraux est de fait en déliques­cence. La SNCF a récem­ment supprimé quatre arrêts à la gare de La Souter­raine, alors que le nombre de voya­geurs y a augmenté de 60% en sept ans. Et A Ussel, la situa­tion n’est guère meilleure. « Ussel est coin­cée », pointe Frédé­ric Cueille de la CGT des chemi­nots limou­sins, qui déplore dans La Montagne un « encla­ve­ment » des zones rurales : « L’objec­tif de la SNCF est de fermer vingt-deux des vingt-sept points de vente. Ussel et Égle­tons sont mena­cées… ».