Dis papa, une imposition marginale à 75% pour les très hauts revenus, c’est un scandale communo-socialo-égalitariste ou pas ? Un peu d’histoire et de statistiques :
Le taux très bas actuel est finalement bien plus exceptionnel que l’idée des 75%
Le taux marginal d’imposition sur le revenu a été historiquement plusieurs fois supérieur à 75%, en France comme à l’étranger, sans que cela n’ait jamais été considéré comme confiscatoire.
Aux États Unis (pays socialo-communiste s’il en est), ce taux a dépassé par deux fois les 90%, pour au total 14 ans sur le dernier siècle, et est resté au delà des 70% la moitié du temps. En France notre taux marginal n’a pas eu les mêmes extrêmes qu’aux États Unis (comme quoi les idées reçues…) mais il est resté supérieur à 60% la majorité du temps, ne descendant en dessous de 50% qu’épisodiquement (dont la période récente).
Il est aussi intéressant de noter que le seuil pour bénéficier de ce taux marginal, même ramené à un revenu équivalent récent, était finalement très faible en regard de ce que le gouvernement tente d’instaurer aujourd’hui (comptez un facteur de 6 à 20 quand même).
À la décharge des libéraux américains, le revenu nécessaire pour atteindre les taux marginaux maximum ont été parfois réellement élevés (quasi théoriques), mais ils existaient. En soi ça veut dire qu’imaginer taxer à 75% est concevable, même là bas, et que la mesure est dans le positionnement du palier.
La première conclusion qu’on peut en tirer : Que l’idée d’un taux marginal à 75% au delà du million d’euros pose problème ne découle pas d’un principe général objectif mais bien d’une évolution très récente de nos mentalités.
Et si on parlait du taux moyen ?
Bien évidemment ici nous ne parlons que du taux marginal de l’impôt sur le revenu. Pour être réalistes il faudrait parler du taux d’imposition moyen, et pas que de l’impôt sur le revenu. Ce taux d’imposition moyen est finalement assez stable entre 40 et 50% pour l’ensemble de la population si on omet les 1 ou 2% les plus riches et les 1 ou 2% les moins riches. La progressivité est assez aplatie par les parties forfaitaires ou plafonnées, ainsi que par les niches ou optimisations qui profitent essentiellement aux revenus aisés.
Je vais laisser les 1 à 2% les moins riches, qui ne sont de toutes façons pas capables d’apporter un revenu significatif à la société, n’en ayant pas un eux-mêmes. On remarque par contre que sur les 1% les plus riches le taux d’imposition moyen régresse fortement au lieu de progresser. Les revenus venant plus souvent de plus-values ou dividendes que de salaires, on saute les cotisations sociales. Le revenu du capital est lui en plus significativement moins taxé. Au final les quelques 1% les plus riches ont une contribution plus faible que tous les autres en proportion de leur revenus, et quand je dis « tous les autres » ça comprend même le premier décile le moins riche.
Il faudrait probablement revoir tout le système plutôt que de monter les taux marginaux, mais en soi il est presque scandaleux de parler de parler de trop hauts impôts sur les plus riches quand on voit un tel graphique (attention à l’échelle non proportionnelle) :
Tout ça ne dit en fait pas si ce taux marginal est légitime ou excessif. Mais finalement cette question est uniquement un choix de société, de savoir comment nous souhaitons redistribuer les mises.
Et c’est bien cette conclusion qui est importante : Ne laissons pas confisquer le débat par des arguments qui se disent objectifs ou définitifs sur le caractère confiscatoire ou illégitime d’un prélèvement à 75% : Ils ne sont vrais ni vis à vis de l’histoire, ni vis à vis de la réalité de l’impôt dans son ensemble.
Lectures :
- http://dfcg-blog.org/2012/01/06/taxer-les-1-oui-le-taux-marginal-d-impot-peut-depasser-les-80/
- http://jeanneemard.wordpress.com/2012/04/10/le-taux-marginal-dimposition-maximal/
- http://blogs.rue89.com/graphique/2011/08/25/etats-unis-en-un-siecle-moins-dimpots-plus-dinegalites-218376
- http://www.les-crises.fr/l-impot-sur-le-revenu-en-france-1/
- http://www.les-crises.fr/l-impot-sur-le-revenu-en-france-2/
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