Le marché du livre numérique décolle ou va décoller en France. Amazon vient de se lancer et je vois des relations commencer à faire leur choix ou me demander ce qu’ils doivent choisir.
Vous avez bien raison, le livre numérique est au livre ce que le mp3 est au CD. Maintenant vous vous souvenez des baladeurs audio fermés qui ne lisaient pas les mp3 ou qui ne vous permettaient pas de récupérer ensuite ce que vous achetiez ? Nous avons les mêmes problèmes ici, pour l’instant.
Avant toute chose, afin qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : j’ai mon propre agenda dans le milieu du livre numérique avec la société que j’ai rejoint récemment. Je ne prétends donc pas être spécialement objectif ni pouvoir dire dès aujourd’hui tout ce que je voudrai annoncer. Ça n’en retire pour autant rien à ce qui suit.
Tablette ou liseuse
J’exclus de fait les offres « streaming », qui demandent généralement d’être connecté voire vous imposent de lire sur PC. Vous ne le ferez pas, et même dans ce cas vous perdrez toute pérennité puisque les contenus seront à distance chez un prestataire. Je n’ose même pas parler des problèmes de vie privée qui en découlent.
Le premier choix à faire c’est « tablette ou liseuse ». Les liseuses ce sont ses sortes de tablettes très fines avec un écran monochrome grisâtre. Si c’est beaucoup moins attirant que les tablettes couleurs, si vous souhaitez « lire » alors c’est ça qu’il vous faut.
Les écrans des liseuses sont réflectifs : Ils n’émettent pas de lumière mais réfléchissent la lumière ambiante, comme du papier. La différence c’est que c’est agréable à lire, que ça ne fatigue pas, et que les batteries peuvent durer des centaines d’heures.
L’absence de batterie disproportionnée en fait aussi des appareils très légers, plus qu’un livre et infiniment plus qu’une tablette classique. La taille est adaptée à la lecture, plus proche des 6 à 7 pouces que des 9 à 10 pouces des tablettes. Aux États Unis on ne s’y trompe pas vu que les constructeurs de tablettes proposent aussi des tablettes « media » de même taille.
Le seul défaut c’est que c’est du monochrome, mais finalement pour lire ce n’est pas vraiment un problème. Les écrans sont aussi connus pour être très lent à se rafraîchir mais là il y a des améliorations qui arrivent, par exemple chez Bookeen.
Enfin, ça compte, les liseuses sont bien moins chères que les tablettes : On parle de 100 à 150 € là où les tablettes sont plus proches des 500 €.
Bon, d’accord, mais laquelle
Là je préviens, il y a de l’opinion de ma part, et peut être aussi de l’émotionnel. Pire, je vais procéder par élimination :
Kindle
Tout d’abord, je ne soutiens pas le Kindle qui vient d’arriver en France. Amazon ne propose ici qu’un seul des produits de sa gamme, et il s’agit du modèle premier prix, le « castré » fait pour casser les prix mais qui n’a que le strict minimum. On peut même considérer qu’il est moins bon que le Kindle de la gamme précédente vu qu’il n’a pas de clavier mais n’a pas gagné d’écran tactile pour autant. Au final vous ne pourrez pas annoter, et même si ce n’est pas dans vos habitudes, ce serait dommage d’investir pour se retrouver avec un matériel limité.
Ici on le vend 100€. Soyons francs, ce n’est pas cher. Pour autant le même est vendu 79$ (59€) outre Atlantique. S’il y a des « offres spéciales » publicitaires dans le second, la différence est tout de même importante.
Mais ce qui me fait refuser le Kindle c’est surtout une question de valeurs. Vous entrez dans un modèle fermé, véritable silo. Ce que vous achetez ou que vous faites sur le Kindle reste sur le Kindle. Si vous abandonnez votre Kindle vous abandonnez tous vos achats avec. Une fois entré dans le système vous êtes pieds et poings liés, à vie, sauf à laisser derrière vous votre bibliothèque.
Vous pouvez éventuellement acheter des livres ailleurs et les importer sur le Kindle mais cela vous retreint aux livres sans DRM (malheureusement une part minoritaire du marché), et surtout vous impose de télécharger le livre, ouvrir un logiciel de conversion puis réimporter le livre dans l’appareil. C’est lourd et vous prendrez vite le pli d’acheter directement sur le Kindle, avec les implications que ça a pour la pérennité. Pour moi que le Kindle ne supporte pas le format ouvert majoritaire sur le marché qu’est l’epub, ça veut tout dire et c’est « niet ».
Fnacbook
Ensuite il y en a d’autres, je vous laisserai faire votre choix mais je vous déconseille juste l’échec qu’est le Fnacbook. Peu vendu, il est aussi à mon avis un échec sur le logiciel et pas une grande réussite sur le matériel. L’ouverture est un peu meilleure que le Kindle puisqu’il permet d’importer directement des epub mais on reste dans une logique peu satisfaisante. Pour l’exemple, vos annotations ne sont pas exportable et, au moins quand j’avais demandé, le catalogue n’était pas accessible avant l’achat de l’appareil (« achetez, vous verrez bien »).
Un conseil ! un conseil !
Sur le reste vous avez Bookeen, Sony et quelques autres. Ils sont indépendants donc relativement ouverts. Vérifiez les capacités d’import (surtout l’epub et si possible le futur epub v3), les capacités d’export (exporter votre bibliothèque, que les achats via l’appareil puissent être récupérés sous forme de fichiers, que vous puissiez transférer vos annotations sur PC, etc.) et globalement l’ergonomie. Si vous voulez accéder aux gros éditeurs français, pour l’instant vérifiez aussi la compatibilité avec les DRM Adobe.
J’aurai tendance à ne vous conseillez une tablette que si la lecture est une activité très annexe, qui n’est pas assez certaine pour en faire un investissement dédié. Là évitez Apple et l’iPad si vous voulez avoir le catalogue complet et un minimum syndical d’ouverture. Dans les tablettes Android il y a la Sony S et la Samsung Galaxy Tab qui semblent se dégager … à défaut de voir débarquer une Xoom 2 en 7 pouces (on en parle mais de là à ce que ça arrive…).
Globalement faites attention à garder ce qui vous semble essentiel comme « droits du lecteur » : acheter au distributeur de votre choix, lire sur le matériel de votre choix, garder accès aux fichiers et à vos annotations, etc. Ouverture et pérennité sont les maîtres mots. Ne vous mettez pas vous-même des menottes, et surtout pas maintenant : le marché démarre, il y a encore plein de surprises et d’innovation à venir.
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