Je ne suis pas forcément en désaccord avec toi sur le niveau de compétence moyen qui est assez bas. Maintenant ça veut dire que c’est un problème de compétences, pas de pénurie, ou en tout cas pas « d’informaticien ».  C’est l’unique but de mon billet.

Éventuellement on peut dire qu’on a une pénurie sur telle ou telle expertise pointue (et pas générale sur l’informatique), mais même là j’y crois assez peu vu les salaires pratiqués. Si c’était le cas les salaires en question remonteraient à des niveaux plus habituels pour des ingénieurs experts. Ils ne le font pas, c’est soit qu’il y a des gens pour répondre, soit que le besoin n’est pas si fort que ça.

Sur le manque de compétences j’attribue ça surtout au dernier de mes trois termes : les évolutions de carrière.

On fait croire que l’évolution en informatique c’est de devenir manager ou à la limite directeur de projets. Il faut dire que les boites qui ne payent pas les développeurs et experts au lance-pierre sont assez rare. Résultat : On manque cruellement d’expérimentés et les compétents s’échappent souvent de la technique avant 30 ou 35 ans. Il ne reste que quelques rares passionnés et tous ceux qui n’ont pas pu avoir de promotion (donc probablement moins bons que les autres).

Le pire c’est que *malgré ça* nous n’avons pas de pénurie de développeurs. C’est dire combien nous formons d’informaticiens chaque année et que ce n’est vraiment pas le problème. On pourrait même penser (mais là je me laisse un peu aller) que nous avons justement trop d’informaticiens et donc que nos SSII arrivent à renouveler en permanence leurs équipes avec des jeunes inexpérimentés alors qu’elles représentent l’essentiel du marché. Avec moins de gens, les expérimentés seraient retenus dans la technique et le niveau de compétence augmenterait.

La théorie du « trop plein » cadre d’ailleurs bien mieux avec les chiffres présentés dans ce billet (chômage, bas salaire, trop de nouveaux diplômés par rapport aux offres, constitution de bases de données de profil recrutés au dernier moment, etc.) que la théorie de la pénurie.

Autre point, mais là aussi ça mériterait un billet dédié, on attend probablement trop des ingénieurs qu’ils soient des techniciens experts, or ce sont deux métiers différents, et deux formations différentes. En caricaturant le technicien a de solides compétences pour réaliser, il sait faire ; L’ingénieur a de solides compétences pour comprendre, il saura analyser et éventuellement apprendre ce qui lui manque. Sauf que nos SSII embauchent à tour de bras des ingénieurs pour leur faire faire du développement à la chaîne sans réflexion. Ils ne sont souvent pas formés pour ça, le font mal, et se laissent parfois prendre dans l’engrenage à faire n’importe quoi dans la durée.